C’est un 11 Septembre qui dure. Un Bataclan avec missiles tirés d’un État confetti voisin. C’est un pogrom arabe dont les scènes rappellent le temps du grand mufti pro-hitlérien Al-Husseini.

Et aucun argument au monde ne saurait justifier, relativiser ou contextualiser ce crime. Pourquoi ?

Parce qu’aucune raison ne justifie, d’abord, que l’on kidnappe des officiers, exécute à bout portant des vieillards et des enfants, dénude une femme, l’outrage, la frappe à mort et la jette, ensanglantée, comme lors d’une razzia antique, dans un pick-up.

Parce qu’aucune circonstance atténuante ne s’applique à des escadrons de la mort qui se filment eux-mêmes se jetant sur une rave party, assassinant 260 jeunes gens et en prenant d’autres en otage.

Et parce que trouver des excuses à cela, arguer comme certains Insoumis de Mélenchon que cette sauvagerie répondrait à une oppression ou humiliation antérieures, reproduit une saloperie qui a l’âge de l’antisémitisme et qui revient toujours à dire que les Juifs sont, à la fin des fins, responsables de leur malheur.

Mais il y a une seconde raison qui interdit d’entrer dans les raisons de ce pogrom.

Une guerre totale

C’est que les tueurs entrés, comme des loups, dans les villes israéliennes n’avaient eux-mêmes pas de raison et se moquaient bien de ce qu’avait pu dire ou faire tel ou tel gouvernement israélien.

N’ayant plus, sur leur sol, depuis dix-huit ans, la moindre force d’occupation, ils n’avaient aucune revendication territoriale à faire valoir, aucun but de guerre à opposer. Ou, s’ils avaient un but, ce n’était plus, pour reprendre les mots de Clausewitz, un but précis, un Ziel, susceptible d’une victoire, d’une demi-victoire, d’un compromis.

C’était un Zweck, un but vague et qui ne disait pas son nom – et pour cause ! car il ne disait rien d’autre, ce but, que la haine nue, l’idée que l’ennemi est en trop sur cette terre et la volonté, par conséquent, de l’en éradiquer.

Cela s’appelle, en polémologie, une guerre totale.

Le Hamas, même s’il n’en a, seul, pas les moyens, a dit aux descendants des rescapés de la Shoah : « Il n’y a pas un lieu de la terre où vous soyez à l’abri des héritiers des tueurs égyptiens, assyriens, romains, médiévaux puis hitlériens. »

Les complicités en question

Eh bien, cette organisation avec qui l’on discutait, jusqu’ici, sécurité, hôpitaux, droits de douane pour les centaines de camions qui traversent, chaque jour, la frontière, ce Hamas avec qui l’on parlait, bien sûr, blocus, mais seulement pour les matériaux entrant dans la fabrication des armes de guerre qui ont permis, ce samedi, jour de la fête de la Torah, de massacrer des centaines de Juifs, ce Hamas, donc, doit être lourdement puni.

Mais justement : fut-il seul à l’œuvre, avec ses petits moyens, pour déjouer la vigilance d’un des meilleurs services de sécurité au monde et semer, des jours durant, la désolation et la mort ?

Je pense au jeune Massoud l’Afghan m’assurant, il y a quelques jours, à Paris, que nombre d’armes laissées derrière eux, à Kaboul, par les Américains ont été acheminées par les talibans, via le Qatar, puis la Turquie, puis par la mer, jusqu’à Gaza.

Je songe à la rencontre organisée, le 27 juillet, à Ankara, entre Mahmoud Abbas et le chef du bureau politique du Hamas, Ismail Haniyeh, par un Erdogan qui, les jours pairs, traite avec Israël et, les jours impairs, décide que c’est un cancer.

Je revois Sergueï Lavrov recevant, plusieurs mois plus tôt, en grande pompe, à Moscou, le même Ismail Haniyeh : que se sont-ils dit ? La Russie, engluée dans la guerre en Ukraine, avait-elle intérêt à un deuxième front obligeant les Occidentaux à affecter à Israël une part des précieuses ressources militaires réservées, en principe, à l’Ukraine ? Et quel crédit accorder à ceux qui, ici, dans le sud d’Israël, où je me trouve, assurent que les planeurs dont les tueurs se sont servis pour, le jour de l’anniversaire de Poutine, franchir la barrière de défense ressemblaient à s’y méprendre aux appareils de modèle Poisk-06 MSN qu’utilisent souvent les gardes-frontières russes ?

