Le nom d’Adel Abdessemed est associé à une certaine conception du défi, de la provocation, et de la réflexion. Artiste essentiel de la création contemporaine, ses œuvres ont tour à tour créé le scandale au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, où il avait voulu exposer une œuvre constituée d’un triangle de cannabis, à San Francisco, où une vidéo représentant des animaux mis à mort dans un abattoir mexicain avait suscité les réactions outragées d’associations de défense de leurs droits, et jusque des menaces de mort envers l’artiste.
Le troisième scandale vient d’arriver, et il est sans doute le plus frappant de tous. Pour une exposition itinérante, l’artiste a conçu une vidéo dans laquelle on voit un porcelet téter le sein d’une jeune femme, qui se trouve être une amie de sa famille, et qui donne son titre à l’œuvre – Lise.
Il est aisé d’imaginer les arguments qui peuvent être usés à l’encontre d’une telle œuvre. Atteinte aux bonnes mœurs, attaque contre la religion – après tout, n’est-ce pas à la Vierge à l’Enfant qu’il est fait allusion ? Et en ce cas, le Christ serait un goret…
Dans les périodes de tension que nous traversons, de Serrano en Castellucci, voilà une audace bien coupable.
Or les commanditaires mêmes de l’œuvre, non seulement ont refusé de l’exposer, censurant ainsi une production de l’art, mais aussi ont exigé de l’artiste qu’il rembourse les frais de production.
La chose est grave.
Elle est même inquiétante, car elle est le symptôme d’une double erreur de taille.
La première tient à l’œuvre de l’artiste lui-même : qu’on le veuille ou non, le scandale n’est pas le trait dominant de l’œuvre d’Adel Abdessemed. En revanche, la force des images, oui. C’est un génie de la construction d’images puissantes, complexes mais pleines d’évidence. En ce sens, il est bien, lui aussi, un maître de cette « beauté convulsive » dont André Breton s’était fait le prophète. Et de fait, l’incroyable perfection visuelle de Lise, la tendresse avec laquelle la caméra fixe cette scène étrangement émouvante, ne peuvent laisser le spectateur indifférent.
S’arrêter sur le choc est donc un contresens grossier et absurde, peu digne de qui se préoccupe d’art.
La deuxième grande erreur consiste à croire que l’art doit être moral, et donc qu’il faudrait le soumettre à une réglementation plus ou moins adaptée à l’époque. C’est imposer une dictature des mœurs telle qu’elle paraît flirter avec le totalitarisme.
Plutôt que de se perdre dans des dérives qui n’ont que peu à voir avec l’art, il serait bien plus pertinent de regarder l’œuvre elle-même, ce magnifique hymne à la beauté à côté de la culture.
Bonjour,
Je ne pense pas qu’il y ait besoin de 3 pages pour expliquer cette « oeuvre », elle me paraît claire.
Adel Abdessemed dit tout simplement que les femmes blanches accouchent de porcelets et donc, par extension, que si vous êtes un blanc, vous êtes un porc… pas besoin de chercher plus loin.
Alors, pour ceux qui sont blancs, si ça vous amuse de vous faire insulter, c’est votre problème…
Maintenant, j’attends la suite avec une femme voilée allaitant le même porcelet…
Bien à vous…
On me dit que j’ai une grande qualité qui peut s’avérer être un énorme défaut. Je ne sais pas m’arrêter. Je sais. Si j’entends la rumeur, je vais y voir en surfeur. Je vais faire mon fdebeauce. Mais attention! il y a une règle pour l’observateur. Tout regarder; jamais participer. On me dit «nazi en ligne», je veux voir du nazi, mais je ne pêche pas moi-même. J’enfile mon masque de plongée, et je pars en apnée observer l’invisible crochet dissimulé à l’extrémité de la canne à pêche de Big Fisher, notre Maître à tous, je mesure la manière dont le gros poisson tourne autour de l’appât, puis se jette dessus. S’il y a fait en effet, je peux y faire allusion. Autrement je ne ferais que colporter la rumeur. Or je ne suis pas un animal de meute. On me rapporte qu’on a pu voir des e-révolutionnaires du printemps arabe communiquer dans des e-rooms pour teen-agers. Je vais jeter deux, trois coups d’oeil, et en effet, je vois Anonymous. Le masque de Guy Fawkes twitte en se trémoussant sur le corps d’une fille en tee-shirt mouillé, mais à aucun moment un propos évoquant quoi que ce soit d’insurrectionnel. Je ne colporterai pas la rumeur dans l’e-monde. V comme Vendetta est devenu ce qu’on appelle un mème internet. Ce que l’on crée dès lors qu’on l’expédie à un destinataire ciblé se retrouve diffusé en quelques clicks à la globalité du peuple d’apatrides du nouveau monde virtuel, enfin… pas si virtuel que ça. Il focifère.
