Vous nous avez offert une vingtaine de livres de philosophie et de littérature. En 1995 paraissait « De l’antisémitisme ». Récemment une nouvelle édition revue et augmentée fut publiée. Est-ce la relecture de Léon Poliakov et la recrudescence de l’antisémitisme qui vous a conduit à repenser cette question brûlante et criante à ce jour ?

Oui, en partie. Par principe et par passion, je suis en train de rééditer minutieusement tous mes ouvrages parus depuis 1991. Cette réédition de De l’antisémitisme s’inscrit dans cette décision et elle aurait eu lieu de toute façon. Mais j’en ai profité pour rédiger une nouvelle longue préface qui tient compte de la recrudescence planétaire démentielle des manifestations d’antisémitisme depuis le 7 octobre 2023. J’y ai également ajouté quelques 300 pages d’annexes, rédigées entre 2021 et 2024, consacrées à l’antisionisme, à Heidegger, à la recrudescence de l’antisémitisme, etc. J’ai également augmenté le chapitre spécifiquement consacré à l’antijudaïsme et à l’antisémitisme musulmans, lesquels remontent aux sources de l’Islam. 

Enfin, pour répondre entièrement à votre question, je n’ai pas eu besoin de relire le cher Léon Poliakov pour percevoir le caractère hélas éternel de ses analyses, ni pour comprendre ce que ses ouvrages m’avaient enseigné il y a déjà plusieurs décennies – et que je décris dans De l’antisémitisme comme une « sensation très claire d’une immense vague de fond, une fureur banale et ronronnante depuis la nuit des temps. Une haine de l’ennui du Temps contre la nuit du Texte ». 

Pensez-vous que la surenchère de la haine soit issue de la convoitise, du second qui ne cesse de vouloir être premier ?

C’est une affaire compliquée, évidemment, d’essayer de percer le plurimillénaire mystère de l’antisémitisme. Vous faites allusion aux deux religions filles, issues du judaïsme, le christianisme et l’islam, et vous avez raison de souligner ce complexe du tard-venu qui les hante et nourrit leur antijudaïsme séculaire. 

Mon idée est que la Parole-Texte juive est profondément subversive, en ce sens qu’elle pose le questionnement au centre du monde, et qu’elle innove dans sa conception oscillatoire de la vérité, qui n’est pas certitude ni adéquation au réel. Ce faisant, elle bat en brèche la volonté de puissance des empires de l’antiquité, principalement de l’Empire romain sur le modèle duquel les empires modernes se sont peu ou prou conçus. L’interdit de tuer biblique, la réglementation de la servitude laborieuse et l’obligation du repos du shabbat – y compris aux animaux et aux serviteurs –, la place éthique faite à l’étranger, au pauvre, à la veuve et à l’orphelin, toutes ces spécificités juives sont profondément troublantes pour un projet politique universel, au sens du catholicisme apostolique et romain des premiers siècles ou de l’impérialisme rival de l’Islam à partir du septième siècle de notre ère. Cette subversion propre à la Parole juive est enkystée comme une épine douloureuse dans les deux civilisations, la chrétienne et la musulmane, qui ne peuvent pas ne pas développer une animosité pourtant suicidaire à l’égard de leur propre source spirituelle. 

Or, pour en venir à votre question précise, ce paradoxe originel d’une source à laquelle on doit son existence mais que l’on réfute pour pouvoir se déployer sur le monde, cela produit une véritable névrose civilisationnelle, une ambivalente animosité profondément amoureuse à l’égard du Judaïsme, de ses porteurs (les Juifs) et de tous ses symboles – État d’Israël inclus. À la différence d’un enfant japonais ou esquimau, un enfant chrétien ou musulman qui naît aujourd’hui apparaît d’ores et déjà au cœur d’une civilisation, d’une culture, d’une langue, d’une littérature, de tout un univers mental, proverbial, langagier, où le mot « juif » est magnétisé par cette profonde négativité résiduelle, et sur lequel, dès lors, la haine névrotique de qui a raté sa vie (les djihadistes, par exemple) peut se focaliser, de la simple invective jusqu’au meurtre le plus sauvage. Le cas abject de Mohamed Merah en fournit un parfait exemple. 

