Il y a cinquante ans ce mois-ci, le monde assistait, choqué, à la guerre faisant rage entre Israël et ses voisins arabes. Cette guerre fut précipitée par les menaces, lancées depuis le Caire et Damas, revendiquant la destruction de l’État Juif ; par la mobilisation de troupes arabes le long des frontières israéliennes ; et par une demande faite aux Nations Unies pour le retrait des casques bleus du Sinaï servant de zone tampon dans un conflit lattant.
Mais c’est à quelques centaines de kilomètres de là, à l’abri des regards de la communauté internationale, que les premières échauffourées éclatèrent à l’occasion d’une campagne lancée contre la communauté juive en Libye — une communauté déjà réduite à peau de chagrin.
Pour les 4 000 Juifs de Libye, seuls vestiges d’une communauté qui comptait à son apogée 40 000 membres, ce fut le troisième et dernier pogrom après 1954 et la fin d’une histoire riche, complexe et fort méconnue entre les Juifs et la Libye.
Les Juifs ont peuplé la Libye durant deux millénaires. Installés originellement à Cyrène — à l’est de la Libye actuelle — par le souverain égyptien Ptolémée Ier au 3ème siècle avant notre ère, ils ont précédé de plus de 900 ans la conquête et l’occupation musulmane de 642. Au fil du temps, cette communauté fut enrichie de Berbères convertis au judaïsme, de Juifs fuyant l’inquisition espagnole et portugaise du 15 ème et 16ème siècles, ainsi que de Juifs venant d’Italie au 17ème siècle. En 1911, année marquant la fin du règne Ottoman sur la Libye et le début de la colonisation italienne, la population juive libyenne comptait près de 20 000 membres, un chiffre pratiquement doublé en 1945.
La fin de la Seconde Guerre Mondiale marque le placement de la Libye sous autorité britannique. La vaste majorité des Juifs libyens survécut jusque là, malgré la conscription de plusieurs milliers d’entre eux dans des camps de travail forcé durant l’occupation fasciste, et la déportation d’un plus petit nombre dans les camps de concentration Nazis. Par ailleurs, les relations entre Juifs et musulmans en Libye étaient jusqu’alors plutôt cordiales.
Cependant, en 1945, la propagande panislamique et antisioniste de la Ligue Arabe attise la haine raciale en Libye, ce qui se traduit par une vague de violence contre les Juifs du pays dont le bilan s’élève à 130 morts et neuf synagogues brulées.
Un second pogrom s’ensuit trois ans plus tard, déclenché cette fois par des nationalistes libyens demandant l’indépendance de la Libye de l’administration britannique. Une réponse ferme des anglais et l’autodéfense de la communauté juive limitent les dégâts. Toutefois, 15 Juifs furent tués à cette occasion et quelques centaines se retrouvent à la rue.
Ce nouveau climat de peur et d’insécurité couplé à la forte attraction du nouvel État d’Israël pour cette communauté très pieuse conduit à l’émigration de la quasi-totalité des Juifs libyens avant décembre 1951, date qui marque l’accès à l’indépendance du pays. Seuls 6 000 Juifs resteront sur le sol libyen après cette date.
Malgré les garanties prévues par la nouvelle constitution libyenne, diverses restrictions furent progressivement imposées aux Juifs. En 1961, les Juifs libyens ne pouvaient ni voter ni se présenter à des élections, ils ne pouvaient ni servir dans l’armée libyenne ni recevoir de passeport, ils ne pouvaient ni acheter une nouvelle propriété ni être actionnaire majoritaire d’une entreprise ni même superviser les affaires de leur propre communauté. En dépit de tout cela, le dernier bastion de la communauté juive libyenne tint bon, attachée à une terre ancestrale et croyant encore à la possibilité d’un avenir meilleur en Libye.
En 1967, la guerre éclata au Moyen Orient. Déchaînés par la rhétorique panarabe de Nasser, les libyens prirent la rue et s’attaquèrent de nouveau à la communauté juive.
Le temps que la situation soit stabilisée, 18 Juifs de Tripoli — la capitale du pays — ont été tués. Ce chiffre aurait pu être bien plus élevé si ce n’est le courage de Cesare Pasquinelli, ambassadeur d’Italie en Libye, qui ordonna à toutes les missions diplomatiques italiennes du pays d’étendre leur protection aux Juifs.
Quelques musulmans aidèrent également. L’un d’eux prit des risques incommensurables afin de cacher pendant deux semaines une adolescente qui deviendrait un jour ma femme, ainsi que ses parents et sept frères et sœurs. À noter que ce Juste libyen refusa toute reconnaissance publique pour avoir sauvé des Juifs, ce qui aurait mis sa vie en grand danger.
Ainsi, en quelques semaines, tous les Juifs restant en Libye fuirent à l’étranger, pressés par le gouvernement libyen de se réfugier à l’étranger pour une durée «temporaire». Chacun d’entre eux fut autorisé à emmener avec soi une valise d’effets personnels et l’équivalent de 50 dollars. La plupart se rendirent en Israël, tandis que 2 000 immigrèrent en Italie. Par bien des aspects, le destin tragique des Juifs de Libye est similaire à celui de centaines de milliers de Juifs d’autres pays arabes.
