Les visites des bibliothèques vous réservent parfois des surprises. Nous avons décidé de passer un week-end en famille à Chantilly. Surtout, me dit-on : « quand vous y serez, n’oubliez pas d’aller visiter le château et son cabinet des livres ». Henri d’Orléans, duc d’Aumale (1822-1897), qui hérite du Domaine de Chantilly est un grand collectionneur d’art qui porte un vif intérêt pour les livres d’Heures enluminés. Il s’agit de recueils de textes de prières inspirés du rite monacal qui étaient écrits à la main avant l’ère de l’imprimerie sur des parchemins avec des lettres enluminées et illustré de peintures miniatures. Les livres d’Heures sont devenus des objets d’art très prisés au fil des époques. Toute personne ayant quelques moyens désirait en posséder comme une forme de manifestation de sa foi et de son intérêt pour la prière individuelle. La collection du duc d’Aumale est présentée en ce moment dans le cabinet des livres du château de Chantilly du 5 septembre 2020 au 30 janvier 2021. Le premier livre exposé attire l’attention de mon fils aîné qui constate que l’intérieur de la couverture est composé de lettres hébraïques.
En m’approchant, je reconnais immédiatement une phrase du livre d’Esther (Méguilat Esther en hébreu) sur le parchemin qui a été collé sur la couverture intérieure du livre. Il s’agit du verset 12 du chapitre 1 qui raconte le refus de la reine Vashti de se présenter au festin organisé par le roi Assuérus. Pourquoi avoir utilisé ce fragment de parchemin du livre d’Esther ? Il est d’ailleurs sectionné de manière si aléatoire que les termes hébraïques sont morcelés laissant deviner que l’objectif n’est absolument pas son contenu mais l’utilisation de la texture du parchemin comme moyen de protection du contenu du livre. L’inscription sous le panneau de présentation du manuscrit ne donne aucune précision sur ce détail de fabrication mais nous informe qu’il s’agit d’un Psautier-heures à l’usage de la ville de Trèves, écrit en latin qui date de la fin du XIIème siècle. L’origine n’est pas certaine, le livre aurait été confectionné en Allemagne. Etonnant de voir qu’un objet censé vanter les vertus de la prière puisse être fabriqué avec un tel dédain d’un culte différent. La particularité du livre d’Esther dans la tradition juive est qu’il s’agit du seul texte des Hagiographes qui doit être lu de manière rituelle non pas dans un livre en papier classique mais dans un rouleau de parchemin à l’ancienne dont la retranscription a été réalisée par un scribe (sofer en hébreu). Chacune des lettres étant scrupuleusement reproduite avec un roseau trempé dans une encre noire. La lecture du parchemin est faite publiquement le jour de la fête de Pourim dans toutes les communautés juives à travers le monde. Mais cela implique que le rouleau d’Esther soit parfaitement complet, indemne de la moindre erreur graphique ou d’effacement d’une lettre. Le rouleau d’Esther a donc le statut d’un texte sacré et les égards qui lui sont associés. Si une lettre s’efface, est illisible ou d’une forme différente, le parchemin devient inapte à la lecture publique. S’il n’est pas possible de le réparer, le parchemin est conservé dans une pièce avant d’être enterré. La tradition juive accorde un respect équivalent aux textes qu’à celui des corps. Hormis l’émoi suscité par cette découverte, on peut constater qu’il s’agit là d’un fragment du rouleau d’Esther datant du XIIème siècle sachant que le plus ancien manuscrit subsistant de ce livre, le codex de Leningrad, date du XIème siècle. Comment ce fragment de la Méguilat Esther s’est retrouvé entre les mains de ce confectionneur allemand en cette fin du XIIème siècle ? Il est clair que l’artisan devait vivre dans un environnement proche d’une communauté juive pour avoir eu l’opportunité de se procurer de tels parchemins. C’est le cas de Trèves, ville originaire de l’usage du Psautier, dans laquelle il existe une communauté avec un centre communautaire et plusieurs synagogues à cette époque médiévale. Le quartier juif se trouve à proximité de la place du marché mais il reste tout de même séparé des autres quartiers de la ville dont l’accès n’est rendu possible que par des grandes portes, ce qui limite les échanges entre communautés. Une analyse détaillée