Le philosophe Italien Giorgio Agamben, au travers de son texte subversif « La fin du judaïsme », a suscité chez vous de vives réactions au point d’en résulter un livre où vous le recadrez avec rigueur. Comment a-t-il pu glisser avec véhémence vers un antisionisme flagrant après s’être enthousiasmé de Walter Benjamin ?

C’est la confirmation de mon hypothèse d’une névrose civilisationnelle qui précède et dépasse les individus, que de voir un intellectuel si réputé, comme Agamben, succomber à l’antisionisme le plus plat et le moins historiquement rigoureux. Or Agamben, à la différence par exemple d’un Noam Chomsky ou d’une Judith Butler, se réfère explicitement à la mystique juive pour alimenter ses interventions sur internet très agressives contre Israël et les Juifs. J’ai tenu à radiographier de près sa pensée, que je ne connaissais pas mais pour laquelle j’avais une estime de réputation, pour comprendre les tenants de cet emballement hostile. Et j’ai découvert à ma surprise tout un édifice de truquage, de falsification et d’amalgames indignes d’un intellectuel sérieusement cultivé, concernant par exemple le statut du « Musulman » à Auschwitz, ou le « Dispositif » selon Michel Foucault, ou la relation alambiquée entre Scholem et Benjamin, et surtout une passion pour saint Paul qui reprend sans du tout la critiquer la sous-pensée anti-judaïque de l’apôtre, exactement comme son compère le philosophe Alain Badiou… Et ce que m’apprit la lecture de l’autobiographie d’Agamben, c’est son neurasthénisme nihiliste, et que toute son attitude dépressive et dépréciative relève de l’assimilation qu’il fait au coin d’une page de son Autoportrait dans l’atelier entre « penser » et « uriner » !

Un rapport de l’Urban Warfare Institute et de l’International Legal Forum paru en mai 2025 a été établi par Arsen Ostrovsky et John Spencer. Vous l’avez repris point par point en revenant sur les Sept mensonges à propos de Gaza. Une façon d’être ambassadeur d’Israël en résorbant les fakes news et démantelant les fausses hypothèses ?

Là, vous faites allusion à mon activité sur mon site Substack, un réseau social plutôt fréquenté par les intellectuels (journalistes et écrivains, surtout anglo-saxons), où je diffuse en effet souvent, dans des traductions françaises, des analyses du conflit en cours à Gaza par des personnalités informées et rationnelles, tels John Spencer ou l’historien israélien Haviv Rettig Gur. C’est un travail d’explicitation et d’intelligence de la situation chaotique du monde contemporain, et plus particulièrement du Moyen-Orient, à laquelle mon séminaire sur l’antisionisme tenu entre 2022 et 2023, avant le 7 octobre, a tenté aussi d’apporter sa pierre. 

Je poste également beaucoup de mes propres analyses, en textes ou en vidéos, et j’entame depuis peu, toujours par ce même biais de mon site Substack, des dialogues avec des amis qui ont un point de vue original sur une question, comme récemment avec Joshua Lhote sur la coexistence pacifiée entre Juifs, chrétiens et musulmans à Gibraltar. Je prévois dans ce cadre de faire au cours de l’été une longue vidéo d’entretien avec l’historien Georges Bensoussan, qui tâchera d’être une sorte de « masterclass » de sa part concernant toute la question sioniste, reprise depuis le début jusqu’à nos jours. 

Vous considérez-vous comme écrivain et juif ?

Je n’ai pas besoin de me « considérer », puisque c’est ce que je suis intimement, dans cet ordre « chronologique » : Juif, français de langue et de culture, et écrivain. Mais, contrairement à la formule de Jankélévitch qui ouvrait son grand essai consacré à Bergson, que je dévorais à vingt ans, selon quoi « le problème des rapports entre Bergson et le judaïsme porte tout entier sur la conjonction Et », il n’y a pas en moi de césure ni de nœud problématique entre ces trois réalités de mon être intime : juif, français et écrivain. 

