En 2010, La Règle du jeu s’engageait aux côtés de figures politiques, intellectuelles et du monde du spectacle pour défendre la liberté du réalisateur iranien Jafar Panahi, injustement condamné à six ans d’emprisonnement pour « participation à des rassemblements et propagande contre le régime ». En outre, cette condamnation s’était vue accompagner d’une interdiction de quitter le pays, de tourner un film ou d’entrer en contact avec des journalistes pendant une durée de vingt ans.

Alors que, dans l’attente de l’appel de cette condamnation, nous n’avons quasiment plus de nouvelles de Jafar Panahi, La Règle du jeu salue l’initiative de l’association  » Documentaire sur grand écran » qui, à l’occasion des vingt ans de la revue IMAGES documentaires, propose  mardi 12 février 2013, au Forum des images, une soirée Doc&Doc avec notamment la projection unique de : Ceci  n’est pas un film de Jafar Panahi.

Le Film

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« Il faut préciser, sous peine de n’y rien comprendre, le fond sur lequel s’élève cet essai documentaire.

Rappeler d’abord que Panahi, 51 ans, et cinq longs métrages à son actif depuis 1995 (dont ces chefs-d’oeuvre que sont Le Cercle, 2001, et Sang et or, 2004), est avec Abbas Kiarostami l’un des plus gr

ands cinéastes vivants, et le fer de lance de ce « néoréalisme » persan qui fait trembler depuis quelques décennies le cinéma et le pouvoir iraniens sur leur base. Fils d’un peintre en bâtiment, cet enfant de Téhéran est de loin le cinéaste iranien le plus engagé dans la dénonciation des maux de son pays, ce qui a lui a récemment valu un brutal retour de volée.

Depuis deux ans Jafar Panahi est le héros d’un feuilleton judiciaire qui tourne à la farce kafkaïenne.

Arrêté à son domicile le 1er mars 2010, il est accusé de « propagande contre le régime », pour avoir préparé un film sur le mouvement de protestation consécutif à la réélection du président Ahmadinejad en juin 2009. Il partage alors ce triste privilège avec son coréalisateur, Mohammad Rasoulof, qui réalisera clandestinement après sa libération Au revoir. Quant à Panahi, libéré sous caution le 25 mai 2010, son procès a eu lieu quelques mois plus tard, et le verdict est tombé à la fin du mois de décembre : six années de prison, assorties d’une interdiction pour une durée de vingt ans de tourner des films, de sortir du territoire et de donner le moindre entretien aux médias. La sentence est ubuesque, et ferait sourire si elle ne donnait lieu à la mise à mort symbolique de l’artiste. Depuis lors, Panahi a fait appel, vit à Téhéran sans pouvoir travailler et demeure dans l’incertitude de son sort. On en était encore là en mai 2011, lorsqu’un nouveau film du cinéaste fut annoncé au Festival de Cannes, en même temps que celui de son compagnon d’infortune, Mohammad Rasoulof. Certains chroniqueurs bien renseignés prétendent que le film a franchi les frontières sous la forme de clé USB cachée dans un gâteau. Ce film, tout le monde peut aujourd’hui le découvrir en salles et mesurer son courage, son insolence, sa dignité. Ce n’est évidemment pas un péplum, plutôt une lettre filmée, adressée en désespoir de cause, mais avec un humour ravageur, au vaste monde. Panahi, reclus entre les murs de son appartement, fait de sa situation le sujet même de son film : que reste-t-il à un cinéaste qui n’a plus le droit de filmer et qui attend qu’on le jette incessamment en prison ? […] »

Jacques Mandelbaum pour Le Monde (27/09/2011)

Le programme de Doc&Doc

Mardi 12 Février 2013 au Forum des images :

19h00 : Ceci n’est pas un film, de Jafar PANAHI et Mojtaba MIRTAHMASB

21h00 : La Bataille du Chili, la lutte d’un peuple sans armes, de Patricio GUZMAN