J.H. : Depuis la place Trahir, vous tournez la tête vers la Libye, vous vous engagez dans cette révolution, vous êtes écrivain. Dans votre esprit, le livre est évidemment concomitant, et même dialectique, avec le mouvement de cette révolution. À quel moment pensez-vous à un film ? Est-ce que vous pensez réaliser un film parce que l’occasion fait le larron et qu’à un moment donné s’est présenté un photographe qui tournait des images ? Ou est-ce le cinéaste qui vous chatouille depuis très longtemps qui vous dit : «Là, il y a un film que je voudrais faire» ? Ou par frustration ? À un moment vous vous rendez compte que l’écrit serait insatisfaisant ?
BHL : Je ne pense pas tout de suite à un film, non. Les premiers mois, en tout cas lors de mes deux premiers voyages, je suis beaucoup trop soucieux de ce que je suis en train d’essayer de faire, vraiment et concrètement faire, pour penser même au livre. Je prends des notes, bien sûr. Mais je ne sais pas encore ce que j’en ferai. Alors, un film ! J’y pense si peu que je ne sais même pas, sur le moment, que ces premiers voyages sont filmés. J’ai à mes côtés un photographe qui s’appelle Marc Roussel ; qui est là pour accompagner le reportage que je dois donner à la série de journaux français et étrangers pour lesquels je travaille ; et qui est équipé d’un «5D», cet appareil-photos qui a la propriété, pour peu qu’on appuie sur le bouton idoine, de passer en mode film. C’est lui qui, sans rien dire, sans bien savoir lui-même, je pense, ce qu’il fera de ce qu’il emmagasine, a l’idée, à certains moments, d’appuyer sur le deuxième bouton et de filmer. Et ce n’est que bien plus tard – au moment, en gros, du voyage à Misrata – qu’on prend, ensemble, avec Gilles Hertzog, la décision de faire le film et qu’on s’aperçoit que toutes ces premières scènes que nous pensions perdues ne l’étaient pas tout à fait.
J.H. : J’imagine que, lorsque Marc Roussel tourne, c’est un peu à tout hasard. Il doit se dire que c’est une opportunité à saisir. Mais, à un moment donné de votre discussion, il se met au service de votre film. Et vous prenez la manivelle de ce film.
BHL : Avec lui, oui. La manivelle, comme vous dîtes, c’est tout de même lui qui la prend. Mais la question qui, à mes yeux, reste, jusqu’aujourd’hui, la plus énigmatique c’est quand même celle de ces toutes premières images. Pourquoi est-ce qu’il les a faites ? Aujourd’hui encore, je pense qu’il ne le sait pas bien lui-même. Il assiste à des scènes qui lui paraissent folles. Il me voit proposer au chef secret d’une insurrection de le ramener à Paris et de l’accompagner chezSarkozy. Il voit le chef en question me demander d’intercéder pour une intervention militaire occidentale. Il voit une grande ville, Benghazi, qui se prépare à un assaut qui promet d’être sanglant. Il a, donc, le réflexe : «Je filme ; on ne sait jamais, je filme».
J.H. : Quand avez-vous eu une idée un peu précise de ce que serait ce récit cinématographique ?
BHL : C’est très difficile d’avoir l’idée précise d’un récit lorsqu’on n’a aucune idée, ni de ce que sera sa fin, ni même de ce vers quoi il tend. La vérité c’est qu’on a tenu une sorte de journal. On se sentait, avec Hertzog, embarqués dans une histoire folle, complètement hors normes, presque baroque et rocambolesque par moments – et on a décidé, avec un quatrième homme qui nous a vite rejoints, qui ne nous a plus quittés et à qui ce film doit beaucoup, le producteur François Margolin, de tenir le journal de cette histoire.
