Qui parle quand l’acteur parle ? Soi ou l’autre que soi selon Bakhtine ? Ego ou alter ego, comme dans « Notes et contre-notes », d’Ionesco ? Les dédales de la conscience selon Emma Bovary et le Stephen Dedalus de Joyce ? La multiplicité des sujets qui l’habitent et qui, comme dans « Les trois derniers jours de Fernando Pessoa » de Tabucchi, adaptés par Denis Marleau, le font se dédoubler, parler sur sa propre image filmée et projetée derrière son visage? Ou bien l’autre, le vrai autre, tout ce peuple des autres qui n’est absent de la scène que parce que le monologueur se l’est incorporé et l’a, pour ainsi dire, avalé – ainsi le « Mistero buffo » de Dario Fo, où il jouait, selon les jours ou les humeurs, des dizaines et des dizaines de jongleurs, joueurs, anges et ivrognes, hallebardiers ou larrons, jusqu’au pape Boniface VIII ressurgi de l’enfer où Dante l’avait logé pour reprendre le dialogue avec ce chœur de voix dont le monologue est devenu le lieu ?
Supposons que ce soit lui et lui seul.
Admettons l’hypothèse d’un théâtre de la solitude : un personnage, unique, aux prises avec son propre et interminable discours – tantôt chuchoté, tantôt déclamé ; tantôt prosaïque, tantôt poétique ou même épique.
Quel est le statut, alors, de cette voix qui parle tout le temps ?
Rêverie de promeneur solitaire ? Méditation ? Confession ? Lutte avec l’ange, le démon, le monde qui se dérobe ou que l’on rejette, la décision qu’il faut prendre (comme dans « Hamlet »), celle que l’on a prise et qu’il faut accepter (comme dans « Lorenzaccio ») ?
Tempête sous un crâne, à la Jean Valjean ?
Se casser les os de la tête, à la façon du vieux Sartre reprenant son Flaubert en pleine époque mao ?
Ou juste l’inconscient, celui des freudiens et des lacaniens, dont chacun sait qu’il ne se tait jamais ?
On sait, en même temps, que personne au monde ne s’est jamais parlé comme ça.
Nul n’ignore que, si l’inconscient est, en effet, structuré comme un langage, cette intimité est mi-loquace, mi-muette et réduite, comme disait Maurice Blanchot à propos des monologues de son ami Louis-René Des Forêts, à « quelques signes espacés ».
Elle a beau, cette parole, mimer le trouble, le tremblé, les embardées de l’association libre, elle a beau faire droit à l’ellipse, l’énigme, l’allusion, la rétractation, la dénégation, la digression, la transgression, elle a beau accueillir, ou feindre d’accueillir, le chaos des déplacements et métonymies censément constitutifs de ce murmure incessant qui est le vrai son de l’inconscient, cette langue des profondeurs est une fiction qui n’a de répondant dans aucun corps et aucune langue.
La question, alors, devient : à qui s’adresse, effectivement, l’acteur ? quel destinataire, fût-il imaginaire, pour cette parole sans écho et dans le vide ? soi, vraiment, ou, de nouveau, les autres ? les morts, comme il lui arrive de dire, ou, à travers les morts, les vivants ? dans le cas de Hamlet, n’y a-t-il pas une entière bibliothèque consacrée aux vrais destinataires, cachés ou montrés selon les mises en scène, de ce combat entre soi et soi ? et s’il s’empêche de lui parler, s’il évite de s’adresser directement et visiblement à elle, s’il s’oblige à grommeler, ou à parler au ciel, ou à son bonnet, ou à son passé, n’est-ce pas encore à la salle, quoique sous un nouveau mode, que le personnage, par exemple, de « La chute », de Camus, lance son apostrophe ? et, dans ce cas, quelle salle ? sous quel régime ? celui de la foule ou du public ? de la communauté présente ou absente ? donnée ou à venir ?
Et puis l’autre question, corrélative : qui est-on, que veut-on, quel est l’état présent de son esprit, quand on met en branle, ensemble, acteur et auteur d’une seule voix dont bien malin qui dira laquelle commande à l’autre, ou lui réplique, la machinerie du monologue ? qui est-on, où en est-on, quand on loge dans un pur ruban de mots où dires et didascalies s’écrivent, soudain, de la même encre les trois unités d’un temps, d’un lieu et d’une action devenus indissociés ? il y a du deuil dans cette affaire ; mais de quoi ? du sens, comme dans la vocifération sublime d’Artaud au théâtre du Vieux-Colombier ? du silence, comme dans les pièces de Koltès ? de la croyance, comme chez Thomas Bernhard ? de l’espérance, comme chez Beckett ? ou juste de ce monde ci, damné et condamné, dont il est temps de prendre congé pour en produire un autre ? juste de cette communauté du jour dont la salle est encore l’image et à laquelle on ne ferait pas face si on n’avait le secret espoir de la voir s’ébrouer, se réveiller, peut-être se métamorphoser et accoucher de ce public secret qui est en elle et que la cérémonie, seule, peut susciter ?