des lettres hébraïques du parchemin permet de constater qu’une lettre est effacée et que d’autres sont de tailles différentes, à des niveaux du texte où la tradition massorétique ne les prévoit pas. Ces anomalies calligraphiques expliquent-elles que le rouleau ait pu être déclaré inapte à être utilisé pour une lecture publique puis mis de côté ? Le rouleau a-t-il été extrait de cette pièce dans laquelle les parchemins étaient entreposés avant d’être enterrés ? Mystère d’une découverte qui devrait inciter les responsables du château de Chantilly à donner l’opportunité à des historiens chercheurs d’analyser l’ensemble des fragments hébraïques de ce livre d’Heures. À suivre…
Informations pratiques :
Collectionner les livres d’heures – Trésors du duc d’Aumale
Du 5 septembre 2020 au 3 janvier 2021
Lieu : Domaine de Chantilly – Cabinet des Livres du château
7 rue du Connétable
60500 Chantilly
Un jour viendra où l’Infrarépublique grossmuftiste de l’Accouchant parviendra rétrospectivement à nous empêcher de faire la mise au point sur le visage d’Adolf Eichmann ou sur celui de Klaus Barbie, qu’elle réérigera en symboles flous de cette puissance d’autorégénération mythique, prise dans le tourbillon sournois d’une horrifique traque.
Nous prenons date… en embuscade.
Ceci ne signifie pas qu’en Cinquième République, la loi des hommes soit supérieure à la halakha, à la loi du Christ ou à la chari’â car, dans le droit français, la loi divine n’existe pas ; il n’y aurait donc aucun paradoxe à ce qu’une législation, élaborée par des hommes, s’efforce de remplir (sa mission dans) un espace vacant.
Le Dieu des monothéistes est irreprésentable ; aussi les codes architecturaux, décoratifs et vestimentaires se rattachant au Michkan, puis au Beit HaMikdach et à ses desservants, tels que les matériaux de construction, les tentures, le mobilier sacré ou la garde-robe des Lévi’îm et des Kohanîm étaient-ils comme frappés au fer rouge par l’Esprit-Saint et témoignaient, chacun à sa manière, de la Présence divine dans laquelle étaient plongés les hôtes de ce reflet du Lieu.
Faire infuser cette codification dans le sanctuaire républicain serait vécu par nous, les rescapés de plusieurs millénaires de guerre de Religion, comme une profanation équivalente à celle que représenta l’érection des statues de Zeus, de Jupiter ou de Caligula dans le Saint des Saints du Second Temple.
Les refondateurs de nos humanités nous ont doté d’un corpus de lois irreligieuses nous épargnant l’épreuve de la torture syncrétique ; rien ne nous empêche pour autant d’inviter Isis, IHVH ou Apollon à l’Assemblée afin de propulser, d’une sentence bien sentie, l’une de nos propositions de loi, à condition que l’intrusion de ces divinités passe par le filtre d’une parole ayant eu l’intelligence de ne pas même désirer l’extinction du faisceau éclairant de la Raison, qu’elle vise à raffermir.
Il ne saurait être question que des buses abonnées à la buse nous élisent tout en nous enlisant dans l’argutie islamiste-démocrate selon laquelle la liberté de conscience n’est pas en question chez des citoyennes françaises portant le voile de leur plein gré quand, ce faisant, celles-ci enfreignent le principe de soumission auquel est censée être liée leur conduite religieuse et nous demandent de délivrer à leur communauté un double passe-droit, qui nous rendrait complice d’un double crime de lèse-majesté en bafouant les souverainetés spécifiques, résolument étanches et donc hermétiquement distinctes, de leur propre loi religieuse et de notre commune loi républicaine.
Le port du voile, fût-il un dévoiement de la chari’â, n’en est pas moins devenu un signe d’appartenance religieuse associé à un islam que l’on qualifiera de politique, au cas où ceux qui cherchent à nous enfumer oublieraient que nous n’occulterons jamais la dimension terrestre des pouvoirs qu’ils briguent à travers leur guerre de conquête.
C’est pourquoi nous veillerons à ce qu’aucune loi religieuse ne pénètre l’enceinte des institutions que nous léguèrent les laboureurs et semeurs d’une vaste civilisation qu’arc-boutent la liberté politique, l’égalité politique et la fraternité politique, institutions qu’inondent les seules Lumières que la République française se soit jamais reconnues.