Cela est également vrai de mon travail artistique qui participe intégralement de l’écriture à la main. Il y a donc entre ma réalité d’écrivain de langue française (c’est important de le préciser, parce que je suis irradié et initié depuis mes vingt ans par la plus haute littérature classique française) et ma judéité, une mystérieuse fusion, que j’ose un peu audacieusement comparer aux deux facettes du « Je suis » dans la réponse de l’Éternel à Moïse au Buisson ardent : « Je serai que je serai »…

Quel est votre aveu de filiation avec le judaïsme ?

Là encore, il ne s’agit pas d’un « aveu », mais d’une évidence depuis mon plus jeune âge. Même si je n’ai pas reçu une éducation juive orthodoxe, seulement traditionnaliste, et si j’ai dû à partir de dix-huit ans redécouvrir par mes propres moyens les grands textes de la pensée juive, Bible incluse, mes ancêtres étaient des Hassidim de Pologne affiliés à la dynastie du Rabbi de Gour. Toute cette spiritualité profonde, mystique et enjouée du Hassidisme ashkénaze, que Kafka par exemple découvrit avec un enthousiasme stupéfait à l’âge adulte, qui s’opposait tant au judaïsme engoncé, exsangue et assimilé de ses parents…, il coulait dans mes veines depuis ma tendre enfance, en particulier par le truchement de bribes de yiddish, argotiques et sentimentales, dont mes parents avaient hérité depuis leur propre enfance, et que je tâche aujourd’hui du mieux que je peux de transmettre à ma propre fille. 

A quoi répond le juif en vous au-delà du face-à-face avec le texte et votre jouissance de l’exégèse !

C’est quand même l’essentiel de ce qui fonde ma judéité, ce « face-à-face avec le texte » et cette « jouissance de l’exégèse ». Sinon, beaucoup de traits assez typiquement juifs m’ont été légués par destin et éducation, comme une certaine angoisse existentielle, ou un souci éthique de l’attention portée aux « petites gens », comme on dit, aux « gens simples », qui ne manquent jamais de me toucher. 

Mais je suis également habité par une grande joie hassidique, corroborée par mon nom hébraïque Simh’a – apposé lors de ma circoncision par la mère de mon père –, lequel signifie « Joie », au même titre que « Freud » ou « Joyce ». 

A la lumière du judaïsme, que vous interroge le plus : la ressemblance ou l’appartenance ?

J’appartiens au peuple-texte des enfants d’Israël, peuple infiniment littéraire puisque jailli d’un Livre, et j’en partage beaucoup de traits, comme l’amour jamais démenti de l’étude, bien sûr, mais aussi ses légendaires défauts, comme la « nuque raide » et le sarcasme ironique répandu à tout va…

Le divin exerce-il un attrait sur vous ?

Bien entendu. Malgré mon trop peu de pratique religieuse, ce que je déplore, j’ai un profond attachement pour le Dieu juif, celui de la Torah, de la Kabbale et du Talmud. Pourtant, malgré quelques efforts, je ne parviens pas à « craindre » suffisamment ce Dieu que j’aime sincèrement, pour m’obliger à accomplir toutes les mitzvoth. Je ne m’en vante pas, et je considère que mes cousines et cousins très religieux qui vivent en Israël sont des parangons de piété dont j’admire sincèrement la pratique de leur foi. Je regrette que cette pratique ne m’ait pas été inculquée dès la petite enfance, au point qu’elle me serait aujourd’hui naturelle et ne réclamerait aucun véritable effort de ma part. J’aimerais être religieusement juif comme un poisson (casher) dans l’eau, alors que je me sens plutôt juif comme un cétacée qui se repose dans les profondeurs de sa religion mais ne peut s’empêcher de bondir et de reprendre son souffle à la surface du monde profane.

Penser est si proche du pressentir, comment envisagez-vous le futur de la diaspora ?

Je suis très pessimiste et fataliste, mais je suis aussi dans l’attente des miracles qui adviendront, car tout est toujours possible. Il est probable que si je n’étais pas aussi attaché à la langue et à la culture française, je serais sans doute déjà parti vivre en Israël.

Avez-vous fait du livre votre lieu, votre terre au sens où la langue est hospitalière ?

