Elle souffre d’abord des politiques du chiffre maintenues par tous les derniers gouvernements et que dénoncent presque tous les syndicats de police, de droite comme de gauche (à titre d’exemple, en voici un premier et un deuxième ; en voilà un troisième, et encore un quatrième). Ces politiques incitent (et parfois contraignent) les policiers à multiplier les actes inutiles, absurdes et même malvenus afin de satisfaire les autorités et d’obtenir un complément à leurs trop faibles revenus.
Elle souffre aussi de l’insalubrité de nombre de ses locaux. Les policiers sont désormais habitués à voir leurs commissariats repeints superficiellement avant la visite du ministre de l’Intérieur ou du Premier ministre. Bien sûr, ces travaux effectués à la va-vite ne rendent pas les locaux plus accueillants (problème de cafards, de rats, de toilettes insalubres…) ; mais ils permettent de dissimuler la honte aux yeux des caméras. Ils permettent, en somme, à Candide-ministre de rester heureux.
La police souffre encore d’un manque d’effectifs et d’un manque de préparation aux missions qu’on lui attribue. De nombreux policiers se plaignent d’ailleurs du manque de proximité avec la population, alors que les policiers travaillent souvent dans des quartiers qu’ils connaissent à peine.
La police souffre enfin des consignes absurdes et des discours contradictoires du monde politique, monde qui lui promet une confiance aveugle tout en la menaçant de sanctions implacables à la moindre erreur (les gouvernements étant toujours prompts à se défausser de leurs propres responsabilités). Ces consignes, ainsi que les maigres moyens qui sont concédés à la police, font que celle-ci se trouve parfois (en effet) en mauvaise posture pour remplir ses missions.
Il n’est cependant pas honnête de ne parler que de ces faits, comme le font de trop nombreux journalistes ou essayistes. Ce sont aussi ces consignes, après tout, qui sont à l’origine de nombre de pratiques indignes au sein de la police.
Comment ignorer en effet que les violences exercées par Alexandre Benalla n’intéressaient, n’interpellaient, n’offusquaient personne lorsqu’on pensait encore qu’il était un simple policier ? Ces scènes de violence sont devenues si courantes lors des manifestations, que plus personne ne s’en étonne. Elles n’en restent pas moins indignes pour une démocratie, et ce d’autant que la France suit un mauvais chemin en la matière.
Comment ignorer encore la persécution et l’humiliation qu’engendrent les contrôles au faciès, pratique aujourd’hui tellement documentée qu’il faut être fou pour contester son existence ? Sur le sujet, La Vie des Idées, revue dirigée par Pierre Rosanvallon, a récemment publié un excellent article sur la manière dont ces contrôles peuvent servir à évincer certaines personnes de l’espace public. Ces contrôles, notons-le, sont en parties dus aux politiques du chiffre. Ils montrent que le fait que les politiques malmènent nos policiers ne les empêche malheureusement pas de malmener parfois, eux aussi, la population.
Comment ignorer par ailleurs la banalité des violences policières à l’encontre des migrants, violences qui vont de la brimade au jet de nourriture par terre, de l’injure raciste au dépeçage de tentes ? Ces gestes, Yann Moix les a observés lui-même ; il en a témoigné, encore et encore, sans qu’aucune conséquence n’en soit tirée par le président Macron.
Comment ignorer, enfin, que de trop nombreuses interventions policières finissent horriblement mal ; et que, si la mission des policiers est des plus difficiles et que leur peur est des plus compréhensibles, la manière dont sont exécutées leurs missions ne doit malgré tout pas être exemptée de toute réflexion ou de toute critique ?
C’était le sens de l’intervention de Yann Moix à «Salut les Terriens» : rééquilibrer le débat. Car s’il est vrai que la police française est abandonnée par nos politiques dans ses missions les plus difficiles, cette même police n’en est pas moins bien trop violente, et ce en raison de ces mêmes politiques.
Yann Moix a le don de faire parler de lui. Mais il n’empêche qu’il pointe quelque chose de profondément juste : Les violences policières.
N’oublions pas que ce sont les policiers qui sont armés et missionnés par l’Etat pour défendre les citoyens.
Et cette « autorisation » accordée par l’Etat de faire usage de violence ne doit en aucun cas être utilisée gratuitement, avec des préjugés. Or, nous savons que cela arrive bien trop souvent.
Les policiers sont pour la plupart d’extrême droite. Nombreux d’entre eux « débordent » et s’en prennent aux plus faibles.
Il n’y a pas de mal à le dire. Depuis quand remettre en cause des débordements de la police serait passible de procès ? Sommes-nous toujours dans une démocratie ? Les flics sont-ils la nouvelle religion ?