Les citoyens héréditaires ou fraîchement adoubés, après qu’ils ont formulé, refoulé, assimilé ou recraché, mais, unis par un élan transcendantal qui les dépasse d’un antimètre, joué le Je collectif du vœu préalable à leur entrée dans les ordres de la République, sont priés de quitter, avant d’en franchir le portail, les symboles religieux relatifs à leur croyance en la supériorité des lois divines sur les lois humaines car, ici-bas, César a reconquis ce qui était à César de sorte qu’il ne convoitera plus ce qui demeure à Dieu.
On pourrait tout aussi bien papillonner dans le ciel des idées avec une paire de keroubîm que l’on aurait pris la précaution de désailer à l’aide d’un coupe-boulon, arguant que le bon droit appartient à tout le monde, ce qui inclurait les chariatiseurs publics, en s’empressant de clarifier sa position répulsive envers les pronateurs d’une islamisation progressive et non moins régressiste de la démocratie à la française, contre lesquels on se dirait prêt à mener un combat politique, dont nous ne doutons pas qu’il serait acharné, bien qu’on nous eût imploré de mettre un point d’honneur à jeter les armes au pied du premier Petit César venu, et ce avant même qu’une première goutte de sang n’abreuvât nos sillons, mais je craindrais que la défense des principes immuables de la République ne creuse ainsi sa propre tombe en oubliant de se durcir le cuir intellectuel au cours de sa descente des escaliers séfirotiques, et qu’elle n’achève son dévalement guilleret par une dégringolade fatale.
À vouloir riposter de manière politique aux attaques reptatives de l’islam politique, on se prive, sous l’abri antiatomique d’un sens de l’équité absolutiste, de toute possibilité d’entraver les imprégnations d’une stratégie idéologisante dont je ne crois pas m’avancer en affirmant que ses partisans nous ont déjà prouvé qu’ils pouvaient la manier avec l’éclectisme informe et redoutable d’une bave incontrôlée.
Nul ne songerait à offenser les fidèles d’une mosquée, d’une église ou d’une synagogue en refusant d’ôter ses chaussures ou son couvre-chef là où il est interdit d’en porter, et réciproquement.
La République a ses propres temples et ses propres symboles au premier rang desquels réside l’égalité des sexes, les droits de l’Homme et du Citoyen se refusant à prendre en considération la différence purement, j’allais dire bassement biologique, existant entre les Français mâles et les Français femelles.
Que les gardiens de nos libertés nous réapprennent à en respecter les premiers principes dans leur propre Maison, ce dernier Lieu où ils semblent encore demeurer inviolables.
Un phénomène assez commun.
Merci pour cette découverte. Il faut savoir qu’il était courant de récupérer et recycler le parchemin, soit pour écrire à nouveau après effacement du texte précédant (palimpseste), soit pour renforcer la reliure. L’hypothèse de la provenance d’une gueniza me semble fragile, le but de la gueniza est de respecter le manuscrit hors d’usage – un relieur n’y aurait pas accès. De plus une Méguilat Esther (rouleau rituel) peut assez facilement être corrigée si nécessaire. Il me semble que le scénario probable est plus « émouvant ». Des centaines, voire des milliers, de manuscrits hébraïques sur parchemin ont été récupérés soit après confiscation (comme lors du brulement du Talmud en 1242 à Paris, ou encore lors des divers massacres de Juifs durant cette période et notamment dans la région de Trèves), soit au moment des diverses expulsions. Il était donc facile de récupérer des manuscrits juifs et de les recycler. Le phénomène fut courant et la recherche de palimpsestes comme de reliures à partir de manuscrits est un filon pour les chercheurs actuels en quête de manuscrits inédits. De plus, l’âge du livre ne dit pas l’âge du manuscrit précisément. On a très bien pu refaire la reliure plus tard… Dans tous les cas, ce petit morceau du rouleau d’Esther, profané et traité en vulgaire matière à reliure nous éclaire un peu sur le sort tragique des Juifs à la fin du moyen-âge… Persécutés, spoliés, chassés, violentés et massacrés… Violences des persécutions d’un peuple sans défense qui sont justement le thème du livre d’Esther.
Rabbin Yeshaya Dalsace