J.H. : Donc vous avez, quand même, l’idée du journal…
BHL : Oui. Mais c’est le degré zéro de l’idée ! Et c’est, surtout, la seule manière honnête de faire quand il n’y a, encore une fois, pas de finalité silencieuse orientant ce que l’on est en train de vivre. Était-ce la démocratie en marche ? La ruse de l’histoire de l’islamisme ? L’avènement du devoir d’ingérence ? Nous n’en savions rien. Et, en l’absence de réponse claire à ces questions, il n’y avait qu’une attitude de probité : le Journal – un Journal en images, une chronique filmée, le film de ce que nous vivions, et faisions, jour après jour…
J.H. : Comment s’y prend-on concrètement ? On est à la fois protagoniste, journaliste, et en train de générer un film : comment intervient-on ? Godard dirait : «Qui décide de la place de la caméra ?»
BHL : J’ai été dans la situation, c’est exact, d’être à la fois le témoin, le narrateur et l’acteur d’une aventure exceptionnelle. Le témoin emmagasine des impressions. Le narrateur, quand tout sera fini, donnera à l’ensemble une forme, une cohérence. Et l’acteur, à quatre reprises au moins, fait ce dont il aura à témoigner : la venue à Paris des gens du CNT ; l’ouverture d’un deuxième front, dans le Djebel Nafoussa ; la reconnaissance des rebelles par un pays d’Afrique, le Sénégal ; la mise en lumière enfin des combattants de Misrata et de la façon dont eux seuls, si on les arme, renverseront le cours de cette guerre. Alors comment fait-on quand on a tous ces rôles à la fois ? On improvise. On invente ses propres règles à mesure que l’on avance. Et on s’y tient.
J.H. : Quand vous preniez des notes dans le désert, dans la voiture, aviez-vous deux carnets de note, un bleu pour le livre et un vert pour le film ?
BHL : Non. Je n’en avais qu’un. Le deuxième c’est Marc Roussel qui le tenait – et c’étaient ses images. De même, d’ailleurs, à partir d’un certain moment, que d’autres images : celles de Thomas Le Bon, de Vojta Janiska ou même de François Margolin lui-même.
J.H. : On arrive à une deuxième phase, de retour de là-bas. J’imagine que vous avez déjà presque achevé votre livre. Vous travaillez sur les images dans la salle de montage. Vous commencez à visionner tous les rushes. C’est un film sans scénario ni script, et pourtant très écrit. L’écriture de ce récit filmé s’est-il beaucoup inspiré du livre ? Est-ce le livre qui sert de scénario ?
BHL : Non. Le point commun entre les deux, c’est évidemment la forme du journal. Mais le film est beaucoup plus abouti, beaucoup plus écrit, que le livre ! Le livre n’est pas composé. C’est un vrai journal, où j’ai laissé les errements, les moments d’indécision, les fausses pistes, le temps pour rien, le temps gaspillé, perdu. Le film est composé. Et, étant composé après coup, il est surtout plus concerté. Le vrai livre, c’est le film.
J.H. : Comment l’abordez-vous ? Menez-vous un travail classique de montage, avec le monteur et le producteur ? Travaillez-vous sur ce récit en l’écrivant parallèlement ?
BHL : Bien sûr, oui, il y a le montage. Avec le monteur et, en effet, le producteur qui n’a cessé, là aussi, de se tenir à mes côtés. Mais, avant cela, avant que le montage ne commence, il y a eu un travail d’écriture. Pas juste le «commentaire». Non. Le film lui-même, je l’ai écrit. Littéralement écrit. Sauf que mes lettres étaient des images, des sons, des combinaisons de lettres et de sons. Quand je dis que le vrai livre c’est le film, je l’entends au sens strict. Que ce film soit un film d’écrivain, on peut trouver ça bien ou le regretter – mais c’est ainsi, c’est le point de départ.
J.H. : La guerre était le personnage principal de BOSNA ! Dans ce film-là, l’un des personnages principaux, c’est la révolution. Est-ce que l’on filme différemment une guerre et une révolution ? Est-ce que l’idée du mouvement, le rythme sont différents ?
