Jeudi 10 mars, La France, par la voix de Nicolas Sarkozy, reconnaît le Conseil national de transition libyen.
Pour la première fois depuis que la Libye, après la Tunisie et l’Égypte, a entrepris de s’affranchir, les armes à la main, du dictateur qui l’outrage, un grand pays occidental tire les conséquences de la situation et n’attend pas la victoire « sûre et définitive » du camp de la liberté pour lui apporter son appui une fois l’affaire réglée, en bon ouvrier de la vingt-cinquième heure — ou pour pleurer, si l’affaire tourne mal, sur le sort des vaincus abandonnés à leur sort.
En 2001, le commandant Massoud vint à Paris. Il ne fut pas reçu à l’Élysée pour de médiocres raisons diplomatiques. Une grande occasion avait été gâchée. Quelques semaines plus tard, il était assassiné.
Pour la première fois depuis longtemps, la France prend donc les devants, tend la main à un peuple qui se libère, et nous en sommes fiers. Si la Libye libre gagne, notre pays n’y aura pas été pour rien.
D’autant qu’il y a urgence. Les troupes de Kadhafi sont revenues en force, à 250 kilomètres de Benghazi.
A Benghazi, la foule remercie la France, le drapeau français est hissé. Cette image restera. Elle a d’ores et déjà fait le tour du monde arabe.
En Europe, suite à la reconnaissance par notre pays de la Libye libre, dans les chancelleries, le tollé est général. « Cavalier seul ! » « Fait accompli ! » « Coup d’éclat ! » « Effet d’annonce ! » « Et la Solidarité Européenne, bordel ? » N’en jetez plus.
La consternation des diplomates de tous bords nous consterne sans nous surprendre. Depuis le temps, c’est encore et toujours la même désespérante histoire qui se répète.
Le vingtième siècle aura, continument, été le siècle des atermoiements, des accommodements, des reculades. Il aura été le siècle en majesté des Norpois et des Ponce-Pilate. Du massacre des Arméniens au siège de Sarajevo, quatre-vingt ans plus tard, de Madrid 1936 à Munich et à la Shoah, de Berlin 1953 à Budapest 1956, de Prague 1968, Gdansk 1981, au Liban sous la botte syrienne, les démocraties occidentales, toutes larmes à l’œil, sont restées, à chaque fois, l’arme au pied.
Passe encore face à Hitler ou Staline. Mais devant Milosevic, Karadzic ou, aujourd’hui, Kadhafi ! Ah, oui, pardon, une exception, le Kossovo. L’honneur est sauf…
Sarajevo, juillet 1995. Les Serbes du général Mladic attaquent l’enclave de Srebrenica, sous protection des Casques Bleus des Nations Unies, qui ne bougent pas. Un massacre est redouté. Mladic est sur place et ses méthodes sont connues. Se doutant du pire, un officier français part de Sarajevo avec un détachement vers Srebrenica. Il lui est intimé l’ordre, depuis Paris, de faire immédiatement demi-tour. La suite est connue.
Aujourd’hui, les chars, les canons, les avions de Kadhafi ont arrêté par un barrage de feu à Ras Lanouf les soldats libyens de la liberté, ces combattants improvisés, armés, pour l’essentiel, de leur seul enthousiasme, qui allaient marcher vers Tripoli. Les troupes du tyran, ses mercenaires étrangers, ne sont plus, de ce fait, qu’à 250 kilomètres de désert, sans aucun obstacle, de Benghazi, la capitale provisoire de la Libye libérée, sans défense ou presque, que quitteraient déjà certaines télévisions étrangères.
Que va faire Madame Merkel ? Répéter pieusement une fois de plus : « Kadhafi doit partir » ? S’aligner sur Berlusconi le pro-Libyen ? Souviens-toi, Angela, de Berlin 1953 et de la révolte des ouvriers berlinois écrasée dans le sang par l’occupant soviétique !
Nul, dans la Libye libérée, ne demande l’envoi de troupes étrangères. Il ne s’agit pas de mourir pour Benghazi. Envoyer des armes, pas davantage. Le temps presse trop, pour apprendre à s’en servir. La solution est connue. Elle est simple.
1) Décréter d’urgence une no-fly zone, face à une aviation libyenne, de l’avis unanime, en piteux état, qui n’est dangereuse que pour ceux qu’elle bombarde impunément à vue.
2) Frapper de loin les quelques aéroports militaires d’où décollent ces avions.
3) En appeler, en cas de danger imminent sur Benghazi et, au-delà, en soutien aux libérateurs libyens, à une intervention, sous l’égide de la Ligue arabe, du grand voisin égyptien et de son armée, qui s’est déjà grandie en destituant Moubarak.
