Alexandra Profizi : Vous exposez à partir de cette semaine des oeuvres créés conjointement. Pouvez-vous expliquer ce travail à quatre mains ? Est-ce que vous pensez les dessins ensemble ?

Pascale Montadon-Jodorowsky : C’est assez clairement défini : Alejandro commence toujours, parce que c’est lui qui fait le dessin au trait et je fais la mise en couleur. C’est donc un travail en deux étapes. Je n’interviens pas du tout dans le dessin, il n’intervient pas du tout dans la couleur. Ca se passe dans une totale harmonie. Ce sont des œuvres à quatre mains, mais on n’est pas à quatre mains en même temps sur la pièce.

Alejandro Jodorowsky : Avant de demander comment on fait les tableaux, il faudrait se demander pourquoi on les fait. On a une grande différence d’âge et ça ne facilite pas les choses pour faire des enfants. Nous sommes ensemble depuis dix ans déjà. Je pense, et Pascale le pense aussi, qu’un couple doit produire quelque chose ensemble. Alors on a fait notre fils ! On a fait une chose ensemble. Le sens de ces œuvres, c’est faire une création ensemble. Je dessine, elle me laisse tranquille, elle peint, je la laisse tranquille. On a une confiance aveugle l’un dans l’autre, et ça marche très bien.

A. P. : Est-ce un jeu de séduction entre vous ?

A. J. : Moi je dessine pour la séduire ! Je ne me sens pas peintre, mais pour attirer son attention, je me suis remis à dessiner.

P. M.-J. : Cela a commencé ainsi : ce n’était ni prémédité ni calculé. Au fond, pour la question de l’enfant, on n’a même pas décidé de ne pas en avoir. On s’est dit que si on avait un enfant, c’était merveilleux, si on en n’avait pas, c’était merveilleux. L’amour est là et ça ne se pose pas autrement. Mais est venue comme une évidence l’envie de faire quelque chose ensemble. Alejandro a toujours plus ou moins dessiné, il est connu pour plein d’autres choses mais pas vraiment pour ça. J’ai découvert des dessins dans des vieux cartons, des choses qu’il a faites il y a très longtemps, et je les ai trouvés incroyables. Il m’a proposé, comme une sorte de jeu amoureux, de les mettre en couleur. C’était un jeu mais qu’on a toujours fait très sérieusement, avec la même intégrité, le même engagement, la même intensité que l’on mettait dans n’importe quelle autre expression artistique. Et effectivement, au bout d’un, deux, trois dessins, on a vu qu’il y avait un style cohérent qui se créait. Comme la création d’un troisième artiste. Là, on nous a proposé de poursuivre et d’exposer ce travail.

A. P. : Diriez-vous que réaliser une oeuvre commune renforce votre couple ou plutôt que le couple nourrit votre art commun ?

A. J. : Pour moi, il n’y a pas besoin de renforcer quoi que ce soit. On est vraiment bien, on s’est trouvés.

P. M.-J. : Moi je pense que c’est parce qu’on est vraiment bien ensemble que l’on peut travailler ensemble. Ce sont des vases communicants, on ne sait pas où ça commence, on ne sait pas où ça se termine. A la base d’une bonne collaboration, il y a une bonne relation. Ca se fait de manière extrêmement fluide et harmonieuse.

A. J. :L’amitié, c’est faire quelque chose ensemble. Faire une œuvre ensemble. Si on n’a pas une œuvre ensemble, on perd son temps, ce sont des amitiés pour dévorer le temps, pour meubler le vide. Une vraie amitié, c’est la création à deux de quelque chose.

P. M.-J. : Au fond, ça relève presque du même processus que de faire un enfant biologique. Il naît de deux individualités. Lorsque l’on crée une œuvre ensemble, on apporte tous les deux son univers pour créer quelque chose qui n’existerait ni sans l’un ni sans l’autre, et qui a presque sa vie propre. En plus, c’est un très bon exercice car, finalement, la démarche, le chemin pour un artiste, c’est arriver, il me semble, à être au service de son œuvre, plus que de son propre égo. Et dans un travail de collaboration, on est de fait au service de l’œuvre commune.

Alejandro Jodorowsky
Alejandro Jodorowsky, avec une photo de ses parents, mis en scène dans son dernier film « La Danza de la realidad »

A. P. : Pascale Montandon, avez-vous déjà « buté » devant un dessin, sans savoir quelles couleurs lui donner ?

P. M.-J. : Non, jamais. C’est étrange, mais c’est très fluide. Il n’y a jamais aucune lutte, aucune résistance. Ce n’est pas quelque chose de raisonné. Je les laisse venir à moi de manière assez naturelle.

