Fernando Arrabal symbole des avant-gardes sera l’étoile de ARCO 2017 (la FIAC espagnole). Dans cette interview surréaliste de Carmen Sigüenza (agence EFE) Arrabal révèle que, dès l’enfance, il voulait être peintre par tradition familiale, que la peinture est essentielle pour lui.
[« La Vanguardia » de Barcelone]
Carmen Sigüenza.- Monsieur Arrabal je crois que vous amenez à ARCO vos poèmes plastiques ; c’est bien ça ?
Fernando Arrabal.- Mes poèmes plastiques sont apparus sur un plateau de télévision. À ma surprise. Lors de ma visite à Andreu Buenafuente. Ils avaient été copiés à la perfection. Je les publie presque tous les jours de l’année sur Twitter. Avec les dimensions. Toute ma vie j’ai été et suis un peintre compulsif. Et j’envoie des lettres et des cartes arrabalesques. Parfois elles disparaissent à la poste : c’est un hommage anonyme. Quand le démon perd les clés il saute par la fenêtre. Je n’ai jamais vendu et ne vendrai jamais ni mes « Grands Tableaux du 20e Siècle » ni le plus petit dessin.
Carmen Sigüenza.- En quoi consistent-ils et combien en apportez-vous ?
F.A.- J’ai peu d’amis peintres. Nous sommes « hacedores », c’est le mot grec. Je fais comme eux. Notons qu’ils se sont occultés et n’ont connu accueil et couronnement que post-mortem. Comme Duchamp, Man Ray, Magritte, Warhol… La terre est ronde : l’ont-ils soulevée ?
Carmen Sigüenza.- Qu’est-ce que la peinture pour vous?
F.A.- Elle est essentielle. Depuis toujours. Et aussi une manière de prendre place dans la tradition familiale. Le compagnon « admiré » de Julio Romero de Torres était mon grand-père. Mon père a beaucoup peint en prison. Une centaine de condamnés à mort. Œuvres que j’ai aussi publiées sur Twitter. Mon frère est un excellent portraitiste ; il peint à l’huile. Le meilleur en ce domaine ? Ils ont tous eu en outre une profession. Mon frère a réussi parallèlement l’entrée à l’école de peinture de San Fernando et celle de San Javier pour les pilotes de l’armée de l’air. La même année que le pilote-et-roi Juan Carlos. Tous se sont consacrés à la peinture et ont assumé leur vie professionnelle. Pour se réveiller ils disposaient de serpents à sonnettes.
Carmen Sigüenza.- Est-il vrai que vous avez toujours voulu être peintre ?
F.A.- Surtout à Ciudad-Rodrigo lorsque j’étais en maternelle chez les sœurs thérésiennes. Avec l’admirable mère Mercedes. Au tic-tac de la pendule elle ajoutait des tonnerres. Ma famille et mon enivrante maîtresse d’école croyaient que je serais peintre.
Carmen Sigüenza.- Quel est le pouvoir de l’artiste aujourd’hui face à un tel culte de la laideur dans tous les domaines ?
F.A.- Les artistes n’ont aucun pouvoir. Ils changent le monde en créant dans les catacombes. Avec tous ces tsunamis l’artiste invente le feu.
Carmen Sigüenza.- Est-ce que les mots parfois… Avez-vous préféré une autre forme d’expression ?
F.A.- Pour écrire je n’ai besoin que d’un ordinateur. Pour faire du cinéma seulement d’une petite caméra. Et pour peindre, de pinceaux, de la colle, et des outils. C’est un monde vraiment étonnant et brutal. Si la souris était un rat elle embrasserait le rat qu’elle est devenue. Quant au théâtre je suis en train de mettre la dernière main à mon cinquième et dernier dialogue pour le 21e siècle avec « Dali-Gala », « Dali vs Picasso » , « Staline-Wittgenstein » (le plus tordant), « Cervantès-Shakespeare », « Sarah Bernhardt-Victor Hugo » (le meilleur !) .
Carmen Sigüenza.- Vous avez connu Dalí et Picasso ?
F.A.- À mon âge et comme j’étais en France ce serait difficile de ne pas les avoir connus. J’aurais dû terminer l’oeuvre cybernétique que Dalí voulait créer avec moi. Seuls les mille-pattes snobs portent des baskets de marque.
Carmen Sigüenza.- Comme créateur, lequel préférez-vous ?
F.A.- Picasso est un peintre exceptionnel quasi monstrueux et à multiples facettes. Malheureusement pendant un tiers de sa vie il s’est affilié à la peste. Quel terrible exemple pour nous tous ! Dalí a été passionné non seulement de peinture mais aussi par les différentes branches de la science : la biologie l’astronomie, la cosmologie, etcetera. Et il a organisé et payé de ses deniers la plus cruciale réunion scientifique du 20e siècle. Quand la ruche devient agnostique les abeilles créent un dieu.
