C’est hier qu’a démarré la campagne officielle.
Dernière ligne droite avant le premier tour de l’élection présidentielle, c’est une période très courte, 12 jours à peine, régie par le principe d’égalité formelle de traitement entre tous les candidats.
Durant cette période, l’Etat met ses moyens au service des prétendants : mise à disposition d’emplacements pour coller des affiches électorales, prise en charge de l’envoi des professions de foi aux 45 millions d’électeurs, égalité stricte du temps de parole entre l’ensemble des candidats. Sur ce dernier aspect, les médias doivent non seulement respecter l’octroi d’un temps de parole égal, mais aussi veiller à ce que cela se produise sur les mêmes créneaux horaires.
Finis donc les acrobaties qui permettaient que seuls les insomniaques et les passionnés aient découvert Cheminade ou entendu la voix de Dupont-Aignan.
Désormais, nous allons tous être servis.
Conséquence de cette égalité de traitement, il est attendu que la période soit favorable aux petits candidats : c’est le moment où tous leurs efforts en vue d’obtenir les 500 parrainages sont récompensés par une sur-médiatisation impressionnante au regard de leurs poids politiques véritables.
La partition classique de la période est donc pour les « gros » de ne pas laisser les « petits » profiter de cette médiatisation exceptionnelle pour leur ponctionner (trop) de voix.
On peut donc s’attendre à ce que Nicolas Sarkozy ait dans les prochains jours un mot aigre-doux sur l’euro ou sur l’Union Européenne pour prévenir les tentatives de Marine Le Pen ou de Dupont-Aignan, tous deux se retrouvant dans une farouche opposition à une Europe « qui ruine la France », expression employée par les deux candidats.
Historiquement, on observe que malgré les efforts déployés par les uns et les autres, la période de campagne officielle ne crée en général rien de neuf, et accélère en fait le mouvement déjà enclenché dans les semaines précédentes :
En 1995, le dépassement de Balladur par Chirac mesuré fin février se confirme dans les sondages à 15 jours du premier tour : Chirac se qualifiera pour le second tour avec près de 21 % contre 18.6% pour son meilleur ennemi. En 2007, l’installation définitive de Bayrou comme le troisième homme, déjà mesurée dès novembre 2006, se confirme nettement dans les quinze derniers jours de la campagne.
En général, la campagne officielle ne rebat donc pas véritablement les cartes. Seule 2002, fait exception à cette règle ; cette année-là, Besancenot crédité de 1% des intentions de votes fin mars, réalisera un score de 4.25% trois semaines plus tard. Ce scénario paraît toutefois peu probable pour 2012. D’abord, parce que l’on ne voit personne capable d’un hold-up de dernière minute ; ensuite parce que le vote utile reste très présent dans les comportements électoraux en 2012.
Les deux prochaines semaines verront donc sans doute une nouvelle poussée de Mélenchon dans les sondages. Bien que ce dernier ne pénalise pour l’instant pas Hollande, et récupère surtout les abstentionnistes et les indécis, il n’est pas exclu qu’il finisse par gêner le candidat socialiste pour le premier tour, ou par rendre plus difficile le report des voix de Bayrou vers Hollande au second tour de l’élection présidentielle.
Le candidat socialiste aura marqué cette campagne par sa ténacité. Il aura, les bons comme les mauvais jours, réussi à tenir sa « ligne » ne se laissant imposer son agenda de campagne par aucun autre candidat, et ne répondant presque jamais directement aux provocations. Pour l’instant, cette stratégie semble payante, puisque malgré la poussée de Mélenchon, François Hollande ne perd presque pas de voix. Les jeux sont faits, rien ne va plus : à moins de quinze jours du premier tour, il ne peut de toutes manières plus changer grand-chose à sa stratégie.