Oui, considérant tout ce que je viens de vous révéler, bien entendu les livres, à commencer par la Bible juive, me sont de vivifiantes sources perpétuelles d’énergie et de méditation, plutôt que des lieux proprement dits. Je n’ai pas vraiment de lieu attitré, hormis peut-être mes pensées, qui se déploient dans mes propres livres, ceux que j’écris. Mais il est vrai que la langue française, d’origine catholique et royale donc, est mon seul lieu intime, d’où cette oscillation étrange, mais que j’aime, entre le monde juif et celui de la littérature française. C’est ce que je qualifie de « swing du sens », et il n’a rien de dramatique, tout comme le véritable swing.

Dans Chaos brûlant vous explorez l’œuvre de Kafka sous l’angle du combat au travers de l’écriture. Il a su créer des mondes parallèles. Quels sont vos chemins de traverse ?

Précisément les livres de Kafka et de tous les nombreux écrivains que j’aime et qui m’ont aidé à me construire une pensée. J’y inclus des écrivains dont je suis psychologiquement assez éloigné, comme Louis-Ferdinand Céline ou Martin Heidegger, et que pourtant je lis et étudie avec une grande ferveur intellectuelle. Ce sont mes « chemins de traverse » au sens où ils ne correspondent pas à mon axe intime, mais l’irriguent plutôt comme des affluents qui participent au cours d’un fleuve. 

A la fin de la nouvelle édition de De l’antisémitisme, vous écrivez : « Ce qui m’épouvantait est survenu contre moi ». Contez-nous cette prophétie auto-réalisatrice.

En 2021, j’ai eu l’idée d’un nouveau roman radical sur les métamorphoses du Mal – dans la lignée de Chaos brûlant, qui portait sur l’argent et les médias de masse, Les intérêts du temps, centré sur le journalisme et la technologie, et Miroir amer, consacré à la manipulation du vivant.

Par une inspiration véritablement cauchemardesque, inspirée sans doute par Le complot contre l’Amérique de Philip Roth, je décidais de décrire la violente disparition des Juifs de la surface de la terre, et la déréliction spirituelle qui en suivrait partout sur la planète. Le titre envisagé de ce roman (toujours en cours d’écriture aujourd’hui), était La Fin

Pour rendre plausible cette « fin » des Juifs, j’imaginais que la vaste campagne de vaccination Pfizer en Israël tournait mal, et que les Israéliens mouraient subitement en tombant comme des mouches. Les Palestiniens en profitaient pour envahir sauvagement Israël et finir de massacrer les derniers survivants, comme les Juifs religieux ayant refusé de se vacciner. 

La phrase que vous citez est une citation de Job, que j’avais mise en exergue de ce livre profondément ténébreux : « Ce qui m’épouvantait est survenu contre moi. » C’était en février 2022, et cette ébauche de roman interrompu resta ensuite dans mes tiroirs.

On imagine mon effroi au matin du 7 octobre 2023, quand je découvris sur internet des scènes d’horreur faisant littéralement écho à celles que j’avais imaginées et commencé de rédiger deux ans auparavant. Et depuis le 7 octobre, la réalité semblait devenue à la fois ma plus fatidique rivale et ma pire inspiratrice. Moi qui, deux ans auparavant, cherchais comment décrire avec un tant soit peu de réalisme un monde galvanisé de haine antijuive, voilà qu’il surgissait à foison sur tous les réseaux sociaux, envahis quotidiennement de demeurés antisionistes ou antisémites, comme si ce délire aux dimensions planétaires avait pour principale fonction de me susurrer jour et nuit : « Voilà pour toi de la documentation à foison. Quand comptes-tu t’y remettre ?… »

Je dois vous faire un ultime aveu : le 7 octobre 2023, je ne pus m’empêcher d’être traversé par la pensée que, peut-être, avec mon imagination morbide, c’était moi qui avais causé, par une forme de magie noire inconsciente, ce malheur venant de s’abattre sur Israël et les Juifs selon un mode comparable à celui que j’avais transcrit à l’encre sur le papier deux ans auparavant. Heureusement, ce type de magie noire n’existe pas. Il n’y a que les envoûtements de la cybernétique qui font déjà, hélas, bien assez de dégâts.

