Le stratège Guy (Ernest) Debord est né à Paris huit mois avant moi à Melilla. Souffrant de polynévrite chronique (« …j’ai été continuellement ivre…. en périodes de plusieurs mois… et le reste du temps, j’ai beaucoup bu»), il a pris de vitesse sa maladie incurable et s’est occulté euthanasiquement le 30 novembre 1994. Dans son sublime Panégyrique, il fait l’éloge de l’alcool et de ce que l’ivresse et son alcoolisme déclaré et assumé lui ont apporté dans sa vie et dans son travail. Quel dommage! ni lui ni Topor n’ont réussi à me guérir de ma sobriété. En janvier 2009, l’État français a décidé de classer toutes ses archives ‘patrimoine national’ par un décret en interdisant la vente. Ce dernier précise que ces documents revêtent une grande importance pour l’histoire des idées de la seconde moitié du XXe siècle et pour la connaissance d’un de ses derniers grands intellectuels (Journal officiel de la République française du 12 février 2009.) La Bibliothèque nationale de France a signé l’achat des archives en mars 2010.
Guy Debord bien que non accepté (très malheureusement) au café La promenade de Vénus, était un grand connaisseur du surréalisme et tout particulièrement de Cravan. Il a conceptualisé la notion sociopolitique de « spectacle » dans la société . En 1952, il avait prévu: Le champ de bataille n’a jamais été aussi vide; il avait publié le synopsis de la première version (avec images) de son premier film Hurlements en faveur de Sade: avec une fin sans images alternant des séquences d’écran entièrement vides ou noires, et une bande-son avec des phrases poétiques détournées de leur contexte originel, saccadées, avec de longs silences.
En 1953, il avait écrit sur un mur de Paris Ne travaille jamais, lorsque le bar Chez Moineau à Paris était devenu son quartier général. 1957 sera pour lui une année décisive grâce aux différents procédés de la dérive situationniste. Dans cette perspective, il considère que la construction des situations remplacera le théâtre dans le sens où la véritable construction de la vie a de plus en plus remplacé la religion.
En 1959 il réalise Sur le passage de quelques personnes à travers une assez courte unité de temps. Il se déclaré héritier de la Commune de Paris dans la Société du spectacle (publié le 14 novembre 1967: le spectacle n’est pas un recueil d’images, mais un rapport social entre des personnes, médiatisé par des images. Cela signifie que chaque aspect précédemment vécu se manifeste maintenant dans une simple représentation qui engloberait toute la vie sociale: c’est l’aliénation de l’homme à la fois du monde qui l’entoure et de sa propre vie; il ne vit plus vraiment, n’en étant qu’un spectateur. Pour Debord, le mois de mai 68 est l’aboutissement logique de sa stratégie: un mouvement prolétarien révolutionnaire qui refait surface après un demi-siècle d’écrasement et qui a cherché sa conscience théorique.
A partir de 1970, GD vit, selon les saisons, entre Paris, l’Auvergne, Florence. Il est passionné d’Espagne. Il entretient une grande amitié avec le satrape pataphysicien Sanguinetti et à Paris avec le producteur Gérard Lebovici, qui finance trois de ses films. Nous montons, lui et moi, en même temps nos différents films dans le même laboratoire et nous nous promenons- Breton s’étant occulté- sur Vénus . Avec le film In girum imus nocte et consumimur igni (1978), un palindrome en latin qui signifie Nous nous promenons la nuit et nous sommes consumés par le feu, il réalise un inventaire mélancolique de son itinéraire esthétique et de ses exigences politiques.
À partir de 1972, il exerce une influence de plus en plus importante dans la maison d’édition de Lebovici; il publie des auteurs qu’il juge essentiels (bien sûr) comme Baltasar Gracián, Clausewitz, August von Cieszkowski. En 1979, il traduit en français des Coplaspour la mort de son père de Jorge Manrique. Il loue un appartement à Séville.
Après le mystérieux meurtre, le 5 mars 1984, de son ami et éditeur Gérard Lebovici, il est accusé par des personnes de toutes tendances d’être responsable de sa mort. Il défend son honneur en dénonçant les calomniateurs devant la justice qui lui donne raison: il analyse les attaques et y répond dans son livre Réflexions sur le meurtre de Gérard Lebovici . Afin de démontrer par son propre exemple (comme il me l’a dit à plusieurs reprises) et montrer qu’une autre vie était possible, il a décidé d’écrire son expérience personnelle dans son chef-d’œuvre Panégyrique (dont le style est à juste titre comparé à celui du cardinal de Retz). Panégyrique était un bien meilleur titre qu’Éloge: je crois avec lui qu’il aurait été trop faible . (Le Littré précise: …panégyrique dit plus qu’éloge. L’éloge contient sans doute la louange du personnqge, mais n’exclut pas une certaine critique , un certain blâme . Le panégyrique ne comprend ni blâme, ni critique).
