Contexte et diversité des réactions
Il importe d’emblée de souligner que la communauté juive française n’est pas monolithique. Si des voix critiques font l’objet de stigmatisation ou d’ostracisme, d’autres sont accueillies avec respect ou suscitent un débat constructif. Certaines institutions, figures religieuses ou associatives continuent de défendre la pluralité des opinions et d’encourager la discussion, même sur des sujets sensibles. J’insiste sur ce point.
Il faut également rappeler que le contexte du 7 octobre 2023 – marqué par l’attaque du Hamas contre Israël, la prise d’otages et le choc émotionnel qui s’en est suivi – a profondément bouleversé la communauté juive en France. Ce traumatisme a renforcé la crainte de l’antisémitisme, la tentation du repli et la crispation autour de la solidarité communautaire. Il explique en partie la radicalisation de certains débats et la difficulté à accepter la critique interne, sans pour autant justifier la fermeture du dialogue.
Cependant, plutôt que de s’inscrire dans un débat d’idées, certaines critiques adressées à des intellectuels juifs français se muent trop souvent en procès d’intention. Ainsi, prêter à Delphine Horvilleur, Anne Sinclair, Bernard-Henri Lévy ou Alain Finkielkraut des mobiles inavouables – recherche de respectabilité, calcul social, trahison communautaire – revient à disqualifier d’emblée leur parole. Cette suspicion, qui confine à l’inquisition morale, nie la possibilité même d’une critique sincère et argumentée. Elle substitue à la discussion rationnelle la stigmatisation de l’individu, réduisant toute divergence à une posture suspecte, voire honteuse.
C’est précisément ce mécanisme de délégitimation et ses différentes manifestations que nous allons spécifiquement analyser dans cette première partie.
I. Les critiques internes dans la communauté juive : de la pluralité à la stigmatisation
La suspicion morale : une mise en accusation infamante
Au lieu de nourrir un débat d’idées, la critique visant certains intellectuels juifs français – qu’ils soient rabbins, universitaires, artistes ou militants – se transforme trop souvent en procès d’intention. Attribuer à Delphine Horvilleur, Anne Sinclair, Bernard-Henri Lévy, Alain Finkielkraut, Joann Sfar, Hanna Assouline, Marc Knobel ou à des acteurs associatifs (La Paix Maintenant, JCall, Les Guerrières de la Paix…) des motivations inavouables – quête de respectabilité, calcul social, trahison communautaire – revient à délégitimer d’emblée leur parole. Cette suspicion systématique confine à l’inquisition morale, niant la possibilité d’une critique politique argumentée et d’un engagement sincère. Elle substitue à la discussion rationnelle la stigmatisation des individus et des associations, réduisant toute divergence à une posture suspecte, voire honteuse.
Prenons l’exemple de Delphine Horvilleur, régulièrement accusée sur les réseaux sociaux de « trahir » la communauté dès qu’elle critique la politique israélienne, certains allant jusqu’à l’accuser de « faire le jeu des antisémites ». De même, les membres de JCall ou de La Paix Maintenant, engagés pour une paix négociée, sont soupçonnés de chercher à plaire à l’opinion publique ou aux médias, leur engagement est disqualifié. Ces mises en cause personnelles ou associatives étouffent tout débat de fond et enferment la parole juive critique dans une logique de suspicion permanente.
L’anathème de la « trahison » : le refus du débat
L’accusation de « trahison » ou d’« irresponsabilité » adressée à ceux qui expriment un malaise moral face à la politique israélienne ou à la situation à Gaza relève d’une stratégie d’intimidation. Plutôt que de répondre sur le fond, les contempteurs préfèrent délégitimer la critique en l’assimilant à une arme offerte aux adversaires d’Israël. Cette logique binaire, qui oppose solidarité inconditionnelle et déloyauté, interdit toute nuance et condamne la parole dissonante à l’ostracisme. Elle trahit une volonté de verrouiller le débat interne, au mépris de la tradition intellectuelle juive fondée sur la dispute et la pluralité des voix.
Deux exemples illustrent ce mécanisme. Lorsque Joann Sfar a exprimé publiquement son trouble face à la situation à Gaza, il a été accusé par certains de « retirer une arme à Israël » et de « trahir » la communauté, ses propos étant immédiatement disqualifiés sans discussion de fond. La journaliste Anne Sinclair, ayant exprimé publiquement son trouble face à l’action de l’armée israélienne à Gaza et plaidé pour un cessez-le-feu, s’est vue reprocher de « faire le jeu des adversaires d’Israël » et d’affaiblir la solidarité communautaire, certains l’accusant de trahir le nécessaire « bloc » face à l’antisémitisme.
