Éric Naulleau, qui vient de publier « La faute à Rousseau », un livre où il multiplie les attaques au vitriol contre la députée EELV Sandrine Rousseau, a été évincé du Festival du film de Cabourg où il devait être membre du Jury pour avoir accordé une interview à Valeurs actuelles à propos de son livre. Une censure regrettable, dénoncée haut et fort par Naulleau, mais qui ne doit pas nous empêcher de parler de la face cachée de ce personnage.

Celui qui a longtemps affirmé son engagement à gauche, et même à la gauche de la gauche, est passé depuis longtemps sur l’autre rive. Celle de la droite de la droite. Du côté de chez Éric Zemmour. Chacun le sait.

Ce que l’on sait moins, que l’on a tendance à oublier ou que l’on voudrait, dans certains cas, sciemment occulter, c’est que Naulleau a été co-signataire d’un livre avec le gourou antisémite Alain Soral,condamné à de multiples reprises pour incitation à la haine raciale et antisémitisme.

Dans « Dialogues désaccordés », un livre de dialogue publié en 2013 et dédié « à Dieudonné M’Bala M’Bala pour soncourage et sa lucidité », les deux hommes faisaient alors, à quatre mains, une belle promotion des idées racistes et « nationales-socialistes » de Soral. Dans ce livre, Naulleau ne trouvait pas grand-chose à redire à la prose antisémite et homophobe de son complice. Il était même son faire-valoir.

Quand Soral, dans ce livre, divague sur l’homosexualité, en parlant de « lien entre homosexualité et pédophilie », quand il ajoute « tu devrais en parler à Pierre Bergé ou à Jack Lang » (page 41) et quand il laisse donc entendre qu’ils seraient tous deux à la fois homosexuels et pédophiles, Naulleau se contente d’ironiser : « Verserais-tu dans la mollesse, serais-tu tenté par la tiédeur de l’âge venant ? Pas une fois dans ta réponse, tu n’établis de lien entre homosexualité et zoophilie. »

Quand Soral délire sur le « parcours intime de Mme Rosenberg (le nom pas très catholique de Madame Sinclair) » (page 27), quand il dit que « ce qui pose problème […], c’est la prétention de la dame et de sa tribu à représenter la gauche ! […] Cette gauche juive qui est en fait la droite économico-politique qui parachève sa prise de pouvoir sur la France chrétienne en achevant de marginaliser la droite catholique traditionnelle », Naulleau minimise : « Remarquable fréquence du mot “juif” dans ta bouche, ce qui n’est pas pour m’étonner. » (page 31).

Et encore pire : quand Soral revendique son « révisionnisme », sa négation de la Shoah, Naulleau en jubilerait presque : « Que l’extermination des Juifs ait été parfois instrumentalisée à des fins politiques et géopolitiques, la question ne fait plus de doute depuis longtemps. Que soit apparus un “Shoah-business” et dans son sillage, nature humaine oblige, quelques escrocs par l’odeur alléchés, qui songerait à le nier ? […] Mais […] pourquoi nier le calvaire de tant d’hommes, de femmes et d’enfants ? » (pages 138, 139).

Quand Soral parle du « peuple allemand martyrisé », comme « victime oubliée de la Seconde Guerre mondiale masquée par la surexposition de la souffrance juive », Naulleau acquiesce en parlant des « souffrances occultées du peuple allemand ». Il ose même regretter « l’avènement du règne victimaire » et « le risque de mythologisation » de la Shoah avant de conclure : « Il suffit à présent de subir un préjudice pour obtenir un quart d’heure de gloire, et dans la mesure où le déporté juif apparaît désormais comme la victime entre toutes, la Seconde Guerre mondiale finit parfois par se résumer à la solution finale. »

À peu de choses près, on est chez Jean-Marie Le Pen et son mot tristement fameux sur le « point de détail de l’Histoire ».

Comme quoi les leçons de morale, de démocratie, de journalisme et d’Histoire d’Éric Naulleau sont à prendre avec de grandes précautions.


Par Frédéric Haziza, chef du service politique de Radio J.

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