Si le groupe Publicis fait tel chiffre d’affaire annuel, l’homme ou la femme qui en chapeaute les membres ne peut pas ne pas exiger un salaire plus important que celui du dirigeant d’une entreprise connaissant une moindre prospérité. En l’occurrence, Publicis Groupe a fait un chiffre d’affaires de 5,42 milliards € pour l’année 2010. C’est le principe de la cote dans le marché de l’art. Dès l’instant qu’un collectionneur fait monter les enchères à tant de millions de dollars sur un Koons ou un Hirst, toutes les œuvres classées antérieurement dans la même catégorie vont voir instantanément leur cote grimper. Leur prix, en conséquence, reflétera leur valeur qualitative relativement à l’indice économique sur lequel elles se seront ajustées. Les qualités d’un patron, au premier rang desquelles les investisseurs rechercheront la fiabilité (les grandes entreprises accumulant les positions dominantes sur plusieurs marchés d’un secteur industriel donné ont été baptisées par les anglo-saxons : «trust» = confiance), sont ainsi estimables au prix auquel ses compétences, preuve à l’appui, lui permettaient jadis de se vendre, et aujourd’hui l’y forcent. Vous me direz qu’il peut aussi refuser de jouer le jeu. Mais il y a encore ceux qui désirent continuer, alors imaginez un peu, si un petit déraisonnable nous faisait la démonstration qu’il est tout à fait possible non seulement de jouer selon d’autres règles mais de le faire avec un nombre incomparable de joueurs, je vois déjà la scène où un type se penche vers l’oreille d’un autre et lui dit qu’il connaît un type très efficace qui pourrait régler ce petit problème avant qu’il n’atteigne de plus grosses proportions. Vous voyez à quoi je fais allusion… Le genre qui vous brise les deux jambes, et n’oublie pas de vous montrer une photo de vos gosses avant de vous quitter en vous marchant dessus, la gueule barbouillée d’un mélange de sang, de bave et de dents. Il est vrai que nous avons sauté par-dessus les temps de Marcel Francisci. Répétons-le! Il est vrai que nous avons sauté par-dessus les temps de Marcel Francisci. Non. Ça ne marche pas mieux la deuxième fois. La mondialisation des marchés a rendu la spéculation globale et à sa suite, le capitalisme, monstrueux. Tant qu’un gouvernement mondial n’est pas mis en place, aucune chance de réguler quoi que ce soit sous le capot de cette machine infernale dont les freins ont lâché. Enfin, s’accroche à nos basques une dernière anicroche. De gouvernement mondial à gouvernement totalitaire, il n’y a qu’un pas.
« Si le patron de Publicis touchait un salaire inférieur à celui de ses concurrents, le prochain marché à se présenter à tous passerait sous le nez de celui d’entre eux qui vaudrait le moins aux yeux des autres »
tu peux m’expliquer ce postulat?
Et si le PS, au lieu que de subordonner le capital au social, choisissait de l’y associer? Si au lieu d’opposer les faiseurs de richesses les uns aux autres, il leur offrait l’occasion de se réconcilier? Mais si! Ne plus monter l’un contre l’autre, mais que chacun monte l’autre à son tour! Pour qui voulez-vous que cela ne passe pas? Et si les fils ont perdu la mémoire, faut-il que nous partagions l’amnésie qui les ronge? Rappelons à Serge, par exemple, comment Marcel a couronné Dassault d’une aura de précurseur de Blum en négociant avec les syndicats une semaine de congés payés. La spéculation est ce qu’elle est. Si le patron de Publicis touchait un salaire inférieur à celui de ses concurrents, le prochain marché à se présenter à tous passerait sous le nez de celui d’entre eux qui vaudrait le moins aux yeux des autres. Si pour avoir Maurice Lévy, les actionnaires de Publicis ont dû y mettre le prix, ceci est un indicateur de la valeur que cela représente à la Foire à l’embauche des têtes dirigeantes. Une foire mondiale où ce qui se prétend capable de réaliser une vente doit montrer en nature que cela sait y faire. Savoir se vendre