BHL : Ce n’est pas la même temporalité. Pour le sartrien que je suis, filmer la révolution c’est avoir constamment en tête l’inévitable séquence : sérialité, puis groupe en fusion, puis retourau pratico inerte puis, éventuellement, avènement de la meute lyncheuse voire pogromiste. Le temps de la guerre, lui, c’est autre chose. Vous le savez mieux que personne, vous qui avez écrit l’un des maître-livres sur le sujet : c’est le temps de l’attente et le temps de la foudre, c’est beaucoup plus binaire, c’est une tout autre dialectique et une tout autre manière de filmer.
J.H. : Cela vous a-t-il passionné de suivre le mouvement plus rythmé de la révolution ?
BHL : Oui. Parce qu’on a beau dire et j’ai beau avoir, moi-même, instruit tous les procès possibles du désir de révolution. Il y a quand même un moment, dans les révolutions, où les hommes se hissent au dessus d’eux-mêmes, se grandissent. Alors que la guerre rabaisse. Y compris dans les actes d’héroïsme, il y a de la misère, il y a toujours de la bassesse secrète.
J.H. : On perd toujours à la guerre.
BHL : C’est cela.
J.H. : Est-ce que le fait qu’il y ait un happy end a beaucoup influé sur votre film ?
BHL : Je ne suis pas sûr que ce soit un happy end. La fin du film est mélancolique. Indécise. Elle n’est pas pessimiste, non. Mais anxieuse.
J.H. : Beaucoup d’incertitudes, c’est vrai. Mais c’est tout de même un film qui tend vers l’optimisme. Si cette révolution avait dérapé, est-ce que cela aurait modifié votre façon de filmer ?
BHL : Je reste une seconde sur cette histoire de happy end. La preuve qu’il n’y a pas de happy end, c’est qu’il n’y a pas de «end» du tout. Le film, comme vous savez, commence par la fin. Et, par-dessus le marché, cette fin qui est au début n’est même pas une vraie fin puisqu’elle est multiple, plurielle, et se dit en plusieurs sens. Il y a plusieurs fins possibles, c’est ce que je dis. Ou mieux : peut-être cette histoire est-elle une histoire sans fin et peut-être cette histoire est-elle celle de «l’Ange de l’Histoire» de Walter Benjamin, dans ses «Thèses sur le concept d’Histoire» où se trouve évacuée l’idée même d’une Histoire qui abriterait une providence silencieuse… Alors, après, le «dérapage». Tout ça peut, encore, déraper. Tout ça peut, bien sûr, très mal tourner. Mais, franchement, non, cela ne changerait rien. Même s’il y avait, demain, une catastrophe à Tripoli, même s’il y avait un coup d’État des milices, même si la Charia était effectivementappliquée, je continuerais de penser qu’il fallait faire ce que nous avons fait et je ne changerais rigoureusement rien à ma façon de monter ce film. Comme dit la sagesse juive : «Ce qui va plus loin que tes oeuvres, ne t’en mêle pas…»
J.H. : Je ne voulais pas parler de ce qui pourrait se produire dans l’avenir. De Benghazi à Tripoli, vous avez quand même rencontré un certain nombre d’événements et de personnages positifs, si je puis dire. Est-ce que si vous en aviez rencontré moins, ou si vous aviez été confronté à un personnage négatif à mi-chemin, vous auriez continué ?
BHL : Mais ce sont presque tous des personnages à mi-chemin ! Abdel Fattah Younes par exemple est loin, au moment où je l’emmène chez Sarkozy, d’être un personnage positif. Mustafa El Sagezly, le «prince des chebabs» de Benghazi, ne partage ni ma vision du monde ni mes idées…
J.H. : La dynamique le positivise.