Où l’on retrouve la vocation originairement politique du théâtre à laquelle peu restent fidèles – et pourtant…
Où l’on retrouve l’autre sens possible de la fameuse et si mal famée formule brechtienne où « dissoudre » le peuple peut aussi vouloir dire, après tout, en extraire la part de grandeur – Vilar et son appel à un théâtre de la vérité, de la hauteur et de l’excellence…
Choqués, scandalisés ou, simplement, sidérés, pétrifiés, incrédules, ennuyés, oyez.
Allez ou venez, comme vous l’entendrez, dans ce lieu sans échange que devient le théâtre de la parole pour acteur seul – pour ma part, en tout cas, j’y reviens sans tarder.
Bonjour,
je ne suis pas un fervent lecteur de votre blog, mais je suis tombé sur cet article par hasard. Et bien que la question soit intéressante et passionnante dès qu’on s’intéresse au théâtre, cet article est juste vide de sens.. Il balance beaucoup trop de référence (chapeau pour le travail de mémoire), reposant une question puis une autre sans analyse de ses propres références. Bref, on lit, on a la tête qui tourne devant tant de noms, pas tous connu. On arrive à la fin en se posant trop de question, et on oublie la première.
Dommage, c’est vraiment un questionnement important, mais malmené..
Et je me permet de rectifier un point : le théâtre n’a pas pour vocation originelle la politique. Il est issu des procession à la gloire de Dionysos, puis célébrait les héros des mythes grecs. Les « représentations » ne se faisaient que pour des concours, pour du divertissement. Il a fallut quelques temps avant qu’il ne devienne réellement politique.
J’ai une révélation à vous faire. Je suis Dieu. Oui, je sais, ça a de quoi surprendre. Mais ce n’est pas tout. Vous êtes bien accroché? Je suis le diable. Bon, ça va. Enfermez-le. Asseyez-vous, euh… c’est bon, restez assis. Alors, qu’avons-nous là-dedans? D’accord. Votre déposition stipule que vous revêtez les deux identités divine et diabolique. Pardon! je ne suis pas sûr d’avoir bien entendu… Votre déposition. Stipule. Que vous revêtez deux. Identités. L’une divine. Et l’autre diabolique. Quoi? Vous êtes complètement dingue? Ah non alors! s’il y a un fou dans cette pièce, ce n’est pas moi… Attendez, je crois comprendre. Je n’ai jamais prétendu être ni l’Un ni l’Autre. J’ai juste dit que je les suivais. Vous avez dit… gardIEN!!! LIBérez-le! Allez! allez! attendez! Attendez! Comment ça, vous suivez Dieu et diable? On ne peut pas être dans le même temps du côté du bien et du côté du mal! Ce n’est pas ce que j’ai dit. Vous savez, il y a plusieurs manières de suivre quelque chose. Par exemple, le général rattrape son éclaireur, et ensemble, ils vont traquer leur agresseur. Oui, oui. Bien entendu. C’est ça. Bien, bien. Eh bien, vous autres… allez! Allez! Attendez! attendez! Nous sommes profondément désolés pour ce terrible quiproquo, monsss… Comment? Vous m’enfermez toute une nuit et vous ne connaissez pas mon nom? Bien sûr que je connn… Hé… détendez-vous! ne vous en faites pas pour ça, hein? Méphisto. Vous dites? C’est mon nom. Méphistophélès. Je suis Dieu. GARDDDIEN! Mais non! Oh! Arrêtez-les! Je plaisantais. Oh! Arrêtez, vous autres… Hé! Hé! Déconnez pas!