A. J. : Dans ce travail de collaboration, j’essaie de choisir des thèmes et de faire des dessins qui soient dignes de Pascale. Peu à peu, à cause de ce souci de la dignité, et comme je fais du figuratif, le figuratif étant un peu littéraire parce qu’il faut raconter quelque chose, j’essaie de montrer, dans cette exposition, le plus difficile : la recherche du sublime. Montrer le négatif, le monstrueux, c’est très facile. Mais explorer des thèmes sublimes sans que cela devienne ridicule, c’est très difficile. Je me suis posé cette condition.

A. P. : Les thèmes qui vous sont chers au cinéma (la métaphysique, la spiritualité, les origines), sont-ils les mêmes dans ces œuvres picturales ?

A. J. : Oui, notamment pour ce qui est des origines. J’ai décidé d’illustrer quelques aspects de l’enfance de Pascale. De là, je suis passé à quelques aspects de mon enfance. C’est intéressant, il se passe des choses comme ça, toujours dans cette recherche du sublime, qui ne soit pas négatif.

P. M.-J. : Alejandro, évidemment, puisque c’est lui qui commence, amène dans ses dessins tout son univers : psychanalytique, onirique, surréaliste, métaphysique, spirituel, etc. Comme on se connaît très bien, et que, forcément, j’adhère à ce qu’il est, j’adhère à son univers, je le reçois naturellement. Mon travail pictural à la base était très différent de ce que l’on fait là. Mais le fait de collaborer avec lui nourrit mon travail personnel. Mon travail garde son intégrité, mais je sais que, par exemple, le travail strict de la couleur dans ce projet-là m’a permis de développer des choses que je n’aurais probablement pas développées seule. Et c’est aussi l’intérêt d’une collaboration ; ce n’est pas isolé du reste.

A. J. : Ca s’est passé de la même façon pour moi. Quand je faisais mon film La Danza de la realidad, j’ai invité Pascale pour qu’elle m’accompagne. J’ai commencé à lui donner des esquisses et, à la fin, elle a changé tout le style de mon film ! Elle l’a enrichi. Elle a fait tous les costumes, on a travaillé ensemble les couleurs… Elle m’a influencée. Dans une collaboration, on influence l’œuvre particulière de chacun. C’est possible.

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A. P. : Pouvez-vous nous parler d’un ou deux tableaux qui vous tiennent particulièrement à cœur ?

P. M.-J. : l y a des tableaux que l’on aime beaucoup, évidemment. Mais une exposition est pensée dans son ensemble. C’est un voyage, un processus. L’intérêt d’une exposition, c’est de voir les œuvres les unes à côté des autres, et un monde se crée finalement.

A. J. : Personnellement, ça n’a rien à voir avec la couleur, mais on dessine, selon ce qu’on nous demande, sur des toiles de différentes tailles. Et tout d’un coup, on a fait l’expérience de faire des tableaux tout petits, grandeur carte postale. J’ai d’abord rechigné à faire cela. Puis, je me suis passionné parce que j’ai découvert un monde : en changeant d’échelle, toute ma conception a changé. Si tu me demandes quels sont mes tableaux préférés, je te dis que c’est un tout petit qui a la grandeur d’une carte postale. C’est ça, mon préféré ! On y voit Pascale enfant, dans son lit, elle est effrayée par une ombre qui passe par dessous de la porte.
Evidemment, une exposition est pour vendre des tableaux. Mais je ne le fais pas pour ça, je le fais pour les montrer. Je crois que, si ça ne tenait qu’à moi, je ne les vendrai pas ! Ca me fait mal de vendre des tableaux, mais c’est la loi de l’art ! Tout est affaire dans ce monde, c’est désespérant !

P. M.-J. : D’autant que, dans cette exposition, on a passé un cap. On a eu l’occasion d’exposer plusieurs fois nos travaux ensemble, même au Musée d’Art Moderne de Paris. Mais on est passé du plaisir de créer quelque chose ensemble au plaisir de l’œuvre elle-même. Au début, on était séduit et enthousiasmé par cette idée de collaborer ensemble ; à présent, on est pris par l’idée de l’œuvre elle-même. Comme le disait Alejandro, en abordant cette thématique, particulièrement personnelle, de nos enfances respectives, on touche à des choses qui sont très intimes, très profondes. C’est drôle parce que je viens de réaliser à l’instant que ça correspond à la période où tu as fait La Danza de la realidad, dans laquelle il était question de ton enfance. Finalement, c’est ça aussi l’art, ça nous emmène sur des zones de soi très profondes et nous aide à les révéler. Il est question aussi de ça dans notre exposition.

