Bonne semaine pour le racisme !
A peine rentrés de la plage, ce sont les « exclueurs » d’extrême droite qui ont fait la rentrée. Première d’entre eux, à la performance tout à fait remarquée, Nadine Romano, pardon, Morano qui au Grand Journal de Canal Plus a répété sa lamentable tirade sur « son amie plus noire qu’une arabe ». Il faudra un jour rencontrer cette amie si originale dont tout le monde parle mais que personne ne voit jamais… Le fameux ami noir, arabe ou juif que l’on se félicite d’avoir dans ses contacts (l’eternel Farid Smahi en somme), réflexe d’extrême droite s’il en est…
Canal Plus et Morano, c’est un tandem qui marche. L’hôte tente tout pour ridiculiser l’invitée, l’invitée se sert de cette tribune « boboisante à mort » pour marquer son territoire, ses frontières et sa différence. Jeudi, les choses étaient encore un peu plus compliquées que cela et la performance de Morano ressemblait à s’y méprendre à un baroud d’honneur avant fermeture définitive. Que les choses soient claires : on ne regrettera sûrement pas l’éloignement (pour le plus longtemps possible) de la haute représentante du néant politique ! La droite républicaine mérite mieux que cela. A Fillon ou à Copé de faire le ménage…
Deuxième temps de cette semaine haute en couleurs (sic) pour l’extrême droite, cet appel du pied à peine voilé du souverainiste Nicolas Dupont-Aignan à Marine Le Pen. Quand on sait, de surcroit, que la déclaration fut lancée en direct sur les ondes accablantes de Radio Courtoisie, on pouvait s’attendre au pire.
« Et, moi, je crois qu’un jour ou l’autre, il y aura besoin de dialogue, bien évidemment, mais chacun devra faire peut-être un pas. Il n’y aura pas un Front National qui fera tout, ce n’est pas possible, on le sait bien », a poursuivi l’ex-candidat à la présidentielle (1,79 %), qui partage avec Marine Le Pen la même volonté de sortir de l’euro et de défaire les principaux traités européens. « Il faut construire plusieurs piliers à la maison et il faudra négocier la maison », a-t-il encore dit.
En fins observateurs de la chose politique, vous me direz que cette déclaration du leader de Debout la République n’a rien de surprenante tant les idéaux défendus par ce dernier se rapprochent des inclinaisons de Marine Le Pen. C’est évident mais la politique française recèle de nuances farfelues et autres rancœurs personnelles qui empêchent certaines évidences de devenir des réalités. En l’occurrence, un rapprochement effectif des deux tendances souverainistes serait redoutable. Accentuant leur force de frappe et leur audience, Dupont-Aignan comme Marine Le Pen construiraient à la droite de la droite ce que l’UMP semble désormais incapable d’atteindre en l’état actuel des choses : une union intéressée certes, mais une union tout de même…
Au fait, il y a deux ans, Dupont-Aignan expliquait en long, en large et en travers en quoi Debout La République n’avait rien à voir avec le Front National. Force est de constater que, avec le temps, Nicolas Dupont-Aignan devient moins tatillon avec « différences fondamentales »…
Je viens de revisionner la vidéo prise à la sauvette pendant une université d’été de l’UMP qui avait fait tellement de bruit que j’avais fini par n’en conserver qu’une image sonore déformée. J’y vois une petite dame légèrement affolée, qui semble vraiment tenir à complimenter ce jeune militant auprès de son vieux dirigeant, et la petite dame va peser des mots lourds de sous-entendus : «C’est notre petit Arabe», propos envers lesquels, ni une ni deux, Hortefeux, sans en évaluer le risque, prend le parti de l’ironie et dégaine sa première tapette sur le bras de mémé : «Il ne correspond pas du tout au prototype, alors…», et d’en remettre une couche, plus pince-sans-rire qu’un Amadou de la grande époque voyant que ça marche déjà sur Copé dont les zygomatiques s’étirent au premier rang de son théâtre des Deux Ânes, et puis surtout, ragaillardi d’un œillade malicieuse au principal intéressé : «Il en faut toujours un, mais dès qu’il y en a un, ça va. C’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes» avant de décoincer un «Allez, bon courage!» au jeune militant que j’entends dire «Merci» et s’éloigner de la vieille qui a déjà aiguillé sa parlote sur le pauvre J(F)C. J’espère que Brice Hortefeux ne me tiendra pas rigueur de ce manque de rigueur. Je pense que la prise de vue a été pour beaucoup dans le malentendu et la polémique nauséabonde qui s’ensuivit. On ne peut pas filmer de dos la pétillance du second degré, laquelle tient tout entière dans l’œil humoriste quand un pouffement de voix ficherait tout son effet par terre. Les humoristes professionnels semblent avoir constaté l’inaptitude croissante d’une grande partie du public à saisir la nature ironique de leurs salves. Ils en arrivent parfois à incruster des rires dans leur texte. Sauf que ce qui était drôle, chez Poiret pour ne citer que lui, c’était précisément qu’il ne riait que des yeux.