L’Europe encore sur la Libye. Son communiqué. Un pur chef d’œuvre.
« Afin de protéger la population civile, les États membres étudieront toutes les options nécessaires, pour autant que la nécessité en soit démontrée, qu’il existe une base juridique claire et que le soutien de la région soit acquis. »
Question : Quelles sont la vitesse de progression d’une colonne de chars dans le désert et la durée d’étude « d’une option nécessaire afin de protéger la population civile, pour autant que la nécessité en soit démontrée » ? Combien de temps, la démonstration de cette nécessité ? Combien de morts, combien de souffrances pour faire enfin « nécessité » ?
Un dernier mot. Sur le bouc émissaire. Sur BHL. Sur celui par qui tout « ce mauvais scénario » serait arrivé, cette « précipitation ». Sur ce diplomate pirate !
Nous étions il y a une semaine à Benghazi. Nul ne connaissait l’écrivain français. Nous rencontrâmes des membres du Conseil Transitoire de la Révolution, pas encore institué en Conseil National. Lévy évoqua la possibilité d’un contact, s’ils le souhaitaient, avec la présidence française. Les personnes présentes le regardèrent, incrédules, un brin sceptiques. Un vieux professeur de français de l’université de Benghazi fut requis pour confirmer que ce Français avait une certaine notoriété en France comme intellectuel engagé et qu’il s’était mobilisé jadis pour la Bosnie et pour Massoud. Nous fûmes bientôt reçus par le Président de ce Conseil, Mustafa Abdeljeleel, à qui Lévy retransmit sa proposition de jouer les bons offices avec Paris, où il venait d’alerter le président Sarkozy, qui avait manifesté d’emblée son intérêt et donné son feu vert à l’accueil d’un envoyé libyen. Nous devions repartir le lendemain ou le surlendemain. Et Lévy, dans la foulée, proposa qu’un envoyé reparte avec nous. Dans la soirée, deux émissaires vinrent apporter la réponse. Le Conseil transitoire venait de se transformer en Conseil National et avait nommé une direction de quinze membres connus, dont deux chargés des Relations internationales. Ils iraient, question de bon voisinage et de soutien primordial du grand voisin égyptien, d’abord au Caire. Puis, de là, ils gagneraient, en effet, Paris. Le rendez-vous eut lieu jeudi.
On a reproché au Président Sarkozy d’avoir joué en solo. On peut mesurer rétrospectivement, aux protestations hypocrites sur la « méthode » (portant, bien entendu, sur le fond), quels obstacles, quelles manœuvres, au sein même de l’Administration française, il aurait certainement affrontés s’il avait procédé autrement. Les diplomates n’ont pas leur pareil pour alerter leurs homologues étrangers quand il s’agit (au prétexte d’adopter une position et une action communes) de bloquer une mesure qui dérange leur indifférence fatiguée au monde, à ses espoirs, à ses appels et à ses cris. On ne connaît que trop leurs sages (?) manœuvres pour botter en touche.
Les manœuvres dilatoires, à l’approche du danger sur Benghazi et toute la Libye libérée, ne sont plus de mise. L’heure d’une solidarité concrète est venue. La parole est aux politiques et aux militaires. Arabes, européens, américains. Elle est, par-dessus tout, à l’opinion publique, ici comme ailleurs.
Le printemps arabe ne peut pas mourir aux portes de Benghazi.
Une pétition internationale sous-tendue par une mobilisation la plus large possible pourrait peut-etre encore avoir un effét sur les décisisons des gouvernants qui hésitent. Mais il faut faire très vite !
il y a un sérieux problème avec votre concept central de « démocratie occidentales »:
– déjà, elles ne forment pas vraiment un bloc : Angleterre, France, Allemagne, Etats-Unis, etc., se tirent la bourre pour les matières premières, les marchés et l’influence chaque fois que c’est possible (Rwanda, Irak, Croatie/Serbie…)
– ensuite, être une démocratie (formelle…) en interne peut très bien exporter la pure violence (en bombardant des Vietnamiens, des fellaghas, des Irakiens, des Pachtounes… la liste est longue), tout en se drapant dans des slogans sur le « monde libre » et en décrétant « terroristes » les ennemis
– et puis pourquoi « occidentales » ? Cette délimitation est en soi perverse, d’ailleurs le seul groupe politique qui s’en soit revendiqué est « Occident »… Puis il y a bien l’inde, le Japon, le Brésil et d’autres, qui sont des démocraties !
Je pensais à Kouchner et à sa fameuse « droit d’ingérence humanitaire ». On a vu ce que ça a donné en Irak et où ice pays en est ajourd’hui.