A. J. : Dans les thèmes, l’exposition évoque aussi la relation entre l’homme et la femme. On fait une expérience que le monde a perdu : la relation complémentaire dans une œuvre, d’un homme et une femme. Ca n’existait pas. Nous, on essaie de le faire. C’est une création à deux, où il n’y a pas l’un au-dessus de l’autre. Je ne suis pas au service de Pascale, Pascale n’est pas à mon service. Et ça s’unit.

Alejandro Jodorowsky et Pascale Montandon-Jodorowsky
Alejandro Jodorowsky et Pascale Montandon-Jodorowsky

P. M.-J. : Oui, de manière totalement magique. Les deux choses s’unissent sans qu’il y ait d’interférence ou d’intervention de l’un dans la partie de l’autre. Il y a une cohérence. Force est de constater que ça se produit. Je pense en effet que cela se nourrit de cette relation que l’on a, qui fait qu’on peut travailler en totale confiance. En fait, on peut tout donner quand on sait que l’autre ne va rien vous prendre à votre propre insu. Je crois que c’est en cela que l’on peut collaborer : parce qu’on a ce niveau de relation-là. Ce ne serait pas possible avec quelqu’un d’autre.

A. J. : Quand je fais un dessin, je suis content de mon dessin, sinon je ne le ferai pas. Mais j’attends avec impatience de le voir en couleur, parce que je me rends compte enfin de ce que j’ai dessiné. Elle voit ce que j’ai dessiné, elle voit toutes les possibilités. Je découvre ce que j’ai fait grâce à la couleur. C’est mon dessin, mais le résultat n’est pas mon dessin, ça prend une toute autre dimension. C’est très intéressant.

P. M.-J. : Après, l’œuvre ne nous appartient plus, presque. On a un rapport très émotionnel avec ça.

A. J. : L’artiste s’appelle Pascalejandro ! C’est arrivé par hasard, avec un autre nom, on n’aurait pas pu faire ça. (Rires)

A. P. : Pensez-vous pouvoir collaborer ainsi justement parce que vous avez atteint un degré élevé de confiance l’un en l’autre ? Cela aurait pu se produire au début de votre relation?

A. J. : Dès le premier moment où je l’ai vue, j’avais confiance en Pascale ! On n’a rien développé, tout était là dès le premier moment. Tu vas penser que je suis un romantique, mais c’est authentique. J’ai vécu toute une vie. Pascale, elle, commence à vivre. Ce sont des points de vue différents. Je suis passé par beaucoup de relations orageuses. Je me suis marié [Pascale est sa troisième épouse. Ndlr]. Dans mes précédents couples, c’était toujours la compétition. Je n’avais jamais connu une relation complémentaire telle que celle-ci.

P. M.-J. : Pour moi, c’est pareil. C’est totalement irrationnel. Dans notre cas, la différence d’âge n’est pas une distance, mais un facteur de stabilité et d’harmonie. J’ai conscience qu’Alejandro est beaucoup plus connu que moi, mais j’ai accès, grâce à lui, à un monde, un univers, une expérience, et moi je lui apporte ce que je suis, ce que je peux. C’est ce que doit être n’importe quel couple, au fond. C’est vrai qu’on a su tout de suite, c’était instantané. Lui est passé par beaucoup de couples orageux comme il le dit, mais quand on lit ses écrits, bien avant notre rencontre, il décrit à plusieurs reprises sa conception de l’amour idéal, et qui n’est pas du tout quelque chose de sucré, mais quelque chose de très pur et fort. C’était inscrit en lui. Et toutes les personnes qui me connaissent très bien savent quel idéal amoureux j’avais. J’aurais pu le décrire, trait pour trait, avant de le rencontrer. Et quand on s’est rencontré, j’ai le sentiment que l’on s’est juste reconnus. Simplement, c’était évident. J’avais l’impression que je l’attendais. J’attendais de le voir, je l’ai vu, et ça s’est fait, en un instant.

A. J. : Ca peut donner l’impression qu’on invente, mais c’est vrai ! C’était là, juste au coin de la rue, dans le café du coin. C’est là que ça s’est passé.

