« L’architecture du présent travail se situe dans la temporalité. Tout problème humain demande à être considéré à partir du temps », Frantz Fanon.

Requête pour le coup frontale, pardonnez-moi du peu, mais j’ose exiger de vous (de nous) un minimum d’attention pour la résolution d’un problème de taille.

Question – aux esprits frileux (ou, au contraire, à ceux que trop de chaleur effraie) s’abstenir car nous n’irons pas de main morte – : à quel moment précisément doit-on décider de changer, d’y voir clair ? Sans doute, précisément, quand cela s’impose. Mais quand CELA s’impose et qu’on s’entête, quand CELA s’enlise ?

Prendre conscience de l’étendue du malaise, dit-on, c’est déjà accomplir la moitié du chemin vers la guérison. Mais encore faut-il « vouloir » en prendre conscience.

Dans le cas contraire, la problématique s‘avère plus complexe, nécessité sera de consulter, et mise à part cette solution psychanalytique fortement répandue et/ou recommandée de nos jours, seul un miracle, une cassure, quelque chose, pourrait provoquer le si désiré « Changement ». Attention : le vrai, celui qui détruit pour mieux reconstruire et pas celui qui, vantard, s’auto-congratule pour mieux légitimer la stagnation (prenons d’ors et déjà soin, si vous le voulez bien, d’utiliser les mots avec précaution).

Car reste à définir le pourquoi du Déni qui pousse le Sujet, la Société, la Nation, la Culture, (ne nous laissons pas non plus intimider par la solennité des concepts), à nier l’existence de sa propre maladie.

Pour ce faire, le praticien (un bon évidemment, évitons les bras cassés) procédera à un état des lieux préliminaire, qui permettra de définir en gros « ce qui n’est plus acceptable en 2010» (dixit notre président national en février dernier), et de comprendre ce qui est en effet à jeter, définitivement, à laisser mourir pour en faire le deuil.

Et justement en 2010, quel est l’état des lieux en France? Il y aurait tant à dire, en ces temps de « progrès » techniques inégalés et de crise. Mais peut-être est-ce l’occasion inespérée, de vieux symptômes d’une maladie ancienne, familière (qui ne dit pas son nom mais, vous l’aurez compris, qu’il nous faut identifier comme telle) ont ressurgi dans les médias et ce, paradoxalement, pour notre plus grand bonheur (à la bonne heure).

Par « vieux symptômes » je veux bien entendu parler des récentes polémiques nées (involontairement ?) dans la bouche de certains dirigeants et/ou journalistes qui, dans une théâtralité du bon sens et/ou du courage héroïque de celui-qui-dit-tout-haut-ce-que-les-autres-pensent-tout-bas, ont exprimé certains « propos malheureux » à travers « le corps traditionnel français », « les Noirs et les Arabes » , pour ne citer que les plus récents.

S’indigner, crier au racisme, certes (mais là aussi toute proportion gardée avec ce type de mots-bombes qui suffit à déclencher un cataclysme), mais puisque la nature des « vérités qui dérangent » est de susciter de vives réactions, il est normal qu’elles en soulèvent, celui ou celle qui crée la polémique, même s’il s’étonne (jeu d’acteur plus ou moins admirable) des conséquences fâcheuses qui lui retombent dessus, n’est d’ailleurs pas censé l’ignorer, c’est la rançon de la « franchise ». Mais, ces réactions même explosives ne feront pas avancer le schmilblick, bien au contraire, on restera de part et d’autre à patauger dans un flou même pas artistique. Pour preuve, en réponse à ces rétroactions tout à coup entendues parce qu’elles s’emparent des outils judiciaires et médiatiques pour ce faire, se bégaieront des excuses oiseuses absolument non réparatrices, qui ne tromperont personne (à moins, une fois encore, de « vouloir » s’y laisser prendre), des justifications incohérentes auto-victimisantes qui chercheront à noyer le poisson et d’une certaine manière y réussiront. La polémique, c’est une de ses particularités, redescend aussi vite qu’elle est montée, et le déni est tenace, sa faculté d’action, incommensurable.

Jean-Paul Sartre
Jean-Paul Sartre

Non, ce qu’il faut c’est une cassure nette, une prise de conscience irréversible, un bon vieux remède corrosif pour éliminer le mal à sa racine. Il serait bon de ne pas rater le coche.

