Pierre angulaire du droit d’asile, le règlement de Dublin établit une base de données à l’échelle européenne des empreintes digitales recueillies dans tous les pays d’entrée des migrants.
L’objectif théorique est de déterminer rapidement l’État membre responsable de la demande d’asile, et ainsi d’éviter de saturer les services administratifs par des demandes dans tous les pays traversés.
Dans la réalité, en obligeant les pays de points d’entrée à recueillir les empreintes :
- Le règlement de Dublin met une pression excessive sur un petit nombre d’Etats membres devenu incapable d’offrir l’asile à tous. En faisant preuve de modération dans leur obligation de relever les empreintes, ces pays comme l’Italie et la Grèce, poussent les exilés à la fuite par de mauvaises conditions d’accueil et un défaut d’écoute.
- Pire que sa non application, le règlement de Dublin rend impossible le choix du pays dans lequel les migrants souhaitent demander l’asile. En faisant procéder à un enregistrement des empreintes aux points d’entrée, il bloque les réfugiés douze mois et sanctionne les contrevenants par un renvoi dans leur pays d’enregistrement, poussant ainsi les réfugiés à se tenir à distance de toute autorité, voire à se brûler le bout des doigts pour ne jamais faire machine arrière.
- Le règlement de Dublin va ainsi contre l’intérêt des réfugiés, contre l’ordre et la santé publique, et contre la logique la plus sérieuse d’une sortie de la crise migratoire, à savoir un management européen d’une répartition équitable des migrants sur l’ensemble du territoire.
Dans ces conditions, une réforme complète du système s’impose. Conscient qu’une révision d’un accord européen ne se fasse pas en un jour, le gouvernement pourrait, dans l’attente, assurer une information de qualité sur le règlement permettant un choix réfléchi et ainsi éviter des mois d’errance. Mieux, les préfectures pourraient recourir davantage à la clause dérogatoire offerte par ce même règlement en son article 17, à savoir, ne pas procéder au transfert du demandeur d’asile identifié dans un autre pays membre mais plutôt prendre en charge sur place l’examen de sa demande.
A cette désinformation du règlement de Dublin, s’ajoute celle de l’établissement public supposé indépendant chargé de l’accueil des migrants (OFPRA). Victime de pressions politiques pour vider le camp d’ici le printemps :
- L’OFPRA s’engage de façon mensongère vis-à-vis des migrants. Elle promet des placements en centre d’accueil jusqu’à la fin du mois de mars, quelles que soient les intentions des demandeurs d’asile en France ou en Angleterre, sans leur préciser n’avoir aucune idée de leur hébergement après cette date.
- L’OFPRA conduit ainsi paradoxalement à un retour au camp dès lors que le migrant refuse de demander l’asile en France, l’établissement public n’ayant pas pris contact avec l’administration britannique comme il s’y était engagé.
- L’OFPRA fait ainsi perdre toute confiance des migrants vis-à-vis de l’administration, et les éloigne un peu plus des autorités.
L’inefficacité du règlement de Dublin, conjugué aux mensonges de l’OFRPA jette ainsi ces exilés dans les bras des passeurs.
C’est ce réseau surpuissant qui est à l’origine de l’impasse. Profitant des déficiences européennes et nationales, il désinforme et défait, par la peur, le travail des bénévoles, des membres de l’OFPRA – certes discutable mais indispensable – et des avocats sur le terrain afin de pérenniser le chaos pour développer leur marché. Concrètement, les migrants vont en Sous-préfecture grâce au bus mis à leur disposition pour effectuer leur premier contact avec l’administration. C’est à leur retour sur le camp qu’ils subissent les intimidations en tous genres des passeurs pour ne pas donner suite, leur faisant simultanément le conte anglais des mille et une nuits.
Les passeurs vont des plus corrects, travaillant seuls et réclamant les sommes couvrant tout juste les risques d’amendes, aux hommes d’affaires contrôlant leurs hommes de mains, armés, sur le camp depuis leur bureau de Londres.
- Ce sont ces passeurs qui alimentent les 3 milliards d’euros que représente la traite d’êtres humains sur le continent européen selon l’Office des Nations unies qu’analyse également le rapport d’Europol, fin janvier 2016, assurant de la disparition de 10 000 enfants migrants non accompagnés entrés en Europe sur les 18 à 24 derniers mois.
- Ce sont ces passeurs que l’on voit chaque soir méthodiquement « frapper aux portes » des tentes pour réclamer aux migrants 1€ sous peine de brûler leur abri de fortune dans la nuit.
- Ce sont ces passeurs qui ont fait passer la semaine dernière en Grande-Bretagne un enfant de 10 ans depuis cinq mois sur le camp en échange de 9000 euros (monnayé entre 200 et 500 euros il y a encore trois mois).
Concomitamment à toute tentative de mettre à l’abri les réfugiés rentrant de leurs premières démarches dans des établissements protégés des filières de passeurs, il convient d’intensifier le travail de démantèlement de ces réseaux criminels.
Entre le dévoiement du règlement de Dublin, la désinformation opérée par les plus hautes autorités et la mainmise des filières mafieuses, l’Etat semble ne plus rien contrôler, comme l’a d’ailleurs rappelé le petit rassemblement anti-migrants – largement médiatisé et clairement interdit – de samedi dernier.
L’ambition de réformer le règlement de Dublin dépasse tout clivage politique et relève du bon sens. Celle d’une information claire et objective de l’OFPRA, conjuguée à une protection effective des migrants dans leur procédure de régularisation et du démantèlement des filières criminelles relève du courage politique.
Au lendemain du rapport de la Commission européenne sur les prévisions économiques, trois millions de migrants supplémentaires sont attendus d’ici 2017. La France a le pouvoir, le devoir, de se réveiller ; à défaut elle ne pourra bientôt plus dormir.
La date du 31 Mars n’est plus une date butoir les cao resteront ouverts après le 31 Mars . Des dossiers avec l’Angleterre sont en cours .
Cet article est très informatif. Néanmoins un complément informatif sur le « petit rassemblement anti-migrants » de Pegida, l’internationale de la haine, aurait été le bienvenu. Petit rassemblement de néo-nazis surfant sur le chaos de l’immigration et très lié à l’expansion des extrêmes-droites européennes.
Nous parlons d’un mouvement qui, malgré son effectif insignifiant, a tout de même compté un général à la retraite et une clique de repris de justice dont certains ont finis derrière les barreaux tandis que d’autres organisent des ratonnades (cf actualité de ce 12/02/16).