L’actualité française fournit régulièrement de puissantes raisons de contester l’action du Président de la République. L’accoutumance à cette contestation pourrait facilement, si elle devenait réflexe, occulter un domaine où sa parole est incontestablement nouvelle et malheureusement pas assez audible, le Proche-Orient.

Le 23 février, devant le Président palestinien, Nicolas Sarkozy a dit l’essentiel. Aucun Président ne l’avait fait  avec autant de clarté à part peut-être François Mitterrand à la Knesset en 1982.

Appelant de ses vœux un « Etat viable, moderne, démocratique » pour les Palestiniens, il a ajouté : « la situation est d’autant plus incompréhensible et inacceptable que tout le monde connaît les termes d’un accord de paix définitif, deux Etats, Jérusalem capitale de deux Etats, un Etat palestinien dans les frontières de 1967, un échange de territoires, une discussion sur les réfugiés ».

Venant de tout autre que lui, il pourrait s’agir de paroles sévères. Elles ont d’ailleurs suscité autant d’interrogations que d’hostilités en Israël. Mais chacun le sait, en diplomatie un message vaut autant par son contenu que par son émetteur. La proximité et l’attachement du Président de la République à l’Etat d’Israël ne sont un secret pour personne et lui valent de solides inimitiés tant à droite qu’à gauche.

C’est la raison pour laquelle l’appel à la création d’un Etat palestinien répond bien sûr à  l’urgence de la situation humanitaire et économique des Palestiniens. Mais je veux croire qu’il s’agit aussi de l’expression d’une amitié tout aussi profonde envers Israël. En réalité, les palestiniens ont plus à craindre d’un Etat que les Israéliens. Comme Bernard-Henri Lévy l’écrivait en 2002, il y a huit ans déjà : Israël étant le plus fort, « il bénéficie de cette mince fenêtre qui lui permet de reprendre l’initiative, déplacer les lignes, briser le cercle infernal de la double naïveté belliciste et pacifiste ».

Car l’urgence n’est pas à la réconciliation mais au divorce. Que les Palestiniens, malgré leurs divisions, leurs luttes, leur misère soient seuls responsables de leur destin, de leurs réussites comme de leurs échecs. Sartre nous a appris qu’il fallait penser contre soi-même. Les amis d’Israël reconnaîtront peut-être dans cette phrase, que pour l’heure, il est plus utile à l’avenir d’Israël de plaider lucidement  pour l’édification rapide d’un Etat palestinien dans des conditions souhaitables que de soutenir aveuglément une politique sans perspectives.