La guerre en Ukraine est devenue le révélateur d’une dégradation politique mondiale et d’un basculement des rapports de force. Elle oppose moins deux armées que deux visions du monde : celle de l’autocratie et du mensonge, incarnée par Moscou et complaisamment relayée par Washington, et celle d’un pays meurtri, que l’on voudrait presque voir capituler sous prétexte de « réalisme ».
Derrière les ruines de Bakhmout et les tranchées du Donbass se joue une bataille autrement plus vaste : celle du sens même de la démocratie, de la valeur de la liberté et de la capacité des sociétés occidentales à défendre autre chose que leurs seuls intérêts matériels immédiats.
Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump a multiplié les promesses tonitruantes : sanctions contre la Russie, tarifs contre ses alliés, ultimatums adressés à Vladimir Poutine. Mais derrière les proclamations, les actes se réduisent à néant. Six promesses en trois mois, et zéro action.
L’ultimatum de juillet, qui accordait cinquante jours à Poutine pour « avancer vers la paix », s’est évanoui sans suite. Le 28 juillet, Trump en réduisait lui-même le délai à une dizaine de jours : une bravade de plus, aussitôt oubliée. Le seul geste concret fut un décret visant l’Inde, alourdissant les tarifs de 25 points. Une mesure en trompe-l’œil, qui n’entrera en vigueur qu’à la fin août et n’aura sans doute qu’un effet marginal.
Même à la veille du sommet d’Anchorage, où il promettait des « conséquences sévères » pour la Russie, Trump a achevé de révéler la mascarade : loin d’imposer des sanctions, il s’est incliné devant Vladimir Poutine. Les images ont fait le tour du monde, confirmant l’impression que sous l’ère MAGA, la Maison Blanche est gérée depuis le Kremlin.
Ce qui frappe le plus dans ce cauchemar, c’est à quel point les États-Unis se sont rapetissés. Ceux qui ont brandi le slogan revanchard Make America Great Again ont produit l’inverse : jamais l’US n’a paru aussi insignifiant, pathétique et peu attirant. Ce n’est plus la nation qui se pensait garante de valeurs universelles, c’est le triomphe d’une pensée réduite à l’intérêt matériel immédiat.
Quand J. D. Vance explique que les États-Unis ont cessé de financer l’Ukraine parce que « les Américains en ont assez de payer pour cette guerre », ce n’est pas un signe de grandeur mais l’aveu d’une faillite morale. Des boutiquiers ne peuvent diriger un grand pays. Ils croient qu’en cessant de soutenir les démocraties, l’Amérique se renforcera. Mais c’est l’inverse qui se produit, elle perd ses derniers alliés et s’affaiblit, car le mal ne disparaît jamais de lui-même.
Ce mal, c’est le fascisme russe. Une idéologie d’expansion née de la Russie de Poutine, qui ronge son propre pays comme une cellule cancéreuse et cherche à métastaser sur de nouveaux territoires. Quand le ministre russe des Affaires étrangères se présente au sommet d’Anchorage vêtu d’un pull à l’effigie de l’URSS (CCCP), c’est le signe trivial d’un impérialisme décomplexé, se moquant de la faiblesse du monde.
On ne négocie pas avec le mal, pas plus qu’on ne négocie avec des cellules cancéreuses : on les détruit, ou elles détruisent leur hôte. L’Histoire l’a déjà montré : Munich 1938, qui « pacifia » Hitler pour un an, devrait suffire de leçon. Pourtant, Trump continue à se poser en pacificateur, alors qu’il n’est que le valet d’un criminel de guerre.
Dans ce paysage crépusculaire, la figure de Volodymyr Zelensky apparaît comme un contre-exemple saisissant. Le chef d’un État ravagé par la guerre conserve ce que ni Trump ni Poutine n’ont : la légitimité de la résistance, le courage qui mobilise et convainc. La guerre de Poutine n’est pas seulement dirigée contre l’Ukraine : elle vise Zelensky lui-même, devenu un symbole mondial, qui n’a pas fui et refuse de capituler. Sa simple présence rappelle chaque jour que la victoire ukrainienne n’est pas impossible et qu’aucune sécurité européenne ne sera possible sans la victoire de son pays.
