Parfois, les faits sont simples.
Il suffit alors pour les comprendre, si l’on n’a pas la « pensée de derrière » dont parle Pascal, d’un peu de bon sens.
Aujourd’hui, en Israël, on tue des Juifs. On tue les Juifs, on hait les Juifs, on les hait et on les tue parce qu’ils sont juifs, un point, c’est tout.
Le Palestinien qui brandit le couteau à l’appel de son imam pour poignarder un Israélien dans la foule, le fait parce que l’Israélien est juif. Il n’y a pas d’autre raison, ou plutôt si, il y en a une : il est juif et vit librement sur cette terre qu’il appelle « Israël » et que l’autre appelle « Palestine ». Peut-être n’aurait-il ni coup de couteau, ni coup de feu, ni bombe, ni crachat s’il vivait là en dhimmi, s’il rasait les murs, Juif misérable qu’on humilie ou Juif de cour qui se verra spolié le moment venu. On n’a pas tant haï les oppresseurs ottomans, les califes, les beys, on ne hait pas tant aujourd’hui, si seulement on les hait, les riches Arabes du Golfe qui possèdent assez pour acheter la France, couper les mains de leurs domestiques sans en être inquiétés, et se rebâtir Babel, mais pas assez, disent-ils, pour faire justice à leurs frères. Et les gentils Occidentaux, ceux qui se sentent coupables, ceux qui prennent les Arabes pour des enfants ou des idiots mais maquillent leur condescendance en anticolonialisme, leur amour de la justice semble s’arrêter là. Quand le « Blanc » exploite (les prétendus « Indigènes de la République » seraient-ils disciples de Morano ?), il est justifié de l’attaquer, de lui faire violence, de le tuer pourquoi pas ; les massacres de prêtres à la Révolution française sont justifiés ; les filles du Tsar n’ont eu que ce qu’elles méritaient… Mais on ne touche ni aux tartuffes de l’Islam, ni à ses princes, ni à ses ploutocrates, ni à ses négriers, ni à ceux qui, justement fidèles à une longue histoire et à leur propre présent, appellent les Noirs des « kahlouch » (nègres) ou des « ‘abid » (esclaves), ni à ses assassins, fussent-ils poussés par une haine ancestrale, fanatique, médiévale.
Les Juifs sont les maîtres en Israël ? C’est vrai. La colonisation corrompt les âmes des uns et des autres ? C’est vrai. J’ajoute qu’elle correspond peut-être à la vision que certains ont du judaïsme, mais qu’elle est à mes yeux et à ceux de beaucoup des miens, contraire à son esprit même. Néanmoins, il reste que face au couteau du zélote, il n’y a plus ni maître ni serf, qu’une femme sans défense reste une femme sans défense, qu’un enfant n’est pas coupable de ce que font ou ne font pas ses parents.
Et surtout que le Juif, pour le Hamas, ne sera libre de vivre que lorsqu’il aura renoncé à sa terre. Et lorsqu’il aura baisé les pieds de son maître musulman en prime. Soumis ! On hait le Juif, c’est la règle. L’Europe n’est pas en reste, elle dont la chrétienne charité s’arrêta naguère aux bébés juifs, à mes cousins exterminés. Je suis sûr que les massacreurs de mes ancêtres invoquèrent toujours leur propre situation de « subalternes » pour se justifier à euxmêmes leurs exactions. Que de bonnes âmes les amnistiaient car ils étaient fils du Christ, et pauvres, et stupides (« Heureux les pauvres en esprit… ») quand les Juifs avaient de toutes les manières tort de vouloir rester entre eux, d’aimer les biens de la terre, de ne pas croire au Messie fils de Dieu. Les descendants les plus modérés de ces fanatiques franciscains, dominicains ou autres du Moyen Âge chrétien invoquent aujourd’hui la Ligne verte et justifient toute agression de Juif qui aurait lieu au-delà de cette « ligne » ; les plus ardents comprennent jusqu’aux meurtres de Jérusalem. Ils sont « de gauche ». Ils ont parfois manifesté pour Charlie Hebdo mais le massacre des enfants juifs de Toulouse les avait laissés de marbre et ils ne seraient pas descendus pour les victimes du seul Hypercacher. Je parle des massacres de Jérusalem mais je connais des salauds qui admettent que l’Etat d’Israël étant l’Etat des Juifs et la plupart des Juifs étant sionistes, il est naturel que tout Juif, à Paris comme à Tel Aviv, soit une cible. Un jeune Tunisien qui achète du vin kasher pour son Shabbat (cultivé en Israël ?? derrière la Ligne verte ??) ne mérite pas meilleur sort qu’un Israélien. Pour moi, je vomis ces indifférents : leur amour de la justice est un amour malade. Je vomis leur méchanceté et leur bêtise.