Car tous ces dérapages discursifs proliférant en masse ces derniers temps – depuis à vrai dire l’avènement de l’autoproclamée (et pas si anodine) France « Décomplexée » -, se révèlent en fait salutaires. En exprimant (involontairement), en notre si futuriste vingt-et-unième siècle ce que nous nommerons les vieux relents impérialisto-colonialistes dans la culture française, ces « gaffes » pourront peut-être permettre à l’abcès d’être percé, quoi qu’à vrai dire, à travers elles, le pu s’écoule déjà, mais pas sans aide. Et puisque que les meilleurs remèdes sont intemporels, ressortons quelques bons vieux textes indémodables, qui n’ont de vieux que l’apparence, prescrivons donc ni plus ni moins du Frantz Fanon.

Pour « mémoire » (autre terme chargé, à manier avec des pincettes ; il s’agit de se cramponner aux sens véritables des mots, de ne pas se laisser étourdir par les faux-semblants), Frantz Fanon fut un psychiatre martiniquais (1925-1961). Ayant combattu dans l’armée française pendant la seconde mondiale, il fut également engagé militant au sein de la guerre d’indépendance en Algérie. Reconnu internationalement, souvent cité dans les milieux intellectuels français, il semble néanmoins rejoindre la liste des nombreux penseurs frappés par l’« amnésie » générale, capricieuse et sélective qui, selon lui caractérise la névrose-type.

Quel texte en particulier conseillerai-je ? Tous, sans aucune exception, car le mal dont nous parlons n’est pas à prendre à la légère, et si le pu a commencé à s’écouler, c’est avec une telle lenteur, hélas.

Expliquons, car c’est avant tout le cerveau du malade qui est ciblé. Le franc-parler de ce visionnaire, son maniement de la langue, stopperont net les gesticulations inutiles, qui apparaîtront pour ce qu’elles sont ; à savoir, ici et là, des résistances pathologiques, désespérées pour s’accrocher à la névrose. Ainsi autant aux récentes (archaïques) tentatives de prélever dans le colonialisme des « effets positifs », qu’aux accusations criardes (creuses) distribuant sans prendre le temps d’analyser du « racisme » à toutes les sauces, Frantz Fanon répondra : Les condamnations spectaculaires et inutiles du racisme. La réalité est qu’un pays colonial est un pays raciste (20 septembre 1956).

L’entreprise, la pensée coloniale et donc la tentative rétrospective de l’instituer en positivité (démontrant ainsi sa persistance dans les tréfonds), par un président élu au suffrage universel, sera éclairée : la guerre coloniale est une gigantesque affaire commerciale et toute perspective doit être ramenée à cette donnée. S’imposera alors l’interrogation suivante, si les « effets positifs » sont véritablement les bénéfices retirés d’une telle entreprise, à qui ces bénéfices ont-ils profité ? Aux colonisateurs, aux Français, mais lesquels? Quand l’« Autre » versant de l’entreprise coloniale reste l’asservissement, au sens le plus rigoureux, de la population autochtone. En d’autres termes, domination, oppression, anéantissement que ressentent dans leur chair, imprimés dans leur esprit, les descendants « français » (à qui par conséquent on refuse de l’être) des peuples colonisés.

Que signifie donc être « français », quand une partie de l’histoire idéalement « commune » se voit oblitérée au profit d’une autre, unique, impérieuse, autoproclamée supérieure, qui fixe les règles ? Le racisme, sa définition première mérite d’être convoquée.

Aimé Césaire
Aimé Césaire

Racisme c’est créer race, c’est faire violemment séparation, scission au nom de la RACE, en s’appuyant sur des critères immuables souvent aléatoires, entre le Soi et un Autre, forcément discriminé, rejeté au titre de ces mêmes critères. Ainsi le racisme conçoit la différence, mais l’appréhende par la peur, prend racine dans la phobie, dans l’angoisse d’intrusion, qui annihile du même coup la curiosité que la dite « différence » aurait pu faire naître. L’Autre enfermé dans son altérité négative, néfaste et répréhensible devient dangereux, doit rester à l’écart et, quoi qu’il en soit dans cette optique, le restera. Le racisme s’attaque au « corps », incrimine et discrimine le visage lévinassien, sous-entend le biologique, le sang (voir la polémique autour des recherches ADN), s’appuie (et les traque systématiquement) sur le visible des signes extérieurs de différence. Il y aura donc un « corps traditionnel français » et un Autre qui, définitivement, visiblement, ne le sera pas.

Le racisme infériorise cet Autre stigmatisé (qui le sera également sans majuscule, « faut pas rêver ») parce qu’il n’est pas possible d’asservir des hommes sans logiquement les inférioriser de part en part. Et le racisme n’est que l’explication émotionnelle, affective, quelque fois intellectuelle de cette infériorisation.

