Après l’acquittement de l’hebdomadaire satirique en 2008 dans l’affaire dite des caricatures de Mohamed, on aurait pu s’attendre à des représailles de la part de quelques extrémistes, il n’en fut rien. On croyait l’affaire tassée, il n’en est rien. 
Durant la nuit du 1er au 2 novembre, on apprenait que les locaux de Charlie Hebdo venaient d’être la cible d’un incendie criminel provoqué par le jet d’un cocktail molotov. Le site du journal, aurait été, en outre piraté, sa page d’accueil remplacée par une image de la Mecque et des versets du Coran.
Cette action criminelle intervient alors que le journal avait annoncé un numéro spécial cette semaine rebaptisé “Charia hebdo”, dans lequel Mahomet était promu “rédacteur en chef”.

L’incendie déclenché vers 1heure du matin a rapidement été maîtrisé, occasionnant néanmoins des dégâts informatiques importants. Par chance, il n’aurait pas fait de blessés.

«Quelqu’un a balancé un cocktail molotov sur le journal, ça s’est embrasé et on n’a plus de journal, a expliqué Charb le rédacteur en chef de Charlie Hebdo, précisant que les locaux eux-mêmes ont peu souffert. En revanche, «tout le matériel qui nous sert à faire le journal a été détruit ou a fondu. On ne peut pas, au jour d’aujourd’hui, faire un journal. Il va falloir que l’on trouve dans l’urgence des locaux et du matériel pour sortir la semaine prochaine».

«Quoi qu’il arrive, on sortira… Il n’est pas question de renoncer». Charb confirme que le numéro «Charia hebdo» sortira bien et précise : «La police m’a signalé que, d’après un témoignage qu’on leur a fait, on a vu deux individus partir des locaux peu de temps après le déclenchement de l’incendie. L’incendie a été provoqué par, visiblement, un cocktail Molotov qui a été balancé par une vitre brisée.»

Selon le directeur de la rédaction, le lien entre l’incendie criminel et la sortie du numéro spécial prévu cette semaine ne fait aucun doute : «On avait reçu des menaces après l’annonce de la sortie du journal mais personne n’a vu ce journal. Les incendiaires n’ont pas lu ce journal, personne ne sait ce qu’il y a dans ce journal, à part ceux qui l’achèteront ce matin. Les gens ont réagi violemment sur un journal dont ils ignorent totalement le contenu, c’est cela qui est le plus aberrant et le plus débile.»

Ajoutant : «Si des Musulmans, ou n’importe qui, trouvent quelque chose à redire au contenu de Charlie Hebdo, qu’ils portent plainte.»

Patrick Pelloux, éditorialiste à Charlie Hebdo et également à la RDJ, nous a confié ce midi ses premières impressions : « Il faut tout de même se dire que c’est la première fois qu’on brûle un journal en France, ce n’est pas rien. Sur place, tout est détruit, il y a un tiers du journal qui est parti en fumée et les deux autres tiers qui sont inutilisables. Tout a pris feu, il y a de la suie partout. Il y a une tonne de flotte, donc tout est trempé, c’est épouvantable. Des menaces, oui, il y en a eu il y a quelques temps parce que la rédaction a voulu relancer l’affaire des caricatures.
En attendant, s’il faut faire le journal sur le trottoir, on le fera, on ne s’arrêtera pas. Quand on touche un journal, on touche les journaux. Quand on agresse un journaliste, on agresse les journalistes, c’est comme ça. Quoi qu’il arrive, il faut rester debout.
Demain, nous organisons une conférence de rédaction commune, nous invitons tous les journalistes qu’il y a en France et ailleurs pour un débat avec les intellectuels, c’est très important. »

Du côté des politiques, le maire de Paris, Bertrand Delanoë a proposé son aide en milieu de matinée : «Si je peux aider Charlie Hebdo à retrouver des locaux pour pouvoir faire vivre son journal et sa liberté je le ferai», a proposé le maire de la capitale, tandis que le patron de la rédaction de Libération, Nicolas Demorand, invite la rédaction de Charlie Hebdo à s’installer à Libé.

Quant à Cécile Duflot et Christine Boutin, elles ont été les premières ce matin à condamner ces attaques contre l’hebdomadaire. Le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant a, pour sa part, appelé “tous les français à se sentir solidaires” de Charlie Hebdo.

