Etre au chevet des malades, les soigner, n’est pas avoir le pouvoir sur eux. L’exercice de la médecine est un acte, comme depuis la nuit des temps, de preuve d’humanité, d’altruisme, d’application des connaissances actuelles de la science pour le bien du malade. Un mauvais médecin, comme probablement un mauvais esprit, est de croire que soigner est un pouvoir, une bascule acrobatique permettant de contraindre le peuple et dans un accès mégalomaniaque : la planète.
Le livre de Bernard-Henri Lévy fait appel aux philosophes aux anthropologues, aux intellectuels comme l’intemporel Michel Foucault…. Nous avons soif, nous avons faim de débats respectueux pour comprendre ce qui nous est arrivé : Une culture de masse, de peurs, d’angoisses est née en quelques mois écrasant toutes les économies, terreau fertile de déstabilisations politiques et sociales et donc de risques de conflits guerriers. En quelques mois toute la société est passée dans une trappe obscure. Oui, ce virus a rendu fou le monde et la France. Ce n’était pas une guerre, c’est une pandémie. Les soignants ne sont pas des soldats.
Un jour le Pr. Delfraissy, président du conseil scientifique, refuse le déconfinement au sénat. La peur en couronne de puissance, le savoir devenu une arme contre le pouvoir politique : le conseil scientifique a pris la République. Tout est symbolique dans cette décision : une humiliation du pouvoir démocratique et des assemblées. Il brille par son pouvoir médical comme beaucoup de ses coreligionnaires, décidant de tout, voulant tout régenter comme Fagon qui voulait avoir la main sur Louis XIV. Le conseil scientifique a pris le pouvoir pour faire aboutir une véritable junte médicale. A tel point que le président de la République se déplacera à deux reprises à l’hôpital de la Pitié Salpetrière, qui devient alors le centre du pouvoir par son université : la noblesse médicale reçoit la République pour la manœuvrer.
Bernard-Henri Lévy retrace une partie de l’histoire récente et des puissances médicales avec une analyse précise et rigoureuse. Dans un temps lointain, les médecins voulaient faire naître la science et émanciper son indépendance par rapport à la religion. Galilée l’a payé cher et, plus proche de nous, le combat, véritable exploit historique, des médecins députés défendant la loi 1905 pour la laïcité. Mais le pouvoir médical a alors voulu toujours plus. L’épidémie du coronavirus a sidéré la société et a permis une revanche sur le pouvoir politique par l’université médicale.
Pourquoi le monde s’est pratiquement arrêté avec une sorte de satisfaction du pouvoir médical, une quasi joie des déclinistes et des écologistes pour qui la solution serait de tout arrêter ? La vision de la ville déserte, abandonnée de ses habitants a et aura des effets sur la psyché, sur le moral du peuple. Je me posais souvent la question de ce qui c’était passé en France en mai 1940 lorsque l’ennemi nazi avait envahi notre pays : avec le confinement j’en ai une petite idée. Je me souviens de ces gens, affolés, qui revenaient du supermarché avec des paquets entiers de papier toilettes, de pates, de riz… De ces gens qui sont décédés car ils ne voulaient plus aller à l’hôpital et être soignés. La peur est tombée sur la France.
L’une des préoccupations principales des êtres humains est leur santé. C’est une volonté humaniste et pas un but pour que les médecins ou les personnels de santé prennent le pouvoir. Ou alors : imaginez un pays sans parlement, sans politique et juste avec le conseil scientifique et son président, avec des messages tous les jours anxiogènes pour laisser la population enfermée chez elle de la naissance à la mort… Vous avez lu Orwell… vivez-le maintenant. C’est peut être ce terrible scénario que nous avons vécu. Tout ça parce que la sécurité et la souveraineté du pays n’a pas été organisée, notamment en fabrication de masques. La fragilité du pouvoir politique est qu’il croit les choses acquises, inébranlables, alors que tout peut toujours basculer d’une minute à l’autre.
Le philosophe nous éclaire sur une analyse fracassante. Aujourd’hui, désormais, il y a deux types de médecins et de professeurs : les uns voulant contenir la civilisation sous une dictature hygiéniste et contraignant des libertés; et les autres exerçant l’art médical comme un accompagnement des libertés de notre société, soucieux de la République et de la démocratie. Je sais de quel coté je suis.