Ainsi, quand un membre du gouvernement de « tous les Français » s’exclame en décembre 2009 : « Moi, ce que je veux du jeune musulman, quand il est français, c’est qu’il aime son pays, c’est qu’il trouve un travail, c’est qu’il ne parle pas le verlan et qu’il ne mette pas sa casquette à l’envers » – petite rectification au passage, depuis les années 90, la « casquette » se porte à l’endroit, voir légèrement de biais -, le Frantz Fanon ne tergiversera pas et rétorquera que dans le racisme qui est oppression (même quand il se nie) On assiste à la destruction des valeurs culturelles, des modalités d’existence. Le langage, l’habillement, les techniques sont dévalorisés (…) critique d’un chapeau original, d’une façon de parler, de marcher…

Troublant… Quand je vous dis que le Frantz Fanon, à plus de 50 ans d’avance visait juste, et que son diagnostic demeure en ce qui nous concerne tout à fait approprié. Quand il suture également quand vous entendrez dire du mal des Juifs (et j’ose rajouter des Musulmans), tendez l’oreille, on parle de vous, signifiant par là que peu importe le destinataire, puisque le racisme attaque l’homme, c’est l’humanité dans son entièreté qui est visée. L’hypocrisie, la volonté de diviser pour mieux régner, de quantifier, sont incisées à la racine : Une société est raciste ou ne l’est pas. Il n’existe pas de degrés du racisme.

Mais d’autant plus troublant encore (puisqu’il nous faut aller jusqu’au cœur) le déni et la dérobade, la dissimulation qui amènera le prétendu « corps traditionnel » à revenir sur ces paroles qui auront fait polémique, à les nuancer, à les préciser, car le mot « racisme » fait peur, constitue tare et décrédibilise la personne en l’excluant du rationnel, de la « morale », du « liberté, égalité, fraternité» dont elle s’est faite la porte-parole. C’est l’arroseur arrosé qui dément, le tuyau à la main. A ce stade le racisme n’ose plus sortir sans fards. Il se conteste. Le raciste dans un nombre de plus en plus grand de circonstances se cache. Le projet (…) est alors un projet hanté par la mauvaise conscience.

La mauvaise conscience (une culpabilité non avouée ? l’angoisse d’intrusion est reliée au fantasme du même nom, qui vise à posséder l’autre en le dépossédant) qui est mère de la mauvaise foi. Sartre, compagnon d’armes de Fanon l’a par ailleurs défini en 1943 : certes, pour celui qui pratique la mauvaise foi, il s’agit bien de masquer une vérité déplaisante ou de présenter comme une vérité une erreur plaisante. La mauvaise foi a donc en apparence la structure du mensonge. Seulement ce qui change tout, c’est que dans la mauvaise foi, c’est à moi-même que je masque la vérité.

Mensonge, tromperie à soi-même, illusion régressive «masquant » les traces de sa propre violence, qui conduira tout aussi bien le « stigmatiseur » stigmatisé à son tour, à détourner les yeux et les esprits de sa propre vérité (qui le dérange), en proclamant par exemple côtoyer ces Autres, des phrases telles « Je ne suis pas raciste, la fille de la cousine de la belle-sœur de ma voisine est arabe » feront leur apparition, attestant par là, la persistance de la scission, la réticence à la proximité.

Seulement en 2010, rappelons-nous que nous sommes « dé-complexés », un autre cas figure est à la mode, une autre forme de déni, quand l’arroseur plus ou moins conscient feint l’incompréhension, car, oui, en quoi ces paroles « véridiques » ont-elles bien pu choquer?  Cacher cette colère que je ne saurai voir, elle est inadmissible.

Au-delà d’une mauvaise foi manifeste, symptomatique, c’est prendre le risque de différer la foudre, de voir la colère de l’Autre qui, entre-temps, aura rongé son frein, se matérialiser en feu, en incendie criminel. Les célèbres et si « surprenantes » émeutes de 2005, l’attestent, alors qu’en 1995, 10 ans avant, NTM chantait déjà « Mais qu’est-ce qu’on attend  pour foutre le feu ». Mais plus ancien encore : quand un Afro-Américain dénommé James Baldwin écrivait en 1962, dans son essai intitulé La prochaine fois, le feu : Échapper à la peur de quelque chose revient à s’assurer qu’un jour on sera victime de cette peur ; les choses menaçantes doivent être regardées en face. Qu’est-ce à dire, prophétie, évidence, Vérité ?