Suite aux derniers maux qui nous secouent depuis la guerre, qu’avez-vous à cœur de soutenir, quel frisson vous anime ?

D’une certaine manière, tous les masques sont tombés depuis le 7 octobre. On a vu une ribambelle d’intellectuels exprimer leur rageuse incompétence un peu partout dans les médias. Même la toute récente attaque d’Israël contre l’Iran, qui n’était dirigée sur aucun civil, qui a fortement meurtri un régime tyrannique honni de son propre peuple, et qui a éliminé une grave menace nucléaire, a été décrite sous la même forme incriminante que la guerre à Gaza, dont le déroulement n’est pas sans complexité non plus. La guerre de 12 jours d’Israël contre l’Iran est sans doute la plus « propre » imaginable, ne visant que des crapules, et pourtant les mêmes éternels critiques de l’État juif ont trouvé un moyen de plaider la cause des mollahs que pourtant tous les esprits libres se devraient d’abominer. Conclusion ? Quand il est question d’Israël, il n’y a plus d’esprits libres. 

3 Commentaires

  1. La solution à deux États nous fut présentée comme un désir de paix partagé par les ré(éclaireurs) du siècle qui, du côté israélien comme du côté nassérien, avaient consenti à renoncer à une guerre totale visant à la reconquête de l’intégralité du territoire du royaume en poussière de Iehouda (province impériale de Palaestina pour les géographes latins) ainsi qu’à la restauration, pour les uns, du Grand Israël ou, pour les autres, de la souveraineté du Méta-Empire panarabe.
    L’appréhension qu’éprouvent les Juifs à l’idée de devoir expulser plusieurs millions de nomades enkystés à l’intérieur des anciennes colonies de peuplement d’un empire démantelé, n’a hélas pas d’équivalent chez les voisins d’Israël qui se réjouiraient de la création d’un État palestinien ayant vocation à réarabiser la région dans le but assumé de la réislamiser de fond en comble depuis le Jourdain jusqu’au littoral méditerranéen. Dans ces conditions, la solution à deux États, telle qu’invoquée, souvent aveuglément, par l’artisan antisioniste de la paix, revêt la forme d’une Solution finale que l’on aurait drapée dans le droit international.
    L’Anation israélite n’annihile pas la réalité de la Nation juive. — Or : la terre d’Israël en tant que foyer historique du peuple juif est un pan déchiré du réel dont l’Internationale préwoke a toujours tenu à ce qu’il fût occulté par les hommes de bonne Constitution que devraient être les citoyens du monde, autrement dit d’un monde délivré du suprémacisme que couve mécaniquement le sentiment nationaliste, à moins que cette doctrine pestilentielle n’ait suscité l’adhésion d’une minorité non WASP ou non juive, la gauche folklo ayant toujours eu en horreur le Peuple élu dont elle situe le concept à l’acmé du fantasme suprémaciste ; comme quoi, il est difficile de porter un jugement rationnel sur un point de religion après avoir systématisé les autodafés de livres sacrés judéo-chrétiens en vue de l’émancipation des masses.
    Les conditions à la création d’un État palestinien viable n’ont pas changé : 1) la reconnaissance de l’État juif et de Jérusalem comme capitale une et indivisible dudit État ; 2) la naturalisation des dits réfugiés palestiniens, ou droit au retour dans leurs pays d’origine respectifs des colons arabo-musulmans de la Terre d’Israël.