La ligne verte n’est pas ici en question. Boycotter les produits venus de Cisjordanie mais pas ceux de Tel Aviv n’avancerait à rien : savoir ce qui, de la terre historique d’Israël et de Palestine – c’est la même – revient à l’Etat juif en toute légitimité, et ce qui revient aux Palestiniens, relève de la négociation politique et non d’une vérité éternelle, personne d’autre que les deux parties n’ont à en juger ; et pour les barbares du Hamas, le Juif qui vit la tête haute à Jaffa, à Haïfa ou à Jérusalem est le même que son frère d’Hébron, le bébé d’Hébron lui-même est pire que Meir Kahane, tous méritent également la mort. « Ils aimeraient vous voir mécréants, comme ils ont mécru : alors vous seriez tous égaux ! Ne prenez donc pas d’alliés parmi eux, jusqu’à ce qu’ils émigrent dans le sentier d’Allah. Mais s’ils tournent le dos, saisissez-les alors, et tuez-les où que vous les trouviez ; et ne prenez parmi eux ni allié ni secoureur… » (Coran, IV, 89) Le Juif est un singe, un porc, rien n’est pire qu’un Juif, ou plutôt rien n’égale la haine de la religion fille pour la religion mère. Comment pardonner aux Juifs d’avoir écrit la Bible avant que le Coran n’existât ? Comment aujourd’hui leur pardonner d’avoir un Etat moderne et démocratique quand le monde musulman n’y est jamais parvenu ? Comment pardonner la résurrection d’un peuple que la vie effaçait de son livre ? Comment pardonner aux femmes de Tel Aviv de ne pas craindre leurs hommes, aux enfants juifs de parler la langue que parlaient leurs ancêtres avant l’Exil, là même où ils vivaient, sans que cela soit pour eux une question ?
Il y a du racisme en Israël, il y a, je l’ai écrit, un terrorisme juif qu’il faut combattre avec la dernière sévérité. Mais est-ce ce racisme qu’affronte le poignard de l’assassin ? N’est-ce pas plutôt le désir qu’avaient tant d’Israéliens de continuer ensemble, de vivre ensemble, de construire la paix avec leurs voisins, leurs frères arabes ? Le terroriste arabe tue les Juifs et leur confiance. Il tue l’amitié, il tue ses propres frères. Lorsque j’irai au marché de Mahane Yehuda à Jérusalem, où j’aimais voir se côtoyer femmes arabes et hassidim parlant yiddish, où j’ai vu le soir danser côte à côte des jeunes Israéliens juifs et arabes, religieux et laïques, que je m’y achèterai comme n’importe quel homme, un homme comme vous, de quoi me faire mon repas du soir, ne craindrai-je pas que l’honnête Palestinien qui me fera face, dont l’oppression scandalise mon humanité et mon judaïsme (mais j’ai le droit, moi aussi, les Juifs ont le droit de vivre sur leur terre : personne ici n’a entièrement raison…), ne craindrai-je pas qu’il me haïsse et veuille me supprimer ?
Les réponses ? Elles ne sont pas simples. Pas de pitié pour le terrorisme, mais détruire leurs maisons ? Qu’on le fasse aussi aux terroristes juifs, ou qu’on ne le fasse pas du tout. La sécurité coûte que coûte… mais la société de surveillance ? La victoire ne serait que temporaire, nous y perdrions nos âmes et notre liberté. Négocier, quitter les territoires ? Mais il faut un partenaire pour négocier, et même si la vie vaut plus que la terre, on ne se débarrassera pas comme ça du Mont des Oliviers ou du Tombeau de Rachel : les Juifs aussi ont droit à leur mémoire et à leurs racines. Et s’ils font des sacrifices, que ces sacrifices soient suivis d’une paix sûre, ce qui n’a jamais été le cas jusqu’à présent. Gaza fut rendue, les bombes ont continué depuis de s’abattre sur Israël.