La peur en effet dénature et fausse les relations, scinde et s’emploie surtout à ne créer aucun pont. Seulement voilà, nous ne sommes plus au XVe siècle, et une autre « race » a depuis longtemps fait son apparition, celle des hybrides dont nous parlions plus haut, aux cultures, aux histoires multiples, d’ici et d’ailleurs, un peu l’Un, un peu l’Autre, résolument insaisissable et mouvante, s’extrayant du simple schéma binaire. Une hybridité (qu’Edouard Glissant nomme créolisation) imprévisible, invisible et ouverte, qui circule et se propage pour toucher tous ceux qui s’y reconnaissent.

Un grand nombre de ces hybrides d’ailleurs, parqués dans les souterrains de la « France d’en bas » infériorisée, montrés du doigt (se sachant vus et enfermés dans ce rôle d’Autre), qui ont appris parce qu’ils l’ont éprouvé depuis leur plus jeune âge, l’art de la dissimulation. Et qui du fait, en opposition, cultivent avec brio l’impertinence, la dissidence. A la lumière hautaine, imperméable de la « France d’en haut » opposeront l’ombre farouche. A la violence non-dite, déniée, une violence éclatante, explicite : l’agressivité étant le mécanisme passionnel permettant d’échapper à la morsure du paradoxe (…) les anciens immobiles, les lâches constitutionnels, les peureux, les infériorisés de toujours s’arc-boutent et émergent hérissés. Une nouvelle règle du jeu sous le poids de l’ancienne. Parce que l’infériorisé retrouve un style autrefois dévalorisé on assiste à une culture de la culture. Deux mondes en somme, qui se font la guerre.

Mais il y a une issue, selon Frantz Fanon, celle-ci réside justement dans cette confrontation des cultures et rajoutons dans cette hybridité, qui enjoint (ne nous y trompons pas une fois encore) au mouvement, à une éternelle remise en question. Hybridité qu’il n’a malheureusement pas eu le temps de voir venir, parce que mort trop tôt.

Et parce que le racisme n’est pas une constante de l’esprit humain mais, toujours selon lui, une disposition inscrite dans un système déterminé. Nous retrouvons là, l’histoire sempiternelle de la lutte des classes (que le racisme dissimule), à laquelle il nous faudra bien tous ensemble, français d’ici et d’ailleurs trouver un point final. Nous retrousser les manches, en finir avec la peur, l’indifférence entêtée et l’automatisme d’exclusion – le racisme comme ceux qui le subissent sont intérieurs, il s’agit de n’exclure aucun des deux facteurs. Regarder la réalité de nos mensonges (de nos « oublis ») en face, savoir ce qui dans la culture (qui dépasse la simple « tradition ») mérite d’être sauvegardé et ce qui doit être abandonné, c’est le lot de chaque génération.

Une fois pour toute, « intégrer » que s’ouvrir à l’autre ne signifie pas renoncer à soi. Mais simplement grandir à travers la rencontre, prendre part au mouvement inévitable qui est le rythme de toute vie. Comme le dirait Aimé Césaire dans sa lettre à Maurice Thorez en 1956 : Cela ne peut signifier qu’une chose : non pas qu’il n’y a pas de route pour en sortir, mais que l’heure est venue d’abandonner toutes les vieilles routes.

Ainsi en ces temps (finalement « positifs ») de questionnements où à chacun est donnée la possibilité de s’interroger sur ce que peut bien être l’« identité nationale », l’immortel Fanon répondra que toute tentative de définition reste illusoire car il ne faut pas essayer de fixer l’homme, puisque son destin est d’être lâché.

Montrant par l’exemple que le remède, comme la réponse (obligatoirement plurielle), réside peut-être dans la langue, dans son histoire qui n’en a jamais fini de se construire. Langue française si « belle » mais pas que (cette beauté a servi tant de fois à couvrir les pires abjections) précise, pointilleuse, poétique et j’en passe, adaptable à tout corps qui souhaite s’en emparer. Laissons donc au Vénérable le soin d’achever cette ordonnance par une prière (à la fin de Peau noire, masques blancs) : Ô mon corps, fais de moi toujours un homme qui interroge ! (Amen ?).