A. P. : Par hasard ?

A. J. : C’était lors d’une des séances que j’animais, gratuitement, pendant vingt années tous les mercredis. Les gens venaient, je m’asseyais, je lisais le tarot. Mon assistant appelait : « le numéro 2 ! le numéro 3 ! » Et j’étais concentré. Ce jour là, tout d’un coup, j’ai levé la tête. Et elle était là.

A. P. : Est-ce que les cartes ont donné une indication ?

P. M.-J. : En fait, il a donné la réponse avant même de lire les cartes. C’était digne d’un film ! Pour faire court, au moment où il m’a dit de m’asseoir, alors que c’était le tour d’une de mes amies, nous étions séparées dans la pièce, il m’a dit de prendre une chaise de m’asseoir là. Je me souviens que les jours précédant cette rencontre, je rêvais chaque nuit de ma propre mort, des choses très fortes. Quand j’ai posé ma question, il m’a répondu avant de sortir le tarot. Il m’a tout dit avant. Ensuite, le tarot a confirmé ce qu’il m’avait dit. Mais il savait tout. Il savait qui j’étais. Il savait ce que je faisais. Alors bon… j’ai su !

A. P. : A part dans l’art, comment vous répartissez-vous les rôles dans votre couple ? Est-ce que, comme il semble se dégager de vos tableaux, il y en a un plus cérébral et l’autre plus intuitif ?

A. J. : Elles sont démodées tes questions ! Il n’y a pas de rôle à partager !

P. M.-J. : C’est plus une question de complémentarité. Dans chaque situation, qu’elle soit privée, publique, importante, ou pas, on apporte ce qu’on est. Par exemple, schématiquement, sur un tournage, Alejandro a des idées très claires, il sait exactement ce qu’il veut et il le dit sans détour. Alors les gens sont un peu déstabilisés. Et comme les gens me parlent toujours facilement, j’essaie de traduire, de redire avec d’autres mots, etc. Donc on va toujours dans la même direction et on fait les choses dans le même sens, mais chacun à sa façon, tels que l’on est, de façon complémentaire. C’est un exemple, mais c’est toujours à peu près comme ça.
Quelque part, j’ai parlé de différence d’âge, mais tout ça est un faux problème, ou une fausse question. Je vais  dire la vérité : cette différence d’âge, à un moment donné, qu’on le veuille ou non pose la question du temps et de son rapport au monde. On a parlé de la question de l’enfant. A un moment donné, on se dit : l’amour est là, c’est une évidence, Alejandro me disait « je ne veux pas te sacrifier, si tu veux avoir un enfant ». On ne sait pas si c’est lui, si c’est moi, si c’est nous, peu importe. C’est avec lui que je veux vivre donc on ne va pas souffrir séparés pour un enfant hypothétique avec un homme hypothétique. C’est absurde.
Alejandro avec son expérience de vie, de construction d’œuvre, me dit incessamment combien il est essentiel de ne pas perdre son temps, d’aller à l’essentiel. Donc je vis avec cette réalité, et on a décidé de vivre dans un éternel présent. C’est aujourd’hui qui compte. Donc ce qui pourrait être au départ un obstacle, la différence d’âge, recentre. Ce qui pourrait nous séparer nous recentre sur l’essentiel.

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Alejandro Jodorowsky et Pascale Montandon-Jodorowsky

A. P. : Ce n’est pas la première fois que vous exposez à la Galerie Forêt verte. Que représente ce lieu pour vous ?

A. J. : Pour moi, c’est intéressant, car c’est une galerie de petite taille, donc c’est en toute humilité. J’en ai marre du côté spectaculaire des musées, de cet art qui essaie de provoquer le scandale, de faire des choses énormes, comme un show de Hollywood, ça se transforme en cirque ! Là, il y a une humilité, une dignité.

P. M.-J. : Je suis absolument d’accord. De toute façon, on a choisi un support volontairement classique aussi. J’ai toujours pensé que la véritable subversion n’est pas dans la forme mais dans le contenu. Dans l’art, la recherche formelle, bien souvent, fait perdre le contenu, qui devient sociologique, politique et on perd ce rapport métaphysique et spirituel dont on parlait tout à l’heure. Maintenant, pour cette galerie, elle a également une signification particulière car c’est le premier endroit à Paris où l’on a exposé notre travail ensemble. C’est aussi pour cela que l’on y retourne.

A. P. : Alejandro Jodorowsky, vous êtes scénariste de bande-dessinée, et vous dessinez également. Envisagez-vous de réaliser votre bande-dessinée entièrement (scénario et dessin) ?

