De loin, on dirait un Chef d’Etat. Tandis que les autres se ruent vers le diktat du parler vrai artificiel, feignent l’aisance et l’assurance faciles, lui surfait son personnage, se construit un style, pioche quelques élans chez le Général de Gaulle, d’autres chez Mendès-France tandis qu’il colore son discours de rouge vif. Montebourg Arnaud, avocat de profession, ameute, harangue et gouaille selon une intonation théâtrale, diction volontairement surfaite, ton savamment oratorien. L’homme de Saône et Loire s’exprime comme aucun autre politique de sa génération et déjà se démarque.
Un orateur hors pair, le déficit des idées…
Puis, Montebourg, ce nom tellement hexagonal qu’il en devient presqu’exotique, respire le terroir, l’authenticité, la vérité. Terroir, authenticité, vérité… Dans le monde réel, posséder ces qualités revient à être taré ; en politique, en 2011, ce sont plus que jamais des qualités. Lorsque Montebourg parle, il est vrai qu’on l’écoute. L’homme possède indéniablement ce charisme et cette assurance qui rassurent et font élire, possède à la fois une fougue presqu’encore adolescente et ce côté si IVème République qui rend si nostalgique.
« J’ai voté pour lui parce qu’il est beau et puis il parle si bien… » disait, comme beaucoup d’autres, une vieille femme à la sortie d’un bureau de votes de la primaire socialiste.
C’est un fait, Montebourg parle bien. Mais comment pense t-il ? De travers ! Car l’on peut vouloir corriger les effets néfastes de la Mondialisation, idée louable, sans jamais se retrouver proche de cette Gauche sans honneur, celle de Chevènement et de Mélenchon, qui fait front avec le FN autour de thèmes de campagne semblables, ici la Démondialisation… Attention Monsieur Montebourg, attention : l’on peut vouloir se démarquer mais il ne faut pas franchir la ligne rouge. Et puis, soyez en certain, vous valez bien mieux que tous ces types !
Le Grand vainqueur de la Primaire Socialiste
Bien… Si Montebourg finit troisième de cette Primaire socialiste, il en est, dans les faits, le grand gagnant. Cela a plusieurs titres. D’abord car l’idée même de Primaires a Gauche lui revient. Selon différentes sources, deux millions de votants se sont déplacés pour exprimer leurs souhaits et avec eux c’est l’idée du citoyen de Gauche engagé et éclairé qui s’est régénérée, bravo ! Montebourg gagnant car il constitue, ensuite, un troisième homme solide, en pleine progression dans un parti socialiste qu’il tente de reformer depuis plusieurs années maintenant. Enfin, Montebourg triomphant car il était, il n’y a pas si longtemps, le porte-parole un peu trop bavard d’une Ségolène Royal nonne républicaine. Voilà aujourd’hui l’élu bourguignon passant devant la dame de la bravitude et éliminant, par la même occasion, tous les espoirs présidentiels de l’ancienne adversaire de Nicolas Sarkozy.
Reste à savoir, à l’heure des choix politiques, ou ira Arnaud Montebourg. Vers François Hollande, favori du PS mais ennemi déclaré ? Ce serait surprenant et quelque part décevant de la part d’un homme qui a fait de la constance de ses idées un véritable atout électoral. Vers Martine Aubry alors ? Au niveau idéologique ce serait logique, surtout depuis que Manuel Valls, à l’autre bout de ce Cadavre (un peu moins) à la renverse que l’on appelle Parti Socialiste, a apporté son soutien à François Hollande.
Le vote utile, le populisme… elle aura bien servit l’oligarchie la famille Le Pen.
Dès qu’un candidat veut défendre le peuple en s’en prenant à l’oligarchie, elle nous ressort Le Pen.
Et de fait on nous ressort Le Pen un peu avant chaque élection. Dernièrement, avant les cantonales elle faisait 20% dans les sondages, pour plafonner à 10% le jour du vote et redescendre à 15% dans les sondages aujourd’hui avant de remonter à quelques mois des présidentielles… pour pousser au vote utile et écartez toute politique déviant du modèle socio-libéral.
Sur le populisme, Mélenchon a été plus malin en revendiquant l’appellation et en retournant l’attaque contre ces auteurs, à la façon de Jacques Rancière dans l’article de Libération « Non, le peuple n’est pas une masse brutale et ignorante ».
Ne nous laissons pas manipuler.
Car il faut être bien bête ou de mauvaise fois pour penser que démondialisation = repli nationaliste avec tous les sous-entendus racistes et xénophobes que cela implique quand on parle de Marine Le Pen.
Comparer une idée économique (démondialisation) avec une idée politique (nationalisme) c’est faire preuve de bien peu de rigueur scientifique, mais les amalgames ne sont pas que chez ceux que l’on croit.
On trouve des populistes et des démagogues à droite comme à gauche (Sarkozy et son obsession sécuritaire, Hollande et la création in extremis avant les primaires de 60000 postes d’enseignants par exemple).
On trouve des partisans du protectionnisme à droite comme à gauche (Mélenchon et Montebourg aux frontières de l’Europe, Le Pen aux frontières de la France).
Je sais c’est difficile d’admettre que tout n’est pas noir ou blanc mais vous verrez, c’est possible.
Ce qui est sûr, c’est que la France ne doit plus se contenter d’être une succursale. Chose qui n’induit pas au repli nationaliste. Ce n’est pas en s’abstrayant du monde que nous allons réussir à imposer à ce monde notre vision de la régulation mondiale des marchés. Si aujourd’hui, la nation mythique des Francs sait retrouver une dynamique placée au bon endroit, sa créativité s’exportera au-delà de ses propres frontières, lui offrant de renouer avec son influence ancienne. Malheureusement, depuis que le syndrome Louis XIV a été transféré dans les lanternes révolutionnaires il semble que pour elle ce soit «être le soleil du monde ou rien». Conserver une telle attitude après deux guerres mondiales, cela ne donne pas vraiment d’autre choix que l’extinction de voie. Impossible à l’empereur de la Maison des Fous de montrer le chemin s’il ne mène plus à Troie. Or Pâris n’est plus l’irrésistible amour à même d’attirer à lui un monstre de beauté qui exciterait, s’ils existaient, la jalousie des dieux. Il ne nous suffit plus pour tromper le nôtre de nous proclamer la lumière du monde. Allons plutôt faire un tour à son bout, et regardons si la lueur qui passe arrive bien de chez nous! Si comme il est à craindre la Ville Lumière n’éclaire guère plus qu’elle-même, et encore que très partiellement, qu’elle reste un petit moment à chaque endroit où elle se sera projetée, s’observant âme et corps d’un point de vue plus large, plus clair, plus inspiré, moins aveuglé d’avoir su enfin décoller le nez de sur sa propre face, et qu’elle revienne à elle!