L’assignation identitaire : une négation de la légitimité
Les attaques ne se limitent pas à contester le contenu des prises de position : elles mettent en cause la légitimité même de ceux qui s’expriment. Les intellectuels critiques sont sommés de choisir entre l’adhésion inconditionnelle à une prétendue doxa communautaire et la relégation hors du groupe, comme si toute nuance ou critique équivalait à une sortie symbolique de la communauté. Cette assignation (prétendument) identitaire refuse la complexité des appartenances et des sensibilités, et procède d’une logique d’exclusion et de discrimination. Elle nie la possibilité d’une parole juive plurielle, réduisant la communauté à une entité monolithique, étrangère à son histoire et à sa vitalité intellectuelle. Par exemple, des universitaires ou artistes ayant exprimé des positions critiques sur Gaza se voient régulièrement reprocher de « ne plus être vraiment juifs » ou de « trahir leur identité ». Ils sont parfois accusés de faire le jeu du Hamas, ce qui constitue une diffamation.
De la contradiction à la violence personnelle : la dérive ad hominem
Le débat d’idées cède trop souvent la place à la violence verbale, à l’insulte, voire à la menace. Les attaques ad hominem – qui mettent en cause la sincérité, la loyauté, voire la judéité des personnes visées – témoignent d’un refus radical de la confrontation argumentée et révèlent la pauvreté des attaques, souvent réduites à des invectives ou à des accusations sans fondement.
Les exemples sont nombreux : Delphine Horvilleur a fait l’objet de menaces après la publication d’une tribune sur Gaza ; Anne Sinclair a été publiquement prise à partie pour ses positions critiques ; Joann Sfar et Marc Knobel ont été la cible d’injures et d’attaques personnelles. Cette dérive révèle l’appauvrissement du débat interne, où la caricature remplace la discussion et où l’anathème tient lieu d’argument.
L’effacement de la complexité : la tentation du simplisme
La violence des attaques s’accompagne d’un effacement de la pluralité des opinions et d’un appauvrissement du débat. Toute tentative de nuance, toute reconnaissance de la souffrance de l’autre camp, toute volonté de dialogue sont disqualifiées comme faiblesse ou compromission. Les attaques, souvent pauvres sur le fond, se réduisent à des slogans binaires ou à des accusations sommaires, ignorant la diversité réelle des positions au sein de la communauté. Cette réduction du débat à des oppositions caricaturales appauvrit la réflexion collective et trahit la richesse du judaïsme français, dont l’histoire est celle de la diversité, de la dispute et de la complexité.
En somme, les attaques contre les voix critiques dépassent la simple divergence d’opinion : elles relèvent d’une logique de délégitimation systématique, où la stigmatisation prend le pas sur le débat, la caricature sur l’argumentation, et l’exclusion sur la reconnaissance de la pluralité. Cette dérive, indigne de la tradition intellectuelle juive, menace la vitalité du débat interne et la capacité de la communauté à affronter ses propres contradictions.
Ouverture comparative et analytique
Ces dynamiques ne sont pas propres à la France. Aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Israël, des tensions analogues traversent les communautés juives, oscillant entre loyauté, critique interne et pression externe. Certaines communautés ont su préserver des espaces de dispute pluraliste, d’autres connaissent des phénomènes de polarisation comparables. S’inspirer de ces expériences internationales, ou des ressources propres à la tradition juive du débat (dispute talmudique, initiatives de dialogue), pourrait permettre d’envisager des pistes pour restaurer la vitalité du débat interne.
II. Les critiques externes : de la pluralité à l’injonction et à la stigmatisation
Il convient de rappeler que si la communauté juive est traversée par des clivages internes, elle fait aussi face à des critiques externes qui, loin de reconnaître la pluralité des engagements, tendent à réduire chaque voix à une fonction utilitaire ou à une identité suspecte.
Critique d’Israël et antisémitisme : une distinction fondamentale
Là encore, il est essentiel de rappeler que la critique de la politique israélienne, y compris la dénonciation de ses actions à Gaza ou la défense des droits des Palestiniens, s’inscrit ou peut s’inscrire dans une démarche politique. J’insiste également sur ce point. En revanche, la critique devient problématique lorsqu’elle assimile tous les Juifs à Israël, recourt à des stéréotypes antijuifs ou exige des Juifs qu’ils se désolidarisent publiquement d’Israël. De nombreux intellectuels, y compris non juifs, insistent sur cette distinction pour défendre la pluralité du débat et éviter l’amalgame.