A. J. : Quand je suis arrivé en France, j’ai rencontré Moebius. Alors j’ai complexé et j’ai arrêté de dessiner. C’était tellement parfait ce qu’il faisait. Si je n’avais pas rencontré Pascale, je n’aurais plus jamais dessiné. J’ai travaillé avec les meilleurs dans la bande-dessinée : Moebius, François Boucq, Manara… C’est un travail : pour une bande-dessinée qui se lit en quelques minutes, c’est le travail d’une année. Il faut répéter un dessin mille fois. On pensait faire un livre avec Pascale, mais avec une illustration par page, pas de petits cadres à répéter. C’est un travail d’ouvrier. Dans la bande-dessinée, les artistes sont des artisans. Je n’ai pas cette patience. Mais je continue à faire des scénarios de bande-dessinée, avec un Chinois, un Mexicain, Ladron, avec qui je fais L’incal. Les enfants d’El Topo, un film qui n’a pas pu se faire et que j’ai fait en bande-dessinée. J’ai fini Bouncer. J’ai également la série Lama blanc. Avec Theo, il me reste un volume à faire du Pape terrible. La bande-dessinée est la seule littérature qui te permette de vivre !

Alejandro Jodorowsky
Alejandro Jodorowsky

A. P. : Pascale Montandon, vous êtes une passionnée de théâtre. Avez-vous envisagé de monter une pièce ensemble ?

A. J. : Ca va venir, oui… J’ai fait deux pièces qui marchent. L’une qui s’appelle Le Gorille, avec Brontis et qui compte déjà avec 500 représentations. Elle a tourné en France, en Angleterre, en Amérique latine… C’est une adaptation d’un conte de Kafka. La deuxième s’appelle L’école des ventriloques et a été montée par la Compagnie du Point Zéro [qui va présenter une pièce d’Alejandro Jodorowsky au Festival d’Avignon cette année]. Et je vais faire une nouvelle pièce avec Brontis, une adaptation de La voix humaine de Cocteau. C’est un monologue, une grande actrice parle au téléphone avec son amant qui l’a quittée. Puis elle se suicide avec le téléphone. Mais je veux que ce soit Brontis qui la joue, qu’il entre dans la peau d’une femme, pas comme un travesti, mais en profondeur, avec les sentiments d’une femme. C’est une expérience. Et avec Pascale, nous ferons les décors ensemble.

P. M.-J. : A chaque fois que l’on a travaillé ensemble, il n’y a pas eu l’intention au départ de le faire. C’est venu naturellement. Ca s’est toujours présenté comme ça. Mais à partir du moment où l’on a cette mécanique-là, au fond, ça pourrait être sur n’importe quel support. On pense à un livre parce que l’on se dit que ça s’y prête bien. Mais c’est toujours le projet en lui-même qui le nécessite. Il n’y a pas de préméditation de notre part. Mais au fond, on pourrait tout faire ensemble.
A. J. : Mais on garde des choses chacun de notre côté. Pascale fait des tableaux magnifiques. Moi j’écris mes choses. Il faut garder des activités individuelles.

A. P. : Et quels sont vos projets futurs, justement ?

A. J. : Je prépare un autre film, je suis en train de le monter. Peut-être que nous allons commencer en novembre ou décembre. C’est adapté d’une bande-dessinée que j’avais faite, qui s’appelle Juan Solo et raconte l’histoire d’une personne que l’on jette dans une boite à ordure. On le ramasse et ensuite on assiste à son évolution, lui qui donne sa vie pour les autres. Il passe de la bestialité à la sainteté.

P. M.-J. : On doit aussi faire une exposition avec notre travail commun et mon travail personnel, en Belgique à la rentrée. Le Musée d’art contemporain de Bordeaux prévoit une rétrospective Jodorowsky avec, entre autres, notre travail commun. On a des projets avec le Moma, ils ont fait plusieurs hommages à Alejandro, c’est là qu’a eu lieu la première de La Danza de la realidad à New York. On a des projets de performance autour du tarot avec eux.
AJ : Qu’est-ce qu’on a comme projets ! Plus je vieillis et plus j’ai des choses à faire !

jodorowsky-afficheExposition du 10 juin au 10 juillet 2014
Galerie Forêt verte
19, rue Guénégaud – 75006 Paris
Ouvert du mardi au samedi, de 14h30 à 19h
Métro Odéon
Tél : 01 43 25 67 74
Email : galerie.foret.verte@free.fr
www. galerieforetverte.com

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