Les pays du Moyen-Orient sont généralement absents de la Biennale de Venise. Cette année, elle réunit 22 artistes venus du Maroc à l’Arabie saoudite. Certains artistes connus sont à l’honneur, comme l’Algérien Fayçal Baghriche, diplômé de la Villa Arson et très présent sur la scène parisienne depuis quelques années. Pour l’occasion, il a réalisé une mappemonde tournant à une vitesse effrayante. Certains artistes présents sont moins connus en Europe mais ils ont tous un point commun : un intérêt pour la politique.
Il n’y a pourtant que le pavillon égyptien, habitué de la Biennale, qui fait directement référence au printemps arabe. Le pavillon est dédié au vidéaste Ahmed Basiouny, tué par balles le 28 janvier place Tahrir. Sa dernière œuvre s’arrête la veille de son assassinat et se présente comme un documentaire historique des événements qui se sont déroulés en Egypte. D’autres artistes évoquent le printemps arabe de façon indirecte, comme le pavillon irakien, où sont réunis des artistes ayant fui le pays sous Saddam Hussein. La 54e Biennale de Venise aura eu le mérite de prouver que le Moyen-Orient s’intéresse aussi à l’art contemporain, que l’art contemporain ne touche pas que le monde occidental, que ses idées se sont répandues sans limitations culturelles ou religieuses. Le Moyen-Orient utilise désormais, lui-aussi, les outils et techniques de l’art contemporain : installations, montages, vidéos, etc.
Mais le Moyen-Orient n’a pas le monopole de l’intérêt pour la politique cette année. On peut par exemple parler du pavillon de la Pologne, représentée cette année par une israélienne : Yael Bartana. C’est la première fois que la Pologne ne se fait pas représenter par un Polonais. Yael Bartana a réalisé plusieurs films sur un mouvement en faveur d’un retour des juifs en Pologne. Mais, dans le film, aucun juif n’est là pour écouter les arguments de l’homme. Pour cause : ils sont morts. Ou ne veulent tout simplement pas revenir.
Le grand prix du meilleur pavillon a été décerné cette année à l’Allemagne, représentée par Christoph Schlingensief, décédé en août 2010. Le pavillon incarne une église, celle de son enfance. Il y présente plusieurs documents multimédias – des vidéos, des radiographies – sur sa lutte contre la maladie incurable, dont son opération pour enlever un de ses poumons. Le Louis d’Or qu’il a reçu a fait polémique, certains considérant sa réplique de l’Eglise simpliste, grotesque, quasi haineuse.
Toutes les œuvres de l’année ne traitent pas de sujets aussi sérieux. Maurizio Cattelan, par exemple, un des artistes contemporains les plus en vue, nous offre une nouvelle œuvre humoristique. Aux Giardini, dans le pavillon international de l’Italie, il a placé des centaines de pigeons au-dessus des visiteurs. Dans la lignée de ses créations habituelles.
Cette année, la France. est représentée par Christian Boltanski. Son rôle: rattraper les ratages français des deux dernières éditions. Sa production: une rotative remplie de photos de bébés. Toutes les huit minutes, une sonnerie retentit et une tête de nouveau-né apparaît. À côté, des fragments de visage des bébés et de morts sont diffusés. Le titre de l’œuvre : Chance. Cela n’a pas suffi pour gagner une récompense.
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