Quand le Rap, l’écriture acrobatique s’inventant et se réinventant selon les lieux de son effervescence, quitte la bonne fréquence, déserte la puissance solaire de l’imaginaire, bifurque loin de sa raison d’émergence, emprunte les voies de la joute ténébreuse, perd l’éclat de sa poésie, sombre dans l’obscurité comme on sombre dans la bouteille, débite des insanités comme on dit des amabilités ;

quand le Rap, l’atmosphère sans feeling ni soul, les vibrations syncopées de négativité, le dos tourné à la non-violence du Hip associé au Hop, ne rend plus la lumière, perd son chemin, n’aligne plus la rime en percussions disant quelque chose au monde, mais heurte les tympans, mais offense à tout va, mais porte la violence en chemin qui ne mène nulle part ;

quand le Rap, ni de la chaleur du soleil, ni de la douceur de la lune, perd son sillon, son scratche et sa verve, tourne mal, se fait bad hardcore sans tonalité ni bémol, la tchatche sans esthétique, ni poétique, citant non plus les rêves de King en marche vers DC pour l’égalité mais citant et récitant Farakkkan à profusion ;

quand le Rap, l’agitation caverneuse surchargée de liaisons sulfureuses, se perd dans l’obscurité aspirant à la notoriété de l’imbécillité, la déclamation étalant sur le net la bêtise comme une bonne affaire ;

quand le Rap n’est plus ni rythmes liaison de toutes les couleurs, tourbillons hors-norme déroulant les choses de tous les jours, l’esprit au large ; ni appels inexplorés de quartiers décalés et recalés, aspirant à l’évasion, loin des ascenseurs sans issue et des casiers judiciaires ;

quand le Rap, le tempo sans inspiration de hauteur, le flow sans musicalité, n’est plus ni kind of blue, ni boogie woogie, élixir d’émancipation qui porte haut les désirs et les angoisses du béton et du bitume branchés sur les écrans périphériques embourbés dans la brume de la précarité ;

quand le Rap n’est plus de la lignée ni de Bambatta, ni de Miles, ni de James remixés version Boogie Down Productions, ni de Nova ni de Skyrock, visages arc-en-ciel, le groove hypnotique non-stop, chef d’œuvres dévastateurs, la chute de tension, félicité, constellations fécondes célébrant le temps vécu et le temps à vivre ;

quand le Rap, les fenêtres fermées, le soleil englouti, le son de glace, vide d’émotion, n’accorde plus à la surface des saisons des notes déchirant les couvre-feux, mais sautille jouant les gangsta, mais s’exhibe les biceps bombés de bribes d’histoires congelées de poussières sans étoiles prêchant la haine en délivrance ;

quand le Rap se boursoufle de verbe sans respiration, n’a plus d’âme, braille l’esprit crevé, l’obscurité dans la gorge, la carcasse tel le Hatecore, le crâne rasé, l’allure identitaire, gigote la mimique agitée, comme ceux qui parlent le bras droit et la main tendus, il nous rappelle, la peste en torche haut hissée, que le fascisme n’est dans la couleur de la peau ni Noir ni Blanc mais d’œuvre brune.