Poussée des nationalismes en Europe et percée du Front national dans l’Hexagone, politique étrangère de la France dans un environnement profondément modifié par les révolutions du monde arabe, liberté d’entreprendre et plus largement d’agir : à un an de l’élection présidentielle, La Règle du jeu tente, par ce dossier, de préciser les enjeux qui lui paraissent déterminants pour l’avenir. Réunissant les contributions d’experts aux approches variées, elle se demande ici : « Comment la gauche peut-elle l’emporter en 2012 ? » Plus qu’un titre prometteur et au-delà de l’exigence qui sied toujours à la position de l’intellectuel engagé (« être fidèle à un ensemble politique et social, mais ne cesser de le contester »), cette interrogation charrie un ensemble de considérations qu’il convient de rappeler.
La première d’entre elles est triviale. Elle se résume à quelques mots : nous souhaitons que la gauche gagne. Qu’elle sorte victorieuse de l’agôn que constitue l’élection présidentielle. Pour cela, il lui faut sans doute formuler une vision d’ensemble cohérente. Les leaders de gauche commettraient une faute caractérisée en se contentant de concurrencer la droite sur le terrain de l’efficacité : Jean-Daniel Lévy, l’un des professionnels les plus habiles à prendre le pouls de l’opinion, nous dit pourquoi. Une élection ne se joue pas sur une capacité à défendre un projet intemporel, mais s’inscrit dans une période particulière et autour d’attentes émergentes, celles par exemple de « la moisson de la crise » et de « l’écolo-compatibilité » comme l’évoque Denis Muzet. Enfin, tout ne peut se résumer à un clivage gauche/droite, l’engagement récent de la France en faveur d’une Libye libérée de Kadhafi nous l’a rappelé ; Frédéric Encel, nous encourage à observer la sensibilité diplomatique du candidat désigné avec finesse et lucidité.
Pour répondre durablement à la question du « comment », il faut résolument répondre à celle du « pourquoi ». Vincent Peillon partage ici les motifs qui rendent indispensable une victoire de la gauche. Dans un registre analogue, Patrick Klugman démontre, à partir de l’exemple précis de l’étude des libertés publiques, que la victoire de la gauche est exigeante pour les attentes qu’elle suscite. Il faut s’opposer aux désabusés qui prétendent que politiques de gauche ou de droite ne sont plus si éloignées. Dans ce fatalisme réside l’une des principales raisons du divorce consommé entre la gauche et une partie de son électorat traditionnel : Philippe Breton, nous explique comment la gauche, en redonnant vigueur, et surtout vérité, à la parole politique, peut reconquérir ceux qu’il nomme les « sécessionnistes » ; Stéphane Distinguin pose, dans un témoignage aux allures de manifeste, les fondements d’un ambitieux renouvellement de l’entreprenariat de gauche ; Danielle Mitterrand offre un vibrant plaidoyer pour ce qu’elle nomme « une politique de l’espoir ».
Vous découvrirez également au fil de ce dossier une inquiétude partagée par l’ensemble des contributeurs, et qui reste à ce jour notre préoccupation politique majeure : la résurgence d’un discours populiste et xénophobe partout en Europe, qui se décline en France par une augmentation significative des intentions de vote en faveur du Front national. Dans ces périodes troubles où un continuum rhétorique s’installe entre droite et extrême droite, vouloir que la gauche gagne, c’est aussi prendre l’assurance que le FN n’accédera pas, totalement ou partiellement, aux commandes de notre exécutif national. C’est de cette tentation présente à l’échelle européenne dont nous parle Jean-Yves Camus. Dans une démarche sans complaisance, Dominique Sopo invite la gauche à déployer un discours antiraciste sans ambiguïté.
Dire comment la gauche peut l’emporter est enfin une manière en creux de prétendre savoir comment elle peut perdre. Le temps est à l’accalmie à l’intérieur du bateau socialiste et le vent semble pousser dans la bonne direction. Et pourtant. Nous savons que les démons de la gauche, la liberté rhétorique au détriment de la conquête du pouvoir national, la singularisation tactique au lieu de la stratégie collective ne sont jamais bien loin. En complément à ce dossier, nous vous proposons, sur le site www.laregledujeu.org, de regarder au- delà de l’échéance électorale immédiate et de réfléchir à la manière dont la gauche peut durablement s’imposer : Olivier Ferrand nous offre l’horizon du think tank et Raffaele Simone inscrit cette échéance dans une perspective européenne. Comment la gauche peut-elle l’emporter en 2012 ? Plus qu’un vœu, une ambition.
Comment la gauche peut-elle l’emporter en 2012 ?
par Raphaël Haddad
3 août 2011
Alors que la gauche se cherche un nouveau leader après la chute de son candidat favori, le dossier central du dernier numéro de La Règle du jeu est consacré à la question : « Comment la gauche peut-elle l’emporter en 2012 ?».
