Décidément, Nicolas Sarkozy fait tout à l’envers. L’élection présidentielle obéit à une règle immuable qu’il doit forcément connaître pour avoir appliqué exactement l’inverse: on rassemble sa famille au premier tour avant d’élargir sa base électorale au second.

Nicolas Sarkozy avait en effet lancé sa campagne en se présentant comme un président protecteur, un capitaine qui avait tenu bon par gros temps ayant affronté «la plus grave crise de tous les temps», un homme expérimenté qui avait en plus appris de ses erreurs. Il fallait vraiment tendre l’oreille pour deviner que ce personnage humble et assagi ait pu un jour se revendiquer d’une droite volontaire et décomplexée.

Plus amusant s’agissant d’un homme d’ordinaire si agité, jadis hyper président, il promettait  désormais de s’en remettre au peuple par voie de référendum à chaque fois qu’il y aurait un blocage. Quel désaveu il s’infligeait à lui-même, quelle condamnation de son propre style de gouvernance,  lui qui n’aimait rien tant que se mêler de l’heure de diffusion des matchs de football ou de la programmation des chaînes de télévision publique  et,  finalement, quelle trahison de l’esprit des institutions de la cinquième république !

Las. Le résultat du premier tour du scrutin et la percée de Marine Le Pen auront eu raison de ces résolutions qui n’auront même pas passé le printemps.

Le 22 avril dernier, au soir du plus haut score de l’extrême droite dans notre pays, les premières paroles de Sarkozy iront directement fustiger l’immigration. La suite sera à l’avenant. Engrenant un à un les thèmes chers au Front National tout en se défendant d’accord électoral avec ce dernier, tout se passe comme s’il avait voulu capter la clientèle sans racheter le fond de commerce du parti frontiste.

Mais plutôt que de rassembler, il s’est mis à diviser. Le discours de Nicolas Sarkozy visant à opposer le « vrai » travail au « faux » travail, actifs et « assistés », nationaux et étrangers, fonctionnaires et salariés.

Assurément, il s’agit autant d’une faute que d’une monumentale erreur de jugement,  car sa conquête effrénée d’un cinquième du corps électoral l’a fortement fragilisé sur les quatre cinquièmes restants. Il est en effet loin d’être acquis qu’il se soit rallié des électeurs notamment chez les supporters de François Bayrou ou les gaullistes de cœur en segmentant à ce point ses prises de position et en prenant pour cible, à chaque intervention, une nouvelle catégorie de la population.

Surtout, en inversant la logique de la campagne présidentielle, il a également inversé sa position avec celle de François Hollande. Exit le « président candidat », place au « candidat sortant », surnom dont l’a affublé son adversaire. Cette évolution a ipso facto rendu dérisoire tout questionnement sur la stature ou l’inexpérience supposée des affaires de l’État du candidat socialiste.

La cristallisation de cette inversion a pu être observée lors du débat télévisé de l’entre-deux tours.  Dans le match qui l’opposait à un bateleur hors norme, François Hollande a d’abord tenu sans rompre, avant de prendre de la hauteur sur la fiscalité, l’éducation ou la justice.

François Hollande, pourtant candidat de l’opposition, a martelé à quinze reprises face à un Nicolas Sarkozy interdit et pourtant président en titre: « moi président, je ferai… ». Plusieurs millions de spectateurs, ont eu la sensation qu’il se jouait à cet instant précis, dans cette passe télévisuelle, davantage qu’un simple échange, un véritable déplacement de la fonction présidentielle. Nicolas Sarkozy, pour sa part, avait tellement surestimé cet événement cathodique comme ressort de l’élection et de sa possible victoire, qu’il a sans doute creusé l’écart qu’il pensait combler. Finalement, tout porte à croire, que d’avoir fait le pari de l’aventure, il ait pris le parti de la défaite.

 

2 Commentaires

  1. Yes, good point. That make Sarkozy look bad. But Hollande’s constant inuonrtptiers – even in the closings – made him look bad as well, as though he didn’t want to let his opponent say what he had to say out of fear of him saying something that would damage him.My feeling overall was that Hollande interrupted and dragged things on and on so they would talk about as few topics as possible.

  2. La figure de l’inversion bien entendu ! mais surtout l’aveuglement . Comment est il possible, de signaler l’intervention d’axel khan à propos de son meeting vu comme un meeting de rock star au trocadéro ? Comment est il pensable, quand on est un homme politique formé et aguerri, de faire savoir à 17 millions de personnes qu’il avait été comparé à Nuremberg (dixit Axel Khan) ? comment faire connaitre cette image associée à sa personne alors que, certainement, seulemnt (et encore) 1% d’entre eux étaient informés de cette nouvelle ?

    Figure de l’inversion, story telling à l’envers, oui mais figure du pendu dans les tarots de Marseille peut être .Aussi .
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