est devenu le premier moteur de sociabilisation d’un talent individuel. C’est valable pour les petits CV, ça l’est tout autant pour les gros. L’homme politique s’attachant à défendre en priorité le plus petit des siens aura pour mission de mettre de leur côté, mais d’abord du sien, les chiens truffiers de l’empire économique, ceux qui ont le don de flairer la bonne affaire à vingt mille kilomètres à la ronde. N’oublions pas d’apprécier la rareté de certains dégradés de gris fusant de la matière, et seulement ensuite, faisons-leur faire la révérence devant leurs salariés. C’est dans cet ordre-là que cela opérera. Une chose ne se fera pas sans l’autre. Le patron n’est pas en haut pour rien. Si l’on cessait de se le rappeler, le pousse-toi-de-là-que-je-m’y-mette redémarrerait du plus bas de l’échelle. Mais à force de vivre en haut, on finit par se croire En Haut. Or à ce plan-Là, nous nous valons tous. Question besoin de première nécessité, rien ne justifie que l’un crève de faim pendant que l’autre meurt d’indigestion. Et je crois bien, et ne crois pas m’avancer en affirmant que le « nous » du calendrier républicain est convaincu autant que le sera à jamais chacun de ses « moi » révolutionnaires qu’avec 1 million d’euros par ans, on n’a de quoi manger tous les jours de l’année. Parler alors de mesure confiscatoire à propos d’une taxe ne concernant que la portion d’un salaire qui dépasserait ce million me semble participer d’une perte du sens commun des réalités. Je sais qu’un certain nombre d’enfants spirituels de Marcel Bloch sont tout à fait conscients de l’image que les Thénardier ne peuvent que se faire de leur situation. Sarkozy avait décidé de les décomplexer. Sur ce point, il vit juste. Les émeutiers de 2005 en ont perdu la rage et les repères d’un coup : ils avaient achevé de concentrer leur haine du pouvoir en place vers l’Intérieur du territoire dont le candidat gaulliste faisait figure d’incarnation féroce; ils ont commencé à l’apprécier en tant que Président comme on respecte un chef de gang adverse, une Caillera avec un grand C, avec son teint mat, ses Ray-Ban tarantinesques, ses montres agrandies par effet d’optique, avec ses meufs, Cécilia et Carla, ses B-Girls, Rachida et Rama, avec ses gangsta killers, Hortefeux, Besson, Guéant et Copé, ça rigole pas avec Nick Sa Race, et on adore ça que ça rigole pas, on lui gueule dessus; il nous gueule dessus, il fait sa Géraldine Nakache, du coup de boule résolument imprévisible, avec ce sérieux avantage sur Zizou que sa tête est à hauteur de plexus ennemi. Visez un peu, les pleins aux as! Il vous a fait la moitié du boulot. À vous maintenant de le finir! Levez l’ancre du yacht et invitez-nous à vous suivre sur le pont! Nous, le peuple, savons autant que vous goûter aux belles choses. Lorsque je navigue sur le website de la Nasa, pas à une seule seconde je ne me vois être privé d’accès au Saint des Saints du temple extra-terrien. Je ne me sens pas mis à l’écart, sachant que le plus riche et le plus pauvre de nous y sont maintenus à équidistance. Je n’éprouve pas non plus la moindre jalousie envers des putains de savants doués d’aptitudes considérables dont il me suffit de les voir évoluer entre ces machines incompréhensibles pour les prendre en considération. Enfin, je ne me ressens pas comme l’exclu parmi les membres d’un club jaloux de ses prérogatives quand tout de là est mis en œuvre pour que je me sache reconnu en tant que frère de clan, élément de la même sphère partageant la même aspiration à étendre mon univers au-delà du visible. C’est de là ou jamais que la société redémarrera, décontractée du paradigme. Que le génie privé fonctionnera désormais comme un génie public. Les subventions ne sont ni plus ni moins qu’un mécénat d’État. Or nationaliser tout financement des arts, on a déjà donné. Ça débutait par UR, finissait par SS. Quelqu’un ici souhaite l’expérimenter? Tous ceux dont il est prédictible