Arthur Adamov (Adamian)  est né le 23 août 1908 à Kislovodsk (Caucase) et s’est occulté à Paris le 21 pédale de l’an 97 de l’Ère ‘Pataphysique(15 mars 1970, apparent ) des suites d’une surdose de barbituriques, ce fut un auteur dramatique.

Antonin Artaud (Antoine Marie Joseph Paul Artaud) est  né à Marseille le 4 septembre 1896 et  s’est occulté à Ivry-sur-Seine le 10 pédale   de l’an 71 de l’Ère ‘Pataphysique(14 mars 1948, apparent), ce fut un poète et théoricien du théâtre.

Arthur Adamov écrit  dans   « L’homme et l’enfant (souvenirs) » publié au 4è trimestre de 1968: « …mes parents possédaient une bonne partie des pétroles de la Caspienne… j’ai voulu me suicider à vingt ans, puis à trente , puis avant d’atteindre la quarantaine… j’avais un peuple de servantes  ma demoiselle française, ma nourrice Macha, ma soeur que je range parmi les servantes , sans doute  parce que ma mère me préférait à elle…  Genève ,1914-1922  …on nous nomme macaques on nous accuse de manger le pain suisse… 1918  l’Armée rouge envahit le Caucase nos puits son nationalisés… nous vivons maintenant de bijoux vendus au jour le jour…. ce que j’ai pu rire en 18 quand mes frères ont perdu leurs puits eux aussi sans rien faire comme des imbéciles…obligés de nous replier sur l’Allemagne , paradis des miséreux… je fais exprès de me blesser avec un canif devant le miroir .. 1924… je descends dans le métro de Paris le pantalon déchiré aux genoux… il me plaît qu’il soit déchiré  j’ai élargi encore les déchirures…  mon père parle de m’inscrire à l’école Bréguet , il me voit ingénieur!…  » Le Songe de Strindberg première grande mise en scène d’ Artaud… il monte sur la scène  « La scène se passe en  Suède , c’est-à-dire nulle part »… un Suédois se lève et dit « Que tous les Suédois quittent la salle … un Danois courtaud presque un nain  « Que tous les Danois fassent comme les Suédois « … Paul Valéry est conspué  « Merde pour Valéry! »…un vieillard vêtu d’une redingote gesticule: Vive la France! Vive Péguy!… hurlements dans la salle  « Les Soviets partout! …je demande à Huguette de pisser sur moi… elle accepte… je demeure son prisonnier volontaire à peu près trois semaines… Octobre 1966 …j’aurais demandé de téléphoner au Bison pour lui dire que je suis mort… 2-2-66 obsession du suicide promenade au long de la Seine pour savoir à quel endroit l’eau est assez profonde… Le canot de l’amour s’est brisé contre  la vive courante  Lili je t’aime  [Maïakovski].. 4-3- 1967  …vais-je me tuer ou pas ?…22-8-1967 …   remords stupides …si je ne me suis pas suicidé c’est que je t’aime…ne pas être ce jongleur affairé qui baignait en sueur sous le rire du public … le défi ferme,  mesuré…

 Arthur Adamov écrit  dans son journal  :   « …en 1945 je décide d’aller voir Antonin Artaud , oublié de tous, « en traitement à l’asile de Rodez  depuis le  début de la guerre (1939)…Artaud affaibli, effrayé. …tremble de tous ses membres . Il me  raconte sa vie à Rodez . Accuse le docteur Ferdière (auteur d’un Gérard de Nerval !) de le terrifier: Si vous n’êtes pas sage , monsieur Artaud on va vous faire encore des électrochocs . Artaud , le visage traversé de tics, ravagé, ridé, la bouche édentée;  mais tout à coup s’échappe une voix retentissante, hurlante Nous noyés dans ses mots…  Antonin Artaud au Vieux-Colombier  perd ses papiers , les cherche par terre, balbutie; il est très pâle.  La salle garde un silence de mort , Artaud impose le respect.  J’aide Gide à monter sur la scène , il veut embrasser Artaud …Le suicide d’Artaud au chloral (l’arme massive)… »
      [Antonin Artaud sombra dans la folie. Il subsiste  un enregistrement exceptionnel intitulé Pour en finir avec le jugement de Dieu: une création  hors du commun. Artaud est enregistré quelques mois à peine avant sa mort. Il est alors interné et souffre d’un cancer du rectum. Cette création devait être diffusée le 2 février 1948 mais le directeur de la RTF décide de la censurer  la veille de sa diffusion. Il faudra attendre 25 ans pour l’entendre.  En effet, les oreilles de l’époque n’étaient pas prêtes à écouter un texte si subversif.  Artaud éructe, crie, hurle sa poésie. Son vomi verbal dénonce l’ordre moral:     
          « Là où ça sent la merde, ça sent l’être. L’homme aurait très bien pu ne pas chier, ne pas ouvrir la poche anale, mais il a choisi de chier comme il aurait choisi de vivre. Au lieu de consentir à vivre mort. C’est que pour ne pas faire caca, il lui aurait fallu consentir à ne pas être, mais il n’a pas pu se résoudre à perdre l’être, c’est à dire à mourir vivant… »           
           L’oeuvre est précédée d’une introduction de Roger Vitrac « donnant des clés »; il évoque ses activités d’acteur chez Charles Dullin. Des textes sont lus par Maria Casarès, Roger Blin et Paule Thévenin. Roger Blin se souvient  dans une vidéo  de cette soirée  du  13 janvier 1947 lorsque  Antonin Artaud se produisit sur la scène du Vieux Colombier. En 1973 Gilles Deleuze  écrit « La folie d’Artaud ».  À la Promenade de Vénus (le cafe surréaliste)  à trois reprises j’ai posé à André Breton  la même question   Que pensez-vous d’Artaud?   il m’a répondu toujours par la même  chose: Un révolté pour rien…]
 
          L’Autoportrait d’Antonin Artaud fut emporté à 2 136 750 euros chez Sotheby’s  le  16 palotin de l’an 141 de l’Ère ‘Pataphysique (5 avril  2011, apparent).  L’oeuvre avait était estimée entre 500 000 et 700 000. C’est un autoportrait à la mine de plomb daté du 17 décembre 1946, quelques mois à peine après la fin de son internement forcé à Rodez (Aveyron).  Ses traits sont incisifs, son expression marquée à la mine de plomb.
             Il faut regarder ce dessin encore une fois après l’avoir vu,  déjà une fois, écrit le poète en 1946. Je crois qu’il reste alors non dans l’espace, mais dans le temps, à ce point de l’espace du temps où un souffle de derrière tient l’existence et la suspend. 
            Ses dents sont cassées à la suite de  58 séries d’électrochocs sans anesthésie. Le regard se pose sur le long cou, les contours de la pomme d’Adam:  C’était pour lui la boule à cris, souligne Thomas Bompard. Enfin, il y a le regard clair, si lointain et déterminé à la fois, du génie foudroyé.  Le visage humain n’a pas encore trouvé sa propre face, écrivit Antonin Artaud. Mais le sien, peint tel qu’en lui-même, n’a pas fini de fasciner.

« Antonin Artaud » par Picasso