Obama ne comprend pas le lien que fait Netanyahou entre Daash et Hamas. Il affirme que les États-Unis n’ont pas — n’ont plus s’entend — l’intention de déclencher au Moyen-Orient une guerre de civilisation. Je nous conseille de relire le Manuel de l’esclave phrygien et de nous pénétrer de l’idée que tout ce qui arrive à un individu ne dépend pas de lui seul. Ensuite, si tant est que cela ait un sens, individuons une civilisation, et appliquons-lui ce principe. Les États-Unis n’ont pas l’intention de déclencher au Moyen-Orient une guerre de civilisation. Nous les félicitons pour la retenue dont ils font montre et retournons prier afin qu’ils ne soient pas grisés par ce bon vieux complexe de supériorité chomskyen. Ce qu’Amérique veut, Dieu ne le veut pas nécessairement. En l’occurrence, l’économie d’en haut répartit les mises et les dettes en billions de gravats eschatologiques. Et il sera dit qu’une poignée d’autohypnotisés n’en démordra jamais de son rêve de conquête d’une Créature qu’elle prétend abhorrer. Vous retrouvez cette doctrine de la contre-impuissance au stade individuel dans la figure persistante de Patrick Bateman, au stade collectif dans le camp d’autoconcentration sectaire. Les ordres millénaristes partagent cette inclination à l’autonettoyage par procuration. Et le fait qu’ils démontrent d’une tonitruante faculté à s’allier en deux temps trois mouvements avec leur exterminateur n’a pas de quoi surprendre.
Si les djihadistes et leurs banquiers ne nous ont pas attendus pour assouvir leur soif du mal, que dire de la grande foire aux images rebattant nos oreilles de dissociations artificielles, avec ces marionnettes d’un surmoi en surcharge d’associations spécieuses? Doctorantes attardées, elles se sont faites les porte-voix du panislamisme en ce qu’elles mettront toujours un point d’honneur à ne point confondre le Jihâd avec ce cheval de Troie — qui est une poupée russe — que fut et demeure le mouvement panarabe, dispositif gigogne que nous aurions tendance à ne jamais exposer en l’état au risque de nous exposer nous-mêmes au choc décivilisateur, sa configuration exacte risquant surtout de jeter la suspicion sur tous les points que nous marquerions contre le bloc de l’Est sous le sceau de la cupidité sioniste — Israël est-il le seul pays au monde que l’Eurasien menace? nos évidences ont-elles achevé de s’écraser sous le poids facétieux des entourloupes de M. Boniface? — mais oui… le coup de l’Internationale antisioniste… «Prolétaires antijuifs de tous les pays, unissez-vous!»… le crime paranoïaque organisé… où l’on retrouve pourtant, entre autres Protée, un SS-Standartenführer Baurnann, liquidateur du Ghetto de Varsovie dépêché par le Ministère de la Guerre égyptien en tant qu’instructeur du Front de libération de la Palestine. Et Sadate dans tout ça! vous oubliez Sadate? Non, je n’oublie pas Sadate. Rassurez-vous, je n’oublie rien… la une du Matin dégoulinant à côté du téléphone, mon visage collé, éclaboussé de peintures rituelles. Je ne doute pas que Sissi en ait conservé des accès de prudence confinant à la méfiance chronique. Il y a aussi un souvenir que j’ai. Celui d’un Arafat qui, en pleine accélération de la Deuxième Intifada, sera démystifié au cours d’un reportage au vitriol où, alors même que Daniel Pearl était sacrifié sur l’autel asymétrique de la fission nucléaire, quelques audacieux avaient fait l’effort de traduire le discours que le chef historique du Fatah venait d’adresser en arabe à son peuple avant qu’il n’intervînt sur les ondes internationales, comme tout bon prix Nobel de la paix qui se respecte, pour condamner l’énième attentat à l’aveugle éraflant Israël dans le vent alvéolant du 11 septembre 2001. Ce discours aux Arabes s’achevait de la sorte : «Le mot d’ordre de mon peuple c’est al-Jihâd! al-Jihâd! al-Jihâd!» Le reportage fut diffusé une fois, au journal de 13h. Puis nous n’avons plus jamais entendu parler de ce ver dans les pourparlers de paix.
Avons-nous jamais entendu un dirigeant israélien approuver l’idée que les conditions de la paix soient un État palestinien démocratique et viable, vivant au côté de l’État d’Israël en sécurité? Oui, nous l’avons entendu.
Avons-nous jamais entendu un dirigeant israélien contester l’idée que les conditions de la paix soient un État palestinien démocratique et viable, vivant au côté de l’État d’Israël en sécurité? Oui, nous l’avons entendu.
Avons-nous jamais entendu un dirigeant palestinien contester l’idée que les conditions de la paix soient un État palestinien démocratique et viable, vivant au côté de l’État d’Israël en sécurité? Oui, nous l’avons entendu.