Dans cette seconde partie, nous examinerons précisément à quel moment et selon quels mécanismes une critique d’Israël peut basculer dans la stigmatisation ou l’antisémitisme, afin de clarifier les frontières entre débat légitime et dérive.
L’accusation de complaisance : un procès en pureté idéologique
Certaines voix juives (Bernard-Henri Lévy, Raphaël Enthoven…), loin d’être accueillies comme des partenaires du dialogue, sont fréquemment sommées de « choisir leur camp ». Cette exigence de pureté idéologique, qui ne tolère ni la nuance ni le doute, substitue l’injonction à la réflexion, et dénie à l’autre le droit à une parole singulière. Elle traduit un refus du débat, où seule la surenchère verbale semble légitime.
Délégitimation systématique de la parole juive
Au lieu de reconnaître la diversité des positions juives, certains militants externalisent la parole juive, la réduisant à une identité suspecte, toujours sommée de se désolidariser d’Israël sous peine d’être assimilée à ses crimes présumés. Cette logique d’assignation essentialise la judéité, la réduisant à un simple appendice du conflit israélo-palestinien, niant la pluralité des trajectoires et des engagements.
Ce procédé, profondément injuste, interdit toute expression nuancée : la parole juive n’est acceptée que si elle épouse sans réserve la cause palestinienne, au risque sinon d’être disqualifiée et tenue pour complice du « génocide ».
Instrumentalisation et essentialisation : la négation de la singularité
Les voix juives sont instrumentalisées de manière cynique : elles servent tantôt de caution morale à la critique d’Israël, tantôt de repoussoir pour délégitimer toute défense de l’État hébreu. Cette instrumentalisation, loin de favoriser le débat, réduit chaque prise de parole à une fonction utilitaire. Elle procède à une essentialisation qui nie la richesse des parcours, des convictions, et des dilemmes individuels. Le débat se trouve ainsi appauvri, vidé de sa substance, et réduit à une confrontation de postures figées.
La violence antisémite : du soupçon à la haine explicite
La critique externe franchit parfois la ligne rouge de l’antisémitisme, notamment sur les réseaux sociaux. Les insultes, les menaces, les stéréotypes antijuifs prolifèrent, visant à intimider, à faire taire, à ostraciser. Cette violence, même minoritaire, crée un climat de peur et de suspicion, qui dissuade toute expression nuancée et favorise l’auto-censure. Elle est le symptôme d’un débat public malade, où la haine remplace l’argument, et où l’indignité des attaques révèle l’incapacité à penser la complexité.
III. Pour sortir de l’impasse : restaurer la pluralité et la complexité du débat
Face à la polarisation croissante et à l’appauvrissement du débat autour des questions israélo-palestiniennes, il devient urgent de repenser les conditions d’un dialogue véritablement pluraliste et respectueux. La première exigence consiste à créer ou à continuer de créer comme le font quelques associations, des espaces de discussion ouverts, où puissent se rencontrer et s’écouter des voix israéliennes, palestiniennes et françaises de toutes sensibilités. Forums, colloques et initiatives associatives doivent permettre à chacun d’exprimer ses doutes, ses convictions et ses souffrances, sans crainte d’être disqualifié ou réduit à une identité figée.
Cette ouverture suppose également de valoriser la diversité des engagements et des opinions au sein de la communauté juive, en donnant une visibilité accrue à la pluralité des parcours, des analyses et des sensibilités. Il s’agit de contrer les logiques d’exclusion et d’assignation identitaire qui enferment chaque parole dans une case préétablie, et d’affirmer que la richesse du débat réside précisément dans la confrontation argumentée des points de vue, et non dans leur uniformisation.
Par ailleurs, il importe d’éduquer à la complexité, notamment auprès des jeunes générations. Cela passe par une pédagogie du discernement : apprendre à distinguer la critique légitime de la déloyauté, à reconnaître la souffrance de l’autre sans renoncer à ses propres convictions, à refuser les oppositions binaires qui appauvrissent la réflexion. Cette éducation à la nuance est la condition d’un débat public plus serein et plus fécond. Dans le même esprit, la lutte contre l’antisémitisme, le racisme et toutes les formes de haine doit être menée avec la plus grande fermeté. Il ne saurait y avoir de débat authentique là où règnent l’intimidation, l’insulte ou la menace. Créer un climat de confiance et de sécurité pour toutes les parties prenantes est un préalable indispensable à toute discussion démocratique. Enfin, les médias ont un rôle crucial à jouer dans cette restauration du débat. Il leur revient de refuser les simplifications, de donner la parole à des intervenants capables de restituer la complexité des situations, et de favoriser la circulation d’analyses nuancées plutôt que la confrontation de postures caricaturales.
