Amir-Reza Arefi (aucun lien de parenté), 21 ans, a été arrêté en avril 2009 par les forces de sécurité iraniennes, soit deux mois avant la réélection ô combien contestée de Mahmoud Ahmadinejad à la présidence iranienne. Une arrestation surprise, puis un long silence… de plus de quatre mois, alors que simultanément ont éclaté dans le pays les plus grands troubles que la République ait connus en 30 ans… Puis vient le mois d’août et la tenue de funestes « procès spectacles ». Des manifestants anonymes et des grandes figures réformatrices jetés en pâture devant la presse et se livrant à des aveux forcés.
Et c’est là que réapparaît le jeune Arefi. L’agence de presse iranienne semi-officielle Fars, l’accuse d’avoir été l’un des instigateurs d’un coup d’Etat de velours ayant pour but de renverser la République islamique ! Rien que ça ! (quelle précocité !). Petit rappel, les Iraniens parlent de « Coup d’Etat » lorsqu’ils désignent la fraude massive qui a permis à Ahmadinejad et à son corps des Gardiens de la Révolution de s’octroyer le pouvoir au détriment du Réformateur MirHossein Moussavi. Selon l’agence Fars, qui cite l’acte d’accusation du jeune homme, celui-ci a été en contact direct avec les services de Renseignements américains. Son intermédiaire, un certain Foroud Fooladvand… Mais ce n’est pas tout, Fars révèle également qu’Amir-Reza Arefi, en compagnie d’un complice lui aussi arrêté, avait l’intention de faire exploser plusieurs sanctuaires et lieux de cultes chiites, parmi lesquels le mausolée de l’Imam Khomeiny, le fondateur de la République islamique… L’agence gouvernementale explique que le jeune homme avait soigneusement planifié et préparé son projet, puis l’avait filmé, avant de l’envoyer par cassette aux Etats-Unis. De quoi faire pâlir notre bon vieux James Bond.
Puis c’est de nouveau le silence total. Pendant ce temps, les manifestations ne faiblissent guère en Iran. Malgré de nombreux morts, arrestations, et de révélations de cas de torture et de viols, les manifestants de l’opposition, qui n’ont bien sûr pas l’autorisation de protester, détournent les commémorations officielles gouvernementales en immenses journées anti-Ahmadinejad, puis bientôt anti-Régime. C’est le cas de la journée officielle de Jérusalem (anti-Israël), du 30ème anniversaire de la prise d’otage de l’ambassade américaine, ou de la Journée de l’Etudiant, théâtre de centaines d’arrestations chez les opposants.
Arrivent enfin les cérémonies religieuses de l’Ashoura, commémorations annuelles de la mort de l’Imam Hossein (adulé en Iran) il ya plus de 1300 ans, que les Iraniens ont pour habitude de célébrer dans la rue. Or malgré l’aspect religieux que revêt cette journée, où faire couler le sang équivaut à un péché, les autorités iraniennes vont tuer, y compris le neveu du leader de l’opposition Moussavi. Le bilan officiel ? Huit morts et plus d’un millier d’arrestations. Un mois plus tard, le 28 janvier, elles vont pendre deux « manifestants ». Il s’agit du jeune Arash Rahmanipour, 20 ans, et de Mohammad-Reza Ali Zamani, 37 ans, provoquant l’indignation de la communauté internationale. Ils ont été exécutés pour avoir été membres de « l’Association de la Monarchie d’Iran », ce qui fait d’eux des « mohareb » ou « ennemis de Dieu », accusation passible de la peine de mort en République islamique. Selon la chaîne de télévision iranienne en langue anglaise, Press TV, cette association est « un obscure groupe monarchiste cherchant à rétablir le règne de la dynastie Pahlavi en Iran ». Pourtant, ni l’existence de cette organisation, soi-disant basée aux Etats-Unis sous les ordres du fameux Foroud Fooladvand, ni les liens des deux condamnés avec celle-ci, n’ont pu être prouvés.
Selon le pouvoir judiciaire, les deux « manifestants » ont été arrêtés lors de l’Ashoura. Or leurs deux avocats révèleront qu’ils ont été incarcérés bien avant la présidentielle de juin.
On reparle alors de nouveau du jeune Amir-Reza Arefi, ou alors uniquement son avocat, Mohammad Mostafaei, les agences de presse officielles iraniennes se faisant curieusement discrètes sur son sort. Sur son blog, l’avocat annonce que son client a été condamné à mort. Selon le jugement rendu par la branche 15 du Tribunal de la Révolution, Amir-Reza Arefi a été condamné le 16 février à la peine capitale pour avoir été membre et avoir lui aussi collaboré avec « l’Association de la Monarchie d’Iran ». Sur son blog , l’avocate iranienne et défenseuse des droits de l’homme, Shadi Sadr, explique qu’Amir-Reza Arefi « a pris contact avec une des chaînes de télévision satellitaire, uniquement parce qu’il avait pour rêve de partir à l’étranger. Or il est maintenant condamné à mort, car accusé d’être un « mohareb », un poseur de bombe, ainsi qu’un membre de l’Association de la Monarchie d’Iran ! ». Hier, le chef de la police iranienne, le général Ismail Ahmadi Moghaddam, a accusé la télévision anglaise BBC de n’être qu’une « arme des services secrets britanniques MI 16», et la chaîne américaine Voice of America « d’appartenir à la CIA », et a menacé de sévères représailles tout Iranien collaborant avec ces médias. L’avocat d’Amir-Reza Arefi, a révélé qu’il avait été donné à son client un délai de 20 jours pour faire appel. Autant dire que si rien n’est fait avant le 12 mars prochain, le jeune Arefi sera pendu.
Cette condamnation intervient alors que s’est tenue lundi dernier à Genève une réunion du Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en République islamique. Comme prévu, la délégation iranienne s’est refusée à tout commentaire sur la répression en cours dans le pays, et n’a pratiquement accepté aucune recommandation occidentale, parmi lesquelles la libération des prisonniers politiques, la visite en Iran du rapporteur de l’ONU sur la torture, ainsi que l’arrêt des exécutions.
Ultime pied de nez aux Occidentaux, le secrétaire général du Conseil supérieur des droits de l’Homme en Iran, Mohamad Javad Larijani, a affirmé qu’il y avait une évolution positive des libertés en République islamique. Ironie du sort, la République islamique pourrait bientôt devenir membre de ce même Conseil, en charge de promouvoir la défense des droits humains ainsi que d’émettre des recommandations sur les violations. En effet, quatre pays asiatiques doivent y faire leur entrée permanente dès juin. Et, en sachant qu’il n’y a que quatre autres candidats en plus de l’Iran, sur un total de quatre sièges, et que la République islamique bénéficie déjà du soutien de la Russie, de la Chine, et du Venezuela, on pourrait très vite voir Mahmoud Ahmadinejad donner des conseils à la France en matière de droits humains.