L’Europe, longtemps hésitante, se réveille nerveusement. Les dirigeants du Vieux Continent ont dû dire adieu aux illusions : sans victoire ukrainienne, il n’y aura pas de sécurité européenne.
Il y a quelques jours encore, le monde avait les yeux tournés vers l’Alaska, présenté comme « le sommet du siècle ». Mais la rencontre essentielle se jouera demain, à Washington. Car Poutine, après onze ans de guerre pour arracher le Donbass, après des centaines de milliers de pertes et l’appui de la Chine, de l’Iran et de la Corée du Nord, n’a rien obtenu. Ni les armes, ni les mercenaires, ni les missiles n’ont changé la donne.
Alors il a tenté de manipuler le président américain, afin de forcer Zelensky à céder le Donbass. Trump, contaminé par cette idée, voudra l’imposer lundi. Le scénario est clair : céder Slaviansk, Kramatorsk et d’autres villes en échange des promesses de sécurité éphémère ». Et, en cas de refus, accuser Kyiv d’ingratitude pour couper l’aide militaire et laisser l’Europe se débrouiller seule.
L’invité du Bureau ovale devra donc expliquer à Trump que cette idée ne fonctionnera pas, tout en évitant de provoquer une rupture qui permettrait à Washington de se désengager totalement. Un exercice d’équilibrisme, d’autant plus difficile que l’humeur de Trump change au gré d’un sourire de Poutine.
Une fois encore, le monde retiendra son souffle. Dans ce face-à-face, c’est l’homme le plus exposé de la planète qui portera non seulement le destin de son pays en flammes, mais celui de l’Europe entière.
Je fais confiance à l’intelligence de Zelensky, à la finesse et à la rapidité de sa pensée. Cette fois, il est mieux préparé pour gérer ce président américain calamiteux. Et l’histoire retiendra peut-être que, face à l’effondrement moral de l’Occident, c’est un président ukrainien qui aura rappelé que l’honneur et la dignité n’ont pas de prix.

Depuis que madame von der Leyen ait allé prêter hommage à Donald Trump dans l’un de ses golfs privés, le mythe de l’Europe puissance a volé en éclats. L’Europe a capitulé (faut-il écrire kapitulieren ?) sans même se battre, accepté un racket sans précédent. Madame von a été effrayée par les pantomimes de catcheur catégorie poids lourd de Trump, l’abominable gorille de Washington.
Emmanuel Macron a eu le mot juste en disant que l’Europe ne sait pas se faire craindre. En effet, à qui nos dirigeants européens peuvent-ils faire ? Pas à Poutine, pas à Xi Jinping, pas même à Trump. Peut-être aux petits oiseaux : canaris, pinsons, moineaux, mésanges, rouges-gorges, hirondelles, etc.
Sanchez l’Espagnol qui joue les matamores contre Israël (c’est normal pour un Espagnol ; il n’aime pas les marranes) est allé cirer les bottes à Xi Jinping et a approuvé l’acte de capitulation de madame von. Des pays comme l’Allemagne, la Grande-Bretagne, l’Italie n’ont jamais envisagé sérieusement depuis 1945 de se comporter autrement que comme des états sous protectorat américain. De Gaulle l’avait bien compris.
Emmanuel Macron saura-t-il, sur l’Ukraine, adopter une position ferme et sauver l’honneur de l’Europe ? Espérons-le. Jusqu’ici il a surtout beaucoup bavardé en se contredisant volontiers.
L’Union Européenne, c’est une sorte de très grand centre commercial avec des boutiques de luxe pour les uns, des magasins à petits prix pour les autres. Dans un centre commercial, on ne demande pas aux clients d’être intelligents, courageux, forts. On leur demande d’avoir une carte bancaire.