En quoi la formule « bonne semaine pour le racisme » s’applique-t-elle à Nicolas Dupont-Aignan ? Pour Madame Morano passe encore, il est vrai que ses propos sont pour le moins maladroits. Mais je mets au défi le rédacteur de cet article de sortir une seule casserole qui prouverait le « racisme » de M. Dupont-Aignan.
Naturellement, étant non-aligné sur la politique europhile hystérique, il est bien évident qu’il a peu de chance de remporter tous les suffrages. Cependant, il n’est pas honnête d’attribuer à cet homme des vices qu’il n’a pas. C’est un gaulliste que je ne crois pas une seule seconde xénophobe, et la perspective d’une alliance avec Le Pen ne fait pas de lui une « bête immonde », mais un patriote courageux, qui a compris que l’établissement d’une gouvernance mondiale avait de grandes chances de mener les peuples souverains à leur perte inéluctable.
J’ai tendu ma perche à l’hameçon de Sarko, mais une créature parvenue à son rang accorde-t-elle encore la moindre attention à l’homme du souterrain? Ma perche avait transpercé le fond du marécage, – pas commun, je vous l’accorde, – avait surgi en pleine tornade législative, au coup du «Marine Le Pen a beaucoup de talent» mieux connu sous l’appellation de «coup de Dahan». Mon objectif se limitait alors à protéger la droite républicaine à travers son incarnation récente, et je lançai ma caillasse non pas dans un esprit de démolition mais par souci de participer à l’édification d’un barrage antifacho allant d’une rive à l’autre tandis qu’une paire d’entristes antirépublicains se voyait ouvrir les portes de mon Assemblée. Or un barrage est un objet tridimensionnel qui dès l’instant où un certain point de vue a pu lui être affecté, un point pouvant consolider son unité formelle, va disposer d’un côté gauche, d’un centre, d’un côté droit, mais aussi d’une hauteur, d’une bassesse et enfin d’une profondeur commune à ces trois plans. Voilà donc le barrage sur lequel une République une et indivisible devra compter si elle veut empêcher le Frankenstein du pauvre de se procurer les membres dispersés (des mon)des saturniens, dévorateurs de leurs propres enfants. Je demeure convaincu de ce que le vrai Sarkozy, pas le siphon oratoire, mais l’homme-à-homme qu’il est, fut le président le moins raciste qu’ait connu la Ve république, chose qui n’affaiblit en rien le quasi-culte naturellement profane que je voue à De Gaulle. Sarkozy sur ce point est un anti-Berlusconi. Sur ce point et tant d’autres à qui sait reconnaître un amoureux de la Résistance et de sa complexion. Sarkozy est complexe, tout le monde n’a pas cette chance.
Il y a néanmoins une menace que la diversité culturelle exerce sur l’humanité, je dis bien l’humanité et non la seule majorité du fait des seules minorités, chargée qu’elle est en soute d’une magie sauvage capable de reptilianiser tout possesseur d’entrailles, et cette menace n’est autre que le communautarisme, qui n’est rien d’autre que la démultiplication de la ligne de front nationaliste et des assauts en chaîne que provoque celle-ci sur les forces d’évolution ou de mutation à l’œuvre dans le vivant, et que le darwinisme a trop longtemps cherché à opposer, lesquelles forces alliées du système génétique ne se laisseront jamais contester sans réaction. Pour ce qui est des limites du multiculturalisme, c’est finalement Hollande qui a dit l’essentiel. L’arme contre l’intégrisme religieux, nous l’avons déjà, et la meilleure qui soit, c’est la loi de la République. Merci à ses fondateurs! Évidemment, celui qui voudrait soumettre aux députés un projet de loi visant la légalisation de la polygamie ou l’abrogation de la loi Veil peut se lancer dans son aventure à ses risques et périls. En revanche, si la majorité l’éconduit sèchement, qu’il s’incline et retourne s’asseoir devant le peuple!