La France est minable dans tous les dossiers Maghrebins et pour cause. Tous les dirigeants, de droite comme de gauche on été « complices » de tous les dictateurs en place depuis des decennies et ont même profité des bienfaits du climat de leur pays( combien de politiciens et hommes d’influence sont propriétaires de palais au Maroc ou en Tunisie ou sont les invités de leurs dirigeants ?). L’honneteté de ces gens s’arrête là où leur interêts commencent et comme cela rien ne pourra changer, sinon que les maghrebins ne pas ou plus dupes , et la France le paiera cher, surtout économiquement. Ceal me rapelle le rejet des américains par la communauté internationale (certain l’ont appellé anti-américanisme primaire…il ‘tait juste à la hauteur de leurs actes en fait), il risque d’un avoir un vent anti français qui souflera sur le maghreb…en fait qui a déjà commencé à souffler il y a un certain temps.
La france ne cherche qu’a controler les richesses de la libye. elle s’en fou des droits de l’homme. la preuve ces libyens tunisiens egyptiens qui sont toujours considéré en france comme la source de tout les maux de la socièté francaises. un peu de dignité pour ces maghrebin et africain de l’afrique noir sur le sol Francais pour montrer que la france agit vraiment pour les droits de l’homme. Sarko l’humaniste n’a qu’a aller a déffendre les somaliens qui meurent en dizaine chaque jours a cause d’une guerre que les USA et la france ont mis en place. les Haïtiens meurent de famine et de choléra et pourtant on entend pas sarko . bien que ce petit pays ne demande que peu d’argent pour sa reconstruction. beaucoup moins que ce que la france est prete à dépenser en Armes bombe et attaque destructrice contre des civils Libyen simplement parce qu’ils défendent leurs président kadafi et défendent par la même leurs souverainté.mais la France ne veut pas oublier sa vrai nature colonialiste. la preuve les dirigent actuels ne veulent même pas condaner le génocide Algérien commis par l’armée francaise. tout cela pour dire que la france qui continue à pays les pays africain , l’uranium au niger la cacao en cote d’ivoir veut encore s’approprier le pétrole libyen. mais les maghrebins ne se laisseront pas aller .
Bravo pour cet article que je partage totalement, on aimerait tant en lire plus souvent de cette nature dans nos journaux….
La Libye libre c’est la Libye de Kadhafi. A Benghazi, ce sont une clique de traîtres qui veulent faire revenir le colonialisme à la Libye à fin de prendre le contrôle du pays et de ses richesses. Ces traîtres appellent l’Amérique à venir combattre avec eux ou à leur place et prendre le pétrole qu’il veulent. Moi je leur dit il vaut mieux appeler Israel à l’aide car Israel c’est plus proche. C’est l’histoire de la colonisation de l’Irak qui se répété. Je suis tunisien et des milliers comme moi veulent entrer en Libye et combattre à cote de Kadhaffi contre les traîtres et les impérialistes qui les soutiennent. Que Dieu soit avec Kadhaffi car la vérité et le droit sont de son coté et INCHALLAH nous vaincrons.
Merci pour cette analyse que je partage dans son ensemble. La gravité de la situation en Libye nous demande de faire un effort particulier pour ne pas être détourné par la mobilisation émotionnelle du drame qui secoue le Japon et sa région actuellement.
La lutte anti-nucléaire me semble devoir passer au second plan. Même si elle est légitime ell ne se joue pas dans les jours qui viennent. Le printemps arabe OUI.
En Irak, l’occident est intervenu pour de mauvaises raisons et il s’est déconsidéré aux yeux du monde arabe et de tous les citoyens de la planète qui étaient opposés à cette intervention.
En Libye, les puissances occidentales ont de bonnes raisons d’intervenir, non pour occuper mais pour venir en aide et en plus elles ont l’accord des puissances arabes qui ont accepté l’idée de l’instauration d’une no-fly zone.
En laissant Kadhafi reprendre le contrôle de la situation, en plus du drame humain et des souffrances qu’elles sont entrain de cautionner, elles vont se discréditer totalement aux yeux de tous les peuples qui aspirent et se battent en ce moment pour nos valeurs de liberté et de démocratie.
En n’intervenant pas, l’occident va envoyer un signal fort aux dictateurs encore au pouvoir, leur faisant savoir qu’ils peuvent utiliser la manière forte pour garder leur privilèges.
Plus qu’un crime, une faute!
En intervenant, en permettant aux forces révolutionnaires de prendre le pouvoir un signal tout aussi fort serait adressé aux pouvoirs autoritaires encore en place: Si vous répondez par la force aux demandes de vos peuples, nous interviendrons.
Comment cela peut il être acceptable à Bahreïn, au Yémen, en Arabie Saoudite, au Maroc….alliés actuels du monde occidental.