Ce dossier, coordonné par Raphaël Haddad, est constitué d’une série de réponses à un questionnaire adressé à quelques uns des acteurs majeurs de la scène intellectuelle et politique française. Parmi les réponses, celles de Vincent Peillon, Jean-Daniel Lévy, Danièle Mitterrand, Dominique Sopo, Michel Wieviorka, Olivier Ferrand ou Raffaele Simone…
La totalité de ce dossier sera publié en ligne au sein de ce blog.
Retrouvez donc ici, tous les lundis, les réponses de deux experts à la question que tous se posent : Comment la gauche peut-elle l’emporter en 2012 ?
Poussée des nationalismes en Europe et percée du Front national dans l’Hexagone, politique étrangère de la France dans un environnement profondément modifié par les révolutions du monde arabe, liberté d’entreprendre et plus largement d’agir : à un an de l’élection présidentielle, La Règle du jeu tente, par ce dossier, de préciser les enjeux qui lui paraissent déterminants pour l’avenir. Réunissant les contributions d’experts aux approches variées, elle se demande ici : « Comment la gauche peut-elle l’emporter en 2012 ? » Plus qu’un titre prometteur et au-delà de l’exigence qui sied toujours à la position de l’intellectuel engagé (« être fidèle à un ensemble politique et social, mais ne cesser de le contester »), cette interrogation charrie un ensemble de considérations qu’il convient de rappeler.
La première d’entre elles est triviale. Elle se résume à quelques mots : nous souhaitons que la gauche gagne. Qu’elle sorte victorieuse de l’agôn que constitue l’élection présidentielle. Pour cela, il lui faut sans doute formuler une vision d’ensemble cohérente. Les leaders de gauche commettraient une faute caractérisée en se contentant de concurrencer la droite sur le terrain de l’efficacité : Jean-Daniel Lévy, l’un des professionnels les plus habiles à prendre le pouls de l’opinion, nous dit pourquoi. Une élection ne se joue pas sur une capacité à défendre un projet intemporel, mais s’inscrit dans une période particulière et autour d’attentes émergentes, celles par exemple de « la moisson de la crise » et de « l’écolo-compatibilité » comme l’évoque Denis Muzet. Enfin, tout ne peut se résumer à un clivage gauche/droite, l’engagement récent de la France en faveur d’une Libye libérée de Kadhafi nous l’a rappelé ; Frédéric Encel, nous encourage à observer la sensibilité diplomatique du candidat désigné avec finesse et lucidité.
Pour répondre durablement à la question du « comment », il faut résolument répondre à celle du « pourquoi ». Vincent Peillon partage ici les motifs qui rendent indispensable une victoire de la gauche. Dans un registre analogue, Patrick Klugman démontre, à partir de l’exemple précis de l’étude des libertés publiques, que la victoire de la gauche est exigeante pour les attentes qu’elle suscite. Il faut s’opposer aux désabusés qui prétendent que politiques de gauche ou de droite ne sont plus si éloignées. Dans ce fatalisme réside l’une des principales raisons du divorce consommé entre la gauche et une partie de son électorat traditionnel : Philippe Breton, nous explique comment la gauche, en redonnant vigueur, et surtout vérité, à la parole politique, peut reconquérir ceux qu’il nomme les « sécessionnistes » ; Stéphane Distinguin pose, dans un témoignage aux allures de manifeste, les fondements d’un ambitieux renouvellement de l’entreprenariat de gauche ; Danielle Mitterrand offre un vibrant plaidoyer pour ce qu’elle nomme « une politique de l’espoir ».
Vous découvrirez également au fil de ce dossier une inquiétude partagée par l’ensemble des contributeurs, et qui reste à ce jour notre préoccupation politique majeure : la résurgence d’un discours populiste et xénophobe partout en Europe, qui se décline en France par une augmentation significative des intentions de vote en faveur du Front national. Dans ces périodes troubles où un continuum rhétorique s’installe entre droite et extrême droite, vouloir que la gauche gagne, c’est aussi prendre l’assurance que le FN n’accédera pas, totalement ou partiellement, aux commandes de notre exécutif national. C’est de cette tentation présente à l’échelle européenne dont nous parle Jean-Yves Camus. Dans une démarche sans complaisance, Dominique Sopo invite la gauche à déployer un discours antiraciste sans ambiguïté.
Dire comment la gauche peut l’emporter est enfin une manière en creux de prétendre savoir comment elle peut perdre. Le temps est à l’accalmie à l’intérieur du bateau socialiste et le vent semble pousser dans la bonne direction. Et pourtant. Nous savons que les démons de la gauche, la liberté rhétorique au détriment de la conquête du pouvoir national, la singularisation tactique au lieu de la stratégie collective ne sont jamais bien loin. En complément à ce dossier, nous vous proposons, sur le site www.laregledujeu.org, de regarder au- delà de l’échéance électorale immédiate et de réfléchir à la manière dont la gauche peut durablement s’imposer : Olivier Ferrand nous offre l’horizon du think tank et Raffaele Simone inscrit cette échéance dans une perspective européenne. Comment la gauche peut-elle l’emporter en 2012 ? Plus qu’un vœu, une ambition.