Abbas Kiarostami, Copie conforme, En Compétition
Xavier Beauvois, Des Hommes et des Dieux, En Compétition
Oliver Schmitz, Le Secret de Chanda, Un Certain Regard
On serait méchant, on dirait qu’avec Copie conforme, Kiarostami fait du Godard cheap : le ping-pong verbal entre Juliette Binoche et William Shimell est un cocktail philosophico-conceptuel à faible teneur nutritive sur le vrai, le faux, le plaisir, la simplicité et toutes ces sortes de choses. On serait méchant, on ne verrait qu’un gimmick assez vain dans le changement de braquet du récit : on glisse sans crier gare, avec les mêmes personnages, d’un flirt entre un écrivain et une fan à un couple fêlé par quinze ans de mariage. Tout ça sur les lacets des routes de Toscane où à l’ombre de vieilles pierres – comme s’il fallait une caution culturelle pour redorer une banale histoire d’amour usé. Mais c’est Kiarostami, qui filme comme il peint, et qui est encore capable de nous émerveiller, quand un jeu de miroirs crée un plan à double ou à triple fond. N’empêche : copie à revoir pour le maître iranien.
Et comme une déconvenue n’arrive jamais seule, on s’est levé avec les poules et avec enthousiasme pour aller voir le Xavier Beauvois, soupe assez indigeste de bons sentiments. L’enlèvement et l’exécution des moines de Tibbhirine, en 96, épisode opaque des troubles islamistes qui ont secoué l’Algérie, donne au cinéaste l’occasion de s’immerger dans les rythmes qui scandent la vie d’un monastère. Les travaux et les jours se succèdent, mais Des Hommes et des Dieux trempe son naturalisme dans un bain de prêchi-prêcha. C’est Lambert Wilson, le supérieur, qui travaille aussi sur le Coran. C’est le bon frère Luc, Michael Lonsdale, comme toujours parfait d’ironie débonnaire, qui se dépense sans compter au dispensaire. Alors oui, bien sûr, tout ça c’est admirable, d’autant plus que c’est serti dans de jolis paysages tout zen pour aider à la méditation. Mais on se demande si le cinéma sert bien à ça.
Dans le genre édifiant, Le Secret de Chanda partait sur des bases redoutables. Chanda, petite fille courage des townships sud-africains se cogne au mur de superstitions et de silence qui entourent le SIDA. Oliver Schmitz n’échappe pas au sirènes du pathos, mais il sait aussi que le cinéma est affaire d’espace plus que de kleenex. Son film est un film-gigogne, construit comme un emboîtement de pièges : maisons interdites aux voisins, cercueils, grillages. Chanda se débat au milieu d’un paysage de déni et de dissimulation, le film rendant ainsi palpable l’omerta sud-africaine autour du SIDA. Et si les joueurs du cru sont habités par la même vitalité que les acteurs du film, on a déjà une petite idée des vainqueurs de la Coupe du Monde.
« le secret de Chanda » :
C’est un film splendide et émouvant qui sort le 1er décembre, journée internationale de lutte contre le Sida….
C’est un message puissant invitant au refus de l’obscurantisme du mensonge.
C’est un appel au combat cohérent et solidaire contre cette maladie que nous devons, ensemble, enrayer et même terrasser.
« Le secret de Chanda »
film d’Oliver Schmitz
1er décembre 2010
Le silence et le non-dit….
Tout de suite, dès les premières minutes le spectateur est fasciné par les images souvent fabuleuses.
Ah ces visages expressifs que nous fait découvrir et aimer une caméra qui sait prendre son temps sans lasser le spectateur !
Chanda, pré adolescente africaine possède un visage grave, déterminé et superbement beau et attachant.
Si très vite elle prend en main le destin de sa famille, ce n’est pas pour pallier « l’incapacité » d’une mère« démissionnaire »
Oh non…
Cette femme qui a toujours affronté les situations difficiles avec force, continue à faire face jusqu’au moment où ses forces physiques l’abandonnent.
Elle a su contre la volonté de sa famille vivre un amour impossible, élever sa fille puis les autres enfants nés de mariages successifs après la mort dramatique de son premier mari.
Chanda va assurer la relève
Nous sommes en Afrique du sud dans le pays le plus contaminé par le sida.
C’est une maladie dont personne ne parle, c’est une malédiction qui frappe ceux qui ont fauté !?…Il ne faut pas toucher ceux qui sont atteints !
Oh l’obscurantisme….Cela se passe très loin de nous diraient certains…
Ils oublieraient vite l’histoire récente de la France, ce pays moderne où il y a 25 ans les malades du sida étaient si souvent « pestiférés »…
Ils oublieraient par là même qu’aujourd’hui le non dit existe encore dans cette belle France malgré les campagnes menées par des associations humanitaires et médicales.
Le livre d’Allan Stratton qui a inspiré le réalisateur m’a plu et profondément touché…
Avec le film, j’ai vécu un moment d’intense émotion , les cinéastes ayant donné à l’histoire une dimension dramatique et visuelle rarement égalée.
Les éducateurs, les enseignants, les militants familiaux disposent là d’une œuvre forte pouvant contribuer à une réflexion utile et passionnante autour des problématiques soulevées.
Cette leçon de force et de courage de Chanda constitue un appel en faveur de la levée des tabous afin de vaincre l’obscurantisme et d’enrayer cette maladie qui fait tant de dégâts ;
Vivement ce 1er décembre, date toute symbolique de la sortie de ce film que vous n’êtes pas prêts d’oublier.
Jean-François CHALOT