L’Amérique du Nord de la côte Est, l’Amérique du Grand-Ouest, l’Amérique des Grands lacs a gagné.

L’Amérique des femmes, des jeunes, des minorités ethniques et religieuses, l’Amérique des plus solidaires et des plus fragiles a gagné.

L’Amérique qui veut lutter contre le Covid et le réchauffement et non les nier a gagné.

L’Amérique ouverte sur le monde, celle qui n’est pas seulement « America first », a gagné. 

L’Amérique, amie et alliée des démocraties occidentales et non des leaders populistes et démagogues de par le monde a gagné.

L’Amérique de l’unité d’un peuple et non de sa fracture permanente a gagné.

L’Amérique de la recherche, de la réflexion et non l’Amérique des Fake News, de l’info-opinion a gagné.

Mais elle a gagné de très très peu.

Cette Amérique que j’aime a gagné de très peu, très peu. Cela s’est joué à presque rien. Et cela doit nous servir d’alerte dans nos démocraties européennes pour les échéances électorales à venir.

Elle a gagné de très très peu, et c’est pour cela que nous avons dû attendre plus de 80 heures pour avoir un résultat qui reste non définitif. 

En France comme dans la plupart des pays libres et démocratiques, les résultats officiels sont connus en moins de douze heures.

Elle a gagné ce dimanche matin de 37.298 voix en Pennsylvanie et 20.539 voix dans le Wisconsin (comptage non définitif, 4 jours après la clôture du scrutin). Sans le vote décisif et si serré dans ces deux États, Trump, malgré tout ce que j’ai écrit plus haut, aurait été réélu.

Il a donc manqué à Trump dans deux États, un total de 60.000 voix sur 145 millions de votes soit 0,04% des votes exprimés nationalement et dans ces deux États, 0,5 et 0,6%.

Vous me direz que Biden a remporté fortement le vote national avec 4 millions de voix d’avance et 2,8% sur son adversaire (50,5% vs 47,7%). Je suis tout à fait d’accord mais, hélas, ce n’est pas le système électoral américain.

Ce système de suffrage indirect a permis, dans une époque récente, l’élection de trois Présidents minoritaires, Kennedy, Georges Bush junior et Donald Trump.

Mercredi matin au lever du jour je découvrais avec frayeur ce que je craignais depuis quelques semaines avec la très faible campagne d’un Joe Biden fatigué, et malgré une Kamala Harris exceptionnelle : une possible victoire de Trump dans cette élection imperdable pour le camp démocrate. J’exprimais cette crainte sur ma page Facebook.

En ce dimanche, le gain de la majorité au Sénat est loin d’être acquis pour la camp démocrate (48/48 pour l’instant, la majorité étant de 51). Les démocrates ont par ailleurs perdu 4 sièges à la chambre des représentants et ne sont toujours pas, à cette heure, majoritaire.

Heureusement, je me suis trompé. J’avais, comme beaucoup de journalistes américains et d’analystes, sous-estimé l’importance du vote par correspondance, et spécialement cette année avec le Covid, dans certains États et surtout dans ces États-là : Pennsylvanie, Géorgie, Wisconsin où le dépouillement avait peu ou pas commencé.

Ce qui est impressionnant, c’est que Trump, malgré quelques succès économiques et diplomatiques pendant sa présidence, est un Président qui n’a cessé de mentir, de changer d’opinion, d’insulter ses concitoyens, comme ses alliés. Il a abusé des réseaux sociaux de manière pathologique, maniaque, narcissique et égocentrique. 

C’est un Président qui, jusqu’à aujourd’hui, refuse les règles électorales et se lance dans des procédures judiciaires comme le failli d’entreprise et le mauvais payeur qu’il a toujours été quand il était entrepreneur.

Trump est celui qui a nié le risque du Covid et n’a pas su le gérer aux États-Unis. Face à cette menace, il est celui qui a nié sa dangerosité. 

Il est celui qui a rompu la cohésion du monde et surtout du monde occidental. Il est celui qui ne croit pas au dérèglement climatique et est sorti de l’Accord de Paris si nécessaire pour la survie de notre planète. 

Mais surtout, il est celui qu’il a fracturé un pays que j’aime, qui a donné des arguments aux racistes, sexistes, au climato-sceptiques, aux suprémacistes blancs antisémites, racistes et homophobes, et aux anti-avortement en plaçant une de leur militante à la Cour Suprême.

Donc je vois avec plaisir son départ et salue la victoire du président démocrate Joe Biden malgré ses faiblesses que cette courte victoire illustre. 

Je salue aussi la victoire de Kamala Harris comme Vice-Présidente, qui représente tellement de choses dans l’Amérique que j’aime et où j’ai vécu 4 ans, où je suis retourné pour le travail, une Amérique que j’ai sillonnée dans tous les sens depuis 40 ans.