  2. Les modèles fascistes d’organisation sociale ne peuvent plus continuer à parasiter l’idée que l’on s’est faite d’une société multiculturelle fonctionnelle.
    La propension à la coexistence de deux cultures dépend de leur aptitude à se fondre en une troisième dont les contours abstraits du creuset civilisationnel ne font qu’accentuer la densité des concrétions éruptives, lequel génie national démontre par là toute sa capacité à sublimer le désir d’autoperpétuation des imaginaires étrangers qui sont venus se greffer au sien — fût-il un antidote contre le nationalisme, le ciel des droits universels ne suffit pas à l’homme dont la gravitation régit la plupart des mouvements — dès lors que la nation a offert des perspectives de vivre-ensemble à plusieurs segments de population ayant non seulement décidé de faire peuple en se forgeant une histoire commune, mais obtenu des résultats probants dans la lutte contre les tentations révisionnistes, négationnistes, plus simplement fumistes à l’égard de principes dont le posthomme aime jouir avec autant de complaisances qu’il en a mises, pour Dieu sait quelle raison, dans les crapules qui en bafouent le socle.
    L’État des Juifs n’y fait pas exception ; car les Juifs en composent le substrat national, intégrateur sous les mêmes conditions qu’un autre, à savoir qu’une nation juive n’intégrerait rien qui s’applique, de façon méthodique ou anarchique, à la désintégrer.
    Il n’est pas impossible qu’une fraction de la démographie d’un État refuse, en temps de guerre, de partager les destinées tragiques de son propre foyer jusqu’à, sinon rallier le front ennemi, du moins en embrasser la cause dite des opprimés, tels que se perçoivent les agresseurs subissant sa riposte. Feu ce crime de haute trahison, requalifié par nos contemporains en intelligence avec une puissance étrangère, n’en demeure pas moins l’un des pires crimes qu’un être humain soit amené à commettre à l’encontre de ses congénères, en temps de paix comme en temps de guerre. Bien sûr, l’ennemi n° 1 change de nature selon qu’un peuple se juge lui-même en bon ou mauvais État sous un régime tribal, impérial, monarchique, théocratique, démocratique ou totalitaire. Les risques d’insurrection, quant à eux, ne varient guère de l’un à l’autre. Ni la nécessité pour l’État d’anticiper le coup du tranchant de la main que lui réservent les franges les plus radicales de la population dont il est censé assurer la défense des intérêts vitaux, à moins que ces dernières n’en soient arrivées à représenter pour lui un péril mortel.
    La nationalité israélienne, qu’on l’ait acquise à la naissance ou grâce à l’obtention d’une naturalisation, implique que l’on épouse le destin du peuple juif, sous l’appellation duquel fut désigné le Klal Israël suite à son retour dans les parts équitables attribuées par IHVH, ou par Moshè, ou était-ce par Iehoshoua‘, aux Benéi Iehouda et Benéi Beniamîn, constitutives du dernier royaume des Benéi Israël. Que vous soyez juif d’origine ou citoyen israélien d’origine étrangère, en acceptant la citoyenneté israélienne, vous vous exposez instantanément aux mêmes menaces existentielles qui n’ont jamais cessé de harasser le premier peuple désélu des Nations. Être israélien comporte donc des avantages notables et des inconvénients notoires. Personne ici et là ne force, ce faisant, quiconque à l’Être.

  3. On ne voudrait pas que, pour s’interposer entre les Israéliens et leurs bourreaux, il faille que l’on marchande en proposant aux premiers notre soutien en échange de messages de paix dont il est de bon ton qu’ils en envoient aux seconds, et nous épargnent par la même occasion un embrasement régional aux répercussions internationales.
    Nous invitons les musulmans de tous les pays à se joindre à Tsahal en vue de terrasser une Bête dont la puissance n’est pas à démontrer dès lors qu’elle peut, où et quand elle le souhaite, faire de l’islam une religion qui ne conçoit de paix que dans la destruction des Juifs et dans la conversion des mécréants ; une approche de l’islam que d’aucuns qualifieraient de littéraliste.
    Aux adeptes de cette forme de religion, nous ne tendons pas la main en signe de paix ; ceux-là, nous les mettons en joue.
    L’universalisme implique que l’on cède à autrui une part de liberté proportionnelle à celle dont il s’est départi pour nous, mais aussi qu’on en prive toute personne qui ne parviendrait à jouir de sa propre existence qu’en piétinant ce qui, chez son semblable, est et demeure un droit fondamental.
    Nous ne consentons à vivre dans la fraternité qu’avec les hommes qui ont mérité notre amour fraternel ; aussi ne nous verrez-vous pas en accorder une once à quiconque ne s’est jamais reconnu de frère que musulman.
    Pour le dire crûment, nous ne ratifierons aucun traité de paix avec des fils de P(é)tain.