Ca y est, c’est fait. Entre deux reportages photo dans Paris Match, Emmanuel Macron a trouvé le temps de quitter le gouvernement. Un long épisode du feuilleton politico-médiatique s’achève ainsi, celui dit de l’enfant gâté. Insider-outsider, constamment un pied dedans, un pied dehors, Macron aura usé et abusé de sa liberté de ton, tranchant radicalement avec le comportement « normal » du parfait ministre, à savoir « fermer sa gueule ou démissionner » selon la formule de Jean-Pierre Chevènement. A l’issue d’un été grisant, le novice en politique, semblable à l’écolier qui rechigne à reprendre le chemin de l’école, a poussé le caprice jusqu’à l’extrême-limite. Pour filer la métaphore, il a fait l’école buissonnière, n’a plus voulu remettre les pieds à Bercy, trahissant au passage François Hollande, c’est-à-dire celui qui l’a fait naître en ce monde où les coups de pouces sont, reconnaissons-le, plutôt rares. Macron, fils indigne ? Les psychologues gloseront longtemps autour de l’assassinat symbolique de la figure du Père-Président, digne d’une série à rebondissements à la sauce Netflix. Previously on French Politics, il y eut ainsi « Macron conseiller surdoué à l’Elysée » puis « Macron ministre en liberté ». La saison 3 promet du grand spectacle, moult rebondissements et toujours plus de sang. Une vraie guerre des chefs. Un Game of Thrones présidentiel…
Ce rocambolesque spectacle, nous, citoyens-zappeurs, nous apprêtons à le regarder par l’intermédiaire souvent réducteur de notre écran télé. Cela tombe bien pour l’ancien ministre de l’économie : comme beaucoup d’hommes politiques, il a la tête de l’emploi. Un physique télégénique, une tête de premier de la classe, un sourire en coin, assez de charme pour émoustiller la ménagère et cette faculté à se glisser dans la peau du gendre parfait, qualité ô combien utile pour s’attirer les bonnes grâces patriarcales. Et puis il y a le facteur jeunesse. Un peu factice certes car nous vivons dans un pays où l’on commence à être pris au sérieux à 45 ans (l’auteur de ces lignes racontait cela dans un ancien numéro de La Règle du Jeu. De mémoire, le texte s’intitulait Les jeunes au pouvoir. Chroniques de la Gérontocratie castratrice. Tout un programme…), mais tout de même. Dans un univers d’hommes blancs, chauves et bedonnants, sans aller jusqu’à la révolution, il se pourrait que Macron incarne une certaine forme de jeunesse et de régénération. Quelque part, tant mieux ! Auto-entrepreneur de lui-même, EM excelle également dans l’art des formules chocs, au choix : «Il faut des jeunes français qui aient envie de devenir milliardaires», «avec la relance des autocars, les pauvres voyageront plus facilement» ou encore «vous n’allez pas me faire peur avec votre t-shirt, la meilleure façon de se payer un costard c’est de travailler». Effrayant quand on y pense… On dirait là l’incarnation du produit politique ultime, un humanoïde programmé pour délivrer l’exacte dose de finesse lettrée ou de buzz flattant l’électorat avide de populisme, le tout en suivant une formule mathématique imparable. Tour à tour brillant, agaçant, amusant ou carrément flippant, le jeune loup devient par la force des choses un bon client, il s’impose médiatiquement et donne aux journalistes de quoi remplir leurs émissions, monopolise l’antenne, force, de fait, le public à l’écouter. L’ambitieux multiplie donc les annonces… Sans grand résultat. On pensait, par exemple, qu’il révolutionnerait les conditions de l’entreprenariat lors de son passage à Bercy, il ne reste quasiment rien de ses volontés réformatrices. En cette effervescence constante, difficile de ne pas voir une version moderne du modus operandi sarkozyste, à savoir : occuper l’espace coute que coute, quitte à commettre d’impensables faux pas. A ce titre, la récente visite sous-médiatisée rendue à Philippe de Villiers en son fief du Puy-du-Fou ressemblait à une bévue honteuse, brouillant le message. Où se situe donc Macron en septembre 2016 ? Quelles sont ses idées ? A priori, son programme ni-de-droite-ni-de-gauche devrait s’articuler autour de deux notions fondamentales : le libéralisme économique et la notion de Progrès. Notons au passage que l’on retrouve, par l’évocation récurrente de la notion chère à Auguste Comte, le premier des visages du wannabe Président : celui d’assistant du philosophe Paul Ricoeur et de membre du comité de rédaction de la revue Esprit. Son bon profil serait-on tenté de dire. Mais cela ne fait pas tout. Comme l’écrit le quotidien Le Monde, «ses talents de communicateur lui permettent de prendre la lumière. Pas encore d’éclairer les français».
Bien posé, le constat d’Emmanuel Macron sur ce qui empêche notre pays d’avancer (renouvellement des élites, libération des énergies, changement d’époque), ressemble à la brillante dissertation d’un élève pas vraiment en dehors du système mais plutôt passé par les meilleures écoles du pays (lycée Henri IV, Sciences Po Paris puis l’ENA). A n’en pas douter, la tête est bien faite. Mais est-elle capable de s’adapter au choc de la réalité ? Pas si sûr… A l’écouter pester contre «les limites de notre système politique» fabricateur de «compromis de dernière minute» et incapable de réunir un «consensus idéologique de fond», il est permis de douter. Car ce qu’implique essentiellement la politique depuis la nuit des temps est bien cette tension nécessaire entre pros et antis, un conflit perpétuel que l’on tempère par la négociation, la discussion et le consensus, des notions loin d’être honteuses. Faire autrement, cela s’appelle la dictature. Il est vrai que le format est en vogue, plébiscité des rives Bosphore à celles de la Volga par des peuples en quête d’un homme fort… S’il veut se construire un avenir, le fondateur d’En Marche devra nécessairement se défaire de ses tentations, sortir du pays de Théorie, composer avec le monde tel qu’il est vraiment. Pour Emmanuel Macron, le plus dur commence. Il va falloir sortir de la com’. Commencer à se dévoiler vraiment…
Il a eu le culot de dire qu’il n’est pas socialiste : c’est pour cela qu’il a bien fait de démissionner.
En même temps quand on s’affiche avec ce comique de Phillipe De Villiers c’est qu’on n’a pas grand chose à perdre.
Franchement je ne vois pas pourquoi on a tant parlé de lui. François Hollande peut se représenter sans crainte en 2017.
Malgré son virage néolibéral (chacun pour sa gueule marche ou crève) il n’y a que lui à gauche pour l’emporter.
Avec Arnaud Montebourg qui veut rétablir le service militaire et Mélenchon qui est anti-européen il reste Benoit Hamon et Gérard Filoche et le PCF…