Il fut longuement question de politique tout au long de ces chroniques new-yorkaises. L’excitation des Mid-Terms désormais retombée, finissons-en en beauté avec ce cycle américain par un focus sur deux artistes new-yorkais amoureux de la France : Adam Gopnik et Ron Agam.

A. Gopnik. La confrontation entre Paris et les Américains a toujours enfanté de superbes inspirations littéraires. Voyez Hemingway, voyez Miller. Eh bien rajoutez désormais à la liste le nom de Gopnik car sa plume, précise et hyper travaillée, mérite lecture.

Avant même de partir pour les États-Unis j’ai voulu rencontrer le célèbre éditorialiste du New-Yorker. À l’approche de mon séjour new-yorkais, j’ai dévoré son livre Paris to the Moon, petit bijou sur la France et les français, récit largement autobiographique relatant les quelques années passées par l’auteur dans la capitale.

Le temps d’un café, à l’heure du petit-déjeuner, j’ai retrouvé Adam Gopnik entre Park Avenue et Madison. Délice de parler français au milieu de l’effervescence new-yorkaise. Partout où se déplace Gopnik, ce ressenti bizarre : il y a comme un petit souffle de France qui le poursuit. Nous avons discuté de son travail d’éditorialiste pour le New-Yorker, magazine littéraire fer de lance du journalisme américain exigeant, des présidentielles de 2012 (avec cette interrogation franco-américaine quant à l’avenir politique de Dominique Strauss-Kahn) et enfin de ces intellectuels – spécialité bien française – qui élèvent le débat hexagonal et fascinent les américains.

Si l’Amérique éclairée raffole de tout ce qui est français, elle a trouvé en Adam Gopnik le parfait guide vers la grande et belle France. La France, elle, ferait bien de lire Gopnik pour se rappeler qu’outre-Atlantique (aussi) on a le souci des belles lettres !

Ron Agam. Dès son plus jeune âge, Ron Agam s’essaya à la peinture et à la photographie. Assis dans l’atelier de son père (l’illustre artiste israélien Yaacov Agam), le petit enfant s’éveille à l’Art, découvrant, dans l’ombre paternelle, couleurs, formes et matières. Après une jeunesse passée entre Israël et la France, Ron Agam pose enfin ses valises aux Etats-Unis. D’abord à Chicago. Le jeune homme cherche un sens à sa vie, s’essaie aux études qu’il poursuit efficacement sans jamais totalement s’y épanouir, puis aux affaires. Agam fils est curieux. À le voir créer, à l’entendre parler on verrait presque revivre en lui la figure mythique du juif errant, capable de vivre partout et de s’adapter aux modes de vies les plus différents. Avant d’être artiste, Ron Agam est donc surtout citoyen du monde : américain à New York, israélien à Jérusalem, français à Paris sans ne jamais jurer avec le paysage qui l’entoure. La dimension internationale du personnage explique en partie son Art ; dès lors ce n’est pas une surprise de le retrouver à New York, ville cosmopolite par excellence et surtout dans son atelier de Long Island, bastion new-yorkais de l’avant-garde.

Dans les années 1990, Ron Agam éprouve le besoin de revenir vers ses fondamentaux, la photographie d’abord et beaucoup plus récemment, peut-être comme un signe de maturité, la peinture. Plusieurs fois au cours de mon séjour new-yorkais, j’ai rencontré l’artiste. L’homme est charmant, hédoniste tranquille il est toujours à l’affut de la nouveauté. Autour d’un bon repas, il vous entretient de politique française comme de pensée juive et vous donne, comme tous les artistes qui méritent ce label, à réfléchir.

Si l’artiste éclaire le monde et nous surprend, alors Ron Agam est un artiste. Dans la folle agitation new-yorkaise, il va rapidement se faire un prénom en proposant, à contre courant des modes et des tendances, une série de portraits et de scènes de vie de l’orthodoxie juive. Le travail épatant autour de cette communauté tournée vers le sacré fascine the Big Apple qui, de Madonna (qui a peut-être trouvé là le point de départ de son obsession kabbalistique) à Rudy Giuliani, se presse à l’exposition.

Récemment, Ron Agam a une nouvelle fois pris ses contemporains à contrepied en présentant In Full Bloom, exposition donnant à voir une série de clichés de fleurs alors que New York subit les affres de la crise économique. C’est alors une vraie redécouverte de la nature qui se joue-là, en haute définition. A première vue, il n’y a aucun rapport entre tel vieux rabbi de Mea Sharim et cette fleur rouge éclatante ! Pourtant il existe bien un fil conducteur dans l’œuvre d’Agam: vues du dessus, ses fleurs ressemblent à des visages humains, elles ont leur caractéristiques propres, leurs architectures complexes. Une façon de nous rappeler, à l’heure de la superficialité et des besoins secondaires, la force de la vie (humaine ou naturelle).

Surfant sur le succès de cette dernière exposition, Ron Agam s’essaie désormais, dans la veine de Joseph Albers, aux arts plastique et à la peinture. L’expérience, vécue comme un grand saut, est concluante et soyons en certains, excitera la curiosité des new-yorkais.

1. copyright Ron Agam
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2. copyright-Ron-Agam
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6. copyright Ron Agam
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7. copyright Ron Agam
8. copyright Ron Agam
8. copyright Ron Agam
copyright Ron Agam
copyright Ron Agam

3 Commentaires

  1. J’ai beaucoup aime l’œuvre de Agam père, surtout celle des années 90 quand il a rajoute la lumière et le mouvement aux œuvres cinétiques de sa période classique des années 70.
    J’ai l’impression de retrouver chez Ron, cette jouissance de la couleur d’ou quelle vienne.
    simplement bon
    J. birenlig

  2. Très bel article sur Ron Agam dont je connais le travail depuis longtemps et dont mon magazine Above a publié un portfolio de photographies issu de l’inoubliable série de fleurs intitulée In Full Bloom. A travers son travail de peinture récent Ron Agam célèbre la vie même mais aussi l’équilibre fragile qui la maintient hors du chaos où une partie du monde semble vouloir la précipiter. Sans lumière point de couleur, et les oeuvres de Ron sont le symbole même de cette loi élémentaire de la physique. La lumière qui permet aux magnifiques couleurx de Ron de s’exprimer, d’exister, est celle de l’espoir, celui de la paix, cette paix que Ron Agam, fin commentateur politique, cherche à promouvoir de toutes ses forces tant par ses écrits réguliers sur les affaires du monde que par son oeuvre picturale dont jaillit cette lumière qui s’oppose à l’obscurité et l’obscurantisme. Bravo Ron Agam et merci.

    Nicolas Rachline

  3. Very nicely done Laurent! Nice article! Ron Agam’s work is wonderful indeed.
    Bertrand