Cela faisait des mois que les photos circulaient sur le Net. Le texte qui les accompagnait expliquait qu’il s’agissait de la décapitation, à La Mecque, en Arabie saoudite, d’une femme accusée de violences sexuelles et de meurtre sur sa belle-fille, la fillette, âgée de sept ans, de son mari. Elle était présentée sous le nom de Laila Bent Abdel Mouttalib Bassim, citoyenne birmane, vivant en Arabie saoudite. Difficile toutefois d’interpréter les photos, prises d’assez loin : on y voit une dizaine d’hommes en uniforme, un autre vêtu dans le style bédouin levant un bras prêt à s’abattre sur une masse noire difficile à identifier. La scène semble se dérouler sur un parking, juste à côté d’un passage piéton matérialisé par de larges bandes blanches sur le sol. Ces images m’ont laissé sceptique. J’ai exprimé mes doutes sur l’authenticité des faits rapportés. Non pas parce j’ignorerais l’existence des exécutions en Arabie saoudite, mais parce que celles-ci s’accompagnent généralement d’un certain rituel destiné au public, d’une mise en scène offrant officiellement aux spectateurs la visualisation du châtiment infligé. Or rien de tout cela sur ces photos ; tout y est banal : le décor, l’attitude des militaires, dont l’un a tranquillement les mains dans les poches, qui semblent assister à une scène juste un peu violente dans la rue.
J’avais tort de douter. Ces photos étaient extraites d’une vidéo réalisée le 12 janvier. Soit au lendemain de la manifestation « Je suis Charlie ». Je l’ai trouvée et me suis forcé à la regarder dans son intégralité. C’est une abomination. La femme hurle son innocence jusqu’au moment où le sabre du bourreau lui tranche la tête. Puis des ambulanciers embarquent le corps. Tout ça est expédié en cinq ou six minutes. Justice saoudienne ordinaire. Affaires courantes. Pas plus importante qu’une voiture mal garée et embarquée à la fourrière. Parce que c’est juste une femme ? Et une étrangère ? L’accusation et la condamnation avaient été annoncées par l’agence officielle Saudi Press Agency. Mais il n’était pas prévu qu’elle soit filmée. La vidéo a été tournée avec un portable par l’un des officiers présents qui l’a mise en ligne, ce qui lui a valu de se faire arrêter en vertu des lois saoudiennes contre la cybercriminalité.
Je m’interdis de regarder les vidéos des atrocités commises par l’Etat islamique. Daech utilise la communication de la terreur et il ne faut pas en être complice. De toute façon nul ne devrait céder à la pulsion voyeuriste face à n’importe quelle mise à mort. Mais pour une fois, exceptionnellement, il peut être utile de voir cette décapitation à La Mecque. Il est édifiant de découvrir cette monstruosité, dont l’horreur réside avant tout dans la banalisation de l’acte, dépouillé de toute solennité. Aucun décorum, aucune gravité, tout est désacralisé.
La vidéo vue, on a envie de la faire projeter en immense jour et nuit sur la façade du Quai d’Orsay et de l’Elysée, de la mettre en permanence sous les yeux des responsables de la politique étrangère française, de ceux qui ont benoîtement accueilli un haut responsable saoudien lors de la grande manifestation du 11 janvier ; de leur gueuler «Vous n’avez pas honte de faire des risettes à ces monstres saoudiens afin de pouvoir leur vendre de Rafales ?». Les Occidentaux se réjouissent que Riyad fasse partie de la coalition internationale contre Daech, mais ils savent pertinemment que leur allié est un régime qui use de la même barbarie que l’ennemi qu’ils combattent en Syrie et en Irak. La dynastie des Saoud, représentée aujourd’hui par le roi Salman, et Al-Baghdadi, le chef suprême de Daech, partagent la même vision démente de l’islam, appliquent l’un comme l’autre la charia sous sa forme la plus intégriste. Mais la communauté internationale ferme les yeux sur la barbarie saoudienne, considérée comme légale. Et puis, n’est-ce pas, contrairement à l’Etat islamique, les rois du pétrole ne diffusent pas leurs décapitations sur les réseaux sociaux…Il ne faudrait pas oublier non plus que la famille royale saoudienne, accompagnée de sa suite (quelques centaines de personnes au total), a l’extrême bonté de venir passer quelques jours de vacances en France dans sa somptueuse villa de Vallauris. Certes il y a eu quelques protestations parce que la plage publique attenante à la propriété doit être provisoirement privatisée. Mais le sous-préfet a répondu que c’était une question de sécurité car ces estivants milliardaires sont menacés par les terroristes. Quant aux patrons de boutiques de luxe à Cannes, ils se frottent les mains : comme chaque été, la venue des Saoudiens annonce de belles affaires. Il ne faudrait quand même pas leur chercher la petite bête : ici ces richissimes wahhabites ne coupent pas de têtes ni de mains et, dans leur immense tolérance, ils acceptent même de voir des femmes sans niqab.