Il faudrait tout de même préciser que cette exposition itinérante est destinée exclusivement aux enfants de 6 à 11 ans qui n’ont aucune expérience du musée. L’intérêt de cette oeuvre, qui intéresse un Pinault, semble indéniable. Etait-ce une raison pour l’imposer aux enfants non seulement en France mais aussi en Afrique, où l’exposition tournera pendant 6 mois ?
L’act de censure est toujours à surveiller.
Veillons.
Une réaction très surprenante dans mon entourage à ce commentaire de l’œuvre d’Abdessemed m’a été rapportée. Je tiens à dissiper tout malentendu auprès des intégristes qui se seraient imaginé une seconde que je pouvais prêcher pour leur paroisse. Ceci n’est pas une défense de la cause des censeurs. C’est une didascalie duchampienne, une note de coauteur engendrée par la réflexion de Donation Grau. Une réaction à l’intitulé de son article. Une tentative de déjouer les pièges de la tentation. D’autre part, mon «je» est le «je» écrit et aussitôt attiré dans le vortex fictionnique. Au mieux, il est un «je» d’autofiction. Par exemple, «je» ne choisi«t» pas entre Cohn-Bendit et Bayrou, «je» souhaiterai«t» que chacun d’eux essaie de comprendre le point de vue de l’autre, et quand je dit «eux», cet «eux» vaut largement mon «je». Autre exemple, je ne condamne pas Dustan, je reconnais simplement la possibilité à une civilisation de se fixer un seuil de tolérance en matière de tabou. Tenez! le médium employé lors de la représentation… un jour, vient un vidéaste qui souhaite filmer le Cupidon du Caravage, en chair et en os, lui demandant à l’occasion de prendre la même attitude… C’est à cela que je voulais en venir. On peut représenter un peloton de fusillés avec un pinceau et des couleurs, on peut aussi le faire avec des vrais hommes et du vrai sang, mais sous le IIIe Reich. Et fatalement, tel que c’est parti, nous devrons faire face un jour ou l’autre à un artiste qui cherchera à tester nos limites sur ce terrain-là. Enfin, en tant que citoyen de la France libre, je voudrais que partout où nous souffrons de savoir nos frères et sœurs muselés comme chiens et chiennes, il soit possible de proclamer son adhésion au paganisme et dans le même temps, d’en combattre l’extension et à terme, la restauration. La Madone au goret me fait grogner, la Madone au fuseau me fait partir en fusée. L’intégrisme coupe la discussion. Elle est ma carotide.
Il y a la beauté de la vie. La beauté d’un petit de cochon vaut bien la beauté d’un petit d’homme. Une même pulsion les habite. Une même satisfaction les apaise. Un même réconfort leur est prodigué. L’instinct maternel d’une femme vaut bien l’instinct maternel d’une truie. Mais il ne faudrait pas occulter ce qui se voit. Une image sexuelle. On peut choisir de voir ce que l’on veut dans ce que l’on voit, mais on sait bien que la chose ignorée se lance à notre assaut d’une façon d’autant plus invasive qu’elle s’est sentie sous-estimée dans son charisme et sa sensualité. Alors vient la vraie question, celle qui nous ferait, dès lors que nous serions capables de ne pas nous figer à la première réponse, atteindre au tout-possible : peut-on enjoindre un être humain de se soumettre à une confrontation organisée avec l’une de ses tendances sexuelles refoulées cependant que celle-ci, en l’occurrence la zoophilie, est réprimée par la loi? Mieux encore, est-il envisageable que celui qui en rédigea ou ratifia la proscription, aille ensuite s’interroger sur son choix de civilisation dans le no law’s land que constituerait l’art pour tout pervers polymorphe qui se respecte? Moi, je suis prêt pour cela. Du moins, je le crois… Et vous, êtes-vous prêt à m’avouer qu’il vous arrive d’envier un goret? La psyché hantée du poète a sa place à Beaubourg dès l’instant où ses compulsions omnivores sont sublimes d’être sublimées. Sauf que. En regard de la Mignon de Wenders, que dire d’une interview de l’apôtre du jouir sans entrave où ce dernier ne faisait rien de plus que réfléchir sur la nature d’une impression de plaisir qu’il avouait avoir ressentie à badigeonner de mercure au chrome le genou d’un enfant? Permettez-moi de l’être, pour le coup, le spectateur nietzschéen, l’amoureux de l’étant à même de subvertir l’existant, et de poser ma question tout au bout de la vôtre, une question non pas au gros porc de l’assemblée européenne mais à ce gros lapin de Buridan dont le champ de carottes comme le champ d’herbe fraîche rivaliseront bientôt de sortilèges olfactifs pour l’attirer dans leur enclos? Monsieur Bayrou, acceptez-vous maintenant de vous faire violence et de prendre position avec moi au bord d’Eva