que les futurs mécènes des futurs gouvernements leur rouleront dessus sans même sentir la secousse, doivent conserver en dernier recours le pouvoir personnel de se dégotter un Kahnweiler. Or à la différence d’un ministre de la Culture, le mécène privé n’est pas habilité à puiser à la poche de millions de citoyens soumis au lever de mains en l’air dont il reverserait l’impôt à l’artiste de son choix. Lui, devra se débrouiller tout seul s’il veut accoucher une âme féconde. Il devra faire fortune avant de pouvoir faire la fortune d’un autre. Utilisé à cet escient, le lit du Pactole n’empêche de dormir que les petits rapaces. Il devient un aspect très secondaire des choses dès l’instant que nos différences de compte en banque sont enterrées sous notre amour commun et communément vécu pour une conquête de l’inconnu, qu’elle se fasse au plan artistique, scientifique ou même, politique. Prenez par exemple les deux grandes figures stoïciennes de Rome, Épictète et Sénèque. Le premier est plus pauvre que le plus pauvre de nous, le second est l’un des hommes les plus riches de son temps. Comment ce dernier a-t-il pu concilier son mode de vie avec sa doctrine? Une question de rapport aux êtres et aux choses. Sénèque observe cette nouvelle mode qui consiste à ajouter de la glace dans l’eau que l’on boit. Grotesque. L’hydratation n’a pas besoin de s’encombrer d’un besoin superflu pouvant causer une impression de manque, avec l’addiction que celle-ci engendrerait. Sénèque possède plusieurs domaines immenses. Dans chacun, on ne trouve qu’un exemplaire de service de table. On ne prévient pas la casse en s’assurant de leur remplacement mais en prenant conscience de la fragilité des objets que l’on manipule ainsi que de la préciosité qu’ils tirent de leur rareté. Reste une différence fondamentale entre Épictète et Sénèque, l’un est un esclave, l’autre possède plusieurs dizaines d’esclaves. Nonobstant, ils vont partager plus ou moins la même philosophie qu’ils ont héritée de Zénon de Kitiôn, riche marchand de son état, mais dont les origines phéniciennes faisaient de lui un métèque chez les Grecs où il fonda en plein air son école du Portique. Il faut voir l’homme dans son rapport aux choses et non pas dans les choses auxquelles il se rapporte. Qui sont Épictète et Sénèque. Qui est Épictète. Qui est Sénèque. Il faut le voir au-delà du système sociopolitique les incluant, au-delà du système de répartition des richesses dont ils héritent. Il n’existe qu’une différence entre Sénèque et ses esclaves, l’un a reçu la charge de la gestion d’une portion de la société, les autres suivent ses directives et profitent de la qualité de sa gestion. Sénèque étant juste et droit, il ne s’octroie pas plus que le strict nécessaire vital et octroie à ses esclaves exactement la même chose. La propriété est une question de caractère. Qu’un autre plutôt que moi possède le coffre-fort, tant mieux pour lui! tant mieux pour moi! Je vous l’avoue, je serais pris de panique si l’on m’en confiait la garde. J’ai non pas une, mais deux mains percées, je dilapiderais tout dans la gigantesque apothéose d’une ouverture n’ayant pas eu le temps de composer son opéra. En revanche, j’attends de celui auquel je n’arrache pas les clés du coffre qu’il me fasse la démonstration de la seule possession que je lui concède, celle du talent de gestionnaire qui me fait défaut. Et l’on ne sait pas gérer les affaires publiques si l’on met de la glace dans son eau tandis que ses esclaves doivent se contenter de plonger un seau au fond du puits de la cour. Haro sur la stigmatisation des riches! Que les patrons qui seraient maintenant OK pour redistribuer avec davantage d’équité les richesses nationales à leur nation se lèvent, et qu’ils parlent enfin! Qu’ils nous montrent l’exemple, si chacun doit s’assumer tel qu’il est! Qu’ils soient ce qu’ils sont et dépassent ce qu’ils valent! Que le je-vaux-tant se change en je-votant!