Mais il y plus grave. Car Morano n’est pas une soucharde, et son refus d’un dialogue interne des composantes culturelles multiples d’une nation en formation continue induit à une internité qui chez elle doit forcément transcender, à en juger l’intensité de sa foi, les frontières de la Gaule. Et là, je ne vois qu’une identité culturelle à même de rassembler sous un même feuillage et la souchienne Marine et le pic vert Nadine, marqués qu’ils sont du sceau de leur muraille civilisationnelle, et c’est évidemment : le national-catholicisme. Cette qualité plus haute qu’avait probablement invoquée le cafetier poujadiste Joseph Ortiz, for de la Reconquista menée par ses globules, et avait convaincu le député Pierre Lagaillarde qu’il n’y aurait pas plus efficace qu’un Espagnol pour en découdre avec les mahométans de son Algérie française avant qu’il ne lui faille s’exiler chez Franco à l’issue d’une Semaine des Barricades sans issue ou plutôt, sans autre issue que la cruzada national-catholique du bourreau de García Lorca; profitant d’une remise en liberté sur parole, Lagaillarde met les voiles vers Madrid où l’attendaient Salan et Susini. C’est là qu’ils vont ensemble fonder l’OAS.
Je ne tendrai plus ma perche à Nadine Morano. Quand on veut, on trouve ce qui sert son salut. Morano ne veut pas. Elle préfère nous élever le Ma-meilleure-amie-est-noire au grade de Plus-noire-qu’une-Arabe. Décrire la peau d’une personne que l’on aime requiert de la part de l’empathe une abstraction de soi préalable à toute forme d’immersion dans le monde touffu et néanmoins diffus que constitue un individu en révolution. Positionner un épiderme comme un rectangle dans un nuancier de couleurs, c’est dégrader l’espèce humaine. L’état de vulnérabilité absolue qu’est la dénégation du mal absolu, Robert Badinter l’a appelée «antisémitisme ordinaire». Il reprenait pour illustrer sa thèse une formule d’André Citroën qui ne me quitte plus : «L’antisémitisme, c’est détester les Juifs plus qu’il n’est absolument nécessaire». Le jour où vous vous convainquez de ce que la petite saloperie qu’on vous dit (qu’on vous fait) ne représente pas un acte d’agression raciste du fait qu’elle émane d’une personne avec laquelle vous partagez une relation d’amitié, voire d’affection, soyez sûr que vous venez de mettre tous ceux auxquels on vous assimile dans le pétrin qui est le vôtre. Madame Morano voudrait bien n’être pas raciste, mais voilà! dans ce domaine, elle est incontinente. Elle goûte le «délicieux Arabe» du sketch de Smaïn, l’«Arabe comme on les aime» du ministre de l’Immigration et de l’Identité nationale dont je tente de prêter, par arrogance performative, c’est à lui de le dire, des intentions ironiques à ses propos de merde. Et puisque la franchouillarde n’entend rien y entendre, voyons voir un peu avec le cœur de la groupie, – ah! mince, je sens ma perche qui se tend. – Une toute dernière question à la femme dont la «meilleure amie est tchadienne, donc, plus noire qu’une Arabe». Vous a-t-on jamais entendu confier à un journaliste, Madame le ministre, votre fierté d’avoir servi un Président dont le nez est moins droit que celui d’un Turc*?
* Peu de gens le savent, mais les Hittites possédaient cette caractéristique physique d’avoir le nez busqué, or comble d’ironie, ce peuple d’Anatolie centrale appartenait à la famille indo-européenne si chère au cœur des bouffeurs de sémites. C’est le genre de petit détail qu’il faut mettre en avant si l’on veut prévenir les dérapages racialistes de la morphopsychologie.