Kamala Harris est l’Amérique du Rêve américain, celle ouverte sur le monde et ouvrant ses bras aux immigrés venus du monde entier. L’Amérique de l’inscription sur la statue de la Liberté : « Give me your tired, your poor, your huddled masses yearning to breathe free. »

La nouvelle Vice-Présidente, enfin une femme, est aussi l’Amérique métissée de parents jamaïcain et indien ayant épousé un juif américain, celle du succès scolaire, de l’intégration et du courage.

Comme beaucoup d’entre vous, j’espère que cette Amérique-là reprendra sa place dans le concert des Nations.

Sa place dans le monde, celle du guide éclairé, modéré, temporisateur et pro-démocraties. 

Douce avec ses alliés et dure avec ses ennemis, nos ennemis communs.

Mais aussi une Amérique qui continuera à mener certains combats pertinents de Trump contre le danger iranien, le terrorisme islamiste, et les tentations expansionnistes chinoises. Le combat pour une paix constructive entre Israël et ses voisins arabes et musulmans (accords Abraham).

Une Amérique qui devra être plus dure avec les dictateurs Turc et Russe et peu conciliante avec les populistes démagogues de par le monde (Brésil, Hongrie, Pologne…)

Il y a tant de choses à reconstruire en Amérique et de par le monde.

J’espère que l’Amérique que j’aime sera de retour.

Welcome Back America !

4 Commentaires

  1. (Suite à mon commentaire du 14 novembre:)

    Et Kamala Harris, la chérie de tout le monde, annonce qu’on veut réinstaller les relations avec les Palestiniens ainsi que l’aide financière pour eux (voir l’article dans Jerusalem Post). Ne sait elle pas que ces ennemis jurés d’Israël ont récemment dedié une partie nouvelle d’une de leurs universités au terroriste qui a dirigé le massacre des athlètes israëliens à Munich? Qui veut la lâcheté d’un Obama encore une fois? C’est exactement comme notre gouvernement socialiste en Suède qui a voté pour donner le nom Palestina au territoire de la PA (ou PLO) sans demander la moindre chose en retour, et qui toujours financie leurs livres scolaires qui toujours encouragent le martyre des enfants arabes contre Israël et la continuation du conflit …

  2. Je me demande pourquoi si peu d’entre nous ont remarqué que le monde avait besoin d’un président pas politiquement correct après l’impotence prèsque totale d’Obama. La quasi-paix aux Moyen-Orient totalement surprénante pour nous tous et les larmes de Kim Jong-Un récentes en rêvant officiellement d’une paix permanente entre les deux Corées, et aussi l’assassinat génial de ce leader iranien responsable pour tellement d’horreurs, ce qui a intimidé l’Iran comme jamais auparavant – tout cela (en quatre ans seulement!) n’aurait pas été possible sans un « enfant terrible », si vous voulez, comme Trump. Il n’est pas un diplomat du tout, mais un homme d’affaires qui retrousse ses manches et se met au travail sans chichi – et un clown, oui, qui dit des bêtises et n’a pas peur de se couvrir de ridicule … Pour moi qui habite la Suède politiquement hypercorrecte c’était vraiment rafraîchissant de voir que cela peut vraiment exister, et il va sans dire que c’était possible uniquement dans l’Amerique du Nord, le pionnier pour toutes les nouveautés, le pays où tout est possible … Mais notre monde n’était pas encore prêt pour ce phénomène – qui peut-être aurait réussi avec son approche nouvelle si les politiquement correctes ne l’auraient pas inhibé et même saboté?

  3. Le fait que le sujet ou citoyen d’un État de droit, quel que soit son rang, ait la possibilité de saisir la justice et d’exposer publiquement les griefs qu’il peut avoir contre l’un ou plusieurs de ses concitoyens, est l’un des grands acquis que nous devons aux révolutionnaires républicains, grâce auxquels une civilisation arrivée à maturité règlera ses litiges autrement que par les émeutes, la répression qui s’ensuivrait, quand ce n’est pas la guerre civile.
    Tant que Trump ne rameute pas ses troupes par un appel à marcher sur la Maison-Blanche, il n’est pas impossible que son cerveau sans filtre, adossé à la nomination d’une juge réactionnaire pour succéder à l’icône progressiste de la Cour suprême, canalise beaucoup mieux les passions tristes de notre temps que n’aurait pu le faire un Biden vaincu, flegmatique, moins résigné qu’apte à relativiser, en tout cas non procédurier, auprès de la portion la plus rageuse de son électorat.
    Mais il est vrai que Donald Trump nous a souvent coincés sous une nuée de paradoxes.

  4. TRUMP-BIDEN (suite)

    Après la victoire de Biden, chacun a pu entendre mille commentaires à la télé ou à la radio. Ce qui m’a semblé le plus éclairant, c’est l’émission de Philippe Meyer, ce dimanche matin de 11h à midi. Le niveau d’analyse Le plus élevé, comme d’habitude, a été celui de Bujon de l’Estang, ancien major de l’ENA, ancien conseiller diplomatique de Chirac, ancien ambassadeur de France aux Etats-Unis. Nicolas Baverez, expert en aronisme, a été très sérieux et lucide. Un régal !