C’est à ce prix seulement que l’on pourra espérer sortir de l’impasse actuelle, restaurer la vitalité du débat et renouer avec l’exigence intellectuelle et éthique qui doit présider à toute réflexion sur des sujets aussi sensibles et fondamentaux.
Marc Knobel est historien et essayiste.
De même que le renversement du Reich islamonazi délivrerait les Perses des chaînes dans lesquelles l’une des pires dictatures de la planète les empêche de progresser vers le rang mondial auquel pourrait prétendre une nation qui ne serait plus freinée par l’impératif du nivèlement par le Très-Bas qu’on lui présente comme un facteur de cohésion vital adapté au contrat ethnosocial inhérent aux civilisations issues de l’impérialisme crypto-tribal des basse et haute Antiquités, de même un renouvèlement intégral du sous-leadership panarabe dit palestinien, lequel tête-à-queue stratégique placerait d’authentiques promoteurs des libertés individuelles à la tête des instances représentatives du personnel géopolitique de trois colonies de peuplement égarées en Terre sainte après la chute des Ottomans, changerait immédiatement la donne au Proche-Orient en y réfractant le spectre éclaireur d’un ordre mondial, parce qu’humaniste, parce que non dévoyé, respectueux du droit à la vie et à la liberté restreinte et générale, repartant de zéro sur la base de la reconnaissance 1) de l’État juif, 2) du peuple juif, 3) de l’histoire juive, 4) de la dette éternelle que des voisins honnêtes admettraient avoir contractée envers les fondateurs du monothéisme et ce dès l’aube de leur contagieuse conversion, 5) des crimes souvent imprescriptibles dont les uns et les autres se seraient rendus coupables et auraient été réciproquement comptables durant un millénaire et demi de persécutions érigées en intangible Loi commune, si l’on s’abstient de remonter aux multiples tentatives d’anéantir les seuls représentants de l’espèce humaine ayant toujours refusé de se prosterner devant ces idoles en pierre ou en terre cuite dont le premier des patriarches de leur ethnie étrange et singulière avait effrontément contesté l’existence au grand dam des envahisseurs qui les déporteraient au cœur d’empires polythéistes voués au déclin afin de mieux y étouffer leur soif de liberté et leur espoir de restaurer un jour, fût-ce au sein d’un royaume défiguré, leur souveraineté une et indivisible.
Ainsi, les mâchoires iraniennes sont loin de totaliser celles de l’étau que l’on entend crisser de manière convulsive à l’idée de pouvoir écraser Israël ; si l’on met de côté le projet de nucléarisation de la RII, la révolution islamique mondiale n’est qu’à dix pour cent chî’ite ; la Nébuleuse dont elle découle et en quoi elle se coule, en tant qu’elle est mécaniquement islamiste, djihadiste et incidemment, j’allais dire prioritairement palestiniste, bénéficie elle aussi d’une économie souterraine fermant les yeux sur les haines fratricides et les profanations religieuses dès lors que les auteurs de ces dernières bénéficient a priori de la clémence des instances disparates dont ils servent aveuglément la cause divinement crapuleuse sur laquelle ils louchent.
L’Internationale désuniversaliste est pressée d’arriver à ses fins, escomptant l’inéluctable résorption d’Israël par le biais bissecteur de l’islamisation de Jérusalem et celui tout aussi préempteur d’un renversement du rapport de force démographique favorable aux déjudaïsateurs du seul État des Juifs.
La neutralisation du régime iranien — son renversement n’étant pas de notre ressort — ne serait alors qu’une étape dans le long processus de pacification régional qu’a entrepris l’État-nation des Juifs qui, on ne le répétera jamais assez, demeure un spécimen unique en son genre d’État de droit au Proche et Moyen-Orient.
Rising Lion est une opération modèle que devraient commencer d’étudier dans les moindres détails les pays cibles du Méta-Empire.