Je songe à une réponse, mais ce n’est pas la mienne. Je n’aurais peut-être pas eu cette grandeur d’âme, fussé-je dans la situation, Dieu préserve, de l’avoir. C’était il y a quelques années à Paris. Mon père avait organisé avec ses collègues journalistes la venue de jeunes Israéliens victimes de l’attentat du Dolphinarium en 2001 à Tel Aviv. Des jeunes gens, des jeunes filles, des Juifs qui, ce jour-là, avaient eu le malheur de danser, de rire et de s’aimer. Vingt-et-un Israéliens avaient été tués, plus de cent avaient été blessés, la plupart atrocement. Des filles, des garçons qui avaient à peu près l’âge que j’ai maintenant étaient mutilés, défigurés. Or, des drapeaux de la Ligue de Défense Juive s’étaient mêlés à la manifestation parisienne, les cris de « Kahane Tzadik » avaient retenti. Et c’est une fille de vingt ans, en chaise roulante, qui demanda à mon père de les faire taire, de les faire partir.
Quand le terrorisme juif a frappé, nous ne nous sommes pas réjouis, nous nous sommes affligés, nous n’avons pas tiré en l’air comme des dégénérés ; maintenant que le terrorisme frappe à nouveau les Juifs, tâchons de n’avoir ni peur ni haine, croyons au moins que c’est là chose possible.
Ce constat, établi par le politologue Dror Even-Sapir, aurait tendance à rassurer ceux qui expliqueraient par l’abandon du processus de paix la cause de la hausse actuelle du volume de sang. S’ils ont raison de penser que, dans l’esprit des panarabes, la sanctuarisation des lieux saints de l’islam passe avant la création d’un État palestinien, ils auraient tort de se contenter de répondre à ces seules attentes lorsque la seule explication du manque d’empressement que manifeste le méta-empire pour la reprise des négociations israélo-palestiniennes, c’est son opposition ferme et catégorique à une Pax Islamica qui comprendrait le paramètre sioniste. Nous savons que la paix au Moyen-Orient n’a aucune chance d’aboutir tant que les trois religions monothéistes n’ont pas admis réciproquement leur réalité plurielle. C’est pourquoi nous (= tous ceux qui, comme moi, pourchassent avec acharnement les saboteurs de la vraie paix) n’avons pas d’autre choix que celui de convaincre, avant tout autre quartier de globe, la totalité des nations arabes d’inscrire, une fois pour toutes, en tête de leurs priorités, l’indépendance de la Palestine. Le peuple palestinien n’existera pas aussi longtemps qu’il ne s’appartiendra pas.
Dernière chute dans les couloirs de l’Histoire. Bibi prétendrait que le programme nazi se limitait à l’expulsion des Juifs hors du Troisième Reich avant que le SS-Grossmufti ne décidât d’y mettre son grain de fiel. Sauf que les frontières de l’empire hitlérien étaient, une fois achevée sa conquête planétaire, conçues pour disparaître. Soit. Et en même temps, la conférence de Wannsee se tiendra en janvier 1942, tandis que la fameuse rencontre entre Hitler et Husseini avait eu lieu en novembre 1941, entrevue au cours de laquelle Tintin Degrelle souligne que le premier avait été séduit par les yeux clairs du second. À ce propos, ne perdons pas de vue que l’extermination des Juifs est l’autre face de l’édification de la race pure, lequel projet précéda, pour le coup, le rendez-vous décroché par le tagueur nazi du Mur occidental; le premier Lebensborn ouvrira ses portes à Steinhöring en trente-six, le jour de l’Assomption, selon un programme eugéniste conçu neuf mois plus tôt sous l’égide de Himmler. Ce qui, reconnaissons-le, n’aurait pas empêché le Grand Mufti de s’inquiéter des conséquences d’une évacuation des Juifs causant inévitablement leur fuite, et concomitamment, leur retour vers la Terre promise de la Bible, cette Paleastina (latin) qu’il espérait voir Hitler lui restituer après qu’il en aurait chassé l’ennemi britannique. D’autant que le Führer, grand amateur du Feu mazdéen devant l’Éternel, n’allait pas le briefer sur le sort qu’il réservait à une population qu’il faudrait maintenir dans l’ignorance de sa destination finale jusqu’aux portes des chambres à gaz. Nous pouvons donc imaginer sa réaction — pour peu, bien entendu, que l’histoire de Netanyahou possède un double accent de vérité par-delà son raccourci allégorique — lorsque l’ancien sujet de l’empire ottoman préconisa pour le peuple d’Israël la même méthode employée par son propre sultan, un quart de siècle plus tôt, à l’encontre du peuple arménien.