Carmen Sigüenza.- Vous aimeriez un musée ? qu’aimeriez-vous y mettre ?
F.A.- J’en ai la nostalgie. Ceux qui dirigent ont dirigé et dirigeront n’ont pas la moindre idée (et d’ailleurs ils n’en n’ont nul besoin). Je rêve d’un musée rassemblant les 4 avatars de la modernité. Supérieur à celui de Dalí ? Dada, surréalisme, panique, pataphysique, avec les jeunes explorateurs et originaux. Bien évidemment avec ou sans musée jamais je ne vendrai un seul des tableaux que les maîtres m’ont offerts de leur vivant. Les cannibales de la spéculation meurent empoisonnés.
Carmen Sigüenza.- Vous êtes très lié d’amitié avec Houellebecq et lui est très critique vis-à-vis de l’art contemporain. Et vous, comment le voyez-vous ?
F.A.- L’art reflète le chaos primitif. Le meilleur et le pire. Dans les profondeurs le scaphandrier myope est visionnaire.
Carmen Sigüenza.- Croyez-vous que le marché corrompt tout ?
F.A.- Il y a toujours eu de vrais amateurs et des collectionneurs que seules les cotes du marché intéressent. Les collectionneurs fidèles ne changent jamais de signe du zodiaque.
Carmen Sigüenza.- Comment croyez-vous que les nouvelles technologies ont changé l’art ?
F.A.- Elles ont changé les supports traditionnels. Après avoir réalisé sept long-métrages professionnels maintenant, avec une caméra miniature, l’unique assistance de ma fille, et un magnifique monteur je réalise des court-métrages en 48 heures. Comme « Salinger et Oona ». Et cette année (si Pan me prête vie) je réaliserai « Orwell à Londres », « Simon Leys et le Batavia » où « Strindberg à Stockholm ». Sauf le vice rien de plus excitant que la vertu.
Carmen Sigüenza.- Jusqu’où un créateur peut-il connaître l’étonnement ?
F.A.- Comme la racine carrée de moins 1. Les perroquets au langage le plus châtié parlent l’espéranto sans accent.
Carmen Sigüenza.- Étant donné votre parcours comment voyez-vous tout ?
F.A.- Je vais avoir 85 ans et j’espère qu’apparaîtront d’autres thérésiennes qui m’enseigneront avec la grâce, l’esprit et le savoir de la mère Mercedes.
Carmen Sigüenza (agence EFE).- Vous irez à Arco ?
F.A.- Oui, j’irai accompagné de ma fille et ce sera un grand plaisir, si le dieu Pan me prête vie. Malheureusement mes amis peintres resteront à Paris. J’espère que lors d’une prochaine invitation nous irons tous. À cause de la crise : le divan du ministre est un sac à dos.
Fernando Arrabal, símbolo de las vanguardias, será la estrella de ARCO 2107. En esta surrealista entrevista con Carmen Sigüenza (agencia EFE) , Arrabal revela que desde niño quiso ser pintor, por tradición familiar, que la pintura es « esencial » para él.
[« La Vanguardia » de Barcelone, laregledujeu.org, lemonde.fr, etc.]
Carmen Sigüenza.-: Señor Arrabal, creo que trae a ARCO sus poemas plásticos. ¿Es así?
Fernando Arrabal.- Mis poemas plásticos aparecieron en un plató de la televisión. Para mi sorpresa. Durante mi reciente visita a Andreu Buenafuente. Los copiaron casi perfectamente. Los publico casi todos los días del año en Twitter. Con las dimensiones. Toda mi vida he sido un pintor compulsivo. Y envío cartas o tarjetas arrabalescas. A veces desaparecen en Correos: es un homenaje anónimo. Cuando el demonio pierde las llaves, salta por la ventana. Nunca he vendido ni nunca venderé ni mis « Grandes Cuadros del Siglo XX » ni el más diminuto dibujo.
Carmen Sigüenza.- ¿En qué consisten y cuántas piezas trae?
F.A..- Tengo pocos amigos pintores. Somos « hacedores », es la palabra griega . Realizo como ellos. Por cierto, se ocultaron sin conocer la acogida y la coronación vivitos y coleando. Como Duchamp, Man Ray, Magritte, Warhol… La tierra es redonda: ellos ¿la levantaron?.
Carmen Sigüenza.- ¿Qué es para usted la pintura?
F.A..- Es esencial. Desde siempre. Y también una manera de insertarme en la tradición familiar. Mi abuelo fue el compañero « admirado » de Romero de Torres. Mi padre en la cárcel pintó mucho. Un centenar de condenados. Obras que también he publicado en Twitter. Mi hermano es un excelente retratista al óleo. ¿El mejor en este terreno? Todos ellos además tuvieron otra profesión. Mi hermano ganó paralelamente la escuela de San Fernando de pintura y la de San Javier de pilotos. El mismo año que el « piloto y rey » Juan Carlos. Todos se dedicaron con pasión a la pintura y con profesionalidad a sus vidas. Para despertarse, mis mayores dispusieron de serpientes de cascabel.