Bien sûr, cet exode temporaire devint permanent. Le colonel Mouammar Kadhafi, qui s’empara du pouvoir en Libye en 1969, annonça l’année suivante une série de lois destinées à confisquer les biens des Juifs libyens, créant en contrepartie des bons pour une «honnête compensation» valables 15 ans. Mais, en 1985, aucune compensation n’avait été payée.
Ainsi, avec seulement quelques faibles contestations de la communauté internationale, peu d’attention de la part de la presse et un silence radio des Nations Unies, une autre communauté juive ancestrale disparut, et la mosaïque culturelle de la région subit à cette occasion une perte irrémédiable.
En tant que membre d’un peuple persécuté, nous sommes, bien entendu, solidaire des Palestiniens, et donc. C’est sans relâche que nous combattrons tous ceux qui, directement ou indirectement, se servent d’eux comme d’un énormissime bouclier humain. Il y a un monde entre la notion de peuple élu et celle de race supérieure. Allez et apprenez. Déracinez votre complexe de supériorité. Les Hébreux se sont délivrés des Destins avant vous. Ils ont été les premiers à comprendre que le soleil, la lune ou la sphère des fixes n’étaient pas constitués autrement que la Terre, laquelle planète n’avait rien d’une divinité. Au lieu de le leur reprocher, profitez-en pour vous engouffrer dans leur sillage libérateur. Prenez conscience de vos responsabilités. Cessez de vous défausser, au moindre déclenchement d’un gilet d’explosifs, sur les impros hypernerveuses du Grand Marionnettiste. Vous n’avez pas même à couper les fils auxquels vous êtes bizarrement suspendus. Il n’y a pas de fils.
Euh vous vous rendez compte quand même que vous n’êtes le peuple élu de personne? Rassurez moi…
Le Maroc est assurément l’étincelant épigone du califat de Cordoue. S’il rejette Israël, ce n’est nullement par antisémitisme. La preuve : il fait applaudir, sous les cieux berbéro-convers, les juifs du pape Jamel. Or ces derniers n’aborderont jamais la venimeuse question de la prise d’otage des ex-colons irrapatriables d’un empire perse, arabe ou ottoman par une islamité qui, décidément, aura eu bien du mal à encaisser le retour des témoins de son imposture sur la terre même où les ancêtres de David Elmaleh, il y a trente siècles, fondaient le premier royaume monothéiste. Wonder Woman n’a condamné ni les bombardements ciblés contre des lance-roquettes ni le dynamitage de ces sordides tunnels de la terreur creusés vers l’État juif par l’islamo-nazi Mohammed Deif. Cela lui vaut aujourd’hui d’être traitée par Abd al-Rahman VI comme l’emblème d’un régime génocidaire. Il lui faudra attendre un petit bout de temps avant que Pedro et Juliette ne lui accordent le statut d’oiseau rare palmé. De son côté, Edgar Morin dont je bois la parole, toujours avec délectation car je partage avec lui le sentiment brûlant d’être le frère de tous les hommes avant d’être celui de tous les Juifs, Edgar Morin, disais-je, ne fera rien qui risquerait de desserrer les boulons d’une statue à l’effigie de laquelle il doit sans doute se consoler quand, hier encore, son éditeur le traitait comme un vulgaire candidat au BEPC, lui demandant de raturer ceci, de recaser cela, dans le manuscrit d’une Méthode qu’il reconnaissait lui-même parcourue de trous de connaissance. Lorsqu’on lui demande ce que signifie pour lui être juif, il s’accroupit au fond du premier Sartre, celui d’avant Benny, et d’un coup de pied neptunien, bondit dans l’aveuglant rétroviseur des abonnés de La Libre Parole pour s’en extraire vigoureusement, mais amnésique de tout judaïsme, à l’exception du long chapitre de la persécution qui, soit dit en passant, rime richement avec Sion. En tant que Persécutien, il se ressent évidemment une fraternité de genre avec les Palestiniens, et ça remettra en place les avocats de Gal Gadot. Rappelons au passage que le frère d’armes de Stéphane Hessel théorisa la reproduction israélienne de l’idéologie nazie par analogie avec d’autres tendances comportementalisantes que les statisticiens du cabinet d’Anthropologie confessionnelle compareront un peu vite à la violence mimétique des enfants martyrs, oubliant, est-il utile de ne le rappeler qu’à soi, que les Hébreux ne descendent des Germains ni en droite ligne ni en ligne brisée. Il est vrai que son éditeur, Jean-Claude Gillebaud, insoupçonnable exhumeur de Rosenzweig, expliquait à l’époque à madame Veil, sur le plateau de Riposte, que la Shoah n’avait jamais visé spécifiquement les Juifs, mais bel et bien l’humanité tout entière, ce qui avait eu le don de faire sortir la Grande Histoire de ses gonds. Moi, frère prêcheur du désert, convaincu que l’antisémitisme dit nouveau n’est pas à proprement parler un principe fondateur de l’Europe des nations, je soutiens néanmoins que l’antisionisme demeure dans nos parages ce que l’on a coutume d’appeler un accélérateur de carrière.
PS: Le plateau de Ripostes au pluriel. Bon Dieu de bois, où avais-je encore la tête? Ce sont nécessairement les agresseurs qui ne portent qu’un seul S et non deux, comme le feraient d’authentiques défenseurs des nations, bien forcés seraient-ils de reprendre les armes devant cette éternelle menace pesant sur leur système.