Les planificateurs et exécuteurs de ces frappes préventives contre un Exterminateur aryen, trop fier d’avoir été proto-nazifié, dont la révolution involutionnaire de 1979 donnerait, de surcroît, un grand coup d’accélérateur à l’interminable phase de restauration obsessive qui s’était enclenchée dès son antique démantèlement, ces défenseurs émérites du monde libre, s’il en reste quelques grains enrayeurs dans l’engrenage des guerres de Religion gigognes, ces soldats de la vraie paix, en somme, ne nécessitent vraiment, Madame, Monsieur, aucun appel à la plus grande retenue.
Ni à propos de Gaza, ni concernant son principal sponsor, l’armée de défense, le service de renseignement ou le gouvernement de l’État juif n’ont besoin des conseils d’une nation à ce point embourbée dans son complexe décolonial qu’elle en oublie, face aux rodomontades d’un tsar star, qu’elle est elle-même une puissance dotée, ou de se comporter comme il se doit en conscience du rapport de force qu’elle a su établir.
Le sens de la mesure, on l’évalue à la capacité d’un pays agressé à n’en faire ni trop ni trop peu pour assurer la sauvegarde des intérêts vitaux qui sont les siens et parfois les dépassent.
Les démocraties occidentales qui semblent avoir découvert, ce matin, qu’elles étaient, jusque dans leurs fondations civilisationnelles respectives et quelquefois communes, liées à Israël et alliées d’Israël, se font du souci pour son karma et son inclination supposément chronique à la riposte disproportionnée.
Merci pour lui, mais nous leur conseillerions plutôt de concentrer leurs dernières énergies sur notre futur proche, en espérant qu’elles aient eu la bonne idée de nous en mettre au frais quelque fragment de souche à partir duquel le désir, le courage et tout ce qu’il faut de foi pour s’embarquer sur la voie de la recivilisation, telle qu’induite par le phénomène de décivilisation identifié jusqu’aux plus hauts sommets de l’État, ne serait pas peine perdue.
P(as)-S(auveur) : Heureux de constater que le dépérissement de l’état de tolérance au contradictoire est de nouveau un sujet qui interpelle non pas les voix juives, mais celles d’entre elles dont on a pu avoir l’impression qu’elles prétendaient parler au nom de tous les Juifs dès l’instant qu’elles écartaient les partisans d’une riposte efficiente d’Israël comme autant de complices de crimes contre l’humanité qui, excusez-moi du peu, déjudaïseraient Israël ; en termes d’anathème, ça se pose là ! sans compter la charge d’ironie que contient cette tendance à distribuer des brevets de judéité aux Juifs qui ont l’outrecuidance de ne pas avoir ruminé comme il faut, c’est-à-dire comme soi-même, les prescriptions et proscriptions toraniques et leurs moult interprétations talmudiques ; dans ces circonstances, il n’est pas incompréhensible que la question de la trahison envers le grand Soi vienne chatouiller nos voix ultratombées au champ du déshonneur anticritique et internationalistique ; l’anéantissement de l’État juif ouvrirait une brèche pour les propagateurs d’anti-Lumières galvanisées par la victoire sans Appel des prétendants à la succession mahométane qui, tel le royaume des Maures dans une pièce de Corneille que l’on ne peut plus étudier sur les bancs de l’École publique ni moins encore répudier ou juste parodier sur le moindre banc, poursuivrait sa guerre de Mille ans jusqu’à la damnation totale du pestiCID ; mais je nous rassure, nous, le premier des peuples élus, pourrions tout à fait nous abaisser à guerroyer entre soi en abandonnant les pistolets chargés de Jean-Paul Sarte pour nous tirer dessus à balles réelles, sans pour autant que cette lugubre descente aux Enfers ait le pouvoir de nous confisquer l’effusion messianique de notre iconoclaste Esprit.
Le choc d’autorité dont le pays a besoin ne procédera pas, en effet, Monsieur le Préfet de la zone de défense et de sécurité, du seul réveil de la police. Mais sans trop m’attarder dans le mode rabat-joie, je crains tout de même que la réponse éducative à cette sinistre et affligeante crise de civilisation ne dépasse largement le cadre de l’Éducation nationale.
Si notre École publique paie aujourd’hui les pots cassés, l’enseignement privé ne saurait recoller à lui seul un pot aux roses dissimulé à gros sabots, à moins que son art de la récup ne vise qu’à réactiver un champ de mines voué à saper un par un tous les principes de la République.