Un retardataire vient de restituer à la bibliothèque de l’Université de Portland un exemplaire de Basic Principles of Speech et un autre de Preface to Critical Reading, livres qu’il avait empruntés en 1963… il y a cinquante-deux ans. Nous attendons toujours que Mahomet ramène son rouleau de Tora. Il pourrait prendre exemple sur Jérôme de Stridon!
— On dit «rapporte», bougre d’âne. Pas «ramène»…
— Non, non. Je maintiens.
And one éviter à tout prix d’internationaliser le conflit And two sauf que le conflit a toujours été international And three faire ce qu’il faut afin qu’il ne le soit plus And four absolument tout ce que je dis va dans ce sens And then arrêter de tanner Israël en le tenant pour responsable d’une guerre qui dépasse de très loin son périmètre géostratégique
l´auteur dans ce texte surréaliste dénie le droit et le devoir de résistance au peuple palestinien.
Le droit et le devoir de tuer des juifs civils quand ils attendent l’autobus et vaquent à leur occupation. Bravo.
« Parfois, les faits sont simples » ? Malheureusement, les choses sont loin d’être si simple dans le conflit israélo-palestinien. Beaucoup d’actes tragiques sont commis des deux côtés…
Pouvez-vous envisager le fait que les Palestiniens haïssent les Israéliens parce qu’ils sont israéliens, et non pas juifs ? En raison de leur politique de colonisation et d’humiliation, et non en raison de leur religion ? On est en train de faire de ces affrontements une guerre de religion, alors qu’ils résultent de décisions (ou de manque de décisions) avant tout politiques. Il ne faut pas l’oublier.
Qui vous parle de religion ici? Avez-vous au moins lu le papier?
Puis j’aimerais savoir comment faites-vous la distinction entre israéliens et juifs? Ca m’intéresse!!!
Aussi, si je vous comprends bien Marion, on aurait le droit de tuer des israéliens, du moment où on les tue non pas parce qu’ils sont juifs mais parce qu’ils habitent en israël?
Vous êtes inquiétante…
Cette phrase de l’auteur de l’article semble avoir été écrite pour vous, Marion :
« Leur amour de la justice est un amour malade. »
@Samuel. Comment ne faites vous pas la différence entre un israélien et un juif vous même ?? 20% de la population israélienne est de confession musulmane, ( à 10% chrétienne !! cela vous avait échappé ?
Toutefois, dans les prêches contre Israël dans les territoires palestiniens, on ne parle jamais d’Israël, mais de « Juifs » , notamment quand il s’agit d’inciter à les tuer …
Il se trouve que les attentats ne visent pas les israéliens arabes mais les israéliens juifs.
Ce type de terrorisme nouveau à l’arme blanche est à l’avant-garde de la peur généralisée que certains veulent instaurer.
Plus besoin de bombes sophistiquée, d’armes difficiles à obtenir et à manier. N’importe qui devient un terroriste potentiel. Les couteaux sont en vente partout. Et nous savons tous nous en servir.
Tristes temps pour la démocratie.
surréaliste !
Ah… JAC! Toujours vous.
L’argumentation n’est pas votre fort, n’est-ce pas?
Qu’est-ce qu’il y a de « Surréaliste » dans ce papier?
C’est, au contraire le plus mesuré, le plus profond que j’ai pu lire jusqu’à présent sur la triste actualité israélienne et la vision de la situation par les Français…