Tous les Bosniaques, et tous les amis français de la Bosnie-Herzégovine, pleurent le général Divjak, mort hier à quatre-vingt-quatre ans.
Nostalgique invétéré de la Yougoslavie multiethnique, refusant de céder aux injonctions du nationalisme serbe, il fut, tout serbe qu’il était lui-même, l’homme entre tous qui sauva Sarajevo au printemps 1992 des assauts de l’armée « yougoslave » aux ordres de Belgrade et de Milosevic, casernée en pleine ville, qui s’apprêtait à étouffer le seul îlot resté libre de la Bosnie-Herzégovine. Il organisa la défense de la cité assiégée, martyrisée par les snipers de Karadzic et les canons du général Mladic durant un siège de plus de mille jours, mais qui ne put jamais réduire la résistance, sous sa conduite, des habitants de la ville. Cela se fit au prix, terrible, de onze mille morts.
Lors du tournage de BOSNA !, il nous mena lui-même dans les tranchées de Grodj, au-dessus de Sarajevo, sous le feu des artilleurs serbes tirant sur notre petite colonne depuis les hauteurs de Trebevic.
Sa popularité en ville était énorme. Il incarnait par excellence le Sarajévien indifférent à toutes les assignations, religieuses, ethniques. Les Sarajéviens, hommes et femmes (surtout les jeunes femmes qu’il honorait en retour d’une flatterie paternelle) l’adoraient. Marcher en ville à ses côtés était un exercice de longue patience. Il avait appris le français en même temps que le métier des armes, à l’école d’état-major de Compiègne, et nous chantait dans les casemates de l’Armja « J’aime flâner sur les Grands Boulevards » avec un accent qui se voulait canaille.
Après la guerre, il s’occupa de milliers d’orphelins dont les familles avaient été décimées par les déportations, l’épuration ethnique des sbires de Pale et des commandos d’assassins aux ordres de Belgrade.
Bien des gens à Sarajevo, mon Général, vous doivent la vie. Ils ne vous oublieront pas. Aucun de ceux, intellectuels, artistes, personnalités politiques qui, depuis Paris, se succédèrent à Sarajevo durant ces trois années terribles et eurent affaire à vous, à votre bonhomie bienveillante (on vous appelait entre nous Jovial Divjak) ne vous oubliera.
Vous étiez un roc. Un roc d’humanité, un roc d’espoir et de tolérance. Merci d’avoir été l’homme rare que vous fûtes.
Si notre crédulité fut réduite en cendres alors qu’elle dépassait la date de péremption du concept d’islamisme modéré, qu’en est-il des mécanismes institutionnels des hyper, grandes, médiocrement médianes, picrocholines et stridentes impuissances propulsées sur la scène transnationale par l’attachement de leurs cœurs et de leurs reins aux droits inaliénables de l’Infrarépublique improclamée par les auto-esclaves que le dernier des siècles incultes émancipe sous nos yeux ?
Madame von der Leyen n’a pas bien réagi.
L’Union européenne est une entité politico-économique et militaire incomparablement plus puissante que ne l’est le fantasme en pire que nous exhibe un simple microsultan et commembre de l’OTAN.
Face à une provocation ouvertement anti-occidentale, on reste droite dans ses escarpins, certes, mais sur ce, on ne s’assoit pas avant que le chef du protocole n’ait réparé sa gross mistake.
Face à un reprogrAmMATEUR de canonnade d’Alger, on déchire son contrat d’assurance anti-Piraterie et l’on en fait pleuvoir les confettis multicolores sur la tête du parrain de la traite des Blancs.
Toute petite frappe de l’Acommunauté internationale marche en racaille, à l’intimidation, à l’embrouille et, apothéotiquement, à l’usure.
Les tyrans immatures nous cherchent ? Fixons-leur les limites qu’ils peinent à découvrir par eux-mêmes ; apprenons-leur à calmer leurs ardeurs consuméristes en sublimant leurs pulsions saturniennes, plutôt qu’en y cédant sur une pente savonneuse.
Le multiethnisme dépendra de notre capacité à dépasser le stade du multiculturalisme.
Sanctuarisons l’Eldorado républicain s’il nous refuse, comme à lui-même, le droit de distinguer entre scolarité et extrascolarité, entre nation et représentant du peuple, entre l’Irreprésentable et Son image.
Chassons de nos grands corps et de nos beaux esprits l’arrière-goût de fer des proscriptions individuelles annonciatrices de prescriptions générales.
Le progressisme ne peut plus être le faux-nez d’une fuite en avant régressiste.
On ne normalise pas ses relations avec le mal sur la base du donnant-donnant, car il est anormal qu’on s’habitue au mal.
(im)P(o)-S(ture) : Une certaine république voit dans la femme voilée la forme la plus aboutie des libertés fondamentales. Son dévoiement creuse sa tombe qui est accessoirement la nôtre. Il va de soi que chez nous, le « nôtre » ouvre grandes les portes de l’Éden voltairien.
La répartition des tâches et la redistribution des richesses impliquent bonne mesure et non moins bonne distance entre chacun des acteurs et passeurs d’une digne civilisation.
Le général Divjak incarne, mieux que bien des civils, une paix ainsi qu’une liberté dont on ne répètera jamais assez qu’elles sont garantes l’une de l’autre.
Il fut et demeure une bénédiction pour les Sarajéviens, comme pour le reste de l’Europe.
La faculté de dire que sa mémoire nous oblige, si elle accentue le fossé entre nous et la cruelle débilité des délaveurs de valeurs qui n’ont même pas conscience qu’ils s’effacent de l’Histoire en dédaignant de s’affranchir de leur dette infinie envers les grandes figures de l’antitotalitarisme, cette faculté, pardon mais, aussi résolument impérative qu’elle soit, ne suffit plus.
Alors oui, nous avons le pouvoir judiciaire entre nos mains, mais encore faudrait-il que nous sachions juger.
Sans doute avons-nous le pouvoir législatif entre nos mains, mais encore faudrait-il que nous sachions légiférer.
Il n’est pas inconcevable qu’il subsiste un soupçon de pouvoir exécutif entre nos mains, mais encore faudrait-il que nous sachions exécuter.