La passivité à l’égard des pratiques moyenâgeuses de l’Arabie saoudite contribue à décrédibiliser les références aux droits de l’homme dont se réclament les Occidentaux et la France en particulier. Elle alimente les propos de comptoir, les «tout ça c’est des affaires de pognon» qui font le miel de l’extrême droite et des conspirationnistes. Comment s’étonner ensuite que nous soyons si peu nombreux et tellement isolés pour exiger – pour ne prendre que cet exemple – que soit annulée la condamnation à 1000 coups de fouet du blogueur libéral saoudien ? Daech, Arabie saoudite, même dégoût.
On peut faire la remarque que tant la République en France que la Barbarie dans d’autres pays, agit sur les symptômes. La République et la Barbarie est une politique « allopathique ». Ce qu’il faut c’est ce que j’appelle une politique dialectique.
Rencontre entre le chef du Hamas et le le roi Salmane d’Arabie Saoudite
« Meshaal, son adjoint en exil Moussa Abou Marzouq, ainsi que deux autres responsables du groupe palestinien, Salah al-Arouri et Mohammed Nazal, ont rencontré « le roi Salmane ben Abdel Aziz, le prince héritier Mohammed ben Nayef et Mohammed ben Salmane », fils du roi et ministre de la Défense, affirme un communiqué du Hamas. » source The Times of Israël.
Le Hamas ne semble pas gêné non plus.
Si nous avons choisi d’intégrer la Turquie d’Atatürc dans l’OTAN, c’est-à-dire, de faire de ce voisin à cheval entre l’Orient et l’Occident notre allié, n’allons pas trop vite en conclure que ce pays est, comme nous avons l’habitude de le dire de nos alliés, un pays ami. Le socle de l’empire ottoman démantelé fut englobé par l’Alliance atlantique pour la raison inverse qu’il menaçait de demeurer indéfiniment notre ennemi revanchard. La Turquie est donc aujourd’hui notre alliée de crainte qu’elle ne redevienne notre ennemie, ou plutôt, pour l’empêcher de passer à l’acte, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Car l’État-ami du Hamas et de Daech ne tuera le chien enragé qu’il a lâché sur nous qu’à partir du moment où il aura reçu de notre part l’autorisation de faire régner son ordre féroce sur tout le territoire que nous lui avons délimité. Cela, nous commençons juste de le comprendre. Nous commençons à ruminer l’idée que les ex-empires mahométans, perses et ottomans, non seulement cherchent à se reconstituer, mais que nous n’avons pas la moindre emprise sur ce processus aussi lent que profond. C’est dans cet état de lassitude consommée que nous nous affalâmes, tels Archimède plongé dans la baignoire, et que l’idée qui tue nous foudroya. Pourquoi ne pas leur donner un petit coup de main et accélérer le processus de triple reconquête jusqu’à ce que les trois prétendants au trône de Mahomet se déchiquètent réciproquement les chairs jusqu’à l’os? (Grattage de menton) Mouais… pourquoi pas? Renforcer l’Iran contre l’invasion de la forêt arabe planquée derrière l’arbre Daech. Puis renforcer la Turquie contre la tentative d’hégémonie régionale irano-syrienne appuyée par le Kremlin. Notre hantise nous paralyse. Comment tendre un piège au mal sans se faire prendre à son piège? En effet, comment vaincre un tyran sanguinaire en recourant aux moyens traditionnels de la guerre qu’il nous a déclarée sans, in fine, avoir tué plus d’hommes de son côté de la ligne de front qu’il n’en a tués du nôtre? Comment se débarrasser d’un assassin jusqu’au-boutiste sans se transformer en un assassin plus performant que l’autre, dans tous les cas, en assassin? À ces questions qui n’en font qu’une, nous avons répondu par la guerre chirurgicale. Opérations ciblées : ne visant que des camps terroristes authentifiés; sauf qu’il en ressort un nouveau à chaque fois qu’on en déracine un. Eh bien, c’est ce que je vous disais… laissons-les régler le problème entre eux. Qu’ils la mettent au point, leur Solution finale anti-mérules, mais qu’ils le fassent dans leur propre maison. Ah bon? moi qui croyais qu’y’en avait qu’une de maison! Même qu’elle brûlait, à ç’qu’on disait… Il suffit! Arrêtons-là notre chichi et récapitulons. Nous faisons face à un Cerbère cannibale, rêvant de normalité — tout au moins à l’idée qu’il se fait de la normalité — et donc, décapiteur de ses propres têtes. On oublie juste que la dernière des trois têtes ne s’arrachera jamais avec ses propres dents. La guerre mondiale que nous repoussons le plus loin possible (de notre génération) aura immanquablement lieu si nous ne parvenons pas, soit à domestiquer les bas instincts de toute l’humanité, soit à placer sous contrôle de la raison qui nous habite notre puissance sauvage. Aparté : Il y a au moins un cas dans l’Histoire récente où le mal fut écrasé par le fer et le feu. Oui, les Alliés ont terrassé l’empire barbare que tentait d’instaurer sur la seule face du globe la civilisation nazie. Ils ont traité le mal par le mal. Ils n’ont lésiné ni sur les moyens employés ni sur l’étendue de leur rayon d’action ni sur la fréquence de leur usage. Avec tout cela, les vainqueurs ne nous ont pas légué une civilisation plus inhumaine que ne l’avait été le Troisième Reich, mais sur ce point précis, je suis sûr que vous me trouverez facilement quelques éminents contradicteurs…
Dans un angle mort de la Première Guerre mondiale, l’empire ottoman avait commis le premier génocide du XXe siècle. Que peut bien présager l’entrée de la Turquie dans la coalition anti-EI?
