Ce samedi du 7 octobre 2023, l’organisation terroriste du Hamas[1] vient de lancer une offensive inédite de par son ampleur et son incroyable violence, en semant la terreur, en attaquant, en infiltrant et même en envahissant le territoire israélien. Le bilan est lourd, mais provisoire. Des images atroces circulent en ce moment même et les blessés affluent dans les hôpitaux israéliens.

Dans ce volcan qu’est le Proche Orient où le quotidien est souvent scandé par des événements tragiques, il est difficile de garder la distance, de se détacher de l’actualité et de réfléchir. Mais, puisque le Hamas a pris l’initiative d’attaquer et de terroriser le territoire israélien en déclenchant cette guerre folle, il y a des données qu’il faut rappeler. D’urgence. 

Quel est l’ADN du Hamas ? Quelles sont les lignes phares de ce mouvement ? Que veut-il vraiment ? Et quel modèle veut-il imposer à la société palestinienne ?

L’idéologie et les objectifs de ce mouvement sont contenus dans sa charte, adoptée le 18 août 1988

Parmi les aspects les plus controversés de cette charte, figure l’article 13 qui définit la Palestine historique, c’est-à-dire le territoire recouvrant celui du mandat britannique et incluant donc géographiquement l’État d’Israël, comme une exclusive propriété islamique (wafq).

« Abandonner une partie de la Palestine est comme abandonner une partie de sa religion », déclare le Hamas. Pour le mouvement islamiste, seul le djihad, considéré par l’article quinze comme une obligation religieuse, peut libérer ce territoire et restaurer une souveraineté, sous la forme d’un État islamique et par le biais d’une (ré)islamisation de la société.

Son article 8 est encore plus catégorique. Le Hamas y rappelle sa devise : « Dieu est son but, l’Apôtre son modèle, le Coran sa constitution, le djihad son chemin et la mort sur le chemin de Dieu la plus éminente de ses espérances. »

Que pense le Hamas du processus de paix ?

Dans son treizième article, le Hamas dit renoncer à toutes négociations. Selon lui, les initiatives et les conférences internationales préconisées pour régler la question israélo-palestinienne vont à l’encontre de la profession de foi du mouvement. « Renoncer à quelque partie de la Palestine que ce soit, c’est renoncer à une partie de la religion. Ainsi, le patriotisme du Mouvement de la Résistance Islamique fait-il partie de sa religion », affirme le Hamas. « C’est sur cette base que ses membres ont été éduqués et c’est pour déployer l’étendard de Dieu sur leur patrie qu’ils mènent le Djihad. »

Le mouvement islamiste réaffirme plus loin : « Il n’y aura de solution à la cause palestinienne que par le djihad. Quant aux initiatives, propositions et autres conférences internationales, ce ne sont que pertes de temps et activités futiles. »

Comment se définit lui-même le Hamas ?

La confrérie serait le « mouvement universel » et le Hamas, son « mouvement de résistance en Palestine ». Le Hamas est donc l’une des ailes des Frères musulmans en Palestine.

Que dit à ce sujet le Hamas ?

« Le Mouvement des Frères musulmans est un organisme mondial, le plus important des mouvements islamiques de l’époque moderne ; il se distingue par (…) l’universalisme parfait des concepts islamiques qui s’appliquent à l’ensemble des domaines de la vie, aux représentations et aux croyances, à la politique et à l’économie, à l’éducation et à la vie sociale, au judiciaire et à l’exécutif, à la mission et à l’enseignement, à l’art et à l’information, à ce qui est caché comme à ce qui est manifeste et à tous les autres domaines de la vie. »

Selon le Hamas, la Palestine serait donc une terre islamique. Dans son article premier, le Hamas définit en ces termes ses bases intellectuelles : « L’islam est sa règle de vie ; il en tire ses idées, ses concepts de même que ses points de vue sur l’univers, sur la vie et sur l’homme ; c’est à lui qu’il se remet pour juger de l’ensemble de ses pratiques et c’est de lui qu’il tire les indications de la Voie droite sur laquelle mettre ses pas. » L’islamisation de la société est donc le pilier de l’idéologie du Hamas, qui appartient à la mouvance des Frères musulmans.

Que deviendraient les Chrétiens et les Juifs avec le Hamas ?

Le Hamas soutient-il la dhimmitude des autres religions ? Nous rappelons ici que le mot « dhimmitude » définit l’ensemble des relations entre d’une part l’Oumma, la communauté islamique, et d’autre part le Peuple du Livre (la Bible), c’est-à-dire les indigènes juifs et chrétiens (ahl al-kittab). C’est ainsi que tant que les Juifs et les Chrétiens se soumettront à la loi islamique – c’est-à-dire accepteront l’état de dhimmitude – l’État musulman théoriquement protégera leur vie et leurs biens. Justement, dans son article Trente et unième, le Hamas affirme : « A l’ombre de l’islam, les disciples des trois religions, islamique, chrétienne et juive, peuvent coexister dans la sécurité et la confiance. Ce n’est qu’à l’ombre de l’islam que la sécurité et la confiance peuvent se trouver, l’histoire récente et ancienne en constituant un bon témoin. »

Examinons ce qu’il en est dans la bande de Gaza. Hazem Abu Shanab, un membre du Conseil révolutionnaire, organe de contrôle du Comité central du Fatah, ancien ambassadeur de l’Autorité nationale palestinienne au Pakistan, avait confirmé à Mideast Christian News (25 novembre 2013) ce qu’il en est du sort dramatique des Chrétiens dans la bande de Gaza.