BHL : La dynamique le grandit, oui. «Et puis, soudain, comme nous tous, elle le ramène à sa vraie taille. Mais ce n’est pas ça qui est important. C’est l’idée de libération d’un peuple. C’est l’idée de devoir d’ingérence pour laquelle je me suis tant battu et qui trouve là sa première mise en oeuvre. C’est l’idée d’Occidentaux et d’Arabes entreprenant, ensemble, au coude à coude, de faire tomber une tyrannie.
J.H. : Et ce sont ces idées que vous essayez de filmer.
BHL : Oui. Même dans les moments où j’étais déçu, désorienté, désemparé, il restait toujours ces idées. Et ce sont des idées qui, quoi qu’il advienne, sont justes – ce sont des idées que rien, en aucun cas, ne viendra invalider.
J.H. : La Bosnie parcourt en filigrane ce film. On l’entend dans votre texte, mais très curieusement on l’entend aussi dans les propos d’Hillary Clinton, de David Cameron, et autres. Sans Bosna !, y aurait-il eu Le Serment de Tobrouk ?
BHL : Non, bien sûr. Le serme nt de Tobrou k c’est la revanche de Bosna ! La «revanche» au sens où Walter Benjamin, encore lui, parle de «revanche des vaincus». J’ajoute, d’ailleurs, un détail encore. Cette référence bosniaque, ce mot de passe, ils courent entre les protagonistes du film. Mais, curieusement, je les également trouvés chez ceux qui nous ont aidé à mener à bien l’entreprise. Je pense à Frédérique Dumas, par exemple, que j’avais croisée, à Paris, avec Ademir Kenovic. Puis quand elle a produit No Man’s la nd. Et que je retrouve, là, avec Studio 37.
J.H. : Qu’est-ce que «le serment de Tobrouk» ? C’est le titre de votre film, et c’est…
BHL : C’est une scène assez miraculeuse qui est à la toute fin du film. Deux Français et quatre Libyens se retrouvent dans le petit cimetière des Français tombés en Libye en 1941-1942. C’est un cimetière abandonné où plus personne ne va. Il y a là un vague gardien qui semble veiller sur les tombes depuis la nuit des temps. Et voilà que ces six hommes, se souvenant du serment de Koufra, cette oasis libyenne où la France Libre a connu sa première victoire et où les combattants de la Colonne Leclerc se sont jurés de ne pas déposer les armes avant que la France entière soit dénazifiée, voilà que ces six hommes font le serment de ne pas se séparer tant que la Libye ne sera pas libérée. Depuis le début, nous sommes, Hertzog et moi, hantés par ce serment de Koufra. Mais là ce sont nos quatre amis libyens qui se recueillent sur les tombes des Français Libres.
J.H. : Se recueillent-ils sincèrement ou pour la scène du film ?
BHL : Sincèrement. D’ailleurs, c’est très simple. J’avais oublié l’existence de ces images. Et, quand je me les suis rappelées, j’ai monté tout ce que j’avais : 25 ou 30 secondes, pas une de plus, pas un plan supplémentaire – c’est l’un de ces «plans Roussel» faits comme ça, à la diable, sans que les protagonistes aient vraiment conscience d’être filmés.
J.H. : Vous traversez le désert. Il y a des images magnifiques : Misrata, Benghazi, le sable, les ruines, la ligne de front jusqu’à Tripoli. Il y a 40 ans, vous étiez au Bengladesh pour écrire votre premier livre, puis on vous a vu au Soudan, en Bosnie, au Moyen Orient, au Pakistan. Vous êtes de culture laïque et juive, dans un pays de culture catholique et laïque. Quelle est cette fascination pour les terres d’Islam ?