Avons-nous jamais entendu un dirigeant palestinien approuver l’idée que les conditions de la paix soient un État palestinien démocratique et viable, vivant au côté de l’État d’Israël en sécurité? Non, nous ne l’avons jamais entendu.
Nous n’allons pas attendre qu’une force démocratique émerge d’elle-même en tyrannie. C’est nous qui irons la faire émerger.
1) Le Mossad est passé maître dans l’art d’infiltrer l’ennemi afin d’obtenir des informations cruciales sur l’avant-poste du djihadisme à géométrie variable. Il doit pouvoir dépêcher, à l’intérieur de ces territoires occupés — à organiser le financement fantôme pour la reconstruction des villes qu’ils se sont fait démolir — des agents uchroniques, des messagers du droit revenant d’un État parallèle, avec images en 3D à l’appui. Le messager partira aussi vite qu’il est venu — nous ne préconisons pas les missions-suicides — mais il aura laissé derrière lui le virus de la raison critique; à ceux qui s’inquièteraient des représailles comploticiennes, je les arrête tout de suite. Le Mossad c’est comme le sexe : «ce n’est pas sale».
2) Les intégristes sont désintégrables et les morceaux de dogme ne pardonneront pas à leurs chefs leur haute trahison. Le téléphone arabe fera le reste.
3) L’anticipation patriarcale de la démocratie assouvira le désir de libération masculine. La parité viendra dans un second temps.
Comme vous le savez, les néochefs SS n’ignoreront pas longtemps l’existence des ces opérations d’infiltration dans les couches les plus basses de la société palestinienne. Or, à l’instar de leur propre langage, les fous alliés de Moscou, lesquels ne peuvent pas s’empêcher de se trahir par des lapsus du genre «cela me rappelle les évènements de la Seconde Guerre mondiale, quand les occupants fascistes allemands avaient encerclé NOS villes, comme à Leningrad, et qu’ils avaient exécuté les populations des villages», ces durs à lier, non-dis-je, sont divisés pour même qu’ils soient identiques. Ils sont divisés du fait même qu’ils sont identiques. Il faut dire qu’il n’y a de place que pour un seul demi-dieu en terre monolâtrique. Dans ce contexte, il ne devrait pas être impossible d’user du théorème dans lequel se sont enferrés les prétendants à la succession mahométicienne en vue d’accentuer leurs divisions. Ce qui fait l’unité du Jihâd c’est ce qu’ont en commun ses acteurs et spectateurs. C’est précisément le fait qu’ils se ressemblent comme deux versions d’une même totalité qui est à même de défaire leur union. Aussi, nous demandons à tous ceux qui se sont érigés en parangons de vertu pour dénoncer le pétainisme transcendantal d’un certain Nicolas Sarkozy qu’ils se mettent au clair avec leurs principes lorsqu’en Cisjordanie ou à Beyrouth, il arrive encore qu’en lieu et place de la honte cathartique, l’on couvre de lauriers la tombe de Mohammed Amin al-Husseini, le Pétain panarabe. (((Abbas & Mechaal sont-ils les Rohani & Khamenei palestiniens? En d’autres termes, un piège à con.))) Ce que nous attendons, aujourd’hui? Que le faux-ennemi de Mechaal prenne ses distances avec le testament empoisonné de Yasser Arafat. Comment? Eh bien, c’est simple. En prenant place, au côté d’Israël, dans une coalition anti-EI du type «armée B». C’est justement parce que nous nous refusons à disparaître sous le syndrome de Huntington que nous devons entraver l’industrie souterraine. La guerre contre l’hyperterrorisme non-?-gouvernemental — l’auteur de Qui a tué Daniel Pearl? fut l’une des premières consciences à en produire la déflagration salutaire — n’est pas une guerre arabophobe mais une guerre antifasciste, et donc, une guerre qui engage le monde arabo-musulman. Les représentants de la vraie religion doivent entrer dans la coalition universaliste. Les roquettes lancées en direction de Jérusalem peuvent, à tout instant, pulvériser le Dôme du Rocher. Le projet iranien de raser Israël de la carte en dit long sur la foi de tous les Rohani de l’extrémisme modéré qui, au nom d’Allah, sont prêts à commettre le sacrilège suprême de sinistrer l’un des lieux les plus saints de l’islam. Avant que de nous inquiéter de manquer notre cible, apprenons à l’identifier.