Chers amis, 

Je suis ému de m’adresser à vous ce soir. 
Je n’avais pas prévu, en étant élu à la présidence de l’Union des Étudiants Juifs de France, que j’aurais à prendre ma part à un effort de guerre si violemment explicite. 
Je pense aux étudiants ukrainiens, je pense à toute cette jeunesse qui avait le droit d’espérer, qu’on est en train d’assassiner, et dont les rêves s’écroulent sous les bombes. 

Hier encore j’étais chez Olga avec les militants de l’UEJF pour y déposer des médicaments récupérés avec le concours du FSJU dans différents entrepôts d’Ile-de-France. Ils sont arrivés aujourd’hui dans une école de Kiev. 

C’est pour les enfants de cette école, la famille et les amis d’Olga que je me bats. Autant que pour Victoria, Présidente de l’Union des étudiants juifs d’Ukraine, qui me dit chaque jour son inquiétude grandissante. Pour elle et tous les étudiants du pays. 

Je me bats également pour mes amis d’Odessa qui m’ont accueilli il y a 3 ans lors des Universités d’été de l’UEJF à la découverte de la si riche histoire juive de cette ville, modèle architectural de Tel Aviv. 

Je me bats enfin pour les militants de Yahad In Unum, qui se battent avec acharnement, depuis des années, pour retrouver les témoins de la Shoah par balles et avec qui nous avons déposé la première plaque en souvenir des juifs déportés depuis la gare de Rava Ruska. Le maire de la ville était là. J’imagine qu’aujourd’hui, il a bien d’autres préoccupations. 

Mais l’Ukraine, ce n’est pas juste des gens que l’on connaît ou que l’on ne connaît pas. L’Ukraine ce sont des semblables, une culture, une histoire, dont notre présent est l’héritier. Il y a de l’Ukraine en nous.

Oui c’est pour eux que je me bats. Nous nous battons pour que la liberté de penser, de voter, d’écrire et de parler persiste en Ukraine, parce que si eux ne sont plus libres, nous aussi, nous serons moins libres.

Nous, les étudiants juifs de France, nous savons qu’en nous battant pour eux, 

nous nous battons aussi pour nous.

Regardez l’Ukraine ! Regardez le spectacle que certains voudraient nous présenter. Un pays, un État, dont on pourrait disposer comme on le souhaite. Un si petit État ukrainien face aux géants, sérieux eux, de l’OTAN et de la Russie. A quoi bon s’émouvoir si on tape sur l’Ukraine… allons « ce n’est que l’Ukraine »… voilà ce que l’on essaye de nous faire avaler.

« Ce n’est que l’Ukraine » ? Ces mots, ces idées, ont fait bondir le cœur de tous les juifs du monde. Ceux qui disent aujourd’hui « ce n’est que l’Ukraine », ont toujours dit et diront toujours « ce n’est qu’un juif ».

Parce que l’Ukraine n’est pas une grande nation alignée dans un bloc, on pourrait en faire ce qu’on veut, la brimer, la ridiculiser. Chaque juif reconnaît dans ce qu’on essaye de faire de l’Ukraine son destin personnel potentiel. 

Les juifs se battent pour l’Ukraine aussi parce qu’ils reconnaissent dans ce pays sans défense ce qu’ils peuvent être eux-mêmes face à l’antisémitisme.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si Poutine, dans ses bombardements, n’oublie pas de viser Babi Yar et son mémorial aux 34.000 assassinés par les einsatzguppen. 

Je le dis donc en tant que juif : ne fermons pas les portes, ne faisons pas de l’Ukraine l’Exodus des nations ! C’est notre devoir d’européens. 

Pour ma génération, l’Europe de la paix, ce n’était jusque-là qu’une idée vague. Belle, certes. Mais surtout théorique. Et c’est avec effroi bien sûr, mais également avec un certain espoir que je la vois aujourd’hui mise en pratique. 

Qu’aurait dit mon grand-père, caché à Paris pendant l’occupation, si je lui avais raconté que 75 ans plus tard, le leader du monde libre serait un petit juif de l’Est, Président d’une ancienne République soviétique ? Zelinsky c’est le witz dans l’histoire, la lumière face aux ténèbres. 

Il faut donc croire que pendant tout ce temps, nous n’avions pas complètement tort de nommer ces ténèbres.
Non, la force impérialiste n’est pas admirable.
Non, un État qui musèle l’opposition, qui poursuit les journalistes, qui enferme ses artistes, n’est pas enviable.
Poutine est le visage vulgaire d’une haine éculée.
Face à l’obscurité poutinienne, face à la sombre fascination de la force qui sème la mort, nous sommes là pour défendre l’ouverture, la lumière et la liberté.

Et nous ne sommes d’ailleurs, pour une fois, pas seuls dans cette tâche. Ainsi, à nous l’UEJF, ainsi qu’à la justice, Facebook et Twitter nous expliquent systématiquement qu’ils doivent rester neutres, qu’ils sont des entreprises privées, que l’on ne comprend pas vraiment comment ça marche Internet, que ce n’est pas possible. Ces gens-là nous expliquent que l’on ne peut pas faire taire l’antisémitisme, le racisme, le prêche islamiste sur Internet. Alors je tiens à remarquer qu’aujourd’hui, lorsque tout le monde s’aligne, eh bien il semble possible de faire taire Russia Today ou Spoutnik. Même sur Twitter.
J’en suis profondément heureux et rassuré. Privé ou public, les agents de notre monde peuvent protéger la liberté.
Messieurs dames des GAFA : Bravo à vous ! Merci à vous ! Et c’est bien noté : quand vous le voulez, vous le pouvez !

Nous le voyons donc ce soir, tout le monde est d’accord. 

Enfin, tout le monde, certains, qui ne sont pas là, ne se privent pas de dire des horreurs. Il s’en trouve même pour leur tendre des micros.

Toujours les mêmes. Les Zemmour, Le Pen et Mélenchon, qui ont du mal à cacher aujourd’hui leur admiration qu’ils assumaient pourtant hier pour le nationalisme meurtrier de Poutine. 

Non, messieurs dames les fachos de services, les explicateurs du contraire de ce que tout le monde constate, nous ne vous laisserons pas faire ! L’UEJF se tient face à vous !
Fachos caduques, ou fachos débutants, vous ne faites pas peur à l’UEJF,

Vous n’êtes que des nationalistes aux petits pieds !

Chère Olga, chère Victoria, chers amis d’Odessa, de Rava Ruska et de toute l’Ukraine, votre courage nous honore. Tenez bon. Nous sommes à vos côtés, comme nous le pouvons. Pas seulement en discours. Mais en actes. Nous sommes là, nous avons des militants. Nous pouvons venir à la frontière, nous pouvons vous fournir le matériel dont vous avez besoin. Les étudiants juifs de France se tiennent à votre disposition car nous savons qu’en vous défendant vous-mêmes, c’est aussi pour nous que vous vous battez. 
Notre avenir se joue dans le vôtre,
Vive l’Ukraine libre !
Slava Ukraini !

Un commentaire

  1. Merci Monsieur Le Joyeux (Quel beau nom de famille)

    Votre article fait du bien à l’âme

    Slava Ukraini !

    Shirley Miller Canada