L’issue meurtrière de l’assaut contre une mission à vocation humanitaire qui se rendait à Gaza, autorise-t-elle pour autant la Turquie à donner des leçons de morale aux Israéliens ? Sans préjuger des torts dans cette terrible affaire qui alourdit encore davantage le climat au Moyen Orient, on ne peut que s’étonner de l’arrogance des dirigeants turcs. Faut-il rappeler qu’Ankara qui affecte de s’indigner aujourd’hui du blocus imposé à Gaza et va jusqu’à soutenir ouvertement les militants qui voudraient le lever, exerce depuis 17 ans un blocus totalement illégal contre l’Arménie ? Cette politique, qui s’inscrit dans la poursuite de la logique meurtrière poursuivie à l’encontre des Arméniens depuis 150 ans, et dont le point d’orgue a été le génocide de 1915 (1 500 000 morts), se traduit également par un soutien sans faille à l’effort militaire azerbaïdjanais visant à anéantir la République arménienne du Haut Karabagh, elle-même soumise au blocus de Bakou. Ces réalités, sans même parler de la question kurde ou chypriote, ne sauraient certes absoudre le gouvernement israélien de toute responsabilité dans le drame palestinien, ou dans les événements tragiques qui viennent de survenir. Mais elles devraient pour le moins inciter la Turquie à plus de modestie dans le registre humanitaire. Et lui interdire, à tout le moins, de se poser en parangon de vertu en matière de droit de l’homme.
Ara Toranian est directeur de Nouvelles d’Arménie Magazine