Je me rappelle de la traduction par Guy Debord des « coplas » de Jorge Manrique (1440-1479):
« Souviens-toi, âme endormie
et ressors de ta stupeur
en contemplant comme passe la vie
et comme survient la mort
par surprise
comme s’enfuit le plaisir
comme après son souvenir
nous fait mal
et comme alors nous croyons
qu’un temps passé, quel qu’il fût était mieux…»
…en espagnol:
« Recuerde el alma dormida
contemplando como se passa la vida
como te viene la muerte tan callando
cuan presto se va el placer
como después de acordado da dolor
como a nuestro parecer
cualquier tiempo pasado,
fue mejor… »
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El estratega Guy (Ernest) Debord nació en París ocho meses antes de que yo lo hiciera en Melilla. Aquejado de polinevritis crónica ( « continuamente me embriagaba… y el resto del tiempo bebía mucho ») tomó la delantera a su enfermedad incurable y se ocultó eutanasicamente el 30 de noviembre de 1994. En su sublime Panegírico, alabó al alcohol y lo que la embriaguez y su alcoholismo declarado y asumido le aportó en su vida y su obra. ¡Qué pena! ni él ni Topor consiguieron curarme de mi abstemia. En enero de 2009, el Estado francés decidió clasificar la totalidad de sus archivos como patrimonio nacional con un decreto que impidió su venta. Porque ellos son de una gran importancia para la historia de las ideas en la segunda mitad del siglo XX y para el conocimiento de uno de sus últimos grandes intelectuales (Journal officiel de la République française del 12 de febrero de 2009). La Biblioteca nacional de Francia firmó en marzo de 2010 su compra .
Guy Debord, aunque no aceptado en el café ‘La promenade de Vénus’, fue un gran conocedor de los surrealistas y muy especial y obviamente de Cravan. Conceptualizó la noción sociopolítica de «espectáculo», en La sociedad del espectáculo. En 1952 había anunciado: nunca el campo de batalla estuvo tan vacío, y publicado la sinopsis de la primera versión (con imágenes) de su primera película Hurlements en faveur de Sade. Con un final sin imágenes alternando secuencias con la pantalla enteramente en negro o en blanco y con frases poéticas desviadas de su contexto de origen, entrecortadas con largos silencios .
En 1953, había escrito en una pared de París Ne travaille jamais (en español, « No trabajes nunca »), cuando el bar Chez Moineau de París se había convertido en su cuartel general. 1957 será un año decisivo para él : entre los diversos procedimientos « situacionistas » la deriva se presenta como una técnica de paso apresurado a través de ambientes variados. Con esta perspectiva, considera que la construcción de situaciones sustituirá al teatro como la construcción real de la vida ha sustituido cada vez más a la religión.
En 1959 realiza Sur le passage de quelques personnes à travers une assez courte unité de temps (Sobre el paso de unas cuantas personas a través de una unidad de tiempo bastante corta). Se declara heredero de la Comuna de París en la La sociedad del espectáculo (publicado el 14 de noviembre de 1967). El espectáculo no es una colección de imágenes, sino una relación social entre la gente, mediada por imágenes. Esto quiere decir que todo aspecto anteriormente vivido se manifiesta ahora en una mera representación que abarcara toda la vida social: es la enajenación del hombre, tanto del mundo que le rodea como de su propia vida; ya no vive realmente, siendo solo un espectador de ella. Para Debord, el Mayo del 68 es la culminación lógica de su estrategia. Un movimiento revolucionario proletario que resurge tras medio siglo de aplastamiento y que buscaba su conciencia teórica.
A partir de 1970, GD vive, según las estaciones del año, entre París, Auvernia y Florencia. Se apasiona por España. Mantiene una gran amistad con el sátrapa patafísico Sanguinetti y en París con el productor de cine Gérard Lebovici que financia tres de sus películas. Montamos, él y yo, al mismo tiempo nuestras diferentes películas en el mismo laboratorio. Y paseamos (ya ocultado Breton) por Vénus. Con la película In girum imus nocte et consumimur igni (1978), un palíndromo en latín que significa Damos vueltas por la noche y somos devorados por el fuego, hace un balance melancólico, pero sin amargura, de su itinerario estético y político.
A partir de 1972, ejerce una influencia cada vez más importante en la editorial de Lebovici; publica autores que considera importantes como Baltasar Gracián, Clausewitz, August von Cieszkowski. En 1979, traduce al francés las Coplas por la muerte de su padre de Jorge Manrique. Alquila un piso en Sevilla Tras el asesinato misterioso el 5 de marzo de 1984 de su amigo y editor Gérard Lebovici es acusado por la prensa de todas las tendencias de ser el responsable de su muerte. Defiende su honor denunciando a los calumniadores ante la Justicia que le da la razón: analiza y contesta a los ataques de la prensa en su libro Consideraciones sobre el asesinato de Gérard Lebovici…
Para demostrar con su propio ejemplo -como me dijo repetidamente- que otra vida era posible, decidió escribir su experiencia personal en su obra maestra Panegírico (cuyo estilo es comparado con razón, al del Cardenal de Retz). Y , en efecto, como repetía siempre con exactitud , Panegírico era un titulo mucho mejor que Elogio, yo creo con él que elogio hubiera sido corto.