Pour la première fois depuis l’après-guerre, la gauche a obtenu ce dimanche la majorité absolue au Sénat. Déjà en difficulté pour cause de crise financière, de hausse du chômage et d’affaires politico-financières, c’est là une défaite cuisante et un avertissement sérieux pour Nicolas Sarkozy et l’Elysée.

«C’est plus qu’un échec, c’est un traumatisme pour la droite […], c’est d’une certaine façon prémonitoire de ce qui va se passer en 2012», a pronostiqué le favori de la course à la primaire socialiste, François Hollande. C’est «le premier acte de la reconquête pour la gauche», a renchéri le premier secrétaire par intérim du PS Harlem Désir.

A droite, seul le secrétaire général de l’UMP Jean-François Copé a concédé une «défaite» de son camp, alors que le Premier ministre François Fillon s’est contenté de constater une «forte poussée» de l’opposition. Pour en réduire l’impact, l’Elysée comme la majorité a voulu d’abord souligner que cette défaite n’était qu’une «conséquence» des victoires successives de la gauche dans les scrutins locaux et préféré renvoyer aux «vrais rendez-vous» de 2012. Mais d’ici-là, cette défaite devrait compliquer encore un peu plus la tâche du Président.
«Concrètement, cela ne va pas changer grand chose puisque le dernier mot revient à l’Assemblée nationale», résume un ministre, «mais, c’est vrai, cette défaite envoie un mauvais signal pour 2012».

Première victime de ce scrutin, la fameuse «règle d’or» de retour à l’équilibre budgétaire que Nicolas Sarkozy voulait inscrire dans la Constitution ne le sera pas. «C’est mort», concède un cadre de la majorité. Avec le basculement du Sénat, le gouvernement a perdu toute chance de réunir une majorité des trois cinquièmes des députés et sénateurs.

Autre conséquence, une majorité de gauche au Sénat pourrait retarder l’adoption de certains textes législatifs, même si l’actuel président du groupe PS au Sénat et désormais candidat au perchoir du palais du Luxembourg Jean-Pierre Bel s’est défendu de toute volonté d’obstruction.
«Sans doute le Sénat aura des exigences sur certains textes, en matière de fiscalité ou de République exemplaire», anticipe un responsable de droite, «il pourrait aussi adopter des textes qui, comme ils seront refusés par l’Assemblée et le gouvernement, feraient passer Nicolas Sarkozy pour un président qui bloque. Cette victoire est un vrai beau levier pour le PS».

Autre souci pour le chef de l’Etat, cette nouvelle défaite de la droite, après celles des municipales et des régionales, a relancé le débat qui déchire les centristes et l’UMP sur la stratégie pour 2012.
François Fillon a lancé un message aux centristes en attribuant la responsabilité de la défaite aux «divisions de la majorité» et sonné «l’heure du rassemblement». Comme Jean-François Copé, qui a invité son camp à «réfléchir à la nécessité d’être rassemblés et de ne pas être divisés».

Serait-on déjà dans l’après-Sarkozy ?

«Cette défaite est essentiellement une défaite de l’UMP due au sectarisme de ses dirigeants», analyse pour sa part le vice-président du Parti radical et soutien de Jean-Louis Borloo, Dominique Paillé. «La majorité doit tenir compte de la nécessité d’avoir une expression plurielle pour 2012, sinon nous serons dans la chronique d’un désastre annoncé», dit-il.
«Cela devient très compliqué pour le président», résume un centriste. «Cette nouvelle défaite va inciter de plus en plus de responsables de droite à jouer leur carte personnelle et à se positionner pour 2017», ajoute celui-ci pour qui «on est déjà dans l’après-Sarkozy».

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