BHL : Il y a deux choses. D’abord, je pense, la généalogie, la mémoire personnelle – un grand-père judéo arabe dont la silhouette surgit, soudain, à travers une vidéo cassette d’un film de René Clément que m’offre, à l’heure de la victoire, un de mes amis libyens. Et puis, ensuite, les «terres d’Islam» comme vous dîtes c’est la zone des tempêtes contemporaine. Ou bien nousacceptons cette logique de l’affrontement que d’aucuns nomment, d’un côté comme de l’autre, la «guerre des civilisations» : c’est la logique Huntington-Ben Laden. Ou bien nous tentons de comprendre, de jeter des ponts, de tendre la main : c’est la logique Averroès-Lawrence – et c’est celle que j’adopte lorsque je vais, dans une des dernières scènes du film, au contact d’un groupe d’hommes qui sont plus proches d’Al Qaida que du libéralisme tocquevillien.
J.H. : C’est le film d’un making of d’une révolution. Mais aussi un récit sur vous-même, qui est assumé. C’est votre point de vue parfois lyrique et romantique sur le making of. Le personnage principal, c’est vous. C’est le récit de votre propre histoire, de celle de votre père. C’est – vous prononcez le mot – l’histoire de votre tribu. Et, parmi tous vos héros, dans ce que vous nommez votre Panthéon, on retrouve D’Annunzio, Georges Orwell, Malraux, Massoud… À quel moment éprouve-t-on le désir, le besoin, ou les deux d’ailleurs, de filmer son autoportrait ?
BHL : Sur cette histoire de «personnage principal», souvenez-vous du mot de Ryszard Kapuscinski, dans «Autoportrait d’un reporter». Quelqu’un lui demande pourquoi il n’y a «pas de personnage principal» dans ses livres. Et il répond, en substance : «Comment ça ? Mais c’est moi ! Je suis le personnage principal de tous mes textes dont je suis le témoin». Et il ajoute : «Peut-être ne suis-je capable d’écrire que sur ce que j’ai vécu, sur ce que j’ai vu, entendu, pensé». Manière de dire que l’extrême subjectivité peut être l’autre nom, à nouveau, de la probité… Alors, après, la question de l’autoportrait, c’est évidemment encore autre chose. Je répondrais qu’on en éprouve le «désir» ou le «besoin» quand on a le sentiment d’avoir accompli ce que l’on pouvait accomplir de meilleur. Ou quand on fait face à l’événement où tout ce que l’on s’était promis à soi-même, tout ce que l’on avait promis aux autres, a été plus ou moins tenu. Ou – mais cela revient au même – quand on a la conviction qu’un rêve, un projet philosophique ou juste une ambition d’homme, ont trouvé l’événement où ils avaient à s’incarner. Là, oui, on ose l’autoportrait. Et on l’ose sans crainte, sans scrupule, sans penser au qu’en dira-t-on, sans tactique.
J.H. : Est-ce que l’on peut voir entre les images une forme de testament ? Non pas dans le sens de «léguer quelque chose», mais dans l’idée d’un aboutissement. Peut-on y lire une page qui se tourne ?
BHL : Oui et non. Car ce sentiment de coïncidence dont je vous parle, cette rencontre miraculeuse entre un événement et un désir, j’aurais pu l’éprouver à 50 ans, ou à 40, ou même à 30. Ça n’a aucun rapport avec l’âge des testaments. Et on peut tout à fait imaginer qu’un miracle pareil se produise à nouveau.
J.H. : Donc, on peut imaginer 103 films comme Ford ?
BHL : 103 films, hélas non.
J.H. : Disons : après un film, un autre film ?
BHL : Rien ne l’interdit, en effet. D’abord parce que je détesterais, je vous le répète, cette vision romantique d’une vie qui se chercherait, se trouverait enfin et n’aurait plus qu’à contempler cet accomplissement. Et puis parce que j’ai la même énergie, le même enthousiasme, la même curiosité, le même appétit qu’il y a 40 ans, à l’époque où je partais au Bangladesh, à l’appel d’André Malraux. La vie continue. Et le combat.
O ALLAH O MOUAMMAR O LIBIA WBESS!