Carmen Sigüenza.- ¿Es verdad que siempre ha querido ser pintor?
F.A..- Sobre todo en Ciudad Rodrigo, cuando fui párvulo con las Teresianas. Con la inolvidable madre Mercedes. Que al tic-tac del reloj le añadía truenos. Todos y la familia y mis embriagadoras maestras creían que sería pintor.
Carmen Sigüenza.- ¿Cuál es el poder de artista hoy, ante tanto culto a la fealdad en todos los órdenes?
F.A..- Las artistas no tienen poder ninguno. Cambian el mundo creando en las catacumbas. Con tanto maremoto el artista inventa el fuego.
Carmen Sigüenza.- ¿La palabra alguna vez le ha cansado y ha preferido otra forma de expresar su creación?
F.A..- Para escribir solo requiero un ordenador Para hacer cine, solo una cámara diminuta. Y para pintar, pinceles, “glu” y herramientas. Es un mundo verdaderamente asombroso y brutal. Si el ratón fuera una rata, le besaría la rata en que se volvió.
Estoy terminando en teatro mi quinto y último « Diálogos para el XXI », con « Dalí-Gala », « Stalin-Wittgenstein » (la más desternillante), « Cervantes-Shakespeare », « Dalí vs Picasso » y « Sarah Bernhardt-Víctor Hugo (¡la mejor!). La palabra, la ciencia, las matemáticas, el ajedrez, por ejemplo, excitan, alientan y descorazonan.
Carmen Sigüenza.- ¿Conoció a Dalí y a Picasso ?
F.A..- A mi edad y estando en Francia era difícil. Hubiera debido terminar la obra cibernética que Dalí quería crear conmigo. Solo los ciempiés esnobistas llevan zapatillas de marca.
Carmen Sigüenza.- ¿Cómo creadores, quiénes de ellos le gustaban más?
F.A..- Picasso es un pintor excepcional, casi ‘monstruoso’ y de muchas facetas. Desgraciadamente, durante un tercio de su vida se afilió a la peste. ¡Qué tremendo ejemplo para todos! A Dalí le apasionó no solo la pintura sino las diferentes ramas de la ciencia: la biología, la astronomía, la cosmología, etcétera. Y realizó y pagó la más determinante reunión científica del siglo XX. Cuando la colmena se vuelve agnóstica, las abejas crean un dios.
Carmen Sigüenza.- ¿Le gustaría tener un museo? ¿Qué le gustaría que tuviera dentro?
F.A..- Lo añoro. Los que dirigen, han dirigido y dirigirán, no tienen ni remota idea (ni falta que les hace, por cierto). Sueño con un museo de los cuatro avatares de la modernidad. ¡Superior al de Dalí! Dadá, surrealismo, pánico, patafísica; con los jóvenes exploradores y singulares. Obviamente, con museo o sin él nunca venderé ninguno de los cuadros que me regalaron en vida los maestros. Los caníbales de la especulación mueren envenenados.
Carmen Sigüenza.- Es muy amigo de Houellebecq y él es muy crítico con el arte contemporáneo ¿y usted cómo lo ve?
F.A..- El arte refleja el caos primitivo ¡Lo mejor y lo peor! En lo profundo, el buzo miope es visionario.
Carmen Sigüenza.- ¿Cree que el mercado corrompe todo?
F.A..- Siempre hubo aficionados auténticos y coleccionistas de la cotización. Los coleccionistas fieles no cambian nunca de signo de zodíaco.
Carmen Sigüenza.- ¿Cómo cree que las nuevas tecnologías han cambiado el arte?
F.A..- Han cambiado los soportes tradicionales. Después de realizar siete largometrajes ‘profesionales’, ahora con una cámara diminuta, la única ayuda de mi hija y un magnífico montador, hago cortos en 48 horas, como « Salinger y Ona’. Y este año (si el dios Pan me presta vida) realizaré « Orwell en Londres » « Simon Leys y el Batavia » o « Strindberg en Estocolmo ». Salvo el vicio, no hay nada más excitante que la virtud.
Carmen Sigüenza.- ¿Qué es la capacidad de asombro para un creador?
F.A..- Como la raíz cuadrada de menos uno. Los loros más castizos hablan el esperanto sin acento.
Carmen Sigüenza.- Con el recorrido que usted tiene ¿cómo ve todo?
F.A..- Voy a cumplir 85 años y espero que aparezcan otras Teresianas que me enseñen con la gracia, el espíritu, el duende y el saber de la madre Mercedes.
Carmen Sigüenza (agencia EFE).- ¿Irá a ARCO?
F.A..- Sí, iré acompañado por mi hija y con mucho gusto (si el dios Pan me presta vida). Desgraciadamente, mis amigos pintores se quedan en París. Espero que en la próxima invitación vayamos todos. A causa de la crisis, el sofá del ministro es una mochila.