Cher Jacques-Alain,
Merci de m’avoir fait parvenir ta lettre à Peter Hallward et ta “confession d’un renégat”.
“Renégat” n’est pas une insulte, c’est une description. Il est évident pour n’importe qui que celui qui vivait et pensait comme toi entre 1969 et 1972, et qui aujourd’hui fricote avec la clique de Sarkozy, poussant les choses jusqu’à engager une école lacanienne dans un dégoûtant et paradoxal soutien à l’expédition en Libye et à son chantre BHL est un renégat du gauchisme, pour ne rien dire du maoïsme.
Pourquoi du reste t’offenser de cette description ? Tu me sembles plutôt devoir assumer et défendre ta renégation comme étant celle du Mal au profit du Bien. Tu peux en somme l’appeler une Conversion morale.
Disons cela : ce qui est pour toi une Conversion est pour moi une Renégation. Ton point-ce-vue est du reste celui d’une majorité de tes contemporains, du moins en ce qui concerne les intellectuels. L’archi-minoritaire, et celui qui fut et est insulté — pour avoir refusé d’être un renégat —, c’est moi, et non toi. Je fais avec depuis bien longtemps.
Tu te doutes que la lecture des confessions d’un renégat n’est pas pour moi une lecture prioritaire. Je lirai cependant ton factum un de ces jours, sans doute même avec intérêt.
Quant au duel, n’y songe pas ! Bien évidemment, je ne me bats pas en duel avec un renégat.
Bien à toi,
Alain

Lire : Les confessions d’un renégat par Jacques-Alain Miller