C’est au sein du foyer qu’un enfant reçoit les bases d’une éducation morale ; d’abord, au cœur de la famille nucléaire et, très vite, à l’intérieur du territoire clanique de la cellule familiale extensible qu’il s’est librement choisie, ou bien qu’un entourage à l’èthos féroce lui assigne sous peine d’exclusion, d’ostracisation et donc d’une dose égotiquement létale de harcèlement quotidien, le bannissement, avec ce qu’il comporterait d’émancipation indirecte, n’étant pas une option sous le couvercle d’un autocuiseur.
Il en résulte que l’état de non-droit est le concept sous le joug duquel vont s’agréger une grande partie des perdants du système ultime tel que conçu par les faux prophètes de la globalisation autorégulatrice, lesquels rebelles préprogrammés condamnent le leadership du nouveau nouvel ordre à penaudement céder la place aux lois prénoachides et antédiluviennes de l’empire des Titans, où agression fait loi sous l’effet d’un délitement multifactoriel d’autant plus désinhibant que l’Adversaire de la guerre froide a été remis en selle par l’Alliance des non-alignés.
La hamassisation des masses en est le signe réfrigérant et le symptôme fiévreux. Et l’on comprend qu’un siphonneur exposé à une radicalisation en série sur laquelle il n’a aucune prise, ne pouvant qu’enjamber la prochaine présidentielle pour se projeter dans le jeu de quilles des années trente, préfère tabler sur les réserves de voix antisionistes et leur donner dès à présent des gages d’ordre et de paix sociale dans le contexte sans doute idéal du conflit déconfit, — livrer chaque jour des armes à Israël tout en veillant à ce qu’un arsenal de destruction massive au compte-gouttes soit acheminé vers Gaza et que la Nébuleuse palestiniste bénéficie continuellement des moyens de se remplumer avant la chute fatale ; ou de l’éternel bouc émissaire Youdi, coupable favori des Youpy terres en état de disgrâce sur qui menacerait de s’abattre la colère du bas peuple.
Il semble à première vue approprié d’interdire la vente de couteaux de boucherie aux mineurs. Hélas, nombre d’entre eux en possèdent déjà un, si ce n’est le râtelier. Quant aux prochaines générations, peut-être devront-elles se rabattre sur le commerce illégal des armes blanches, ou sur celui des armes à feu, et pourquoi pas les armes de guerre ; n’est-ce pas déjà le cas pour une sous-population infime, on prie pour qu’elle le reste, bien qu’on ait eu un aperçu du type d’atrocités qu’était en mesure de perpétrer en quelques heures une piraterie d’Empire dans les costumes cheguevaresques de Brigades vertes savamment spontanéifiées ?
L’éducation des masses est la mission prioritaire d’un État de droit qui se refuse à être le spectateur de sa propre déchéance. La décivilisation doit être désamorcée à toute hâte ; nous n’y parviendrons qu’en reprenant conscience de la forêt de concepts de laquelle nous sommes faits.
La République n’est pas excluante, mais encore moins encline à inclure des principes et des lois, des coutumes et des us, des outrages et des rages qui s’administreraient à elle comme un poison mortel.
L’Europe n’est pas une auberge espagnole, quand bien même en hébergerait-elle pour le bonheur des uns et le malheur des autres, ou inversement, — c’est au choix ; encore faut-il être apte à en offrir sur des sujets ayant trait à la guerre intestine sans contourner les zones de fracture culturelle qui feraient de notre rampe de déploiement civilisationnel une proie facile pour l’agresseur, envahisseur et démanteleur de l’Union qu’elle préserve.
Les antisystèmes attaquent un modèle universaliste qui, de manière paradoxale, générerait davantage d’exclusion qu’un régime absolutiste. Sauf à se trahir lui-même, on ne voit pas comment. Il n’est d’ailleurs pas impossible que le sentiment de rejet que nos droits humanistes insufflent à certains résulte d’un contre-effet miroir. Mais comment inciter ceux-là mêmes qui abhorrent vos tabous à brûler les totems qu’ils adorent ?
La loi du clan contrevient à cet ordre républicain que l’on accuse de toutes les injustices qui nous frappent. Vive le désordre, scande le post-soixante-huitard dont les instincts de vie et de mort sont passés à la moralinette sans son consentement. Eh bien voilà… Libérée de pied en cap, notre nature chérie ! Libre de suivre sa logique de clan ; libre d’exclure à grande échelle qui elle veut, où elle veut, quand elle veut ; libre de priver de ses droits fondamentaux tout un chacun, dès lors qu’il ferait obstacle à son bon plaisir.
« La liberté ou la vie ?
— Tenez ! prenez tout ! »