Et l’Iran… D’un côté, j’entends Antony Blinken prétendant ne pas avoir de preuve de l’implication de l’Iran dans cette boucherie… Mais, de l’autre, il y a les 6 milliards de dollars d’aides récemment débloqués par des banques sud-coréennes et affectés non, comme il était prévu, à des biens de première nécessité mais à des achats d’armes ; il y a les réunions de planification dont on m’assure qu’elles se sont multipliées, ces derniers mois, au Liban et en Syrie, autour d’instructeurs iraniens formant les Gazaouis à une opération aussi inédite dans sa forme que, je le répète, le 11 Septembre ; et il y a ce que dit le Hamas lui-même quand, par la voix d’un de ses porte-parole, Abou Obaida, il « remercie la République islamique d’Iran » pour lui avoir « fourni l’argent, les armes et les équipements » qui lui ont permis de mener l’assaut contre la « forteresse sioniste ».

Cela fait du monde autour des « oubliés » du Hamas. Cela fait bien des parrains pour une action qu’ils n’avaient ni les moyens militaires, ni l’intelligence tactique, de mener seuls.

Et il y a là une coalition de type nouveau où tous n’abattent pas leur jeu, mais où chacun observe et teste la fermeté de la riposte d’un Israël réputé invulnérable mais qui semble, tout à coup, baisser la garde.

C’est pourquoi je précise : le Hamas doit être non seulement lourdement puni, mais détruit.

8 Commentaires

  1. Croisé une Israélienne. Improvisation : elle, la nouvelle Première Ministre (PM), moi le nouveau chef d’état-major.
    PM : que me conseillez-vous ?
    Moi : à grands traits :
    1. ne pas y aller. Ni à pied ni en avions. Pas un seul soldat de Tsahal dans les rues de Gaza. Pas un seul bombardement.
    Pq? Car j’ai soudain l’impression d’être comme dans le « Stratego », le jeu de société préféré de mon enfance. Vous connaissez ? Les rouges affrontent les bleus mais les adversaires ne savent pas quelles sont les pièces de l’autre ni où se trouve le drapeau (ici le Hamas ; la PM : j’avais compris…) car elles se tournent le dos.
    Bref, chère PM, je ne veux pas être le général Nivelle de ce Chemin des Dames.
    2. protéger nos frontières bcp mieux qu’au matin du 7 octobre. Sans démobiliser l’économie du pays. Peut-être pas besoin de 300 000 réservistes.
    3. récupérer les otages même s’il faut libérer 5 000 prisonniers.
    4. essayer de rentrer d’urgence dans l’OTAN. Israël ne peut plus être seule. Il faut que le monde comprenne que nous sommes le bébé phoque du Moyen-Orient.
    5. essayer d’avoir des dirigeants visionnaires.
    6. négocier d’une manière ou d’une autre, sans relâche, de toute urgence, la coexistence : 2 états me semble la meilleure solution. Très vite. La question des 600 000 Israéliens en Cisjordanie est compliquée mais pas insurmontable.
    7. poursuivre le processus de paix avec les États de la région.
    Les points 2 à 7 seront sans doute plus faciles à atteindre si vous me suivez sur le point 1.

    Quand Israël en saura plus sur le Hamas, ses alliés, son potentiel, etc., il sera toujours temps de se battre ruelle par ruelle, ruine par ruine, dans les tunnels, les bunkers, etc., si le Hamas poursuit son œuvre de destruction. Mais, s’il faut vraiment se battre, le faire de préférence avec des armées alliées (l’infanterie de l’OTAN, etc.) et une opinion publique mondiale plus favorable (même si l’opinion publique n’est pas ce qui doit conditionner la décision de se défendre).

    Bref, peut-être une autre façon d’être fort dans un océan de bêtise, de fanatisme, de dictatures.

    La PM : merci. Je ne suis pas d’accord. Il faut y aller. Ils ne comprennent que la force. Nous ne pouvons pas nous permettre d’être faibles.
    Moi : aujourd’hui, nous sommes faibles parce que nous ne connaissons plus les moyens de notre adversaire. Et nous ne sommes pas faibles que militairement. Délicat, madame la PM, de parler politique et morale quand vient de se commettre envers notre peuple un crime contre l’humanité. Mais nous vivons au bord de l’abîme depuis trop longtemps.
    La PM : merci. Je me charge des questions politiques.
    Moi : Bien sûr. Courage.

    Pierre Weinstadt, Paris
    pierreweinstadt@hotmail.com

  2. Je vous parle d’un monde, un ensemble de civilisation qui se construit par ses erreurs et ses réussite. L’humain est universel dans son ensemble. tout être humain est doté de raison et de passion, mais certain, ce qui domine, l’oublie.

