Voici un petit livre hyper-intelligent, paradoxal, iconoclaste et salvateur, portant sur l’Art au vingtième siècle et jusqu’à aujourd’hui, qui renverse comme au jeu de quille, dans un joyeux déboulonnement d’icônes, les notions de modernité, d’avant-garde, de post-modernisme et va, l’insolent réactionnaire, jusqu’à se moquer sans pitié de l’art abstrait, excepté Kandinsky, Pollock et Rothko, des soixante-dix dernières années. Sans parler, cela va sans dire, du PopArt et tutti quanti. Au profit de qui, demanderez-vous ? Réponse : du véritable Art contemporain, bâillonné, véritable Underground de l’Art, réduit au silence sous les impostures wharoliennes, Jeff Kooniennes et son Balloon Dog, Damienhirstiennes, d’un Anish Kapoor, d’un Maurice Cattelan, d’un Claude Lévèque (dont une œuvre, si l’on peut dire ainsi, s’intitule : « mon cul/ ma vie/ mes couilles ») ou encore d’un certain Manzoni empaquetant ses propres déjections. Le tout sous les diktats du marché, les spéculations des grands collectionneurs et marchands faiseurs de modes et de côtes, relayés par les expositions moutonnières des musées d’art contemporains comptant pour rien, et des grandes institutions culturelles qui, tous et toutes comme un seul homme, emboitent le pas pour ne pas louper le train du Post-Moderne, des arts de masse, du Trash, du fun et du degré zéro du Beau. A commencer par les nôtres, beaubouriennes, languiennes, FRACquiennes et autres.

Le véritable art contemporain, qu’est-ce donc à dire ? C’est, pour notre auteur et quelques autres dont ici votre serviteur, cette discipline savante et de haute technique où les peintres savent encore, ou de nouveau, dessiner et peindre, et les sculpteurs sculpter, bref ont ce qui s’appelait jadis du métier. Outre, comble de l’audace, qu’ils peignent le monde réel, les êtres humains, comme jadis encore Degas, Cézanne, Monet et non moins Picasso ou Hopper et Balthus, ou, plus près de nous, Lucian Freud, Francis Bacon, David Hockney, Kiefer ou Baselitz. Ils peignent, ces solitaires, ces incompris, ces Anciens, ces archaïques, quasiment ces artistes maudits, un compotier, un paysage, un visage de femme ou de torturé, et même, rendez-vous compte !, un escalier. Pas forcément du tout par pur réalisme, sous l’emprise d’un mimétisme plat et mécanique, mais par réalisme poétique, magique, métaphysique et autre encore, voire par amour du Beau : les sculptures de Giacometti en disent plus sur le tragique de la condition humaine que les ineptes bandes à l’infini d’un Daniel Buren ou l’énorme phallus gonflable de Paul McCarthy place Vendôme à la Noël 2014.

Alors qui sont ces artistes sous le boisseau, cette arrière-garde qui maintient vivante la demeure de l’Art, le foyer du Beau ? Ils se nomment, en France, Truphémus, Sam Szafran, Avidor Arikha, feu le délicieux Raymond Mason, Zoran Music, Henri Cartier-Bresson. S’y ajoutent Cremonini, et même jadis le doux Henri Rivière. Et que grâces leur soient rendues !

Bref, lisez le jeune Benjamin Olivennes, son Autre Art contemporain (un titre, il est vrai, pas trop terrible).

2 Commentaires

  1. Raphael dit que « votre diagnostic est caduc », mais je trouve que vous contribuez à faire trembler le business contemporain d’un « art » politiquement correct, et c’est pourquoi votre article et le livre qu’il annonce sont les bienvenues!

  2. Votre point de vue , très proche de l’ aimable peinture provinciale , rassurante parce que lisible , a été maintes fois ressassé . Bernard Buffet , fut le chevalier Bayard de la dite  » véritable  » peinture . Marcel Duchamp , qui avait bien compris le désenchantement global dés 1912 a lancé le pavé dans la mare . Que des petits marquis , reliés au 15ème degré a son geste iconoclaste , en fasse leur gagne – pain , cela m’ indiffère . Si les commissaires a la création artistique – organisme à la soviétique – de la rue de Valois tartinent leur tranche de pain avec ces clowns , tant pis . La nullité bureaucratique a toujours prospéré en France . Après Malraux , Duhamel , le déclin s’accélère , les FRAC achètent leurs copains et le tour est joué . Il vous est facile de prendre des contres-exemples avec de telles nullités , véritables pets soufflés.
    Jean Baudrillard, Yves Michaud ont déjà décapé ces simulacres il y a 20 ans .
    Le désenchantement global commence avant meme la boucherie européenne de 1914-18 . Il y a des contrefeux spiritualistes en Russie avec Kandinsky, Malevich , en Hollande avec Mondrian , avec l’ésotérique Kupka puis des contrefeux Rimbaldiens , épidermiques, convulsifs avec Dada et Surrealisme . Mais il faut vraiment etre indécrottable pour clamer que la VERITABLE peinture est incarnée par votre brochette . Vous y mélangez les magiciens avec les cuistots …Claude Bernard a eu lui la vista de repérer Francis Bacon . Malraux fut l’ami de Fautrier . Ceux que vous élevez au pinacle sont bien poussifs .
    Je suis désolé de disconvenir, votre diagnostic est caduc .