Selon lui, le Hamas impose un islam rigoureux, réprime les Chrétiens, limite leur liberté de culte et s’efforce de les convertir à la religion musulmane. Dans cet entretien, Hazem Abu Shanab rappelle les attaques contre les églises et lieux de culte chrétiens et l’imposition aux chrétiens depuis 2013 de manuels scolaires qui ont été rédigés pour promouvoir l’idéologie du Hamas et des Frères Musulmans.

Et l’antisémitisme ?

Au-delà de l’hostilité à Israël, la charte exprime une forte hostilité aux Juifs, le mouvement palestinien Hamas est fondamentalement antisémite. Les sionistes sont partout : derrière l’ONU, la Franc-Maçonnerie, la révolution de 1789 et celle de 1917, et même derrière le Lion’s Club et le Rotary. La Charte se réfère sans l’ombre d’une hésitation au Protocole des sages de Sion, le célèbre opuscule antisémite russe datant de 1903.

Qu’impose le Hamas à Gaza ?

Examinons la situation et prenons quelques exemples caractéristiques.

1. Le mouvement islamiste palestinien Hamas, au pouvoir à Gaza, est accusé de violations systématiques des droits de l’Homme à grande échelle, y compris de torture et de procès inéquitables.

2. Son système pénal se caractérise par l’injustice, il viole systématiquement les droits des détenus et accorde l’impunité à des services de sécurité abusifs.

3. Des jeunes ont été régulièrement arrêtés par la police, parfois battus et ils ont eu par exemple le crâne rasé de force, car ils arborent des coupes de cheveux jugées « indécentes ».

4. Des garçons portant des jeans taille basse ont également été visés (RFI, 26 avril 2013).

5. Le Hamas s’occupe également des femmes. Si aucune loi n’est émise, le mouvement islamiste encourage le port du voile. Les Palestiniennes se voient interdire de fumer la chicha en public, de monter à l’arrière de motos ou encore de se faire coiffer par des hommes…

6. L’organisation islamiste a expurgé les manuels scolaires des valeurs « contraires à la religion musulmane » : le Hamas s’oppose à l’enseignement des droits de l’Homme et au fait que ces manuels reproduisent la Déclaration universelle des droits de l’homme. Car, selon l’organisation islamiste, ces manuels sont « totalement étrangers à la réalité de l’élève arabo-islamique palestinien », (Shaffaf, 18 février 2014).

7. C’est ainsi que règne une « famine culturelle » à Gaza, déplore dans un entretien, le professeur de littérature anglaise Sahar El-Mougy : « Il n’y a même pas de cinémas, de bibliothèques, de librairies proposant des livres sur les arts, la philosophie ou la littérature. Les seuls livres disponibles sont ceux traitant de la charia islamique (jurisprudence islamique) et du Fiqh (pensée islamique). »

8. Le Hamas impose sa loi, il fait régner la terreur, liquide ou torture les opposants politiques et se sert de la population civile comme bouclier humain. Il prend ainsi en otage des centaines de milliers de gazaouis. 

9. De fait, le Hamas fait autant de mal aux Israéliens qu’il en fait aux Palestiniens, qui vivent dans la bande de Gaza.

Les guerres israélo-palestiniennes sont une tragédie et personne ne peut ou ne doit se réjouir d’un conflit aussi dur, avec son cortège de morts et de blessés.

Cependant, ce n’est pas avec le Hamas que la paix adviendra, parce que dans son ADN, il y a le refus de reconnaître Israël, l’opposition aux traités de paix, le recours systématique au terrorisme et le Hamas ne reconnaît que l’Islam, sa seule et unique matrice. Mahmoud al-Zahhar (28 octobre 2011), un des fondateurs du Hamas l’avait d’ailleurs déclaré : « La nation arabe a commencé à récolter les fruits d’un chaud printemps arabe. Hier, les islamistes l’ont emporté en Tunisie. Demain, ils triompheront en Égypte, puis en Libye et ce, jusqu’à ce que l’islam, qui règne en conformité avec les règles du Coran, prévale sur la planète entière. »


Marc Knobel est historien, il a publié en 2012, L’Internet de la haine (Berg International, 184 pages). Il publie chez Hermann en 2021, Cyberhaine. Propagande, antisémitisme sur Internet.


[1] Le Hamas est sur la liste officielle des organisations terroristes de l’Union européenne (dès 2001), du Canada et des États-Unis. Il est classé « terroriste » par Israël, l’Égypte, le Japon, le Paraguay également.

Un commentaire

  1. L’infanterie US, française (à présent que l’armée quitte l’Afrique), etc. pour aider une opération au sol à Gaza ? Ce serait bien pour réparer les actes et omissions du 20ème siècle. Pierre Weinstadt, Paris