en tenue d’Ève, portrait en cascade que tira d’elle sa génitrice, Irina Ionesco, à chaque étape de sa croissance impubère et pubère, et de chuter sans parachute dans le gouffre de l’art? Cela dit, je me sentirais un peu plus confortable avec tout ce que je dis si la ligne blanche entre l’art et la politique n’était pas une corde à sauter. Mais je me souviens d’un écrivain nommé Guillaume Dustan, sur un plateau à LCI, animé par un certain Buisson, qui depuis ce 1er janvier 2002 a fait, comme on dit, son chemin. Cela m’émeut toujours de prononcer le nom par lequel William Baranès avait retiré son premier acte de parentalité à celle dont il disait qu’elle voulait sa mort, peut-être à cause des mots que ravalait sa bouche de petit garçon plaintif de peur de recevoir la gifle qu’il cherchait, peut-être parce que nous étions nés la même année, peut-être pour cette saleté d’oursin nanoscopique l’ayant choisi lui comme milieu où se reproduire… De l’autre côté de la table, Alain Soral, – dans ces années-là, on le laissait statuer sur la recevabilité de la mise en parallèle posée par Goldnadel du nombre de Palestiniens tués à Jénine par les Israéliens et du nombre de Juifs tués à Auschwitz par les Allemands, comparaison en forme d’équivalence établie par Soral. Et puis soudain, une autre année, ou la même, en tout cas sur le même plateau où la culture de la Libre Parole envahissait les foyers français, Dustan de relancer la plaidoirie hallucinante de son Génie divin sur la dépénalisation de la pédophilie : «Moi, je suis pour la pédophilie. Sauf que je pense que ça doit se faire en sens inverse», et pour ceux qui ne l’auraient pas capté : «la gérontophilie des enfants». Une dernière chose. Et une qui se voit comme le groin au milieu de la figure. L’anthropomorphisme, signifiant d’une tendance de plus en plus tangible à l’appel au retour du paganisme. Et là, pas dans sa forme résiduelle et entriste. Pas de ce mauvais monothéisme mâtiné de mithriacisme, de mazdéisme ou de celtisme, d’éleusinisme, de saturnisme, de scythisme de phagocyte. Non. C’est maintenant au païen post-athéiste de faire valoir son droit au retour. Un païen plus qu’hypothétique, mais quoi? si tout de certitude pour soi! Quatorze, vingt siècles pour mettre le schismatique devant le témoin décidément indestructible de son imposture. Mea culpa ou pas. Et… Et… Et… Coup de frein, tête-à-queue, pied au plancher, fumée de fusée, desserrage de frein à main, vvvVVVrrrRRRoooOOOuuuUUUmmmMMM. Largage universel de la bombe H(umanité). «L’important (…), c’est l’atterrissage», disait Kasso. Mais si nous profitions de cet instant de grâce où nous croyons réaliser le vieux rêve d’Icare pour nous projeter quelques millions de kilomètres plus bas… Si nous profitions d’être là, unis en un arrachement simultanéiste à tout ce que nous sommes, pour nous concocter une Arche du deuxième type, qui nous sauverait, qui sait? du Déluge que nous sommes… Deux questions, en somme. Qu’est-ce qu’on garde? Qu’est-ce qu’on jette?
Artiste essentiel de la création contemporaine, ses œuvres ont tour à tour créé le scandale au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, où il avait voulu exposer une œuvre constituée d’un triangle de cannabis, à San Francisco, où une vidéo représentant des animaux mis à mort dans un abattoir mexicain avait suscité les réactions outragées d’associations de défense de leurs droits, et jusque des menaces de mort envers l’artiste.
Le troisième scandale vient d’arriver, et il est sans doute le plus frappant de tous. Pour une exposition itinérante, l’artiste a conçu une vidéo dans laquelle on voit un porcelet téter le sein d’une jeune femme, qui se trouve être une amie de sa famille, et qui donne son titre à l’œuvre – Lise…..
L’art doit donc être scandaleux ou ne pas être….Le scandale est donc partie constituante et majeure de l’oeuvre … L’artiste doit être passé maitre dans l’art du crachat, de l’insulte, du vomi, de la défécation et du blasphème… Et bien je me prépare à être le maitre des maitres en caguant sur Dieu, Allah, jehovah et Bouddha, mais aussi sur chacun de vos défequeurs pusilanimes et mesquins, sur leurs mievrerie et leurs lachetés, sur vous, sur vos mères, sur vos femmes, vos enfants. Sur ce qui vous est essentiel et sur ce qui vous fait croire que vous existez…. Préparez-vous: le plus grand d’entre vos minables arrive et se répend… faute de rependre un message divin de beauté, de sagesse, et d’amour de l’humain. Pardonnez-moi, une gerbe sublime me reprend. Je me rends de ce pas au dessus de vos têtes pour vous ensemencer de ma divine merde….