A chaque séjour en Normandie, je vais aux Roches Noires. Cet ancien hôtel de Trouville construit en 1963 puis repris partiellement par Robert Mallet Stevens, fut le lieu de résidence de Marguerite Duras à partir de 1966. C’est un rituel. Je marche le plus souvent avec la femme que j’aime jusqu’au bout de la plage. Sans rien lui dire, je l’entraîne à l’intérieur. Le plus souvent je passe par une petite porte arrière en évitant que le gardien me repère. Ce vaste hall désert où Duras venait regarder la mer en descendant de ses appartements est un lieu de la Communauté des Amants. C’est là que le jeune homosexuel, Yann Andréa, viendra rejoindre pour la première fois celle qui deviendra la femme de sa vie et de ses textes. C’est là que Duras a écrit entre autres romans, le Ravissement de Lol. V Stein — énigmatique et saisissante communauté des amants. Et surtout c’est à une relecture de la Maladie de l’amour, que Maurice Blanchot intitule le deuxième chapitre de sa somptueuse Communauté Inavouable, la Communauté des Amants — terme repéré chez Georges Bataille. Voici donc rapidement évoqué la généalogie littéraire, érotique, estivale et théorique de cette idée qui m’habite et me passionne.