Coup double et peut-être même triple pour Marine le Pen. De son quartier général bleu blanc rouge, la fille du vieux menhir a, ce dimanche, gagné son pari familial et national. A six points de Sarkozy à qui elle a repris les voix volées en 2007, elle, a, dans le même mouvement, définitivement ringardisé son père. Coup double, donc. Regroupant presqu’un Français sur cinq, une nouvelle force politique vient d’émerger à la droite de la droite, et, de la bouche de sa chef, affiche haut et fort son ambition de la supplanter. On peut, de fait, lui prédire une troisième victoire dans quinze jours : un Sarkozy battu, avec les électeurs du Front National en fossoyeurs d’un jour (un jour qui va durer cinq ans) de la droite classique au pouvoir. Place nette, demain, à la Hénin-Beaumont pour porter, seule, le combat du populisme contre la gauche sur la défensive ? Dans l’euphorie de cette double et bientôt triple victoire, la gagnante a lâché quelques mots qui en disent long sur son ambition sans mélange et la direction de son prochain combat. « Résistance » ; « Ce n’est qu’un début, continuons le combat », détournements symboliques et sans la moindre pudeur de phrases-symboles. Auxquelles elle n’a pas manqué d’ajouter, pour faire bonne mesure, ceci : « Français de gauche, comme Français de droite » ; « Ouvriers, paysans, petits fonctionnaires. » Cible, plus que jamais, de Marine le Pen : la France d’en bas, avec, au premier rang, la France prolétarisée. Là, Jean-Luc Mélenchon, en effet, a perdu son pari. S’il a réussi à refonder sur les ruines du PC et de la gauche révolutionnaire, une nouvelle force politique néo-marxiste, il a échoué, hélas, à reprendre au Front National sa part du vote ouvrier et populaire.

Face à cela, Jean-François Copé, Rachida Dati, Xavier Bertrand, Nathalie Kosciusko Morizet, loin d’appeler à la mobilisation républicaine pour conjurer la menace qui pèse sur la droite classique, leur paroisse en péril, sont partis, dès l’annonce de la défaite de leur camp, sans perdre une seconde, à la pêche aux votes, arguant d’une seule voix que Marine Le Pen n’était pas propriétaire de ses suffrages et que les électeurs du Front National, dont il faudrait entendre la douloureuse protestation de victimes de la crise, sont des Français comme les autres. Comme les autres ? Ah, oui, vraiment ? Eh bien, non. Ils ne sont pas tout à fait, je pense, comme vous et moi. Ils ont ceci de différent qu’ils n’aiment pas la République, qu’ils n’aiment pas son histoire et ses valeurs, au mieux les méconnaissent et au pire les méprisent, et qu’en conséquence ils n’aiment guère ou pas du tout la France telle qu’elle s’est construite depuis la Révolution française (et construite, en premier lieu, faut-il le rappeler, contre leurs aïeux ou leurs héros et leurs mentors), lui préférant un régime fort, réactionnaire et nostalgique des temps radieux d’avant la démocratie, d’avant le peuple-citoyen, fonctionnant, au nom de l’ordre et de la suprématie des forts, à coup de lois d’exception liberticides et de discriminations en tous genres, décrétant des citoyens de seconde zone, rejetant hors de la communauté nationale les basanés, les mal-nés, les tard venus, les opprimés, les chômeurs, les pauvres, épurant la fonction publique, l’Education nationale, les bibliothèques et la Culture. Le modèle de ces Français-là, qui ont voté Front National ? Vichy, peut-être, mais c’est tellement loin tout cela, et un peu « too much ». Non, bien plus propres, bien plus présentables, modernes et civilisés, ce sont La Ligue du Nord en Italie et sa chasse aux immigrés, la Hongrie de Viktor Orban et sa chasse aux Roms, le haro jeté sur les mauvais Hongrois, les « anti-nationaux », intellectuels, journalistes, travailleurs sociaux, l’Autriche de Haider et de ses successeurs néo-nazis, les Serbes de Bosnie, défenseurs de Mladic, au premier rang de « la défense de la chrétienté » contre Sarajevo la cosmopolite.

Les sondeurs escomptent que 60% des voix de Marine Le Pen se reporteront sur Nicolas Sarkozy, 20 % sur François Hollande, le reste s’abstenant. La droiture, l’honnêteté, la clarté commanderaient que les deux candidats en lice disent hautement, sans faux-fuyants, que ceux et celles qui, électeurs hier du Front National, voteraient pour eux, renieront par là-même, en adhérant au pacte démocratique, leur vote de la veille, et que ces citoyens de retour au bercail de la démocratie sont évidemment les bienvenus. Quant aux autres, ceux qui persistent et signent, il conviendrait qu’il leur soit publiquement signifié qu’ils ne seront pas les bienvenus, qu’ils polluent, de fait, la démocratie et que, plutôt de la prendre de biais en otage, qu’ils plébiscitent de nouveau leur Madone, Marine Le Pen, en votant, à la face de tous, blanc ou nul.