4 Commentaires

  1. @Lilas, si l’on va au bout de votre raisonnement, il y a des « règlements de compte à la machette en France » (merci de nous donner les références) car on y trouve les mêmes populations que celles qui s’entretuent en Afrique. Des populations violentes et sauvages par nature. Changeons d’exemple et de perspective : les populations européennes qui ont massacré les Aborigènes d’Australie les Amérindiens les Congolais, sont elles violentes par nature ? Sauvages, barbares ? Ou tout simplement humaines ? De qui devons-nous avoir peur sinon de nous-mêmes ? De cette violence que nous portons tous en nous. Comme l’a fort bien montré Hannah Arendt, l’Impérialisme est aux racines de la Shoah, aux côtés de l’Antisémitisme du 19ème siècle. Prenons garde à ne pas trop vite rejeter sur l’autre cette violence qui nous habite tous.
    @Vanessa Sylvanise, cela fait plaisir de lire un article comme le vôtre, on se sent moins seul ! Par des moyens différents, mais en partant des mêmes évènements récents, j’ai aussi écrit sur Rue89 qu’il était urgent de (re)-lire Fanon (en rappelant au passage les théories psychiatriques coloniales sur l’infériorité congénitale des noirs et des arabes de l’injustement oubliée « école d’Alger » du Professeur Porot). Je me permets de joindre ici le lien de cet article intitulé « Zemmour viré du Figaro ? Dans ses propos, l’inconscient colonial »
    http://www.rue89.com/2010/03/23/zemmour-vire-du-figaro-dans-ses-propos-linconscient-colonial-144138

  2. Si l’on peut et doit tout dire, est-il permis à tout le monde de le faire ?

    Eric Zemmour est très certainement le dernier à pouvoir prétendre « tout dire » quand on connaît ses opinions sur l’immigration en général et sur les français issus de la culture arabo-musulmane et/ou maghrébine ou bien encore d’Afrique noire… en particulier.

    ***

    Mais au fait, peut-on tout dire ?

    Et doit-on vraiment tout dire ?

    Il en va de l’immigration arabo-musulmane comme de la communauté juive de France.

    Non, on ne peut pas tout dire ni dire n’importe quoi ! Et pas seulement parce qu’une affirmation serait fausse ou vraie – le vrai n’étant pas la vérité ni le faux le mensonge*…

    Les leaders d’opinion, les premiers, devraient s’imposer un devoir de réserve.

    Mais tout simplement pour les raisons suivantes :

    – en ce qui concerne les juifs de France : on pensera à l’anti-sémitisme, à la Shoah, à Vichy, à la rafle du Vel d’Hiv et le fait que la France abrite la communauté juive la plus importante d’Europe.

    – en ce qui concerne les français issus de l’immigration arabo-musulmane : on n’oubliera pas la colonisation, le racisme, la discrimination massive ainsi que le nombre de français issus de cette immigration : plus de 5 millions.

    * Le fait que les tribunaux traitent des affaires de trafiquants qui impliquent en majorité des Français issus de l’immigration arabo-musulmane, maghrébine ou d’Afrique noire n’est pas une vérité mais une donnée sociologique : celui qui détiendra la vérité à ce sujet, sera celui qui répondra d’une manière exhaustive à la question : pourquoi eux en majorité ?

    ***

    Nul doute, Zemmour fait partie de ceux (génération Sarkozy ?) qui, après avoir déserté le champ de l’intelligence et de la compassion, s’autorisent tout, sans retenue, au nom d’une franchise au mieux juvénile et naïve, au pire… vindicative, loin des analyses des déséquilibres sociaux toujours croissants et de leurs solutions toujours repoussées à plus tard ; disons-le haut et fort : franchise délibérément destinée à nuire dans le cadre d’un règlement de compte inter-communautaire sans fin et sans issue depuis 20 ans.

  3. Cette peur Kadjomou est normale.
    Depuis maintenant 50 ans, l’ensemble des pays africains ont été décolonisés. Le résultat ? des guerres tribales faisant des millions de morts. Des dictateurs en série qui ont vendu leurs peuples pour de riches placements immobiliers à l’étranger.
    Lorsqu’on voit ce qui s’est passé au Rwanda, au Zimbabwé, au Soudan, etc…on est écoeurés. Les règlements de compte à la machette ont cours en France. On peut se poser la question sur la peur de l’autre. C’est absolument légitime.
    Franz Fanon porté aux nues par les Indigènes de la République, c’est pas un cadeau non plus !

  4. Je trouve cet article remarquablement instructif et de nos jours, il faudrait que plus de gens sachent affronter les vérités.
    Nous sommes tous naturellement raciste, car dans l’autre et son altérité on refuse souvent de se voir et dès lors on reste figé sur nos préjugés et refusons de les dépasser pour entrevoir l’autre comme un possible prolongement de soi meme.

    Merci mademoiselle Sylvanise car en lisant ceci, ceux qui tentent de scléroser l’identité française dans « un corps tradictionel » apprendront surement à leur détriment que, c’est de leurs propres peurs qu’il faudrait guérir de la sclérose pour enfin les sortir de cette maladie qui l’empeche d’appréhender l’humanité.