C’est pour cette raison il me semble que la Ligue Arabe, tout en se disant favorable à la création d’une no-fly zone pour faire croire à leurs peuples qu’ils ne sont pas des Kadhafi, ne prend pas l’initiative d’intervenir elle même avec l’appuie de la France et de l’Angleterre.
Pourquoi elle délègue-t-elle cette décision à l’Occident?
Il faut interpeller avec force simultanément la Ligue Arabe, l’Europe et l’Otan?
Il faut que nous nous mobilisions déjà au niveau européen et que nous descendions dans la rue pour marquer notre solidarité avec les peuples du bassin méditerranéen.
Je voudrais soulever au passage la question de la côte d’ivoire. Deux poids deux mesures? La démocratie n’est elle pas bafouée en ce moment avec son lot de massacres et de terreurs?
Pourquoi ne nous posons nous pas la question de l’intervention militaire là bas? La lutte pour l’instauration de la démocratie en Afrique est tout aussi vitale même s’il n’y a pas de pétrole.
Le printemps arabe est NOTRE printemps. Si nous le laissons mourir c’est une partie de nous même que nous tuons.
De tout les article que j’ai lu sur la Libye, cet article résume toutes mes pensées
En quelques mots, comment les pays responsables peuvent se donner autant de temps a débattre d’une guerre qui fait de plus en plus de morts et qui menace toute une population civile de génocide ?
C’est comme si un feux se déclare dans une maison et les voisins diront « ok, en va éteindre le feux, mais en va organiser une réunion la semaine prochaine pour débattre comment en va procéder »
C’est vraiment le comble de l’absurde
En tout cas, les puissances occidentale auront mieux a regretter une intervention mal préparé politiquement, que d’avoir a regretter leurs immobilisme face a un génocide dont « leurs enfants et leurs petits enfants l’est culpabilisèrent a jamais »
Les trois cotés « Arabe, Europe, Amérique, et le conseil de sécurité » sont déjà sur la même longueur d’onde
Il faut Agir et « TRES VITE » pendant qu’il est encore temps
Si les peuples et leurs gouvernement en pu déjouer les affres de alqaida, leurs immobilismes face au génocides qui se prépare en Libye va créer un Kadhafi 1000000000 fois plus dangereux que alqaida et il fera payer a tout ceux qui en soutenu le peuple libyen dans ces moments difficile de sont histoire.
Les attentats de lukerbi et les autres tueries sont des signaux majeurs et révélateurs, qui prouvent la vraie nature du régime Kadhafi
Angela merkel a dit « il ne faut pas s’engagé dans un projet que l’en peut pas achevé » il faut dire que le coup de feux de la communauté international est déjà partie vers le camps Kadhafi
En quelques mots « si la communauté international reste immobile face a se génocide et laissera Kadhafi s’en sortir, ils payèrent très chère leurs immobilisme »
En attendant le génocide du peuple Libyen, la communauté international prépare le sien à grand pas
Vous aller voir, l’avenir proche nous le dira sûrement
Si le printemps libyen s’éteint, si le combat pour la liberté du peuple libyen en se libérant d’un despote sadique meurt, je prends l’engagement de porter le deuil de cet avortement pendant trois mois à l’aide d’un brassard noir et à témoigner du désespoir qui aura été le mien auprès de tous les contacts que je rencontrerai.
Une fois de plus le mal et l’injustice vont triompher et continuer à répandre la souffrance.
Qu’importe le pétrole mais l’essentiel était qu’un schizophrène disparaisse et même soit mis avec sa famille hors d’état de nuire. L’histoire et un proche avenir nous dira quel aura été le destin de cet homme sanguinaire.
Ni printemps arabe ni vent de liberté à l’ancienne mode, ce qui se passe en Libye est une sorte de guerre civile entre deux provinces historiques, la Cyrénaïque et la Tripolitaine pour le contrôle du pouvoir et des ressources énergétiques. Point. Personne n’y parle de démocratie…
Le président français a décidé de soutenir l’un des deux belligérants sans tenir compte de l’avis des spécialistes. Qu’il assume les conséquences de cet acte. Seul. Les autres comprendront qu’il a des comptes personnels à régler avec Kaddafi.
Quoi qu’il arrive maintenant, la Libye, qui est loin d’être une puissance même de vingtième ordre, vient de mettre en échec le cycle des « révolutions » arabes induites par le changement pacifique par le bas. C’est un constat.
Tout à fait d’accord. Cet attentisme est insupportable et désespérant.
C’est maintenant qu’il faut intervenir ou bien jamais : dans quelques jours il sera trop tard et nous il ne nous restera plus qu’à nous indigner des massacres à Adjabiyah, Benghazi et Tobrouk.