L’Autoportrait d’Antonin Artaud fut emporté à 2 136 750 euros chez Sotheby’s  le  16 palotin de l’an 141 de l’Ère ‘Pataphysique (5 avril  2011, apparent).  L’oeuvre avait était estimée entre 500 000 et 700 000. C’est un autoportrait à la mine de plomb daté du 17 décembre 1946, quelques mois à peine après la fin de son internement forcé à Rodez (Aveyron).  Ses traits sont incisifs, son expression marquée à la mine de plomb.
             Il faut regarder ce dessin encore une fois après l’avoir vu,  déjà une fois, écrit le poète en 1946. Je crois qu’il reste alors non dans l’espace, mais dans le temps, à ce point de l’espace du temps où un souffle de derrière tient l’existence et la suspend. 
            Ses dents sont cassées à la suite de  58 séries d’électrochocs sans anesthésie. Le regard se pose sur le long cou, les contours de la pomme d’Adam:  C’était pour lui la boule à cris, souligne Thomas Bompard. Enfin, il y a le regard clair, si lointain et déterminé à la fois, du génie foudroyé.  Le visage humain n’a pas encore trouvé sa propre face, écrivit Antonin Artaud. Mais le sien, peint tel qu’en lui-même, n’a pas fini de fasciner.

« Antonin Artaud » par Picasso

Arthur Adamov écrit  dans son journal  « L’homme et l’enfant (souvenirs) » publié au 4è trimestre de 1968:   « …en 1945 je décide d’aller voir Antonin Artaud , oublié de tous, « en traitement à l’asile de Rodez  depuis le  début de la guerre (1939)…Artaud affaibli, effrayé. …tremble de tous ses membres . Il me  raconte sa vie à Rodez . Accuse le docteur Ferdière (auteur d’un Gérard de Nerval !) de le terrifier: Si vous n’êtes pas sage , monsieur Artaud on va vous faire encore des électrochocs . Artaud , le visage traversé de tics, ravagé, ridé, la bouche édentée;  mais tout à coup s’échappe une voix retentissante, hurlante Nous noyés dans ses mots…  Antonin Artaud au Vieux-Colombier  perd ses papiers , les cherche par terre, balbutie; il est très pâle.  La salle garde un silence de mort , Artaud impose le respect.  J’aide Gide à monter sur la scène , il veut embrasser Artaud …Le suicide d’Artaud au chloral (l’arme massive)… »

      [Antonin Artaud sombra dans la folie. Il subsiste  un enregistrement exceptionnel intitulé Pour en finir avec le jugement de Dieu: une création  hors du commun. Artaud est enregistré quelques mois à peine avant sa mort. Il est alors interné et souffre d’un cancer du rectum. Cette création devait être diffusée le 2 février 1948 mais le directeur de la RTF décide de la censurer  la veille de sa diffusion. Il faudra attendre 25 ans pour l’entendre.  En effet, les oreilles de l’époque n’étaient pas prêtes à écouter un texte si subversif.  Artaud éructe, crie, hurle sa poésie. Son vomi verbal dénonce l’ordre moral:     
          « Là où ça sent la merde, ça sent l’être. L’homme aurait très bien pu ne pas chier, ne pas ouvrir la poche anale, mais il a choisi de chier comme il aurait choisi de vivre. Au lieu de consentir à vivre mort. C’est que pour ne pas faire caca, il lui aurait fallu consentir à ne pas être, mais il n’a pas pu se résoudre à perdre l’être, c’est à dire à mourir vivant… »           
           L’oeuvre est précédée d’une introduction de Roger Vitrac « donnant des clés »; il évoque ses activités d’acteur chez Charles Dullin. Des textes sont lus par Maria Casarès, Roger Blin et Paule Thévenin. Roger Blin se souvient  dans une vidéo  de cette soirée  du  13 janvier 1947 lorsque  Antonin Artaud se produisit sur la scène du Vieux Colombier. En 1973 Gilles Deleuze  écrit « La folie d’Artaud ».  À la Promenade de Vénus (le cafe surréaliste)  à trois reprises j’ai posé à André Breton  la même question   Que pensez-vous d’Artaud?   il m’a répondu toujours par la même  chose: Un révolté pour rien…]

Arthur Adamov (Adamian)  est né le 23 août 1908 à Kislovodsk (Caucase) et s’est occulté à Paris le 21 pédale de l’an 97 de l’Ère ‘Pataphysique(15 mars 1970, apparent ) des suites d’une surdose de barbituriques, ce fut un auteur dramatique.

Antonin Artaud (Antoine Marie Joseph Paul Artaud) est  né à Marseille le 4 septembre 1896 et  s’est occulté à Ivry-sur-Seine le 10 pédale   de l’an 71 de l’Ère ‘Pataphysique(14 mars 1948, apparent), ce fut un poète et théoricien du théâtre.