Vieille comme la nuit des temps, la fable en faisant parler des animaux nous donne sur un ton plaisant, souvent léger, une leçon de vie, et c’est visiblement avec ce genre littéraire que Marcela Iacub a décidé de renouer, dans la droite lignée d’Esope et de La Fontaine, pour tenter de nous faire voir ce que DSK pouvait nous révéler sur nous-mêmes. Ouf, cochon n’est donc pas une insulte.
Et si cela vous a échappé, c’est que vous manquez singulièrement de culture… Sans compter que c’est très humiliant pour Marcela Iacub qui est une grande intellectuelle, une femme libre respectueuse des droits de l’Homme et de la dignité de chacun, pas une mégère vengeresse qui, se sentant sexuellement humiliée par son partenaire, lui lancerait au visage en quittant le lit : cochon!
Une fable, donc. Un projet littéraire. Il faut entendre par là un projet digne. Respectable. Admirable, même. Il faut entendre un projet qui justifie tous les moyens puisque la fin visée est la littérature, et que, c’est absolument vrai, nous ne possédons rien de plus précieux. Dès lors, Marcela Iacub a donc tous les droits. Oui, elle a le droit, et même le devoir, de mettre son éthique de côté.
Elle peut coucher pour réussir sans qu’on la traite de salope, approcher l’épouse, la séduire puis déformer ses propos sans apparaître pour la traître absolue, elle peut s’attirer les feux médiatiques sans passer pour une opportuniste, empocher le pactole sans être vue comme une charogne, piétiner le droit au respect de la vie privée, détruire un homme et sa famille, elle peut tout, absolument tout, je vous dis, puisqu’elle fait de la littérature! Alors parlons-en, justement. Ne parlons même plus que de ça puisque en matière de livres, tout le reste, si j’ose dire, n’est que littérature…
Parlons du cochon. Du “gros” cochon dégueulasse, du porc que représente Dominique Strauss-Khan pour cette auteure et qui, nous dit-elle, sommeille en chacun de nous. Était-elle vraiment obligée de choisir un tel animal? Si ragoûtant? Si peu excitant? Guidée par la perspective jouissante de pouvoir traîner sa proie dans la boue, de le voir encore et encore bouffer sa merde, on voit bien pourquoi elle n’a pas pu résister à user et abuser de cette figure si peu casher pour démolir son ancien amant, mais il me semble qu’elle a fait là une grossière erreur. Au cochon, Marcela Iacub aurait dû préférer le taureau. Car le taureau est cochon lui aussi, mais également bien monté – ce qui ne doit pas être un défaut pour la libertaire qu’elle est – et que c’est dans l’arène, aux yeux de tous, que cette femme a décidé, par ce livre, de le mettre à mort. Mais malheureusement, n’est pas El Juli qui veut, et Marcela Iacub semble tout ignorer des règles de la corrida…. Or la corrida, comme la littérature, est un grand art, et elle se doit, pour nous emporter, de nous faire voir un combat loyal entre l’homme et la bête – il n’y a pas de “belle” en la matière.
Mais ce combat n’aura pas lieu puisque Marcela Iacub s’est frottée au mauvais taureau. Elle n’a pas voulu prendre de risques. Elle n’a pas eu le courage d’affronter un de ces jeunes et beaux et forts taureaux de Lidia qui aurait pu, d’un coup de corne, lui faire péter la aorte. Non, elle a préféré planter ses banderilles dans la chair vieillisante d’un vieux bovin déjà à terre, et qui n’en finissait plus de mourir. Le spectacle a donc tourné à la boucherie. Au bain de sang. Et maintenant, coincés dans les gradins, nous ne pouvons rien faire d’autre qu’huer le piètre matador pour que le carnage cesse enfin. Cessera-t-il un jour? Je n’en sais rien, mais ce qui est sûr, c’est que Marcela Iacub voulait la queue de DSK, et que nous ne lui donnerons même pas une oreille!
il n’y a aucune loyauté quand une seule partie des combattants (l’homme) définit les règles. Dans la corrida, le taureau n’est qu’un prisonnier innocent livré au sadisme d’un faux adversaire. Enfermé dans l’arène, le taureau acculé n’a d’autre choix que de tenter piteusement de faire face. L’homme, parfaitement entrainé, sait très bien ce qu’il fait. Le taureau ne connaîtra qu’une corrida. Nous avons donc d’un côté un homme qui a passé sa vie (à l’école et dans les arènes) à torturer des innocents et de l’autre, un animal qui doit se battre pour la première fois.
Je vois toute la loyauté d’un combat égal dans cette description, c’est vrai !
Et je trouve lamentable de citer La Fontaine qui défendait la sensibilité des animaux.
un porc, ragoutant ? le jambon c’est ragoutant, mais l’animal en lui même est plutôt dégoutant !