La démocratie, la République n’a que faire d’eux.

Telle est notre attente des deux candidats républicains, et notre aimable conseil aux Fous de l’anti-France de Marine Le Pen : restez entre vous, dans votre parc à saloperies. Votez tels que vous êtes.

6 Commentaires

  1. De tels titres confortent l’électorat de Marine Le Pen.
    Les médias ont tort d’ainsi mettre en avant ses prétendues « victoires ».
    A-t-on déjà vu un candidat qui ne récolte que 18% monopoliser autant toutes les attentions? Faire autant de Unes? Avoir autant de sites qui lui sont consacrés?
    Difficile.

  2. Tout à fait d’accord. A longueur de journée on entend que les causes du vote FN sont un vote-sanction par des français victimes de la crise. Je trouve que c’est bien pire que ça. Ce sont des français toute tranche d’âge confondue, qui prônent un nationalisme et un exclusionnisme acharnés… De façon totalement décomplexée depuis que MLP a totalement recréé la stratégie marketing du FN, en ratissant très large et en atténuant les traits xénophobes et purement sécuritaires de son programme…Pourtant en trame de fond c’est bien de tout cela qu’il s’agit…
    Là où Sarkozy a échoué, c’est lorsqu’il a amené la droite et ses électeurs sur le terrain du FN en exacerbant sa politique sécuritaire, de flux migratoires etc… Il a amorçé au sein même de l’Elysée et du pouvoir central, ce type de politique qui a fini par entrer dans la « normalité » et qu’on a même fini par trouver trop souple… Le régime démocratique et républicain s’est durçi à nos dépens.

  3. Visiblement Monsieur, vous ne comprenez pas.
    Toujours les insultes, les insultes, les insultes … toujours pas d’arguments, d’efforts de discussion, de compréhension, d’ouverture d’esprit…bref d’esprit républicain. Non seulement cette stratégie échoue lamentablement, mais elle conforte l’immense majorité des gens qui pensent différemment dans leur ardeur contestataire en plus de vous couvrir d’un halo de ridicule ne suscitant en dernier ressort que répulsion et mépris à votre endroit. Toujours les même rengaines « anti fascistes », les même références historiques dans l’espoir d’agiter la peur de la resurgence « des heures les plus sombres … ».
    Fierté de son pays, liberté, fraternité, souveraineté, respect des petites gens, des travailleurs, justice sociale, relocalisation de la fabrication, réindustrialisation, défense des intérêts nationaux, priorité nationale dans l’accès aux emplois, au logement, aux soins (pour tous les nationaux indépendemment de leur origine, de leur religion, de leurs convictions…) … est-ce si honteux? est-ce si infâme? est-ce une apologie « d’un régime fort, réactionnaire et nostalgique des temps radieux d’avant la démocratie… »? bref est-ce véritablement « un parc à saloperies »? Non, et vous le savez bien. Alors, pourquoi toujours les insultes, les insultes, les insultes … ?

  4. Je voulais juste vous dire Monsieur Herzog que je ne suis pas d’accord avec votre analyse; la republiqe a besoin de TOUS ses citoyens, y compris ceux qui ne sont pas d’accord avec nous et qui votent differemment; l’electorat du front national veut revenir a une epoque passee supposee meilleure… Il faut discuter et argumenter mais surement pas leur nier leur droit a l’existence!

  5. Merci Marine, rien que de voir à quel point tu emmerdes tout ces bourges retranchés dans leur petit monde douillet, entourés de courtisans, ça me convainc dix mille fois de voter pour toi.

  6. Je constate, une fois de plus, l’autisme intellectuel édifiant des intervenants de ce site internet. Après votre série « une idée par jour pour faire baisser le FN », dont je note qu’elle a du très certainement et brillamment convaincre les convaincus, voilà une analyse qui s’évertue dans une rhétorique du mépris absolument dégoûtante et contre-productive.
    Il faut tout de même pratiquer une forme de yoga intellectuel assez pointu, pour écrire, à quelques lignes d’intervalle, que les gens qui votent FN « ne sont pas comme nous » et pointer par la suite le fait que ces gens décrètent des citoyens de seconde zone.
    J’ai presque été surpris, voyez-vous, que l’auteur n’aille pas au bout de ces idées en décrétant que les électeurs FN devraient être parqués dans des réserves, comme les Indiens d’Amérique. Bref, comme la plupart des analyses à chaud sur le vote Le Pen, cet article n’exprime rien de constructif, il n’est que ressentiment, haine, rejet, et il salit davantage son propre auteur que ceux qu’il entend insulter.
    Continuez ainsi, Monsieur Herzog, la prochaine fois l’héritière sera à 25%.

    Signé : un universitaire qui travaille sur le FN et qui se désole en constatant le jeu d’influence réciproque entre analyses pseudo-savantes, éditoriaux insultants, et succès électoraux du FN.