pour accueillir Franco, le maire de Ciudad Rodrigo et l’école thérésienne ont décidé que je serais l’enfant qui l’accueillerait avec la chanson :

L’Espagne est la nation qui a conquis le plus de gloire au cri de Lépante, de Castille et Aragon… etc.

…à la dernière minute, le maire [lorsqu’il s’est rendu compte que mon père était en prison ?…] a mis à ma place un de mes amis très intelligent. Ce garçon était très ému… Franco a pris ses petites mains et lui a dit :

Ne pleure pas, je suis un homme comme les autres

…puis il a fait un discours interrompu par des clameurs et des cris de caudillo invaincu… etc. J’ai appris par cœur ce qu’il a dit d’une voix très aiguë et pas du tout masculine :

Mirobrigenses ! mirobrigensas ! Espagnols, vous tous qui m’écoutez. Je ne viens pas ici en orateur, vous savez tous que je ne le suis pas. Je viens pour la défense de l’Espagne : Une. Grande. Libre. Nous souffrons d’une après-guerre, d’une guerre européenne et d’une sécheresse persistante. Nous construisons 23 réservoirs d’eau sur le Tage, 17… etc.

Franco, pour plaire à son allié de l’Axe, a créé le concours, disparu (et nietzschéen ?) des surdoués, pour lequel m’a préparé extraordinairement bien le premier amour de ma vie : mère Mercedes ; pendant son régime tous mes écrits et films ont été interdits ; en 1966 : prison de Carabanchel ; ensuite j’ai publié en livre ordinaire et de poche dans les principales langues « Lettre au Général Franco », également interdit en Espagne…

*

« …tu n’inventes, petit Africain, ni ne découvres rien… que tu n’aies imaginé ? »

*

« …tous tes souvenirs… sont-ils décisifs ? »

*

« …tu peux penser… que tout existe et n’existe pas ? »

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« …les malades imaginaires… sont-ils deux fois plus malades ? »

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« …ta pensée est la trajectoire d’une flèche… inséparable de la flèche ? »

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« …que le néant ne t’effraie pas… c’est lui qui a peur de toi ? »

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« …tu peux vivre l’éternité passionnante… d’un jour ? »

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« …il y a ceux qui rampent… jusqu’au niveau du ciel »

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« …sans discréditer personne, personne n’est meilleur que nous ? »

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« …non, non, loin de là, Africanito, quand on parle d’amour… on ne fait pas l’amour »

Détail d'une huile sur toile de Fernando Arrabal. La toile est de couleur bleue, noire, rouge, verte, avec des formes abstraites, liquides, des sortes de bulles, et au centre une forme noire qui ressemble à un fer à cheval. En haut on peut lire le mot "News" en lettres metalliques, puis au centre "Madre Mercedes" et en bas "Ciudad Rodrigo".
Huile sur toile de 150 cm x 120 cm de Fernando Arrabal. Photo : DR
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