Engagé dans une procédure de divorce avec son épouse française d’origine russe, Marina Stcherbatcheff,Boris Spassky est revenu à l’occasion d’un long entretien sur sa carrière et en particulier sur la partie historique qui l’a opposé à l’américain Bobby Fischer en 1972, et pour laquelle il a perdu son titre de champion du monde. Étrangement il a été peu question des raisons pour lesquelles il a pu faire l’actualité ces derniers mois. En effet, le 16 août 2012, Boris Spassky avait mystérieusement disparu de son domicile français de Meudon, étant toujours en convalescence après une attaque cérébrale en septembre 2010. C’est son fils Boris qui retrouve sa trace, quelques semaines plus tard, dans un hôpital de Moscou où il est soigné pour des problèmes rénaux. Son père ne sachant pas comment il a pu passer de son lit à une chambre d’hôpital à plus de 2 800 km de chez lui, Boris fils décide de porter plainte en France pour enlèvement et séquestration. Une action qui vise essentiellement Valentina Kuznetsova, cette mystérieuse femme trouvée au chevet du joueur d’échec et qui ne laisse personne l’approcher. Depuis, Spassky assure qu’il est en Russie de son plein gré, son séjour étant financé par un mystérieux sponsor. Aujourd’hui il reste éloigné de sa famille qui dénonce les manipulations et pressions dont il serait l’objet.

Les obscures raisons du retour quasi triomphal de Boris Spassky en Russie ajoutent un ultime chapitre à l’incroyable parcours de l’ancien champion.

Né en 1937 à Leningrad, il est évacué vers Kirov lors du siège en 1941. Après avoir échappé de peu aux fusillades nazies, il apprend à jouer aux échecs à cinq ans à peine. A vingt-quatre ans il devient champion d’URSS et en 1969, après de nombreuses compétitions, il est sacré champion du monde. En 1972 il perd ce titre face à l’américain Bobby Fischer, son « meilleur ennemi », lors d’un duel resté célèbre à Reykjavik. Spassky refuse de devenir cet homo sovieticus que le régime voudrait en faire, il devient profondément anti-communiste après la chute du mur. En 1976 il quitte l’URSS, les autorités soviétiques ayant exigé le départ de son épouse Marina. Le couple s’installe à Meudon. En 1978 il obtient la double nationalité française-soviétique. Endetté, Spassky dispute le match de la revanche contre Fischer en 1992 dans l’ex-Yougoslavie. L’Américain conservera son titre.

Mardi, à la question du présentateur : « Qu’en est-il de la France ? Est-ce terminé ? », Spassky répond sous les applaudissements du public : « Avec la France… oui. » Avant d’ajouter, grave : « Lorsque je suis en Russie la France me manque, et quand je suis en France, c’est la Russie qui me manque. »Fernando Arrabal, a promis de bientôt raconter, au sein de son blog à La Règle du jeu, comment François Mitterrand a accepté sa requête de décerner la Légion d’honneur à Boris Spassky, après son triomphe à Linares.Romain David