On se doute et l’on espère que les choses n’en resteront pas là et que l’hebdomadaire se battra jusqu’au bout. Pour l’heure, Charb a annoncé qu’une conférence de rédaction se tiendrait jeudi à 15 heures au théâtre du Rond-Point (salle dirigé par Jean-Michel Ribes) située au bas des Champs-Elysées.

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photographies © AFP PHOTO / ALEXANDER KLEIN

5 Commentaires

  1. La liberté de presse est la base de la démocratie.
    Ne laissons pas faire!

  2. Bon courage !
    Vous avez la sympathie des millions de gens dans votre combat pour la liberté. Continuez votre action. Elle est nécessaire pour rationaliser peuples et gouvernements.

  3. – Tous les prétextes sont bons pour vendre du papier. Parions qu’après cet incendie, les ventes du Non-évènement du Mercredi (NEM) vont grimper en flèche.
    – Luze, dessinateur au NEM, peut se sentir fort, on se sent toujours fort lorqu’on aboie avec les chiens contre une minorité, et qu’on a le soutien du ministre raciste de l’intérieur, Guéant. Si c’était un préfet qui avait ordonné l’incendie, genre paillotes corses, alors oui, on pourrait se poser des questions quant à la liberté d’expression, mais les thèses islamophobes du NEM sont majoritaires au sein de la presse, alors un de plus ou de moins ne fera pas de différence
    – Le NEM n’est pas un bastion de la liberté d’expression, preuve en est le renvoi de Siné pour avoir osé caricaturer Jean Sarkozy, fils du prince.
    – On ne sait rien de qui ni de pourquoi, mais déjà les «usuals suspects» sont stigmatisés.
    – Les politiques français accusent la violence de cet incendie, qui n’a fait aucune victime, mais soutiennent la violence armée que l’armée française fait endurer au Tiers-Monde: Irak, Somalie, Afghanisan, Djibouti, Libye, Cote d’Ivoire et j’en passe. Cherchez l’erreur.
    – On attend toujours la même mobilisation quant à l’incendie criminel qui a détruit un squat occupé par des précaires et où il y a eu mort d’homme.

    Pauvre France. Lamentable.

  4. À la suite d’une énième condamnation ambivalente, – 1er temps : condamnation de l’attentat islamiste (ayant détruit le siège de Charlie Hebdo); 2ème temps : dénonciation des caricatures de Mahomet (justifiant auprès des fidèles un acte de représailles), – j’invoque l’esprit des esclaves de Kubrick arrachés à l’insurrection villageoise du Fuenteovejuna de Lope de Vega, qui après la défaite de Metaponte lorsque Spartacus se dénonça lui-même au général Crassus comme responsable de leur soulèvement, put voir ses compagnons enchaînés à la poussière se lever un à un après lui, en proclamant qu’ils étaient lui. Aujourd’hui, c’est-à-dire la veille de demain, c’est l’organe vital de notre liberté d’expression, porte-drapeau de notre indépendance d’esprit, qui fait l’objet d’une intimidation djihadiste. Une Presse esclave décidée à rompre ses chaînes rassemblerait tous les atomes constitutifs de son système nerveux qui se lèveraient l’un après l’autre en sorte que les représentants de tout culte, islamique ou autre, ne puissent en aucun cas se polariser sur Charia Hebdo plus que sur Allah Libé, Le Monde de Mahomet, Le Nouvel Islam Observateur, Le Point Oumma ou Le Coran Express et ainsi insinuer que si la réaction était disproportionnée, ceux qui la provoquèrent avaient dépassé les bornes et, somme toute, bien cherché les beignes. La religion doit faire la différence entre profanation et dérision. La dérision est une soupape capable de protéger contre la surpression le pape et l’antipape.
    Benedictus sit Carolus Hebdo.
    Jubilate.

    • P.-S. : Que ceux qui n’ont pas besoin de sous-titres ne s’offusquent pas si je tiens à préciser que mon usage du latin ne cherche pas à opposer les religions mais à établir un parallèle entre elles, de la même façon que «pape» ou «antipape» sont des mots choisis au titre de degrés hiérarchiques au sein d’une institution cultuelle et non pas en raison de leur appartenance au culte particulier dont ils surplombent l’organigramme. Enfin, substituer Carolus Hebdo à Deus dans le Jubilate Deo n’est pas une façon de sanctifier Charlie, sinon peut-être, de tremper dans le vin de messe la partie de son corps que consacrait au Tout-Puissant le professeur Choron.