Maillot
Bañador ESPAGNE
Avec quel vertige le maillot
m’emporte vers le périple de l’hallucination.
Je traverse des labyrinthes
des forêts,
et des clitoris
exponentiellement.
Ou je rêve?
Avec quel éclat des galaxies,
des planètes de sexes,
et des tunnels du cerveau,
s’élèvent jusqu’au ciel
parmi des piscines, des plages et des abysses.
Ou je rêve?
Je n’ai pas le temps de tout voir,
tout défile à trop grande vitesse
parmi des fleurs géantes
ou des herbes microscopiques,
et du sperme aux cornes.
Ou je rêve ?
Des pierres précieuses
et des miroirs en caoutchouc
font des bonds sur la lune,
des kaléidoscopes
s’ouvrent, accueillants.
Ou je rêve ?
Des nageuses nues
murmurent près de moi.
Les sourdes
jouent la symphonie de l’Eden.
Ou je rêve ?
Dans un autre véhicule
« elle » voyage au-dessus ou au-dessous de moi?
derrière moi ou à mon côté?
transversalement ou perpendiculairement ?
vient-« elle » d’en haut ou d’en bas?
Ou je rêve ?
« Elle » me suit une seconde,
puis s’éloigne.
Inexorablement.
Nous nous reverrons, heureux,
sur une autre plage
à bord d’une vache de météores.
Ou je rêve ?
La course précipitée
à califourchon
sur Loreta Young
et sa soeur Olivia de Havilland,
me donne le tournis.
Je ne parviens pas
à me diriger
sur le croisement
des piscines et des plages.
Ou je rêve ?
Je sais que nous allons nous embrasser
dans un autre gouffre
tout au fond du firmament
parmi des cataractes de sable.
Ou je rêve ?
Se tordant de rire,
les nageuses
passent comme des bolides.
Elles volent à bord d’une fusée
grâce à la perfusion d’oxygène
fixée dans leur nez.
Ou je rêve ?
Nous rions
sur la plage
avec les séraphins.
Les pataphysiciens nageurs
chantent
en choeur
« bienheureux les pauvres »
en un écho qu’on pourrait mastiquer.
Ou je rêve ?
Moi-même j’apparais
et disparais
sans pouvoir me reconnaître
dans le corps et l’âme
d' »elle ».
La déesse Pan m’avale
et me recrache
en pleine piscine.
Elle m’extrait
de mon véhicule
supersonique
et me pose dans la paume de Sa main.
Ou je rêve ?
Je sens qu’il va se passer quelque chose
d’encore plus prodigieux
lorsqu’une voix me murmure
doucement:
« Monsieur Arrabal, comment allez-vous? »
Je reconnais
la voix féminine
de l’anesthésiologiste.
J’atterris à l’hôpital
sans piscines.
Parmi les doctoresses
sans maillot.
Ou je rêve ?
Fernando Arrabal,
Paris, 10-V-16 (v)=
15 Palotin 143 de l’Ère ‘Pataphysique,
Occultation de S. Gauguin, océanide.