Un sadique te kidnappe, il t’entraîne dans sa cave, t’attache à une table de découpe, et te paye quarante coups de fouet de l’heure pour services psychophysiques rendus. Si tu lui donnes les trois-quarts de ton salaire, il range son fouet. Logiquement, il faudrait l’arrêter, le juger et le foutre en taule pour séquestration et sévices corporels aggravés. Dans le monde où c’est le sadique qui mène la danse, il faut se montrer envers lui pétri de gratitude.
Dans le rôle du sadique : la Turquie.
Dans le rôle du fouet : Daech.
Dans le rôle du salaire : les Kurdes.
P.-S. : Les héritiers de Shakespeare ne sont pas censés oublier que dans cette pièce de théâtre à l’intérieur de laquelle on peut monter une pièce de théâtre, les rôles comme les sexes sont interchangeables.
JE RESTE SANS VOIE , je suis boulversée ,
«Cette décapitation, Un défi civilisationnel »?
Y a-t-il un pas, entre foudroyant conflit de conduite insurrectionnelle et mutation vers un acte barbare ?
Et quel est le nom de ce pas ?
Entre l’acte ignoble d’un membre d’une organisation dépendante d’un empire voué à la destruction, et la magistrale inanité d’une culture muette brisée par la compréhension d’un péril sans couleur, immergé dans une communauté sommeillant dans le sein d’une République pétrie de saines, centenaires et romanesques visions de la mémorable mugissante « Liberté chérie » ?
Dans ce pays où être juif ou arabe ou bien ni juif ni arabe mais citoyen est devenu un pendant de détonation, même un tableau de Francis Bacon est marginal dans le miroir d’un jeu de cartes des horreurs où monstruosité et sang donnent un reflet des mammifères de la civilisation du 21è siècle puant des canalisations des eaux usées d’une foi musulmane indigne du Prophète.
M. Schalscha fait dans cet article l’amalgame entre 1) condamnation à mort, 2) charia, 3) justice équitable, 4) cérémonial adéquat/banalisation et 5) décapitation,. Une distinction mérite d’être faite. En effet, la condamnation à mort n’est pas l’exclusivité de la charia ainsi qu’elle n’implique pas non plus l’iniquité de la justice. Le cérémonial inadéquat est également une généralité tant la mise à mort est en elle même un acte barbare. Par exemple aux US l’esprit de la cérémonie semble être la vengeance des victimes (petit théâtre avec, sur la scène, le condamné + « torture » du couloir de la mort) . Ce qui n’est, il faut l’avouer, pas très noble et peut-être aussi terrifiant que cette banalité du parking. Reste la méthode de mise à mort qu’est la décapitation elle même. Objectivement, c’est sans doute une méthode qui ne fait pas trop souffrir la victime. Subjectivement, l’horreur qu’inspire cette méthode est largement culturelle et dès lors difficile à juger.
En somme j’aurais aimé que M. S chalscha détaille davantage les raison de son dégoût sans se laisser emporter par ce dernier.
Le premier ministre de la province du Québec au Canada a pratiqué la médecine 5 ans en Arabie saoudite et refuse de condamner ce pays. Je crois même qu’il a déjà dit que l’intégrisme était un choix personnel. Pour quelles raisons, les chefs occidentaux ne condamnent-ils jamais l’Arabie saoudite comme ils l’ont fait pour l’Iran et la Corée du Nord? Je ne crois pas que ce soit seulement pour le pétrole et son argent. Il doit y avoir d’autres raisons. Les médias occidentaux font également la sourde oreille face à ce pays barbare, pourquoi??? Je ne crois pas que ce soit parce qu’ils considèrent ce pays comme un allié. Si c’est le cas, il faut être super naïf. J’en viens même à me poser la question : Est-ce que l’Occident est véritablement démocratique?
En sait’on plus sur ce genre de jugements rendus par la » justice » Saoudienne
Nombre de décapitations?
Lapidations?
Amputations de membres ?
Lieux d’executions de ces abominations ?
Pas de manifestations ?
Pas de boycott ?
Et chez nos Amis qataris meme Chariah ?