  3. C’est avant tout la notion de pogrom qui retient mon attention dans vos propos. Il me semble en effet que ce qui est au principe de l’action terroriste du Hamas, c’est la haine antisémite et la logique corrélative de l’extermination. C’est pourquoi je considère que plutôt que de parler de guerre et de crimes de guerre, il convient de parler de crimes contre l’humanité et d’une entreprise en dernière analyse génocidaire. Si le Hamas en avait le pouvoir, Israël serait détruit et les Israéliens méthodiquement massacrés. Il faudrait donc mettre fin à l’existence du Hamas. Est-ce possible sans conséquences redoutables ? Je ne suis pas en mesure de me prononcer à cet égard, et je n’ai pas les moyens de situer la question dans sa perspective géopolitique. En revanche, votre analyse, qui en recoupe d’autres, peut faire redouter un embrasement qui ferait le jeu de la Russie, de l’Iran, de la Turquie, et, vraisemblablement, de quelques autres. De cet ensauvagement, dont il n’est pas difficile de percevoir la menace, comment penser et et mettre en oeuvre les moyens de l’endiguer ? N’est-ce pas, au-delà de la nécessaire riposte au pogrom inqualifiable autrement que comme sous-tendu par une intention génocidaire, ce qui nous confronte à un dilemme ? Quoi qu’il en soit, Bernard-Henri Lévy, je me tiens à vos côtés par la pensée et vous remercie de contribuer à m’éclairer autant que possible.

    • Tout ce qui se dit là est vrai et juste. Mais il y apparaît aussi une demi-vérité : les Arabes, ou [H]Araguènes, descendants d’Ismael –frère de son frère, si je puis dire, et tous deux reconciliés, d’après certaines sources talmudiques, à l’accasion de la mort de leur père Abraham, nonobstant les zizanies maternelles–, sont aussi un peuple sémite. La généalogie de la Thora ainsi en témoigne, et le midrash Rabba [61, 7] se fait l’écho avant-coureur des tragédies d’aujourd’hui.

  4. Maintenant que le chef du Hamas a été tué,
    ce n’est pas la peine que Netanyahu
    continue plus longtemps son opération sur
    Gaza : Israëliens et Palestiniens peuvent
    désormais vivre ensemble en paix sur la
    terre d’Israël !..

  5. 7 octobre, jour de haine et de meurtre pour Israël et Anna Politkovskaïa, liés à jamais.

    L’horrible attaque du Hamas en Israël, avec le soutien de l’Iran et des groupes fondamentalistes du Hezbollah au Liban, a été menée le jour de l’anniversaire, le 7 octobre 2006, de l’assassinat d’Anna Politkovskaja, tuée par les sbires de Poutine pour ses articles qui dénonçaient au monde les massacres de Dubrovka et de Beslan, dont Poutine et son régime fasciste en portent la véritable responsabilité.

    Après l’Ukraine, le Haut-Karabagh, c’est aujourd’hui au tour d’Israël d’être frappé par le terrorisme djihadiste du Hamas, armé et guidé par la main fanatique de l’Iran.

    Des villes et quartiers israéliens ont été violemment attaqués, des massacres les plus atroces contre les femmes, hommes, enfants ont été conçus et provoqués pour effrayer et déstabiliser Israël, pour jeter le chaos et la terreur d’un ISIS jamais mort, aujourd’hui comme hier, toute proportion gardée, en France, en Belgique, aux Etats Unis le 11 septembre.

    Les mêmes atrocités, la même terreur se sont abattues sans cesse depuis 24 février 2022 en Ukraine, ce qui fait dire que les deux pays, Israël et Ukraine, sont unis dans la guerre au même ennemi mortel, le terrorisme.

    Il faut être aveugles ou (et) complaisants avec la terreur, avec la menace existentielle qui plane sur le monde occidental pour ne pas voir et mieux soutenir la troisième main agissant en arrière-plan au duo Hamas-Iran, la main de la Russie, pour orchestrer la peur, le doute, la désunion, le chaos.

    Toutes les tactiques se réunissent en une seule stratégie armée pour propager de Moscou, de Téhéran, à la Méditerranée la guerre, la désinformation et le désordre dans l’Occident.

    La cinquièmes colonne de ce vaste plan est bien ce monde à l’inverse que nous connaissons depuis longtemps.

    Ce sont les pacifistes en faveur de Poutine qui accusent Zelenski et les Ukrainiens d’être les seules responsables de ce qui leur arrive.

    Ce sont les propalestiniens qui, pensant de soutenir Gaza contre Israël, finissent volontairement ou par tragique obscurcissement de la raison pour être les meilleurs alliés du terrorisme du Hamas.

  6. Isaac et Ismaël se battent en duel comme
    d’habitude.
    Pourtant dans la Bible il n’y a pas
    d’animosité particulière entre les deux.
    Israëliens et Palestiniens devraient prendre
    exemples sur ses deux personnages
    historiques.
    Dieu n’a pas de préférence entre les deux…